Ségolène Royal capitule devant Nutella

Face à l’adversité, on peut faire face. On peut également se voiler la face, et s’imaginer un monde sans contradictions, rêver par exemple d’un petit commerce à Manhattan comme dans les films passant à la télévision pour Noël…

Avec la crise, la mode en France a ainsi bien souvent comme contenu le régressif. Et parmi les démarches régressives, niant la réalité au profit de la posture individuelle, on a le Nutella. Tout le monde connaît cette pâte à tartiner, composé surtout de lait écrémé en poudre, de sucre et d’huile végétale, les deux derniers composants faisant pas moins de 72% du produit!

Sur le plan diététique, on comprend facilement la nature de ce produit, et quand on voit que 26 % de la production mondiale est achetée par les Français, on reconnaît que derrière le discours français sur la « malbouffe », il y a une traditionnelle hypocrisie et le culte de la fuite dans le sucre, la facilité et le régressif.

Nutella joue à fond là-dessus, évidemment.


Maintenant, en parlant d’hypocrisie, tournons nous vers la ministre de l’écologie, Ségolène Royal. Elle tente par tous les moyens de se la jouer écologiste, avec notamment la conférence de l’ONU à la fin de l’année: c’est la grande opération poudre aux yeux.

Invitée au « Petit Journal » de la chaîne Canal + lundi dernier, elle s’est dit qu’elle pouvait lancer une petite phrase facile, empruntée à ce que disent les gens ayant une conscience écologiste: l’huile de palme est une catastrophe, il faut dire stop.

Il faut boycotter l’huile de palme, c’est une évidence même. La déforestation en Malaisie et en Papouasie Nouvelle Guinée est terrifiante; le film Green témoigne de l’horreur de ce qui se passe.

Ségolène Royal, tentant de s’approprier l’apparence de la culture écologiste, a cru donc qu’elle pouvait lancer simplement la chose suivante:

« Il faut replanter massivement des arbres, parce qu’il y a eu une déforestation massive qui entraîne aussi du réchauffement climatique. Il faut arrêter de manger du Nutella, par exemple, parce que c’est de l’huile de palme. »

Aux remarques classiquement facho d’un présentateur – c’est bon, cela fait des emplois – elle a maintenu sa position. Elle a pensé que la critique du Nutelle était socialement et culturellement acceptable.

Que n’a-t-elle dit? Immédiatement, le groupe italien Ferrero a mis en avant la certification « durable » de son huile de palme. A l’Exposition universelle de Milan se tenant actuellement, et dont Ferrero est un sponsor important, l’épouse du chef du gouvernement Matteo Renzi a amené sa fille au stand Nutella pour manger des crêpes, sous les photographies.

Le ministre italien de l’Environnement, Gian Luca Galletti a publié sur twitter: « Que Ségolène Royal laisse les produits italiens tranquilles. Ce soir au menu : pain et Nutella ». La presse italienne, le personnel politique italien… la vague de soutien au Nutella a été massive, dans un grand élan de nationalisme et de mauvaise foi.

Mais, et c’est aussi la clef de l’histoire, il y a eu une vague « populaire » de soutien au Nutella. La régression a ses adeptes!

Ségolène Royal a alors… capitulé, aussi simplement que cela.

Elle a même expliqué aux médias:

« C’était des propos tenus dans une émission qui se veut un peu humoristique, mais je comprends que ça ait pu soulever un certain nombre de troubles, donc je veux éteindre la polémique. »

Bref, la tentative de Ségolène Royal de se donner une image écologiste a échoué. Pourquoi? Parce qu’être écologiste de manière authentique, c’est comme être vegan : on peut prétendre tergiverser ou être « constructif » avec les valeurs dominantes autant que l’on veut, à un moment on se heurte bien aux réalités et il faut aller au clash.

Paradoxalement, cela explique parfois pourquoi des gens très engagés pour les animaux ne deviennent pas végans: s’ils le deviennent ils savent qu’il sera alors nécessaire d’aller jusqu’au bout du raisonnement et de rentrer en conflit avec les valeurs dominantes, ce qu’ils préféreraient éviter, par confort…

Ségolène Royal s’est confrontée au réel, et cela annonce déjà non seulement la faillite de la conférence de l’ONU à la fin de l’année, mais également une écologie radicale qui demain, à l’inverse, assumera la rupture avec les valeurs dominantes consistant notamment en une alimentation non saine produite sur une base de monoculture produite dans le tiers-monde et s’élargissant aux dépens de la Nature…