L’une des pires choses qui puissent nuire au véganisme, c’est le relativisme. S’il y a des « poches » d’incertitude, ou de libéralisme, on ne convainc pas, on a pas l’air sûr de soi, on laisse place au doute.
On ne peut qu’être affligé de voir comment Brigitte Bardot vient ainsi de torpiller la lutte contre la corrida. Et nous disons cela alors qu’à LTD, si nous sommes bien entendu contre la corrida, nous ne considérons pas la campagne contre la corrida comme devant être une campagne centrale pour une stratégie de libération animale.
Voici donc ce qu’a dit Bardot :
Je soutiens Gérard Depardieu, victime d’un acharnement extrêmement injuste, bien qu’il soit un amateur de corrida, ce qui ne l’empêche pas d’être un acteur exceptionnel qui représente la France avec une popularité et une célébrité uniques
Il ne s’agit pas de critiquer Bardot une énième fois. Il s’agit juste d’évaluer l’impact culturel énorme de ses propos. En effet, Bardot s’est donnée l’image d’une irréductible. Or, ici elle relativise.
Relativiser, cela signifie qu’on peut accepter, à certains moments, qu’il ne s’agit pas d’une ligne de fracture. Il n’est pas difficile de comprendre que si Bardot « l’irréductible » relativise la corrida, alors en général on peut la relativiser.
Comment alors les personnes qui mènent campagne contre la corrida pourront-elles arriver en disant : c’est barbare, cruel, il faut l’abolition ?
Comment la grande masse des gens acceptera-t-elle un discours pour l’abolition de la corrida comme seule solution, si « même Bardot » accepte de mettre parfois cette question de côté ?
Tout cela par ailleurs pour défendre un beauf comme Depardieu, qui joue dans les médias le personnage archaïque du franchouillard aviné et rebelle, grande gueule et chef d’entreprise. Depardieu n’a vraiment rien de l’ami des animaux, assumant le véganisme, un mode de vie positif en refusant l’alcool, l’utopie écologiste, etc….
Mais bon tout cela on le sait, c’est comme quand Bardot proteste qu’on doive mettre sa ceinture en voiture, etc. C’est de la rébellion du café du commerce, cela n’a rien de nouveau et on ne va pas perdre de temps à ce sujet.
Non, ce qui compte, c’est que la campagne contre la corrida se voulait jusqu’au boutiste et comme une première étape. Or, on voit bien que sans garde-fou – le véganisme – on ne peut pas avancer, en raison du relativisme non vegan.
Jamais une personne végane ne dirait ce que Bardot a dit de Depardieu. Un jeune étudiant qui mange de la viande peut être quelqu’un de sympathique qui se trompe, mais un matamore comme Depardieu qui apprécie la corrida, ce n’est pas vraiment un camarade qui se trompe !
On pourra arguer qu’on va trop loin ici et que Bardot ne connaît pas forcément la position de Depardieu à ce sujet. Sauf que ce n’est bien sûr pas le cas. Voici justement la « Lettre ouverte » de Brigitte Bardot à Gérard Depardieu à propos de la corrida.
Cette lettre suit une interview accordée à Midi Libre à Nîmes à l’occasion de la sortie du film Bellamy sortant le 25 février 2009, où Depardieu avait affirmé:
« La corrida est un rituel sublime. Il ne faut pas entendre les arguments de ceux qui s’élèvent contre cette tauromachie, d’ailleurs les anticorrida sont beaucoup plus violents que tous les matadors qui tuent les toros. »
Ce qui montre que Depardieu s’y connaît et rejoint ici le mysticisme idéologique développé notamment par Simon Casas (voir Simon Casas, un faux humanisme de faux prophète).
Voici ce que disait Bardot alors en réaction :
Monsieur,
Je suis atterrée par votre déclaration sur la corrida parue, dimanche, dans Midi Libre : La corrida est un rituel sublime. Il ne faut pas entendre les arguments de ceux qui s’élèvent contre cette tauromachie, d’ailleurs les anti-corrida sont beaucoup plus violents que tous les matadors qui tuent les toros.
Comment pouvez-vous tenir de tels propos, vous pâmer devant cette boucherie à ciel ouvert, jouir d’un acte de cruauté passible de 2 ans d’emprisonnement et de 30 000 d’amende partout où le lobby tauromachique na pas imposé sa loi ?
Non, la corrida n’est pas un rituel sublime mais un rituel barbare et primaire.
Les Français, dans leur très grande majorité, ont honte de cette pratique sanglante. La violence que vous condamnez n’est pas le fait des anti-corrida, la violence, la lâcheté sont le fait de ces bouchers en collants roses qui torturent à mort un animal.
A vos propos affligeants, je préfère garder en mémoire ceux de Victor Hugo pour qui : Torturer un taureau, pour le plaisir, pour l’amusement, c’est beaucoup plus que torturer un animal, c’est torturer une conscience Mais la conscience aujourd’hui, tout le monde s’assied dessus !
Soyez assuré de mes sentiments consternés.
Brigitte Bardot Présidente
Depardieu est cohérent : il affirme un « style de vie » de matamore, assumant d’être une « grosse gueule », comment ne pourrait-il pas apprécier la corrida, qui est un acte de mise en jeu de sa propre vie pour se « transcender », pour vivre des émotions fortes ?
Bardot n’a pas seulement torpillé la lutte contre la corrida avec son relativisme, elle montre ici, en disant que Depardieu « représente la France », qu’elle est incapable de saisir que pour faire triompher la cause animale, il faut vaincre la beauferie.
Entre Depardieu le beauf et les animaux, elle a choisi Depardieu. Elle ne peut pas se prétendre amie des animaux alors qu’elle abandonne le taureau dans l’arène.
Notons pour finir que dans son communiqué de soutien à Depardieu, Bardot demande également à un acteur ayant critiqué Depardieu de :
garder son venin, sa vulgarité, sa médiocrité et sa jalousie pour insulter ceux qui en valent la peine
Nous, à LTD, étant cohérent, n’acceptons pas l’utilisation du terme « venin » dans ce contexte. Parler de « venin » est une insulte aux animaux ayant du « venin », car eux sont naturels, alors que là sinon on est dans du matamore, de l’egotrip, du narcissisme, du beauf, médiatique qui plus est !