Anomalie concernant le couvercle et le fond de la cuve du réacteur de l’EPR de Flamanville

« Je ne présage en aucune manière de la décision qui sera prise, compte tenu de l’importance de l’anomalie, que je qualifie de sérieuse, voire très sérieuse » : tels ont été les propos de Pierre-Franck Chevet, le président de l’Autorité de sûreté nucléaire, devant l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.

L’anomalie en question concerne le couvercle et le fond de la cuve du réacteur de l’EPR de Flamanville actuellement en construction… Cela concerne ainsi un réacteur nucléaire de « troisième génération », construit par EDF et Areva.

Les médias ont largement parlé de cette affaire ces dernières jours; il est vrai que l’Autorité de sûreté nucléaire a vraiment tapé du poing sur la table devant les réticences des industriels à admettre la vérité… Pour que cela soit dit ouvertement, on peut s’imaginer de la profondeur du problème!

Voici en termes relativement clair la nature du problème de la cuve, fournis par la Chambre de Commerce et d’Industrie de Normandie:

Concrètement, la teneur en carbone de l’acier utilisé sur une calotte étalon de la cuve testée pour son caractère ‘comparable’ avec celle de Flamanville était ‘supérieure à celle attendue’.

Par ailleurs la résilience de certaines zones du couvercle – c’est-à-dire la capacité du matériau à absorber un choc – était en moyenne ‘inférieure à la limite réglementaire’.

Or, comme le rappelle l’ASN, la cuve, qui pèse 425 tonnes et mesure 11 mètres, est un équipement ‘important’, car il contient le coeur du réacteur et sert de deuxième barrière de confinement aux éléments radioactifs.

Evidemment pour les industriels, c’est un coup dur… La raison est simple à comprendre, comme le constate Le Monde au sujet des intérêts économiques:

La cuve du réacteur de Flamanville, qui mesure 13 mètres de hauteur avec son couvercle pour un peu plus de 5 mètres de diamètre, a été posée en janvier 2014.

Elle a été positionnée dans le « puits de cuve » situé au centre du bâtiment réacteur, et elle est déjà raccordée et soudée aux tuyauteries du circuit primaire de refroidissement.

Son éventuel remplacement entraînerait donc de nouveaux retards et surcoûts, alors que le calendrier a déjà dérivé de plus de cinq ans – la mise en service, initialement prévue en 2012, a été repoussée à 2017 –, tandis que la facture grimpait de 3,3 à 8,5 milliards d’euros.

Voici le communiqué de Sortir du nucléaire :

Alors que l’EPR était présenté comme le nec plus ultra de la sûreté, le couvercle et le fond de la cuve du réacteur en construction à Flamanville présentent d’inquiétantes anomalies [1].

En cas de choc thermique lié à l’injection d’eau de refroidissement, des fissures se propageraient plus rapidement, laissant craindre la rupture de la cuve.

Ce problème grave ne fait que s’ajouter aux innombrables malfaçons qui affectent déjà l’EPR : vannes montées à l’envers, béton mal coulé, dôme endommagé, utilisation d’aciers de mauvaise qualité…

Ces défauts sont sans doute plus nombreux encore, l’Autorité de sûreté nucléaire elle-même reconnaissant qu’elle ne disposait pas du temps suffisant pour mener efficacement le travail de certification.

Et que dire des autres fragilités qui pourraient découler des conditions de travail inhumaines sur le chantier, avec le recours à la sous-traitance en cascade et aux centaines de travailleurs étrangers sous-payés et non déclarés ?

D’autre part, ces problèmes ne sont-ils pas susceptibles de se retrouver sur les trois autres réacteurs EPR en construction dans le monde ?

Face à des malfaçons aussi graves, le rôle des autorités ne devrait pas être de demander des modifications et de nouveaux essais.

Il est criminel de s’entêter à vouloir mettre en service un réacteur aussi dangereux qu’inconstructible, sans parler du gaspillage financier entraîné par de nouveaux retards et surcoûts.

Pour protéger la population d’un futur accident, le Réseau « Sortir du nucléaire » demande à l’Autorité de sûreté nucléaire et au gouvernement l’arrêt immédiat du chantier EPR et l’abandon de tout nouveau projet de réacteurs.

Pour en savoir plus sur le flop du réacteur EPR :
http://www.sortirdunucleaire.org/EPR-le-flop-monumental-du-reacteur-nucleaire-324

[1] Voir le communiqué de presse de l’ASN du 07/04/15 :
http://www.asn.fr/Informer/Actualites/EPR-de-Flamanville-anomalies-de-fabrication-de-la-cuve