La loyauté, une valeur straight edge

Le mouvement straight edge n’est pas qu’un simple « refus » des drogues, de l’alcool et de la sexualité vécue comme fin en soi (c’est-à-dire sans sentiments et déconnecté d’une relation authentique et durable).
C’est aussi la revendication de valeurs positives, qui sont justement mises à mal par la « vitesse » des rapports humains dans la société  de consommation.

L’un des mots qui revient ainsi le plus souvent dans les chansons straight edge est le mot anglais « loyalty ». Les trois sens de ce mot en français relèvent tous de la culture straight edge ; on a ainsi « fidélité », « loyauté », « dévouement ».

Fidélité, cela signifie ne pas abandonner quelque chose pour passer à autre chose simplement en suivant un désir, un besoin violent et irréfléchi ; cela veut dire reconnaître quelque chose comme beau et bien et en « rester » là, parce qu’en soi c’est suffisant.

La loyauté, c’est la même chose mais en le revendiquant et en cherchant à être là le plus possible dans la relation, c’est aller au-devant des besoins possibles, c’est refuser toute trahison.

Dans la culture straight edge, on retrouve souvent mis en avant le slogan « unbreakable loyalty », « loyauté inébranlable » (parfois on trouve la version en latin: « invictus fidelitas ».

Le dévouement est un terme qui semble un peu plus abstrait, mais c’est très important, puisque c’est l’idée de revendiquer son identité elle-même comme fondamentalement liée à quelque chose.

On ne peut pas être vegan sans dévouement aux animaux, un dévouement qui doit se révéler à tous les niveaux de la vie privée, depuis la nourriture végétalienne jusqu’aux soutiens aux refuges.

Dans la société capitaliste, par contre, il n’est pas difficile de voir qu’on retrouve partout et tout le temps des gens incapables de choisir, oscillant entre plusieurs choses par opportunisme, choisissant une chose pour en mieux en choisir une autre le lendemain, etc.

Il n’y a ici aucune continuité, aucune cohérence, juste une éternelle fluctuation, un va et vient perpétuel, un flou systématique.

Naturellement, l’hypocrisie, le mensonge et la mythomanie sont des outils pour « compenser » l’absurdité des choix faits, pour excuser l’incapacité à la fidélité, à la loyauté, au dévouement. Parce que les faits sont têtus et qu’à force, les cadavres dans le placard finissent par s’agiter et par hanter la personne qui a sacrifié l’authenticité sur l’autel de sa propre « carrière individuelle ».

La culture straight edge s’oppose donc fondamentalement au libéralisme, au fait de relativiser, d’exprimer tout le temps du scepticisme, de ne finalement rien prendre au sérieux et de se comporter en touriste dans sa propre vie, dans celle des autres et dans la société elle-même.

Dans la société aujourd’hui, il est considéré comme regrettable mais comme relevant finalement d’un choix personnel que de tromper la personne avec qui on vit, d’abandonner son « animal de compagnie », de changer d’avis comme on l’entend, bref de ne finalement jamais s’engager.

L’une des conséquences les plus terribles est bien sûr le fait que plus rien de prolongé n’existe, parce que plus personne n’assume rien, parce que les gens agissent un jour d’une manière pourtant critiquée la veille, etc.

Le libéralisme fait l’apologie du traître, du renégat, qui est salué comme un individu capable de suivre ses propres décisions à lui, alors qu’en réalité c’est quelqu’un sans intégrité aucune.

Cela ne veut pas dire qu’il ne fait pas faire de ruptures ; il faut bien sûr rompre avec les gens qui se trahissent eux-mêmes, qui pour une raison ou une autre prennent des décisions s’opposant à leur propre personnalité, et fondées le plus souvent, bien entendu, par le profit, par le fait de se faire valoir ou bien voir, etc.

Il faut également savoir faire des ruptures avec soi-même, se « faire violence » pour rompre avec son propre nombrilisme, son propre égocentrisme, etc.

Loyauté envers les autres, envers soi-même, envers l’authenticité, envers la cause que l’on pense juste, voilà un principe straight edge, et forcément être authentique cela va de pair avec être progressiste, avec le fait d’aimer la vie et les êtres vivants !