Véganisme ou végétalisme?

Ces dernières semaines, on a pu lire sur internet de nombreux articles au sujet de l’alimentation. On y retrouve la thèse selon laquelle il existe de nouvelles formes d’alimentation, considérées comme plus ou moins délirantes, et bien entendu le végétalisme en ferait partie.

En fait, c’est relativement vrai dans la mesure où il existe une forme de végétalisme non lié au véganisme, et simplement tourné vers la santé. Comme, en plus, le véganisme a été abandonné comme stratégie par beaucoup de gens s’orientant vers le végétarisme, le réformisme, etc., alors le mélange est d’autant plus facile.

Voici l’extrait d’un article exprimant ce point de vue :

« Les interdits alimentaires mettent à mal, avec la restauration rapide, l’art français et latin de la table et sa civilisation de la commensalité. Les aventures d’Astérix se finissent par un festin, symbole de réconciliation, à l’instar des autres lieux de socialisation où il faisait bon manger en France : cafés-concerts, banquets républicains et guinguettes populaires.

Les chrétiens, plus sécularisés, ne veulent rien s’interdire de manger mais ils sont oublieux en cela de préceptes (abstinence, faire maigre).

Orientés vers les désirs narcissiques, les Occidentaux ont remplacé les interdits par une autre forme d’obsession, celle du bien manger : l’orthorexie. D’où les régimes et l’aspiration récurrente à un âge d’or alimentaire, à travers les régimes macrobiotique, végétarien, végétalien, ou le dernier en date : le régime préhistorique crudivorien, à base de gibiers et de baies, excluant les produits transformés. »

On remarque que le végétalisme est considéré comme un « trouble », qu’en fait tout cela serait une mode, une sorte de hobby, de fuite par rapport à la « bouffe industrielle ».

Tout cela est bien entendu n’importe quoi, mais là n’est finalement pas la question. Le véritable problème de fond, c’est que finalement il y a une sorte de mouvement de balançoire : alors que le véganisme disparaît comme proposition, le végétalisme quant à lui est quelque chose de plus en plus connu.

Mais végétalisme et véganisme apparaissent comme découplés, le rapport n’est plus évident, et d’ailleurs en fait il ne l’est pas historiquement. Pire, les deux formes apparaissent comme totalement coupées l’une de l’autre.

Certains pourront trouver cela pas si mal, parce qu’au final, le véganisme consiste en plusieurs choses, qui prises séparément, finissent par se rejoindre : idéalement, les gens refusant la fourrure rejoindraient les personnes végétaliennes, qui toutes seraient rejointes par celles refusant la vivisection, etc.

Le problème est qu’on voit mal pourquoi cela se déroulerait de cette manière-là. Pourquoi, spontanément, les gens iraient-ils au véganisme par une pratique partielle ? Par quel chemin y aurait-il, par ce détour, une reconnaissance de la vie animale ?

Surtout que le végétalisme a parfois comme moteur sa propre santé, comme le refus de la fourrure repose sur un choix moral totalement personnel. Comment en arriverait-on à une vision globale, d’où viendrait la saut général ?

Finalement, ce qui ressort, c’est que le véganisme s’est enlisé, s’est dilué dans des revendications, et que finalement il a disparu.

Il y a beaucoup de choses à étudier ici. On sait par exemple que le terme « vegan » en anglais signifie à la fois végétalien et ce qu’on appelle « vegan » ici en France. Quel est l’aspect que les gens ont privilégié dans leur compréhension de tout cela ?

Inversement, pourquoi en Allemagne et en Autriche le terme de « vegan » a-t-il réussi à s’imposer, avec un mouvement se distinguant de la simple question alimentaire ?

On peut alors penser que justement, comme on est en France, c’est la question de la « bouffe » qui compte.

Sauf que là il y a quelque chose qui ne colle pas. En effet, ces quinze dernières années, il y a eu une énorme progression de gens adoptant les principes du halal et du casher. Il n’y a pas lieu d’interpréter ce phénomène ici, qui a de multiples aspects (et surtout que ces gens-là auraient pu et dû devenir vegan straight edge!).

Ce qui compte ici, c’est que ces gens, en tout cas une partie significative, est très stricte dans sa démarche. Elle regarde attentivement ce qui est correct, ou non. Elle se plie à des exigences qu’on peut considérer comme importantes, sans rechigner, sans se plaindre.

Si on compare aux éternels complaintes de nombre de personnes véganes en France, il y a beaucoup de choses à comprendre… Et notamment, que la question de la « bouffe » n’est pas l’aspect prédominant et absolu, comme on peut souvent le penser, et ce en tout cas pour une partie significative de la population.