Drank & Drugs

Voici le grand tube de l’été aux Pays-Bas : Lil Kleine & Ronnie Flex – Drank & Drugs (prod. Jack Chiraq). Le fait que « Jack Chiraq » soit le producteur n’est pas la chose la plus étrange concernant cette chanson dont la vidéo youtube a déjà dépassé les huit millions de vue.

Si la chanson, très réussie si l’on peut dire, est pratiquement hypnotique avec des gens délirants aux comportements répétitifs montrant qu’ils sont « scotchés », c’est qu’elle témoigne en fait de la prise d’alcool et de MDMA, la drogue qui prend une ampleur toujours plus grande en ce moment chez les jeunes.

Au niveau du texte, pour faire simple le narrateur dit à une « bitch » qu’elle peut aller se reposer (chill) car lui-même n’est pas seul : il a de l’alcool et des drogues, et d’ailleurs « Tous les adolescents disent oui à la MDMA ».

On l’aura deviné d’ailleurs : la vidéo tente de retranscrire l’effet de la MDMA, c’est-à-dire de l’ecstasy. Les termes sont en effet équivalents mais celui d’ecstasy (ecsta, Xeu, XTC, etc.) est directement rattaché par les jeunes à la techno, alors que celui de MDMA est désormais associé aux festivals, aux discothèques, etc.

Par un habile tour de passe, cette drogue « ringarde » est devenue une drogue « nouvelle », qui serait adapté aux nouvelles conditions des soirées des jeunes, etc.

En ce qui concerne les effets, dans la revue bobo les « inrocks », on a une interview d’un docteur qui raconte au sujet de la MDMA :

« C’est un stimulant, mais cette drogue a surtout un effet empathogène qui favorise les contacts.

Et puis ce n’est pas un hasard si c’est arrivé avec le mouvement techno : en démultipliant les sensations, la MDMA permet de mieux ressentir la musique. C’est une drogue qui s’adapte bien à la fête. C’est pourquoi ce sont surtout les 25-35 ans qui en prennent.

En général, après on a une grosse déprime, même si cela dépend des doses prises et de la susceptibilité de chacun. Les usagers prennent souvent d’autres choses pour contrer la descente, comme des benzodiazépines (des médicaments psychotropes – ndlr) ou des opiacés. »

On l’aura compris : la vidéo tente de « coller » avec les effets de la MDMA, avec la logique de la répétition (jusqu’au ridicule) et le thème de la sexualité débridée. Ce n’est pas une critique, alors qu’on pourrait le penser vues les attitudes délirantes la vidéo…

C’est un fait même très simple à comprendre : les drogues sont banalisées comme jamais. On peut en rire, en parler, en prendre, en vendre, en rigoler, c’est devenu un produit pratiquement comme un autre.

Tout comme le corps n’est pas sanctuarisé, les drogues font une irruption massive dans des vies désorganisées prenant tout ce qui se passe comme un événement permettant de passer le temps et, de manière hypothétique, même du « bon temps ».

Une vidéo exprimant la dimension « fun » de la MDMA relève donc du possible… Aux Pays-Bas le tout est devenu tout de même un thématique et les deux rappeurs ont fait une version expurgée pour les enfants, remplaçant l’alcool et les drogues par les chips et le cola. Il va de soi que cela ne change rien au fond de l’affaire…

Et cela montre que l’idéologie des drogues est capable de gâcher plein d’énergie, plein de productivité musicale!