Le Colorado comme eldorado libéral libertaire du marché du cannabis

C’est encore une fois du libéralisme libertaire dans sa version la plus brutale que nous fournit le quotidien Libération avec un article signé de quelqu’un profitant encore une fois de son prestige institutionnel pour vanter le cannabis.

Il s’agit cette fois de Pierre-Yves Geoffard, professeur à l’Ecole d’économie de Paris, directeur d’études à l’EHESS (les « hautes études » en sciences sociales).

Quant au titre, il est d’une clarté digne d’Emmanuel Macron :

« Le cannabis pour relancer la croissance »

L’article affirme pouvoir présenter un argument « massue » : on aurait enfin un exemple concret des effets économiques du marché du cannabis avec l’État américain du Colorado.

« Lorsque le cannabis est illégal, de telles analyses [sur la légalisation du marché du cannabis] ne peuvent s’appuyer que sur des extrapolations, intrinsèquement périlleuses, d’estimations par ailleurs contestables puisque portant sur des activités clandestines ; mais le cannabis étant devenu légal au Colorado, il est possible d’observer l’activité économique réellement générée par ce produit dans un territoire où vivent plus de 5 millions d’habitants. (…)

En ce qui concerne l’activité directe, le volume total des ventes est d’un milliard de dollars en 2015, pour près de 13 000 emplois créés dans l’agriculture, le commerce, ou l’activité de transformation, la marijuana étant vendue non seulement sous forme d’herbe à fumer mais aussi en huile, en cookies, etc.

Il faut noter que la production est presqu’exclusivement indoor, dans des bâtiments où un éclairage artificiel permet de simuler le rythme des saisons et de produire régulièrement tout au long de l’année ; un tel mode de production est plus intensif en capital, et surtout en énergie, qu’une production en plein air, plus intensive en travail.

Une activité directe importante est également d’ordre bureaucratique, la loi imposant de nombreuses contraintes, notamment en termes de traçage du produit et de normes sanitaires, depuis la production jusqu’au consommateur final.

Au-delà de ces 13 000 emplois, près de 3 000 emplois indirects ont été créés dans des entreprises qui fournissent des services aux producteurs et distributeurs de cannabis : sécurité, construction et ventes immobilières, conseils juridiques, etc.

Enfin, à travers l’intégration de ce nouveau secteur à un modèle «input-output» de l’économie du Colorado, l’étude a chiffré à 2 500 le nombre d’emplois indirects, induits par la consommation des employés et des actionnaires de l’industrie du cannabis, désormais entièrement intégrés à l’économie légale.

Un élément important à prendre en compte est que les échanges restent interdits d’un Etat à l’autre, même entre deux Etats limitrophes ayant chacun légalisé le cannabis. Une grande partie de l’activité induite par l’économie du cannabis reste donc, par construction, localisée au Colorado. Au total, la légalisation a créé plus de 18 000 emplois directs ou indirects.

Les auteurs notent que la transition du marché noir au marché légal continuera pendant quelques années, nourrissant ainsi une forte croissance du marché au moins jusqu’à 2020. L’ensemble des recettes fiscales est, quant à lui, estimé à 120 millions de dollars, 30 % de moins que pour les cigarettes mais trois fois plus que les taxes sur l’alcool.

La transposition à l’échelle de la France n’est pas immédiate, tant les modes de culture et de distribution que les taxes seront différentes.

Mais rapportée à la population française, il s’agirait de 200 000 emplois, non subventionnés, et de près de 1,5 milliard de recettes fiscales.

Alors que les arguments sécuritaires et sanitaires plaident eux aussi contre la prohibition, la France peut-elle se priver d’une telle source de richesse, d’emplois, et de croissance ? »

On remarquera que le troisième paragraphe en partant de la fin utilise directement le futur et même pas le conditionnel : ces gens sont certains de la légalisation.

La question finale de l’article relève à ce titre de la pure rhétorique. Cet article est un simple placement de produit : du cannabis pour Libération dont le libéralisme libertaire est le fond de commerce, pour l’auteur qui pourrait ainsi gagner des places dans les institutions comme « spécialiste ».

Un passage important à ce titre est l’éloge de la production indoor permettant des cadences plus grandes, plus d’investissements de capital, etc. C’est avec cela qu’on peut progresser dans les institutions : en faisant l’éloge du capitalisme à tous les niveaux, jusque pour les drogues !