Il est arrivé qu’on nous demande notre avis au sujet d’un document intitulé « En finir avec l’idée de Nature, renouer avec l’éthique et la politique », d’Yves Bonnardel. C’est un document en effet fondamentalement opposé à notre vision de la libération animale et de la libération de la Terre.
Nous, nous aimons la Nature, alors que justement le document considère qu’il faut totalement la rejeter. C’est un document vraiment très mauvais, d’ailleurs, qui confond intellectuellement de très nombreuses choses.
Il considère dès le départ que :
« L’idée de nature est omniprésente dans les discours normatifs. Ce qui est naturel est bien, répète-t-on depuis des lustres. La nature est un ordre, harmonieux, où toute chose est à sa place, qu’il ne faut pas déranger. »
Or, c’est totalement faux. Dans l’idéologie dominante aujourd’hui, la culture est toujours opposée à la Nature, toute personne ayant fait une classe de terminale l’a forcément appris en philosophie.
Descartes est absolument intouchable en France et d’ailleurs tant les laïcs que les religieux sont d’accord pour considérer que l’être humain n’est pas un animal. L’auteur explique qu’il y a des publicités mettant en avant la Nature : lesquelles ?
L’idée de Nature n’est, contrairement à ce qui est dit, absolument jamais mis en avant par l’ordre dominant, bien au contraire.
Pourtant à le lire, on se croirait transposé en Allemagne à la fin du 18ème siècle, avec tout un mouvement mettant en avant la Nature, avec Goethe reprenant Spinoza et célébrant un univers organisé parfaitement et statique…
Voici ce que dit Bonnardel, et on se demande bien où est-ce qu’il a vu cela en France au 21ème siècle :
« On assiste ainsi aujourd’hui à la résurgence massive d’une structure très ancienne de pensée religieuse, apparemment laïcisée par le remplacement du mot Dieu par celui de Nature. On la devine par exemple derrière les discours qui élèvent le respect des équilibres naturels au rang de valeur en soi.
Au sens premier, l’équilibre est un terme purement descriptif. Il désigne un état d’immobilité ou de permanence : les relations qu’entretiennent les éléments d’un écosystème sont telles qu’il conserve sa structure, les êtres qui le composent étant soit invariants, soit renouvelés à l’identique (…).
Ces mots font naître l’image d’une Nature ordonnatrice du monde pour le bien de ses créatures, tout en faisant sentir le danger qu’il y aurait à en déranger la perfection. Il s’agit d’une mystique… »
La seule chose qui corresponde à la description faite par Bonnardel, c’est la défense du « paysage » par l’extrême-droite. Mais il n’y a sinon en France aucun mouvement ne défendant les écosystèmes en tant que tel…
Ce qui d’ailleurs ne serait pas si mal. Bien entendu, il est faux d’imaginer que la Nature est statique. Elle évolue, elle est vivante, puisqu’elle est composée de tout ce qui est vivant…
Mais pour autant, faut-il considérer que les gens considérant l’Amazonie comme devant ne pas changer comme de gros réactionnaires ? Non, évidemment. Bonnardel a totalement tort.
Et c’est là le problème de fond finalement. A LTD, nous sommes catégoriquement contre l’anthropocentrisme. Nous considérons que l’humanité n’est qu’une petite partie d’un grand tout : la vie sur la planète, ce que nous appelons Gaïa.
Nous sommes pour la soumission de la partie au tout… Sauf que pour Bonnardel, il n’y a pas de tout. Il arrive à considérer l’être humain comme « séparé » de la Nature. Ce qui est ridicule. Les humains sont-ils des robots mécaniques inépuisables et éternels ? Bien sûr que non, nous sommes des êtres vivants.
Mais Bonnardel n’aime pas la vie :
« Pour notre part, nous ne voyons dans la nature ni harmonie spontanée, ni modèle à suivre, ni source de châtiments utiles ou mérités : on pourrait détailler « ses » méfaits envers les humains ou les autres animaux. »
Ce qu’on lit là est absurde : la Nature, c’est justement les humains, les autres animaux, les végétaux, etc. Comment la Nature pourrait-elle se faire du mal à elle-même ?
En séparant les deux, Bonnardel ne fait-il pas justement ce qu’il critique : en arriver à une conception religieuse, où l’être humain tombe du ciel ?
Et dans le prolongement de cette conception divine, il se veut un luciférien, un rebelle contre Dieu, d’où son attitude de « rebelle » :
« Elle [la Nature] génère un sentiment religieux de respect, au sens d’adoration et de crainte (comme de soumission devant tout ce qui nous paraît puissant et dangereux). En soi, déjà, cultiver ce type de sentiment mystique de « respect » de ce qui peut apparaître comme une puissance, et de soumission (même déguisée en « volonté d’harmonie ») à un ordre, ne paraît pas de bon augure… »
Bonnardel n’a donc pas compris qu’en parlant de Gaïa, nous prenions la défense de la vie en général, non pas en considérant celle-ci comme extérieure à nous, mais justement parce que nous aussi nous sommes vivants…
Bonnardel n’a pas compris la beauté de la vie. Il ose ainsi dire :
« La règle « obéir à la nature » est vide de sens. La « respecter » est du même tonneau : pourquoi respecter ce qui existe, simplement parce que ça existe ? »
Ben oui ! La vie est belle !