Nous avions parlé du fait que Clément Méric était végétalien ; or, il s’avère que son meurtrier était présent à la fameuse manifestation parisienne contre la fourrure où il y avait des activistes ultra-nationalistes.
Il était avec eux et l’information a même été rendue public par un autre militant ultra-nationaliste (d’une autre organisation cependant), Alexandre Gabriac, sur son compte twitter.
Gabriac Alexandre GABRIAC 8 Juin
#Esteban un assassin ? Pendant que #ClementMéric chassait du nationaliste, Esteban luttait pour la cause animale. pic.twitter.com/SXNh5RahN0
Voici l’image qui a été publiée en même temps sur Twitter.
L’information a été rediffusée par la suite, notamment par Laurent de Boissieu, journaliste politique au quotidien catholique La Croix, qui en profite pour tacler au passage la libération animale :
l’extrême droite païenne est depuis longtemps impliquée dans les associations de défense des « droits des animaux », refusant par anti-judéochristianisme la valeur différente donnée dans la Bible entre la vie humaine et la vie animale (sacrifice par Abraham d’un bélier et non de son fils Isaac ou Ismaël pour les musulmans, Genèse 22, 1-19). Ce qui n’empêche bien entendu pas par ailleurs un juif, un chrétien ou un musulman de s’opposer à la souffrance animale!
Le journal gratuit Metronews a donné également cette information, qui va avec puisque la personne dont il est parlé était également présente à la manifestation contre la fourrure, parmi les ultra-nationalistes :
« Depuis qu’il est installé dans la capitale, le jeune homme, devenu agent de sécurité, ne vit pas seul. Il a rencontré Katia, de 12 ans son aînée, et habite chez elle. Végétarienne convaincue, elle milite pour la cause animale. »
Tout cela est pour le moins surprenant, et en même temps pas du tout. En fait, si jamais Clément Méric était passé à cette manifestation, il aurait donc été présent en même temps que son meurtrier ! C’est quelque chose de tout à fait possible…
Mais est-ce bien étonnant ? La question animale est une grande question du 21e siècle, parce que la Nature est la grande question du 21e siècle. Il s’agit de reconnaître Gaïa, et donc de reconnaître la sensibilité.
Au pays où la philosophie mécaniste de Descartes a totalement triomphé, c’est évidemment encore plus révolutionnaire qu’ailleurs. C’est une question qui brûle les doigts, c’est une question qui polarise immédiatement. Bref, c’est révolutionnaire, au grand dam des partisans de la protection animale qui aimeraient bien que cela ne soit pas et que cela se réduise à une question de morale chrétienne.
Est-ce que cela veut dire alors que le meurtrier de Clément Méric était un « révolutionnaire » ? Dans son imaginaire, c’était le cas, et c’est pourquoi il ne pouvait pas éviter la question animale. Il ne pouvait pas éviter cela. Aucune personne sincère et révolutionnaire ne peut éviter la question animale.
Bien sûr il ne pouvait pas pour autant être vegan, car pour cela il faut comprendre la question de la libération animale, la question de la Nature. C’est ce qu’a compris par exemple Sebastian Angermüller.
Sebastian Angermüller a été un cadre nazi en Allemagne pendant 10 années de sa vie ; militant « nationaliste autonome », il a été l’un des artisans de la mise en avant de la question animale à l’extrême-droite.
Mais il s’est aperçu que bien sûr c’était contradictoire. Le fascisme et la libération animale s’opposent ; il a donc rejoint l’antifascisme. Et à part une brève période (2007-2008), les nazis allemands ont abandonné la question animale.
Mais ils reviendront, inévitablement, ils doivent le faire, et plus haut nous citions Alexandre Gabriac, qui vantait l’engagement pour la cause animale du meurtrier de Clément Méric. Il ne faut pas se leurrer : Alexandre Gabriac n’en a rien à faire de la cause animale, et encore moins de la libération animale.
Ceci dit et toutes proportions gardées, le végétalisme de Clément Méric a pu également être mis en avant de-ci de-là comme une « valeur éthique », par des gens n’ayant rien à voir avec le véganisme…
C’est ça qui est le plus frappant. Le véganisme n’est pas partout loin de là, et pourtant il est partout. La question animale est incontournable, et elle est révolutionnaire. Elle est quelque chose qui parle, mais encore faut-il que ce soit de manière appropriée.
Le meurtrier de Clément Méric aurait-il suivi la voie de Sebastian Angermüller? Peut-être pas, mais en tout cas, le résumer à un « individu » n’a pas de sens et c’est nier sa quête de radicalité.
Et justement le végétarisme est acceptable par le fascisme, pas le véganisme. Les personnes organisant la marche contre la fourrure avaient réagi de manière claire suite à notre critique de la présence de fascistes dans leur manifestation.
Nous disions que c’était irréaliste, et là alors qu’un des fascistes s’est avéré être un assassin, ce que disaient notamment les personnes organisant la manifestation s’avère faux :
« Voilà pourquoi nous n’exclurons pas si nous pouvons nous retrouver sur un thème commun. Nous n’exclurons pas si le message partagé est le même. Nous ne demandons pas aux gens de venir avec
leur carte politique mais juste avec leur cœur. Si pendant cette Marche, nous pouvons aussi toucher les humains pour qu’ils abandonnent leur haine contre les autres humains, pourquoi ne pas le faire ? »
Si le thème est révolutionnaire, alors cela est vrai, mais la lutte contre la fourrure est une lutte d’arrière-garde, qui n’est pas à la hauteur des enjeux.
Si la manifestation contre la fourrure avait vraiment été progressiste, alors un jeune de 20 ans vivant à la campagne et étant à moitié espagnol n’aurait pas continué à être un nazi six mois plus tard, frappant à mort un végétalien.
C’est malheureusement aussi simple que cela, et c’est cela qui est dramatique, et non tragique.