« Le retour des chasses présidentielles »

« Le retour des chasses présidentielles » : voilà le titre des articles qui circulent dans les médias. La fonction présidentielle est d’une très haute importance, et ce qui se fait a un impact énorme dans la société.

En choisissant de remettre au goût du jour les chasses présidentielles (mises plus ou moins « entre parenthèses » par Chirac), Sarkozy anéantit un énorme travail contre la chasse, un énorme travail soit, mais réformiste.

Car en refusant de critiquer l’ensemble de la société et l’exploitation animale qui va avec, le réformisme s’est mis à la remorque des valeurs dominantes… qui sont celles qu’elles sont.

Quel bourgeois refuserait de se faire « acheter » par l’énorme privilège d’aller dans un château comme celui de Chambord, en petit cercle fermé, avec petit déjeuner, déjeuner dans une clairière, partie de chasse, dîner dans la grande salle du château?

Sans oublier le « tableau de chasse » présenté par la garde républicaine évidemment en grande tenue, le flambeau à la main, le tout dans un château illuminé, les sonneurs jouant du cor!

Le ministre des finances suédois lui n’a pas hésité, puisque ce lundi il est allé chasser à Chambord, sans évidemment le préciser dans son emploi du temps. Pas de chance pour lui un tabloïd suédois l’a grillé, et ce qu’on lit dans l’article exprime clairement le sens de ces « chasses présidentielles »; à côté de la photographie du château, on lit: « c’est ici que chasse le ministère des finances avec les élites du pouvoir. »

Les « élites du pouvoir », voilà quelque chose de profondément anti-démocratique, et donc qui s’ouvre à la chasse. C’est précisément cet aspect féodal qui avait torpillé la volonté de Mitterrand de rompre avec ces chasses, comme on peut le lire dans un article du Monde:

C’est paradoxalement sous François Mitterrand qu’elles furent particulièrement courues.

Le président socialiste n’aimait pas la chasse, mais n’ignorait pas son importance. Lorsque Alain Bombard, nommé secrétaire d’Etat à l’environnement du premier gouvernement Mauroy, voulut interdire la chasse à courre et fermer les chasses présidentielles, ce fut une levée de boucliers. Quelques vieux socialistes de la Nièvre, terre d’élection de Mitterrand, les défendirent avec ardeur.

Le frère du président, Philippe, grand tireur et bon connaisseur des oiseaux, plaida habilement son goût de la nature : « Tous les chasseurs ne sont pas des viandards, allons… » Michel Charasse et André Rousselet firent valoir la nécessité de réguler la faune sur les domaines. Bombard dut démissionner. Et les chasses présidentielles prirent leur véritable essor.

Il n’est ainsi pas étonnant que les chasses présidentielles soient une référence culturelle dans notre société; selon les médias, on retrouve dans les chasses présidentielles de grandes figures de la police, des grands bourgeois d’entreprises du CAC 40, des préfets, des ministres, des chefs d’Etat de pays « amis »…

Bref, l’élite de l’élite du pays, en cercle très fermé.

Le tout chapeauté par le conseiller de Sarkozy, Pierre Charon, qui est le président du conseil d’administration du domaine de Chambord. Conseiller qui explique quant au caractère secret des invitations: « Quand on invite des gens à un anniversaire, on ne donne pas le nom des invités. »

Voilà le genre de fêtes de la haute bourgeoisie, voilà son idéologie: la mort, institutionnalisée.