3 associations portent plainte contre Marineland

Les associations « Réseau-Cétacés », « C’est Assez ! » et « ASPAS » ont porté plainte contre Marineland d’Antibes et ses dirigeants. Voici des extraits du dossier de presse.

Les graves méfaits en question sont des actes de cruauté et de maltraitance envers les cétacés, l’absence de soins et la mise à mort sans nécessité.

Maltraitance des cétacés : Trois associations portent plainte contre

le Marineland d’Antibes

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Les chefs d’accusation retenus sont la commission d’actes de cruauté et de

maltraitance envers les cétacés, défaut de soins et la mise à mort sans

nécessité. Cette plainte est accompagnée de 4 témoignages édifiants qui lèvent le voile sur la condition des cétacés captifs au Marineland :

celui de John Hargrove, ancien employé du parc marin et

principal témoin à charge du documentaire «Blackfish» qui a mis

à mal l’industrie de la captivité aux Etats-Unis,

celui de Jennifer Reynaud, ancienne stagiaire au Marineland,

celui de Franck Dupraz, Docteur Vétérinaire et membre du Groupe d’Etudes des Cétacés de Méditerranée,

celui de Morgane Perri, Biologiste Marin.

Derrière le business, la détresse…

A quelques semaines de la réouverture du parc marin, les associations

« Réseau-Cétacés », « C’est Assez ! » et « ASPAS » rappellent qu’elles ont

déposé une plainte officielle, le 29 décembre 2015, contre la société

Marineland qui exploite le parc marin et animalier d’Antibes et contre ses

dirigeants. Plainte déposée auprès du Tribunal de Grande Instance de

Grasse, par l’intermédiaire de Maître Alexandre Faro, Avocat au Barreau

de Paris.

«… Un matin, en arrivant au travail, nous avons trouvé sept orques grièvement brûlées, lésions provoquées par une défaillance du système de filtration dans la nuit qui envoyait du chlore en continu dans le bassin. Les orques étaient tellement brûlées qu’elles n’arrivaient pas à ouvrir les yeux, même pas pour se nourrir… Cet incident a aussi provoqué des problèmes de peau. Des lambeaux de peau tombaient au niveau de la tête et du dos. Pendant des jours, leur peau était gravement endommagée et exposée aux infections bactériennes… ».

Extrait du témoignage de John Hargrove.

Marineland enfreint manifestement le code pénal qui sanctionn

–  les actes de cruauté envers des animaux tenus en captivité.

Comment ? D’après le témoignage de Jennifer Reynaud, la société Marineland emploie des méthodes de dressage particulièrement draconiennes afin que les animaux réalisent leurs acrobaties. Selon les attestations jointes à la plainte, les cétacés sont affamés pendant plusieurs heures avant une représentation aux fins de s’assurer de leur volonté et de leur efficacité pendant le spectacle :

«… Les animaux ne sont nourris qu’en fonction du planning. Afin d’obtenir l’entière coopération de l’animal durant un spectacle ou une séance de dressage, il faut préalablement l’affamer. Voilà pourquoi les animaux ne seront pas nourris plusieurs heures avant une représentation, pour s’assurer de leur totale volonté et efficacité durant le show… Si l’animal veut se nourrir, il doit obéir…»

– les actes de mauvais traitements envers des animaux.

Comment ? Par souci d’économie, Marineland refuserait de prodiguer les soins nécessaires à ses cétacés, leur causant ainsi d’insupportables souffrances.

«Durant mon stage, un soigneur m’avait expliqué que l’orque Shouka souffrait d’une maladie qui lui attaquait la dentition et que l’orque Inouk semblait contracter les mêmes symptômes. Le vétérinaire américain en charge des soins de Shouka aurait trouvé une solution pour la soulager, voire la guérir et aurait proposé ses services au Marineland pour Inouk. Le soigneur m’a affirmé que le directeur de l’époque, M. Mike Riddell, avait refusé de payer les frais de déplacement du vétérinaire (qui pourtant ne demandait aucune contrepartie financière sinon son billet d’avion et son logement sur place) et avait forcé les soigneurs à soulager Inouk avec de l’Efferalgan». Extrait du témoignage de Jennifer Reynaud.

– les atteintes involontaires à la vie ou à l’intégrité des animaux tenus en captivité.

Comment ? Depuis l’ouverture du parc en 1970, 27 dauphins et 11 orques ont perdu la vie à un âge précoce. A titre d’exemple, chez les dauphins, Manon est décédée vers 13 ans, Fenix et Kaly vers 8 ans. Chez les orques, Calypso est morte vers 11 ans, Clovis vers 4 ans, Kim Oum vers 14 ans et Betty vers 13 ans. Notons a contrario la présence, en Colombie Britannique, de l’orque Granny, qui nage paisiblement et librement, à l’âge de 104 ans…

«… il est important de noter que les différentes études basées sur le suivi à long terme des populations sauvages de Grands Dauphins et d’Orques prouvent, par comparaison avec les bases de données accessibles des animaux captifs, que ces deux espèces ont une espérance de vie nettement réduite (à de rares exceptions près) par la détention en captivité. Cette simple constatation à elle seule prouve que la captivité est totalement nocive pour les cétacés, qu’elle ne peut en aucune manière respecter les conditions biologiques et physiologiques permettant un bien-être de l’animal, et donc de fait est une aberration qui doit être stoppée». Extrait du témoignage du Docteur Franck Dupraz.

Et puisque nous en sommes à la triste rubrique nécrologique du Marineland, il est intéressant de noter l’omerta qui plane sur celle-ci : début 2015, 2 dauphins ont été signalés manquants à l’appel aux associations de protection. La Direction de Marineland n’a avoué leur décès, en juillet dernier, que sous l’effet de surprise induit lors d’une interview improvisée lors de laquelle la question du sort de ces dauphins a été soulevée. La liste des différentes entorses au Code Pénal est malheureusement longue et détaillée dans la plainte. Néanmoins, la violence infligée aux cétacés a pris une toute autre ampleur dans la nuit du 3 au 4 octobre 2015, lors de laquelle de violentes intempéries et une vague de 2 mètres se sont abattues sur le parc marin, le détruisant à 90% et recouvrant les bassins de boue. De nombreux animaux du zoo ont trouvé la mort, ainsi que l’orque Valentin âgé de 19 ans. Monsieur Giampaolo – alors Directeur général du parc, appelé depuis à d’autres fonctions – évoquait « une situation apocalyptique».

Dès lors, un collectif d’associations s’est formé en vue de faire diligenter différentes démarches par la Direction Départementale de la Protection des Populations. L’enquête sanitaire réalisée par la DDPP est restée très laconique, soulignant simplement «une préoccupation pour le bassin des orques» et faisant fi de la demande d’analyse de l’eau. La demande de mesure de sauvegarde de la dépouille de l’orque Valentin est restée totalement vaine, ce qui n’a pas permis de réaliser la nécropsie contradictoire.

Vers un effet «Blackfish» en France ?

Nous avons décidé de produire aux débats, le film «Blackfish, l’orque tueuse» de Gabriela Cowperthwaite. qui lève le voile sur la cruauté de l’industrie de la captivité. Bon nombre de témoins à charge de ce film ont eux-mêmes été des maillons de cette industrie (chasseurs, dresseurs etc…). Depuis sa sortie aux Etats-Unis, «Blackfish» a mis SeaWorld au centre de la polémique, entraînant la tourmente et la chute du monstre industriel. L’impact du film a même incité les gouvernements fédéraux à réviser les lois encadrant la détention des cétacés captifs. Alors est-il étonnant que « Blackfish» ne soit pas sorti dans les salles de cinéma en France ? Qu’à cela ne tienne, il débarquera dans notre système judiciaire…!

Bande annonce : www.youtube.com/watch?v=VuXnU6RTAW8

Si la fermeture de Marineland est prononcée, que faire des animaux captifs ? Nous rappelons ici que le but de la procédure n’est pas forcément la remise en liberté des cétacés captifs. Le dressage en delphinarium consiste à briser la nature même de l’animal qui perd tout instinct de survie en milieu naturel. Un animal captif ne peut donc être réintégré à son milieu naturel qu’au terme d’un protocole de réhabilitation qui va, pas à pas, lui faire retrouver ses réflexes naturels, notamment pour ce qui concerne la chasse.Si certains cétacés tenus en captivité ne sont pas réhabilitables, il faudra envisager leur placement en «lagon de retraite» – c’est-à-dire, une zone protégée en mer où ils pourront couler des jours paisibles sans avoir à se soumettre à des shows, à des interactions forcées avec les humains, etc…

La même problématique se posera pour les autres animaux tenus en captivité par ce parc d’attraction (manchots, otaries, ours polaires…) pour lesquels une procédure de réadaptation à la vie en milieu naturel devra être également mise en place. Le cas échéant, il faudra leur trouver une structure d’accueil adaptée à leur espèce et apte à leur offrir une vie digne de ce nom. La procédure en Justice envisagée par nos équipes va être longue… Sa durée est estimée à 3 ans. Ce qui va nous permettre de nous rapprocher des différents spécialistes – travaillant sur des projets de réhabilitation ou de placement d’animaux captifs en lagon de retraite notamment – et d’étudier, avec eux, les différentes possibilités en vue de formuler des demandes précises à la Justice. En conclusion…

En Europe, 15 Etats préfèrent les dauphins libres, il s’agit de l’Autriche, de Chypre, de la République Tchèque, de l’Estonie, de la Hongrie, de l’Irlande, de la Lettonie, du Luxembourg, de la Pologne, de la Slovaquie, de la Slovénie, du Royaume-Uni, de la Croatie, de la Norvège et de la Suisse. Ailleurs dans le Monde, l’initiative a été suivie par le Chili, le Costa Rica, le Nicaragua et l’Inde qui est allée encore plus loin en conférant aux dauphins le statut de personnes non humaines. La France, avec ses cétacés libres présents tout le long de son littoral, doit elle aussi sérieusement envisager de revoir sa législation vis-à-vis de leur détention  en captivité ; ce qui passera par la fermeture ou la reconversion de ses 4 delphinariums : Marineland (Antibes, 06), Parc Astérix (Plailly, 60),  Planète Sauvage (Port Saint Père, 44) et le Moorea Dolphin Center (Moorea, 98).