« On peut le remonter vivant et le saigner »

« On peut le remonter vivant et le saigner » : voici ce qu’on peut lire en 2014 sur la page « style » du journal Le Monde (lié à M le magazine du Monde), dans l’article « Du beau, du bon, de la BONITE » :

« Pour les marins marseillais, la différence est majeure : « Le bonitou, c’est pas terrible. Nous les pêcheurs, on ne le mange pas, confie Christian Guarino, qui pêche la bonite depuis plus de trente ans, au vallon des Auffes, à Marseille. Ce poisson-là est surtout bon à faire des pâtés. »

En revanche, le pêcheur raffole de pélamide, ou « palamide », comme on dit chez lui. « C’est un poisson moins sanguinolent, la chair est rose clair, moelleuse et ferme à la fois, il survit plus longtemps dans les filets, donc on peut le remonter vivant et le saigner. Son goût est incomparable », affirme celui qui vend ses prises sur le Vieux-Port et fournit des grands chefs comme Gérald Passédat (Le Petit Nice).

Le chef étoilé comme son pêcheur la préfèrent crue, tant sa texture est fine, fondante, soyeuse. L’un la prépare avec des zestes de bergamote et des légumes en julienne, l’autre avec un trait de jus de citron, un peu d’échalote ou un fruit exotique. »

Voilà une barbarie exemplaire de modernité. Car il ne s’agit nullement de nourriture, d’alimentation, mais bien de style, masqué derrière le « goût ». Et ce goût, ici, c’est celui du meurtre.

Voilà pourquoi justement les produits simili-carnés sont une honte : ils ont le goût du meurtre, même s’ils ne sont pas fondés sur le meurtre. C’est toute une culture qui est à refaire, et faire un fétiche d’un goût lié au meurtre, c’est inévitablement, un jour, y retourner.

Même si tout le monde mangeait des produits simili-carnés, un jour forcément un retour à « l’authentique » verrait le jour, et là fini le pseudo véganisme, tout cela rien qu’avec la question culturelle du goût.

Soit le véganisme est un nouveau goût, un saut de civilisation, soit il n’existe pas.

Pour en revenir à la question du goût, voici également ce que dit l’article du monde consacré au « style », et c’est très intéressant de par cet ignoble mélange d’ultra-modernité et de terroir, de « style » et d’irrationel magique :

« En Turquie, le lakerda est un mezze de bonite en saumure dont la recette remonte aux premières heures de l’Empire ottoman. Sur les marchés d’Istanbul, à la belle saison, les bonites (palamut, en turc) sont les trésors des étals. En direct du Bosphore, elles sont présentées avec les ouïes retournées, dont le rouge vif témoigne de leur fraîcheur.

Tandis qu’en Océanie, dans les îles Salomon, certaines populations vouent un véritable culte au beau poisson moiré. Ainsi, pour le peuple Owa d’Aorigi, la bonite est porteuse du mana sacré, une énergie vitale symbolisée par la brillance et l’iridescence. « La bonite a un statut très particulier dans l’archipel, explique l’anthropologue Sandra Revolon. Quand elle est en vie, sa peau est irisée ; une fois morte, c’est sa chair qui se pare de reflets arc-en-ciel. C’est un phénomène puissant à leurs yeux. »

Chez les Owa, une cérémonie d’initiation voit les jeunes garçons, futurs grands pêcheurs, se frotter avec les bonites, pour s’enduire de leurs cellules iridophores. « La bonite, ce n’est pas seulement une nourriture, conclut le chef Christian Qui. Elle ajoute du merveilleux, du magique dans l’assiette. » »

Magique et ancestral: voici ce que ces gens sont obligés d’inventer pour légitimer le crime. Tout cela relève de principes, de valeurs, de traditions. Peut-on aider les animaux si on ne connaît pas ces pfincipes, si on n’est pas capable de les vaincre ?
En 2014, ne doit-on pas être prêt à tout renverser pour en finir avec des propos aussi infâmes que : « on peut le remonter vivant et le saigner » ?