Jusqu’à 88% de la surface des océans touchée par des microparticules de plastique

Les médias ont publié des informations concernant des analyses de la pollution de l’océan par le plastique. Tous les articles n’avaient pas la même approche, ainsi Le figaro osait un article relativisant le phénomène et intitulé pas moins que « Moins de plastique que prévu dans les océans« .

Avant de revenir sur cette question, voici une présentation très sérieuse faite par RFI.

Jusqu’à 88% de la surface des océans serait touchée par des microparticules de plastique, révèle une étude publiée lundi aux Etats-Unis. Mais la destination finale de ces minuscules déchets n’est toujours pas connue.

Rares sont les zones épargnées. Les résidus plastiques de notre consommation toujours plus importante de sacs, d’emballages alimentaires, d’ustensiles ou encore de jouets n’épargneraient que 10% de nos mers et océans.

En une année, chaque être humain rejette en moyenne 35 kilos de polyéthylène et de polypropylène, des polymères issus de la pétrochimie. Seule une partie est recyclée. L’autre entame alors un long voyage dans la nature pouvant durer 1 000 ans, le temps qu’il faut au plastique pour se désintégrer.

Produit sur terre, le plastique se retrouve dans les zones les plus reculées des océans. Il est d’abord acheminé des villes vers les littoraux, essentiellement par les égouts et les cours d’eau. Puis des littoraux vers le centre des océans par cinq gigantesques courants océaniques naturels.

L’océan Pacifique Nord est le plus touché, retenant environ 35% des déchets plastiques de notre planète. Un phénomène qui s’explique par la taille du courant qui l’alimente ainsi que par la concentration humaine sur ses côtes asiatiques : les plus peuplées au monde.

Une quantité de particules étonnamment stable

L’étude réalisée par 400 chercheurs du monde entier et publiée dans les comptes-rendus de l’Académie américaine des sciences (PNAS) lundi dernier, part d’un étrange constat.

Alors que la production de plastique n’a cessé de croître depuis les années 1980, la quantité de microparticules retrouvée à la surface des océans, elle, n’augmente que très faiblement. La destination finale de nos déchets plastiques ne serait donc pas la surface des mers mais un autre endroit, encore inconnu.

Grâce au prélèvement de près de 200 000 échantillons d’eau, de plancton, de particules atmosphériques et de gaz à la surface mais aussi jusqu’à 6 000 mètres de profondeur, les scientifiques ont tenté de comprendre où finissait le plastique.

Plus de 300 endroits dans les océans Pacifique, Atlantique et Indien ont été testés depuis 2010. Puis des protocoles de calculs modélisant les données récoltées ont permis de les extrapoler sur de plus larges échelles.

Le plastique ne se volatilise pas

Quand on pense au plastique dans les océans, l’image d’une bouteille jaunie dérivant sans fin nous vient rapidement à l’esprit. Mais ce n’est que le début du voyage. Bringuebalés par les courants océaniques, les morceaux de plastique sont réduits en très petits fragments par les radiations solaires qui provoquent leur photodégradation ou encore par le mouvement de la houle.

C’est lorsqu’ils deviennent inférieurs à quelques millimètres que l’on commence à perdre leur trace. L’étude ne fait que proposer plusieurs explications possibles.

Parmi elles, l’hypothèse d’une décomposition plus rapide que le rythme auquel le plastique est déversé chaque jour dans les mers du globe. Pour l’expliquer, les scientifiques soulignent le rôle des populations bactériennes vivant dans les océans.

Elles finiraient de décomposer les particules en minuscules résidus qui deviendraient aussi denses que l’eau et se mettraient à s’enfoncer lentement sous la surface. La densité des océans augmentant avec la profondeur, ces résidus microscopiques se stabiliseraient à un niveau ou leur densité égalerait celle du milieu alentour. Mais ils disparaîtraient en tout cas de la surface.

La chaîne alimentaire contaminée

Une autre hypothèse pour expliquer pourquoi la quantité de plastique à la surface des océans n’augmente pas du tout au même rythme que celui de sa production est celle de l’ingestion par les animaux marins. L’analyse des estomacs des poissons épipélagiques (vivant au-dessous de 250 mètres de profondeur) révèle un taux de matières plastiques compris entre 1 et 35%. La plupart des résidus retrouvés mesurent entre 0.5 et 5mm.

Mais les plus touchés par ces ingestions indésirables sont les poissons mésopélagiques (qui eux vivent entre 100 et 500 mètres de profondeur). En remontant près de la surface pour se nourrir de zooplancton, ils absorbent des quantités de plastique proches de celles présentes sur le plan d’eau.

Une partie de ce plastique serait alors dégradé par ces poissons et tomberait sur le plancher océanique sous forme d’excréments, polluant alors le fond des mers. L’autre partie de ces poissons contaminés serait à son tour ingérée par des mammifères plus gros. Péchés par l’homme, ils se retrouveraient parfois dans nos assiettes puis dans nos organismes.

Des données encore manquantes

Malgré ces hypothèses, l’étude n’apporte pas pour l’instant de véritable étaiement scientifique. Utilisé depuis les années 1950, le plastique est devenu le matériau le plus répandu dans notre quotidien et les scientifiques estiment que son développement a encore de beaux jours devant lui.

Mal connue à cause de son gigantisme et de son développement récent, la pollution au plastique dans les océans ne fait pas encore l’objet de données précises. L’étude estime qu’entre 7 000 et 35 000 tonnes infesteraient nos mers et océans. Un poids impressionnant quand on sait qu’une bouteille d’eau vide pèse 30 grammes.

Savoir où finit le cycle du plastique dans la nature est essentiel pour traiter efficacement la pollution que génère la décomposition de ses composants pétrochimiques.

D’autres études seront nécessaires. Une note d’espoir tout de même : un étudiant néerlandais a mis au point un système permettant de purger les océans de ces déchets avec une consommation énergique très faible. Une étude de faisabilité a validé son concept il y a quelques jours. La plateforme pilote pourrait voir le jour d’ici à 2018.