Emmanuelle Auriol et la légalisation du cannabis

Pour rebondir sur l’article d’hier avec le libéralisme en rapport avec le cannabis, on a depuis plusieurs jours une grande offensive médiatique menée au sujet d’un ouvrage d’Emmanuelle Auriol, intitulé « Pour en finir avec les mafias Sexe, drogue, clandestins : et si on légalisait ? ».

Comme dit hier, quand on est libéral, on l’est pour tout. C’est une question de cohérence. Nommée il y a plus de dix ans « Meilleur Jeune Économiste de France » par le journal Le Monde pour qui elle écrit désormais de manière régulière, elle est chercheuse en économie à l’Université Capitole de Toulouse. Ses travaux, comme on peut l’apprendre, « s’intéressent aux réformes structurelles optimales, telles que les privatisations, la (dé)régulation, ou les partenariats publics-privés ».

On a ici un exemple classique de capitulation devant l’infâme, maquillée en position « raisonnable », tout cela pour en réalité servir le business à travers un soutien de l’Etat.

Voici ce qu’elle dit par exemple dans La dépêche, de manière très subtile:

Vous prônez la légalisation du cannabis. Sous quelle forme, en vente libre ?

Surtout pas. Il n’est pas question de vendre du shit dans les supermarchés ! C’est l’Etat qui instaure un marché légal dans des endroits où l’on peut se procurer du cannabis sous certaines conditions, avec des restrictions, par exemple sur l’âge des consommateurs. Les prix sont fixés par l’Etat et le produit est taxé, comme le tabac. Les acheteurs sont sûrs qu’ils n’ont pas affaire à des trafiquants, ils peuvent consommer des produits contrôlés, sans risquer de se faire arrêter. (…)

Légaliser la prostitution, c’est rouvrir les maisons closes ?

Non. Tous les pays qui l’ont fait ont plutôt vu une augmentation de la prostitution légale et illégale. Je propose de créer un statut de profession libérale réglementée, avec la création d’un ordre des prostitués(e) s, qui s’occuperait des questions de consentement, de tarifs, de santé, de reconversion, de sécurité.

Cela permettrait aux prostituées d’avoir un statut décent, de recevoir des clients en toute liberté, et cela conduirait à limiter les abus de l’exploitation illégale, du crime organisé qui emploie des esclaves. Je propose aussi la criminalisation des clients des prostituées non encartées, comme en Suède.

Ce qu’elle masque à travers ce discours, c’est que l’Etat devra bien se procurer du cannabis, et à défaut de le produire lui-même, il faudra bien qu’il se le procure sur un marché concurrentiel… De la même manière la prostitution est tout à fait acceptée, il s’agit simplement d’en faire un métier légal, les prostituées étant même dans ce cas appelés (notamment par les anarchistes) des « travailleuses du sexe ».

Voici également une vidéo du Nouvel Observateur où elle présente sa thèse, où l’on voit facilement que rien ne tient dans son discours : comme si les recettes fiscales serviraient vraiment à la lutte contre le cannabis… De la pure poudre aux yeux.

On retrouve le même discours chez la députée socialiste Anne-Yvonne Le Dain, il y a deux jours dans la Gazette de Montpellier :

« Ma position est simple : ce n’est pas bien et ce n’est pas bon de fumer, mais je dis aussi qu’on n’arrive pas à l’enrayer. Et dans aucun pays occidental. Je suis pour la légalisation du cannabis sous contrôle de l’État. Je ne suis absolument pas pour une vente libre par n’importe qui. Ce n’est pas un produit banal.

La distribution sous contrôle de l’État se ferait non seulement pour fixer les prix et encaisser les taxes, mais aussi parce qu’il faut surveiller le taux de substance active. Aujourd’hui, dans le cannabis qui circule sous le manteau, on a des taux de substance active qui sont colossaux !

[Et où est-ce que l’on pourrait acheter du cannabis ? Dans les commerces ?] Je n’ai pas encore d’opinion fixe, le débat est sur la table. Mais je pense que cela pourrait être dans les pharmacies ou les bureaux de tabac, parce qu’ils sont assermentés. Mais certainement pas à la confiserie du coin. (…)

Le cannabis, tout le monde en fume. Dans les campagnes, dans les villages, dans les grandes villes, dans les banlieues… Y’en a partout… Face à quelque chose qui est partout, la police doit-elle continuer à courir derrière ? Il y a eu 130 000 interpel- lations l’année dernière ! On entretient tout un ensemble de petits dealers, alors qu’il faudrait que la police se concentre sur des trafics lourds et gros. »

Il faut être naïf pour y croire. Le capitalisme voit un marché et il utilise les positions relativistes pour faire accepter le cannabis, s’appuyant sur des gens prétendant servir la santé publique et être « réaliste »…

C’est une grande tendance de fond et on sent bien comment l’opinion publique est travaillée au corps.