Le chat, un ami depuis si longtemps

Nous avions cité « Les débuts de l’élevage » de Jean-Denis Vigne, au sujet des chiens (A propos du rapport entre les chiens et les humains). Voici ici un nouvel extrait intéressant au sujet des chats et de leur rapport à l’humanité. Depuis quand sont-ils si proches ?

« Partout on lit que le chat a été domestiqué en Égypte. L’idée est renforcée dans nos esprits par la riche et fameuse mythologie égyptienne, dans laquelle la déesse chatte Bastet jouit d’une place de choix, les découvertes de momies de chats qui lui étaient offertes jusqu’à la période ptolémaïque (au début de notre ère) se comptant par centaines de milliers (…).

Contrairement au chien ou au mouton qui, quelques siècles après leur domestication, ont connu des modifications de forme et des réductions de taille détectables sur leurs squelettes, le chat domestique, encore de nos jours, est de morphologie très semblable à celle de son ancêtre sauve d’Afrique et du Proche-Orient. »

Les chats égyptiens nous parlent encore tellement, car ils sont si proches de ceux que l’on connaît aujourd’hui… Mais les chats sont présents depuis bien plus longtemps !

Voici comment dans un autre article, il décrit une découverte sur le site de Shillourokambos, près de Limassol, sur l’île de Chypre… Des restes d’un village d’il y a 8400 à 8300 avant notre ère…

Sépulture à Shillourokambos

« La tombe en question, fouillée en 2001, est constituée par une petite fosse de 55 centimètres sur 60, creusée dans les restes d’un bâtiment circulaire de terre crue. Elle contenait les restes d’un adulte en position hypercontractée, bras repliés sur la poitrine et jambes en flexion maximale. Peut-être avait-il été inhumé dans un sac.

Contrairement à la plupart des tombes individuelles également reconnues sur ce secteur de la fouille, cet individu avait bénéficié d’un intéressant mobilier funéraire: deux petites haches polies, un fragment de pierre volcanique, un pendentif en roche noire, un grattoir discoïdal, une lame appointée, deux fragments de lame et une petite boule d’ocre.

À peu de distance, une sorte de dépôt votif, regroupant un petit galet de picrolite [une pierre fine tâchetée] et 24 coquillages, avait été aménagé dans une cuvette.

Face au défunt, à 20 centimètres de la bordure de la première fosse, une troisième dépression, peu profonde, de 43 centimètres sur 25, avait été agencée.

Elle contenait le squelette d’un chat, couché sur le côté gauche, tête à l’ouest, déposé avec soin dans ce petit volume apparemment creusé à son intention. La bête, jeune, était de forte taille. »

Citons ici de nouveau l’ouvrage mentionné plus haut :

« Les observations des fouilles montrent qu’il [le chat] a été déposé en entier, sans avoir été débarrassé de sa peau, ni éventré au préalable, dans une petite dépression creusée grossièrement certes, mais précisément adaptée à sa taille.

Les squelettes complets d’animaux sont excessivement rares sur la plupart des sites archéologiques du Néolithique précéramique [7000 – 9000 avant J.C.].

A Shillourokambos, c’est le seul cas.

Dans les autres sépultures du même site, lorsque les animaux sont représentés par des restes osseux, il s’agit de dépôts symbolisant l’espèce (bois de daims, crânes de cochons, sabots de moutons), jamais de squelettes entiers non perturbés.

Cette singularité souligne le fait que ce chat a été inhumé non pas en tant que reste alimentaire, bien sûr, ni même tant que symbole emblématique de l’espèce ou de ce qu’elle représentait dans l’imaginaire des hommes d’alors, mais en tant qu’ « individu » attaché à l’homme qu’il accompagne. »

Si l’on ajoute que Chypre est une île, cela signifie que les chats ont été amenés auparavant par bateau. On sait que des renards ont été également amenés ; très certainement, chats et renards, pas forcément « domestiqués », ont été capturés et emmenés sur l’île pour s’opposer aux rongeurs profitant de l’inorganisation humaine et apparaissant comme des « pillards. »

Ainsi, au village de Shillourokambos, on mangeait également les chats, mais il y a ce chat dans la tombe, ce qui est contradictoire: on est sans doute à un moment où s’établit un nouveau rapport, un rapport d’amitié inévitable si l’on suit le sens de la vie.

C’est fascinant, intéressant au plus haut point, et important pour une réflexion sérieuse pour comprendre le rapport de l’humanité aux êtres vivants et… le changer !

Voici, pour conclure ici, une tête de chat sculptée trouvée dans les restes du village de Shillourokambos.