« L’âge de la neo-vie »

Nous avons parfois parlé du primitivisme, une théorie que nous ne défendons pas et qui propose un retour avant l’émergence de la civilisation.

Si on ne peut qu’exprimer un intérêt certain pour la scène primitiviste sud-américaine – vegan, straight edge, extrêmement social malgré ses discours ultra-individualistes – on ne peut qu’être dubitatif du primitivisme dans les pays développés, qui semble bien plus être un mélange de misanthropie, de pessimisme et de un moyen pour éviter le véganisme.

Difficile de penser autre chose à la lecture la brochure intitulée « Decomposition – Autour de la civilisation et de la domestication », diffusée par le site insurrectionaliste Contra-Infos.

On n’est pas ici dans la libération de la Terre, mais dans l’éloge du « sauvage », c’est-à-dire de l’individu comme mesure de toute chose, au-delà des « genres », de tout concept (et même de l’amour). Le primitivisme est ici vraiment un discours mystico-universitaire pour éviter le véganisme.

Voici un extrait très parlant de cette brochure, qu’on peut télécharger en cliquant sur l’image.

La guerre contre les femmes, la guerre contre les pauvres, la guerre contre les peuples indigènes et subsistants de la terre, et la guerre contre le sauvage sont toutes connectées. Au regard de la civilisation, illes sont tou-te-s perçu-e-s comme des commodités – des choses à être revendiquées, extraites, et manipulées pour le pouvoir et le contrôle. Illes sont tou-te-s vue-s comme des ressources, et quand illes ne sont plus d’aucune utilité pour le pouvoir-structure, illes sont jeté-e-s dans les décharges de la société. (…)

Au cours de son développement, la technologie a toujours joué un rôle en expansion constante. En fait, les progrès de la civilisation ont toujours été directement connectés, et déterminés par le développement de technologies toujours plus complexes, efficaces, et innovatrices. Il est difficile de dire si c’est la civilisation qui pousse la technologie, ou vice-versa.

La technologie, comme la civilisation, peut être vu plus comme un procédé ou un système complexe que comme une entité physique. Cela implique de façon inhérente une division du travail, l’extraction de ressources, et l’exploitation par le pouvoir (celleux possédant la technologie). Tout contact avec, et les conséquences de la technologie, sont toujours une réalité aliénée, arbitrée et lourdement chargée de conséquences.

Non, la technologie n’est pas neutre. Les buts et valeurs de celleux qui produisent et contrôlent la technologie sont toujours inscrits en elle. Différente d’un simple outil, la technologie est connectée à un processus plus large et infectieux, et projeté lui-même en avant par son propre élan.

Ce système technologique avance toujours, et a toujours besoin d’inventer de nouvelles façons de se supporter, s’alimenter, se maintenir et se vendre lui-même. Une partie clé de la structure moderne-techno-capitaliste et l’industrialisme, le système mécanisé de production fondé sur un pouvoir centralisé et l’exploitation des individu-e-s et de la nature. L’industrialisme ne peut exister sans génocides, écocides et impérialisme.

Afin de le maintenir, la coercition, l’expulsion de terres, le travail forcé, la destruction culturelle, l’assimilation, la dévastation écologique, et le commerce global sont acceptés et perçus comme nécessaires. La standardisation de la vie par l’industrialisme l’objectifie et en fait une commodité, voyant chaque vie comme une ressource potentielle.

La technologie et l’industrialisme ont ouvert la porte à la domestication ultime de la vie – l’étape finale de la civilisation – l’âge de la neo-vie.

Ainsi nous sommes maintenant dans la post-moderne, neolibérale, bio-tech, cyber-réalité, avec un futur apocalyptique et un nouvel ordre mondial. Est-ce que les choses peuvent vraiment empirer ? Ou cela a-t-il jamais été si mauvais ?

Nous sommes presque totalement domestiqués, à l’exception de quelques rares moments (émeutes, se faufiler dans le noir afin de détruire des machineries ou les infrastructures de la civilisation, connecter avec d’autres espèces, nager nu-e dans la rivière d’une montagne, manger de la nourriture sauvage, faire l’amour (1)… ajouter vos préférés) durant lesquels nous avons un aperçu de ce que cela pourrait être que d’être sauvage.

(1) ndt [note du traducteur] : on n’est pas d’accord avec l’idée de « faire l’amour ».

L’amour est à nos yeux l’une de ces notions construites par un système hétéro-patriarcale et capitaliste dont le seul but est encore une fois l’enfermement d’individu-e-s dans des cages qu’ielles construisent elleux-même. Il se base sur des attentes incompatibles avec le respect de la liberté des individu-e-s, et une division hiérarchisée entre les ami-e-s [celleux avec qui t’es pas censé faire du sexe et avec qui tu passes un peu de temps, et avec lesquel-le-s tu es modérément attaché émotionnellement] et ton amoureuxe [avec qui t’es censé faire du sexe, passer le plus de temps possible, être le plus attaché-e émotionnellement, etc.].

L’amour, c’est aussi un bon moyen de rappeler aux gen-te-s qu’il faut être hétéro, faire et avoir envie de faire des enfants qui elleux aussi pourront être une force de travail et être une existence rentable pour le système dans lequel nous sommes forcés de vivre.