L’antispécisme d’Aymeric Caron : de la morale pour bobos

Aymeric Caron a publié un ouvrage intitulé « Antispéciste » et nous sommes heureux et heureuses d’avoir, de notre côté, toujours réfuté l’emploi de ce terme en raison de son contenu totalement erroné.

Et, tant qu’à faire, précisons également que nous ne sommes pas du genre à faire confiance à Aymeric Caron qui, il y a quelques mois encore, continuait sa démarche consistant à ne jamais répondre à la question de savoir s’il était vegan ou pas.

Ces derniers jours, à l’occasion de la parution de son ouvrage, il le déclame par contre haut et fort, se présentant aussi comme un « abolitionniste ».

Tout cela est bien trop contorsionné pour être honnête, mais il faut juger sur pièce et, plutôt que de juger ses propos dans des interviews ou encore dans l’émission « On n’est pas couché », regardons ce qu’il dit dans « Antispéciste ».

Rien qu’avec la première phrase et sa justification, à notre sens tout est dit :

« Je n’aime pas les animaux. Je les respecte, tout simplement. L’amour est un sentiment parfois irrationnel, une inclination subjective, une expression trop passionnelle pour être tout à fait sensée. »

Ce qui nous distingue des autres courants de pensée et d’action en faveur des animaux, c’est que nous aimons les animaux et que nous considérons qu’il est absurde d’opposer la raison aux sentiments.

Nous méprisons Descartes et sa vision séparant le corps et l’esprit ; nous pensons qu’il est naturel d’aimer, et nous n’opposons pas les cinq sens à nos raisonnements.

Pour cette raison, même si nous considérons que le véganisme est incontournable, nous avons le plus grand respect pour les activistes des refuges, la « vieille femme aux chats », le SDF qui nourrit les pigeons, toutes ces personnes qui, sans être vegan, relève pour nous d’une tendance naturelle à la compassion.

Nous trouvons insupportables ces intellectuels, bobos et autres hipsters qui nous ennuient avec leur « droit », leur questionnement sur la « justice », tout cela pour faire carrière, dans un esprit bien français. Rappelons qu’en chinois, l’idéogramme désignant la France signifie au sens strict « pays de la loi ».

Aymeric Caron est quant à lui d’un formalisme odieux ; comme le montre les lignes suivantes :

« Mais si je ne mange pas d’animaux, si je refuse de consommer des produits issus de leur souffrance, si je m’oppose à leur détention et si je milite pour la fin de la chasse et de la corrida, ce n’est pas en raison d’une sensibilité exacerbée à leur égard. Seule une exigence de cohérence et de justice motive mon refus de tuer et de faire souffrir un animal.

Avant de sauter dans un lac pour sauver un homme en train de se noyer, vous ne vous demandez pas si vous aimez cette personne. Le médecin et le pompier n’ont pas non plus besoin d’aimer les individus auxquels ils viennent en aide : ils agissent en fonction de leur conscience et de leur sens des responsabilités. Il n’y a pas d’affect dans leur comportement. »

Nous disons de notre côté : voilà exactement l’horreur de notre monde. Le manque d’affect est insupportable et l’exemple du médecin ou du pompier est bien choisi. Qui ne connaît pas l’arrogance hautaine du médecin qui nous voit comme un objet à réparer, du pompier dans sa version militaire qui prend le peuple pour un ramassis d’inconscients et d’écervelés.

On a à peine commencé l’ouvrage d’Aymeric Caron que la messe est dite : voilà encore de l’existentialisme à la française, du catho cherchant à se donner bonne conscience.

Quant au concept d’antispécisme employé, qu’Aymeric Caron s’approprie de manière éhontée afin d’asseoir sa carrière médiatique de bellâtre, il n’a rien de nouveau.

Il s’agit d’une simple catégorie bobo de plus, à côté de la grossophobie, de la transphobie, de l’âgophobie et autres termes délirants pour désigner ce qui relève d’un manque d’humanité, d’éducation, de savoir.

Citons Aymeric Caron, qui encore une fois dès le début de l’oeuvre le dit ouvertement :

« Je suis antispéciste. C’est-à-dire que je considère qu’il n’y a aucune justification à discriminer un être en raison de l’espèce à laquelle il appartient.

Autant le préciser tout de suite : l’antispécisme n’est pas juste un cri de défense en faveur des animaux maltraités. Il est un combat social pour l’égalité, qui présente la particularité de dépasser le simple cas des humains.

L’antispécisme est donc en réalité un nouvel humanisme, qui reconnaît notre parenté avec les autres espèces animales et qui en tire les conséquences. »

Quarante années exactement après la naissance de l’ALF, il faut encore avoir à supporter un tel anthropocentrisme, refusant de faire de la libération animale une cause sacrée, devant s’imposer car elle est d’une justesse absolue ?

Nous répondons non, nous répondons : non, la place est prise, par une démarche sérieuse qui sait qu’il faudra arracher les animaux à leurs ennemis, qu’il faudra se confronter à tout prix aux promoteurs de l’écocide en cours.

La cause animale n’est pas un simple ajout universitaire à la liste des combats sociétaux que seraient la cause des femmes, des personnes homosexuelles, des minorités, des personnes subissant le racisme, etc.

La cause animale est une cause qui dépasse l’humanité, qui la replace dans l’ensemble de la Nature, qui la fait se soumettre à la planète compris comme un grand tout.

Nous disons qu’Aymeric Caron n’a rien compris à la cause quand il dit :

« Il ne s’agit pas de décréter que tous les animaux sont les égaux des hommes.

Cela n’aurait aucun sens. Mais nos différences avec les autres espèces ne peuvent plus justifier le refus de leur accorder à tous des droits minimaux. Lesquels ? Le débat est ouvert. Selon moi, quatre droits fondamentaux s’imposent : nous ne devons plus manger les animaux, ni les enfermer, ni les torturer, ni en faire le commerce. »

Nous, nous disons : « en défense de toute vie ! » et nous affirmons que chaque être vivant est une composante liée à l’ensemble de la vie, dont l’existence est sacrée car l’ensemble est sacré, chaque élément étant indissociable de l’ensemble.

Nous n’avons pas besoin de gens qui ne sont pas spécistes. Nous avons besoin de gens dans les refuges, nous avons besoin de gens pour libérer les animaux des laboratoires, nous avons besoin des gens pour détruire les abattoirs, nous avons besoin de gens pour admirer les oiseaux !

La Nature subit une offensive généralisée : elle n’a pas besoin d’existentialistes se comportant de telle manière à avoir bonne conscience, mais de gens se lançant dans la bataille, à ses côtés !