La catastrophe de Three Mile Island, le 28 avril 1979

Nous rentrons dans une période coincée par deux tristes anniversaires : celle de la catastrophe de Tchernobyl, le 28 avril, et celle de la catastrophe de Three Mile Island, le 28 mars. Cette dernière catastrophe est peu connue, ce qui est bien entendu fort dommage, car il s’agit de la troisième grande catastrophe avec Tchernobyl et Fukushima, et un sérieux avertissement sur le danger énorme des centrales nucléaires.

En plus, pour comprendre l’ampleur de Fukushima justement, on compare la catastrophe japonaise à celle de Three Mile Island et à celle de Tchernobyl… Tout au moins au début, car désormais on sait que Fukushima est d’une dimension très proche de celle de Tchernobyl.

Au début de la catastrophe de Fukushima, on avait donc pourtant tout de suite pensé à un incident de type Three Mile Island. En effet, à Three Mile Island, on a également eu droit à un problème de refroidissement du coeur.

La centrale de Three Mile Island a été ouverte en 1974 ; elle est située à une quinzaine de kilomètres de Harrisburg, en Pennylvanie, au nord-ouest des Etats-Unis, voici une photo de l’installation.

On trouve à Three Mile Island deux réacteurs nucléaires, TMI-1 (à partir d’avril 1974) et TMI-2 (à partir de février 1978), situés dans les petits dômes, et quatre tours de réfrigération.

L’accident du 28 avril 1979 s’est déroulé de la manière suivante : les pompes d’alimentation en eau sont tombées en panne et le coeur n’a plus été refroidi, alors que le réacteur tournait à 97% de ses capacités. Les pompes auxiliaires qui devaient relancer l’eau avaient été stoppées pour des exercices de routine…

On a ici un schéma proche de ce qui s’est passé à Fukushima. Ce qui s’est alors passé à Three Mile Island est qu’une vanne de décharge du pressuriseur est restée bloquée en position ouverte, au lieu de se refermer après avoir évacué une partie de la pression.

Mais cela, les opérateurs ne le savaient pas car le voyant indiquait qu’il s’était refermé, et ils ne pouvaient pas vérifier par eux-mêmes !

Ensuite, le circuit d’injection de sécurité a alors projeté de l’eau, qui est venue atterrir sur le réacteur. Cette eau s’est mise à bouillir, ce qui a augmenté la chaleur et donné naissance à des vapeurs d’eau.

Cette vapeur a rempli le pressuriseur, alors plus froid que la cuve, et se remplit tellement que le réservoir de décharge se mit à se remplir et céder, et l’eau radioactive se déversa dans l’enceinte de confinement après la rupture…
Les opérateurs, voyant les chiffres du pressuriseur faussés par ces vapeurs, ont alors pensé que tout allait bien et ont… coupé les pompes d’urgence, par peur que le réacteur soit noyé !

Les opérateurs n’ont alors rien compris de ce qui s’est passé, notamment les avertissements sur les hausses de chaleur. Au bout de 165 minutes, on avait une fusion partielle du coeur.

La situation fut rétablie, difficilement, en refaisant couler de l’eau (au risque d’une explosion thermique) et en « jonglant » avec la vanne d’isolement pour faire sortir la pression (de la radioactivité et des centaines de mètres cubes d’eau contaminée passant dans l’enceinte de confinement).

Comme on le voit ici, le refroidissent a réussi, contrairement à Fukushima pour l’instant. Voici un schéma montrant l’état final du coeur du réacteur, fondu à 45%, avec 20% ayant fondu au fond de la cuve (qui a résisté et maintenue 20 tonnes d’uranium).

Le coeur a été évacué et TMI-2 fermé, l’autre réacteur restant opérationnel jusqu’à aujourd’hui, malgré les multiples protestations se développant alors aux États-Unis. Le hasard voulut qu’un film catastrophe sortit deux semaines avant, Le syndrome chinois avec notamment Jane Fonda qui participa par la suite aux campagnes anti-nucléaires.

Dans le film, une équipe de journalistes est confrontée… à une fusion d’un coeur de réacteur nucléaire.

La catastrophe de Three Mile Island est restée confinée dans la centrale, mais on a toutefois l’eau radioactive (plusieurs dizaines de milliers de litres) qui a été évacuée dans la rivière Susquehanna, et une radioactivité qui s’est diffusée mais n’a pas été alors mesurée.

TMI-2 a été nettoyée jusqu’en 1993, l’opération coûtant un milliard de dollars (le réacteur lui-même n’aura fonctionné que pendant 13 mois au total). 91 tonnes d’éléments radioactifs ont été évacuées.

Au départ le gouvernement local a dit au bout de 24 heures que tout était sous contrôle, pour finalement abandonner le point de vue de l’entreprise gérant la centrale et le gouverneur a demandé aux femmes enceintes et aux jeunes enfants de quitter la zone, amenant 140 000 personnes à s’enfuir.

L’industrie du nucléaire a vu ses tentatives d’hégémonie largement vaciller avec cet accident. Un accident qui sert depuis d’exemple mondial, avec Tchernobyl, et désormais Fukushima!