« Alcool, foot & rock’n roll » comme « nouvelle devise de la capitale »

Suite à l’attentat terrible du 13 novembre, il y a eu une grande campagne de la part des bobos et des hipsters pour expliquer que c’était eux les véritables cibles des djihadistes. Leur mode de vie qui serait festif et joyeux serait l’antithèse de l’obscurantisme et du fanatisme…

La couverture de Charlie hebdo reflète cette approche totalement ridicule.

Dans un même ordre d’idée, il y a eu l’appel sur facebook à « une partouze géante place de la République ». 35 000 personnes ont déclaré vouloir participer et 150 000 étaient invitées en attente. Bien entendu elle n’a pas eu lieu. Difficile en tout cas de faire plus affligeant…

Voici comment les bobos et hipsters ont vu les choses, avec un point de vue qui est celui de Libération. C’est impressionnant de délire, mais aussi de mauvaise foi : le groupe qui jouait au Bataclan, les « Eagles of death metal », ne se prennent pas au sérieux, mais le chanteur est vraiment un fanatique de droite, considérant Obama comme un bolchevik, tout en faisant des prêches chrétiens en faisant l’apologie de la pornographie.

Le terrifiant mur d’images qui se constitue sous nos yeux avec les photographies des victimes identifiées des attentats de vendredi apporte cette confirmation : la population visée par les terroristes de l’Etat islamique (EI) était clairement ce biotope de jeunes urbains cool qui remplit au crépuscule cafés, gargotes et salles de concert de la capitale.

Il faut être singulièrement instruit des habitudes sociales et de la symbolique des lieux pour, non pas s’attaquer à un fief touristique (Beaubourg, les Champs-Elysées, le Louvre) ou à une enclave communautaire (le Marais gay ou le XIIIe arrondissement chinois), mais à une zone à la fois bourgeoise, progressiste et cosmopolite – certes en cours d’hipsterisation avancée.

Dérision maligne.
Si l’on regarde le plan de ce fragment rive droite de la capitale, on sait, pour les avoir arpentées en tous sens, que ces rues témoignent d’une hétérogénéité sociale et ethnique qui a disparu de bon nombre d’autres arrondissements.

Echoppes à la mode, bars pakistanais, cafés arabes, bouis-bouis chinois ou vietnamiens, librairies musulmanes et synagogues coexistent dans un espace urbain chahuté.

Et le Bataclan était évidemment rempli, ce soir-là, d’un public d’ados et de jeunes adultes venus en toute décontraction applaudir un groupe rock à succès qui joue à fond d’une dérision maligne à l’égard des codes machos et bas de plafond de la sous-culture redneck.

L’attentat foiré du Stade de France visait quant à lui à détruire l’épicentre d’une ample communion dans l’hédonisme sportif avec, en son cœur, une équipe de France elle-même à l’identité composite, dont les plus brillants éléments sont issus des banlieues défavorisées.

La suite de l’article raconte ensuite que les islamistes ont fait exprès d’attaquer une réunion de Charlie hebdo et un concert, lieu de joie « collective »…

C’est là une construction intellectuelle sidérante. On a là une logique qui est de dire : picoler dans des bars parisiens, tromper son conjoint, ne prendre rien au sérieux, voilà le mode de vie « idéal » et les djihadistes seraient des rabats-joies, des gens austères non épanouis, etc.

Pour le coup, impossible de voir que pour ces gens, les religieux intégristes et les vegan straight edge ne différeraient en rien. Le sens de la vie, ce serait « picoler » de manière « festive ».

Le magazine Les inrockuptibles, autre grand classique des bobos et hipsters, ne dit pas autre chose : non aux « séparatistes » :

« Cette fois, c’était le peuple lui-même qui était visé, c’est-à-dire nous tous, qui aimons les stades, les terrasses de cafés et les salles de concerts. A Saint-Denis comme à Paris, il s’agissait de faire le plus de morts possible, parmi cette multitude française, naturellement diverse et colorée, joyeuse et mélangée, qui s’obstine à vouloir vibrer, aimer et manger ensemble, contre toutes les injonctions séparatistes. (…)

Quand on lui parle “d’attentats aveugles”, Pierre-Jean Luizard, directeur de recherche au CNRS, auteur du Piège Daech – L’Etat islamique ou le Retour de l’Histoire, rectifie aussitôt : “Ce que visait l’Etat islamique était bien cette jeunesse bobo française qui a élu domicile dans ces Xe et XIe arrondissements.

A la fois parce qu’elle symbolise un mode de vie insouciant jugé “répréhensible”, mais surtout aussi parce qu’elle illustre mieux que tout autre milieu les espoirs (et les illusions) attachés aux idéaux républicains français (lutte contre le racisme, les inégalités et les discriminations, empathie envers la population immigrée, tolérance envers l’islam comme “culture du monde” à Paris). En la choisissant pour cible, l’Etat islamique visait à faire sauter un écran de tolérance en opposition avec son projet : susciter la peur et des réactions communautaires en chaîne.”

C’est de nous que parle Luizard, de nous et de nos amis, de nous et de nos lecteurs, de nous et de nos morts, nombreux, trop nombreux, à une poignée de mains de chacun d’entre nous, à un degré de séparation. »

Les bobos et hipsters, nouvelle figure révolutionnaire, on aura tout vu! Et pour ceux et celles qui n’auraient pas compris, un autre articles des « inrocks » indique le mot d’ordre à suivre :

Alcool, foot & rock’n roll. C’est la nouvelle devise de la capitale, en forme de bras d’honneur aux assassins.

Pour finir, regardons chez les bobos et hipsters en mode « alternatif », c’est-à-dire dans les squatters et autonomes choisissant la marge, dans l’esprit de l’ouvrage « L’insurrection qui vient ».

« La doxa du moment veut que ce qui ait été attaqué soit « notre mode de vie », celui qui serait incarné, les vendredis soirs, par le foot, les bars branchés et les concerts de rock – un mode de vie décomplexé, libéral, libertin, athée, transgressif, urbain, festif, etc. Ce serait cela la France, la civilisation, la démocratie, les « valeurs » : la possibilité de vivre sans croire à rien une vie d’après la « mort de Dieu », que voudraient justement abattre ses fanatiques.

Le seul problème, c’est que toutes les caractérisations qui sont ici données de ce « mode de vie » par tant de ses partisans enthousiastes ou mélancoliques coïncident à peu près avec ce que des penseurs occidentaux à qui l’on s’accorde à reconnaître, en d’autres circonstances, une rare lucidité n’ont cessé de flétrir. (…)

La Une de Libé sur les attentats n’efface en rien celle qui était annoncée initialement, et qui portait curieusement sur le chancre social et humain que sont les hipsters dans le cœur des métropoles, et plus particulièrement de Paris.

La sorte de coup d’État émotionnel qui a voulu, en janvier dernier, faire de Charlie Hebdo « la France » ne parviendra pas, cette fois, à imposer l’identification à une certaine forme de vie métropolitaine. La petite-bourgeoisie cognitivo-communicationnelle, l’éclate, la drague, le salariat branché, l’hédonisme du trentenaire cool, n’arriveront pas à se faire passer pour « notre mode de vie », « nos valeurs », ni même pour « la culture ».

C’est une certaine forme de vie, comme il y en a tant d’autres dans cette époque, dans ce pays, et qui ne suscite pas que de la tendresse. L’instrumentalisation des attentats par certains propagandistes afin d’assurer l’hégémonie morale de cette forme de vie-là ne peut que contribuer à la rendre haïssable.

Puissent les attentats de vendredi, et ceux qui ne manqueront pas de suivre au vu de l’engrenage que les gouvernants ont délibérément choisi d’enclencher, nous rendre plus vrais et moins distraits, plus profonds et moins hypocrites, plus sérieux et plus communistes.

Telle est, pour nous, la guerre véritable, celle qui, en Occident, mérite que l’on y risque sa vie : la guerre pour en finir avec l’économie. Mais voilà aussi une guerre qui ne se mène pas à coups de spectaculaires carnages, aussi anti-économiques fussent-ils. C’est une guerre essentiellement indirecte.

C’est par le communisme vécu que l’on fait reculer le terrain de l’économie, ce qui n’exclut pas des coups d’audace opportuns. La construction d’un communisme sensible est plus que jamais la seule chose à même de faire brèche dans le cauchemar historique dont nous essayons de nous réveiller. »

Seulement, un communisme vécu, à la marge, est-ce possible? Surtout sans véganisme, car cette mouvance est odieusement anti-vegan. Bien sûr que non : aucun changement ne peut se faire à la marge, aucun changement ne peut ne pas porter le véganisme… Et les bobos et hipsters ne sont pas quelque chose de bien : ce sont juste des décadents, qui regardent s’effondrer le monde, pendant que d’autres, comme les djihadistes, participent activement à cet effondrement.