Le film « Origine »

« Origine » est un film japonais de 2006, sous la forme d’un dessin animé, qui présente un très sympathique conte fantastique dans l’esprit de l’écologie radicale.

Les êtres humains ont mené des expériences sur la lune, jouant aux apprentis sorciers avec la Nature, et le résultat en est que les plantes deviennent douées de conscience sur Terre. La civilisation est dévastée et la forêt domine le monde.

Cette forêt a un esprit, qui n’apprécie guère les humains ayant agressé la Nature, et ne fournit de l’eau qu’avec parcimonie. Dans ce contexte subsistent deux villes : une pacifiste cherchant à un compromis avec la Nature, l’autre se militarisant, s’industrialisant de manière outrancière et cherchant à attaquer la forêt.

Dans ce contexte, deux personnes sont retrouvées dans une machine, alors qu’elles étaient en hibernation depuis 300 ans. L’homme rejoint les militaristes, alors que la fille se sent plus proche des pacifistes. Mais la nostalgie du passé l’emporte et elle rejoint l’homme qui veut relancer le projet « istock » qui doit anéantir la forêt et ramener à la situation précédente.

Un jeune rejoint alors le camp de la forêt, qui lui transmet des sortes de super-pouvoirs et il part affronter les militaristes et leurs machines.

Bien entendu, il réussit, mais meurt en étant finalement intégré à la forêt. Celle-ci le fait finalement renaître, en expliquant que tout est lié, et que si la forêt prend la vie elle la donne aussi. Sur la planète, toutes les formes de vie sont liées. Même le « méchant », venu du passé, qui a été happé par la forêt, comprend que c’est une nouvelle forme de vie qui a finalement triomphé.

C’est donc une belle fable écologiste pour enfant, qui à la très grande différence des films de Miyazaki (que nous avons critiqué ici: Les films de Miyazaki: entre rétro-futurisme et célébration des esprits de la nature (et non de la nature)) ne sont pas une nostalgie du passé, mais bien un film sur l’actualité de Gaïa et présentant le futur comme marquant inévitablement la victoire de Gaïa, les humains devant vivre forcément en paix avec elle, s’ils veulent exister.

Le monde « ‘d’avant » est présenté comme nullement enviable.

On a ici finalement un scénario très proche de la bande dessinée au scénario vraiment excellent, Mother Sarah. La planète l’emporte, la mode de vie humain tel qu’il existe avec une civilisation de béton n’est pas viable. Malheureusement, on y trouve d’ailleurs le même défaut que dans Mother Sarah : il n’y a pas d’animaux.

Un problème de taille, donc, reste que « Origine » est vraiment un film pour enfants très intéressant, au scénario apportant quelque chose de constructif, depuis le sens de l’engagement pour la planète au refus d’un monde de machines, en passant par l’inévitable victoire de la Terre.

Jouets de Noël, exploitation animale et Playmobil

Noël est passé, et il n’est pas étonnant que dans une fête de la consommation, on retrouve les valeurs qu’on a dans la production. Pour parler plus clairement: les jouets reflètent les valeurs dominantes. Faisons un tour dans une petite galerie des horreurs.

Tout d’abord, la technologie aidant, voici « duck hunter » (le chasseur de canards). Un canard mécanique – électronique vole et on tire dessus avec un pistolet muni d’un faisceau laser indiquant si on l’a touché, ou pas. On peut voir ici une vidéo de démonstration (en lien à côté on trouve de nombreuses autres vidéos).

Dans un même genre, voici des « rats » télécommandés, ayant comme but de faire peur. Dans la présentation on apprend qu’il « peut se déplacer rapidement dans toutes les directions comme un vrai »… et que « ses yeux deviennent rouges »…

Voici un autre « rat » télécommandé. Voici la description du « produit »:

Ce rat télécommandé est garantit de rendre vos animaux fous! Observez et regardez votre chat chasser et attaquer ce rongeur diabolique!

Les yeux de ce rat télécommandé s`allument pendant qu`il court et qu`il tourne avec la touche d`un bouton. Vous pouvez contrôler chacun de ses petits mouvements à distance avec la télécommande combiné. Ayez beaucoup d`amusement en regardant les gens sauter, crier, grimper sur leur bureau pendant que vous le faites courir dans les parages.

Caractéristiques : ? Parfait cadeau de gag pour faire peur a vos amis, Le rat RC a des yeux qui s`allument pendant qu`il court

Dans un registre plus simple sur le plan technique, et destiné à des enfants bien plus jeunes, voici… les fameuses « machines de mort jaunes » qu’une chanson d’Earth Crisis appelle à détruire.

Rappelons ici le passage de la chanson en parlant (le texte en entier étant là):

De nouveaux ponts, de nouvelles routes et de nouveaux barrages
pavent la voie pour le développement contre ce qui reste de la nature sauvage.
Tout cela doit être empêché à l’avance ou bien détruit pour que durent les terres sauvages.

Luttant pour sauver les animaux. Leur liberté est notre paix.
Pour la préservation de leurs habitats, pour que cesse la violence contre eux.
La libération de la Terre par l’écodéfense. Stopper cette folie consistant en l’avancée des machines de mort jaunes

Notons d’ailleurs que Playmobil n’est pas en reste…

Playmobil étant une marque très connue et ayant un grand succès, attardons nous sur leur production. Il est bien connu que les enfants aiment les animaux, n’étant pas encore contaminé par l’idéologie dominante. Cela se reflète justement dans la production de Playmobil.

Ainsi, dans la section « La vie dans la savane », on trouve un Centre de soins pour animaux sauvage, un poste d’observation avec des animaux de la savane… et il est vrai que les deux braconniers disponibles ont clairement une sale tête de « méchant. »

Mais on trouve également des pilotes à moto sur une piste de rallye… Dans les jouets Playmobil, les animaux sont là pour les enfants, mais s’insèrent en pratique dans un environnement totalement au service de l’humanité. On trouvera des animaux « sympathiques », mais choisis uniquement pour servir de décor (jusqu’au « pittoresque », avec des hyènes et un vautour autour d’un squelette).

Pour preuve, la grande présence du cirque et du zoo, dont voici des images parlant d’elles-mêmes.

On pourra arguer qu’il s’agit là uniquement de phénomènes connus des enfants, par l’intermédiaire de leurs parents. Raisonner ainsi est faux, comme le montrent les images suivantes, présentant très clairement l’exploitation animale dans son sens industriel (mais, évidemment, sans les abattoirs, et toujours à « petite échelle »). Ajoutons y d’ailleurs l’exploitation de la forêt, qui va avec dans la logique de subordination de la nature.

Cette dernière image est censée être une ferme… On voit la propension à l’idéalisation.

Les enfants aimant les animaux, ces derniers sont présents, mais strictement encadrés par les activités humaines, et servant uniquement de décor. Même dans la série « clinique vétérinaire » les animaux sont clairement là pour les loisirs, alors que le vétérinaire roule… en 4×4.

On ne sera pas étonné donc, là où on a un 4×4 dominateur, d’avoir des chevaux…

Les jouets de Noël – les jouets en général même – reflètent les valeurs dominantes, mais ils contribuent également à ce que ces valeurs soient inculquées dès le plus jeune âge… C’est quelque chose dont il faut avoir conscience, afin de pouvoir critiquer dans son entourage ces vecteurs d’exploitation animale et de destruction de la nature!

Brutalité anti-animaux et anti-humains, et le sens d’être vegan straight edge

Souvent on doit entendre le mauvais refrain comme quoi quand on aime les animaux, on aime pas les humains. Voici deux informations toutes récentes permettant d’établir que ce n’est pas du tout vrai.

La première information, ce sont les révélations concernant la corruption au sein de la Commission baleinière internationale. La seconde consiste en une analyse sur le rapport entre la violence contre les animaux et la brutalité sociale.

Le fait qu’il y ait une corruption au sein de la Commission baleinière internationale est très révélateur des mentalités esclavagistes qui règnent dans le camp des anti-animaux. En effet, ont été proposés à des représentants de différents pays de l’argent ainsi que des prostituées.

Selon le Sunday Times du 13 juin, l’Etat japonais a en effet employé ce genre de moyen : des aides d’Etat ont été fournies, ainsi que de l’argent en liquide, ont été donnés à des représentants pour qu’ils soutiennent la non interdiction de la chasse à la baleine, le tout accompagné d’invitations officielles au Japon tout frais payé, avec mise à disposition de prostituées.

Chaque jour que se tenait le congrès de la Commission baleinière internationale, le représentant de la Guinée touchait au minimum 1.000 dollars par jour, avec une voiture de service à disposition…

On ne s’étonnera pas que les représentants corrompus viennent du tiers-monde : les pays riches achètent des gens tentant de joindre les deux bouts, afin de mettre en place leur propre exploitation à l’échelle du monde.

On ne s’étonnera pas non plus que le Japon paie des « scientifiques » pour expliquer que les baleines mangeraient des poissons, et ce d’une quantité phénoménale (soit disant 6 fois plus que la pêche mondiale).

Ces mêmes « scientifiques » expliquent que les baleines meurent rapidement, alors qu’en réalité elles mettent au minimum 14 minutes, mais plutôt plusieurs heures en fonction du harponnage…

Quand on pense que seulement 5% des personnes au Japon mangent de la baleine, on voit bien que ceux qui n’aiment pas les animaux, ici les baleines, n’aiment pas les humains : ils pratiquent la corruption, et ne défendent que leurs intérêts, certainement pas ceux des Japonais « en général. »

Il est important de le dire car défendre Gaïa n’est certainement pas une question « nationale », c’est une question touchant l’humanité entière, dans son rapport avec les animaux.

Son rapport avec les animaux, qui est un rapport social.

Aux États-Unis, où la violence sociale est énorme, on s’aperçoit de plus en plus que la cruauté contre les animaux est une composante culturelle des actes barbares.

Ce qui est logique : quelqu’un de déphasé dans la société, quelqu’un de perdu socialement, a perdu tout contact avec la nature et vit avec les valeurs urbaines de concurrence.

Ainsi Jeffrey Dahmer, le « le cannibale de Milwaukee » nécrophile qui a tué 17 personnes, avait un rapport aliéné aux animaux : ils les « palpait » au lieu de les caressait, puis il disséquait les animaux morts et finalement mettait des têtes de chiens et de chats sur des piques…

Ted Bundy, le « tueur de femmes » ayant fait entre 25 et 35 victimes, regardait enfant comment son grand-père torturait des animaux…

Les victimes de la société, de sa brutalité sociale et de son aliénation par rapport à la nature, basculent dans la barbarie, et l’attitude aux animaux est très révélatrice.

C’est dans le même sens que va une étude publiée dans uns revue de psychiatrie américaine, et intitulée « Une étude sur les incendies volontaires et la cruauté animale chez les enfants : les influences familiales et les résultats sur les adolescents » (A Study of Firesetting and Animal Cruelty in Children: Family Influences and Adolescent Outcomes).

Cette étude montre que les enfants de 6 à 12 ans qui sont cruels avec les animaux basculent dans les violences volontaires – mais ici il faut bien voir que les enfants sont autant victimes que les animaux.

Brutalisés par la société, ces enfants répercutent la brutalité sur les plus faibles. En fait, le rapport aux animaux révèle le degré de culture. Plus une société est barbare, moins les animaux comptent.

Il n’est pas difficile de voir à quelle vitesse on se précipite en ce moment dans la barbarie !

Contrairement à ce que prétendent les associations pour les droits des animaux, la situation empire!

Et cela est tellement vrai qu’aux USA on est en train de le reconnaître. Dans de nombreux Etats dont l’Illinois, la loi oblige les vétérinaires à prévenir la police dans le cas où il y a des suspicions de cruauté contre les animaux.

L’État de Californie forme des officiers de police dans le même sens, afin de reconnaître… la violence pédophile.

Car là où les animaux sont victimes, les enfants le sont aussi.

Et cela est triste à dire, mais il y a ce phénomène social qu’il faut prendre en compte : ce sont souvent dans les familles déstructurées socialement qu’on trouve des animaux de compagnie.

Ceux-ci sont évidemment maltraités et leur vie est souvent un calvaire, mais il faut comprendre en quoi tout cela fait partie d’une sorte de tourbillon social, où les couches sociales les plus pauvres et les animaux vivent un enfer, où l’enfer appelle l’enfer.

Dans une étude relativement connue aux USA, portant en 1997 sur les 48 plus grands refuges pour les femmes victimes de violence domestique et pour les enfants victimes d’abus sexuel, 85% des femmes ont rapporté des cruautés sur les animaux, tout comme 63% des enfants.

Et le ¼ des femmes battues a affirmé avoir repoussé au maximum la fuite au refuge, afin de… protéger l’animal domestique.

Ceci est très lourd d’enseignement, et montre bien le sens de l’engagement vegan : pour les animaux, pour l’intégrité des enfants, pour les droits des femmes… Ce qui va de pair avec le refus des drogues, dans une morale straight edge, contre tout ce qui détruit et empêche de construire sa vie sans exploitation ni rapports d’oppression.

Michel de Montaigne, grand précurseur de la libération animale et de la libération de la Terre

Michel de Montaigne est une grande figure de l’humanisme; né en 1533, il meurt en 1592, et il nous a laissé une oeuvre très intéressante: les Essais.

Plus qu’intéressante, l’oeuvre est formidable, car les thèses de Montaigne préfigurent admirablement celles sur la libération animale et la libération de la Terre.

On a du mal à croire que Montaigne ait vraiment pu écrire cela, tellement ses positions sont radicales, d’une grande modernité, et totalement en porte-à-faux avec l’idéologie dominante.

Sa vision des animaux est ainsi marquée par un profond respect allant jusqu’au refus des hiérarchies. Dans toute son attitude, il récuse les thèses de « l’animal-machine », comme lorsqu’il dit:

« Quand je joue avec ma chatte, qui sait si je ne suis pas son passe-temps plutôt qu’elle n’est le mien ? Nous nous taquinons réciproquement. »

Mais il va plus loin: il reconnaît que les animaux sont sociaux:

« Même les animaux dénués de voix ont entre eux des systèmes d’échange de services qui nous donnent à penser qu’il existe entre eux un autre moyen de communication : leurs mouvements expriment des raisonnements et exposent des idées.

Ce n’est pas loin de ce que l’on voit chez les enfants,
qui compensent du geste la déficience de leur langage.
[Lucrèce, V, 1030]

50. Et pourquoi pas ? Nous voyons bien des muets discuter, argumenter, se raconter des histoires par signes. J’en ai vus qui étaient si adroits, si bien formés à cela, qu’en vérité, il ne leur manquait rien et se faisaient comprendre à la perfection. Les amoureux se fâchent, se réconcilient, se remercient, se donnent rendez-vous, enfin se disent toutes choses avec les yeux.

Le silence même sait prier et se faire entendre.
[Le Tasse, Aminte, acte II] »

Montaigne a donc eu la capacité d’aller au-delà des préjugés. Et il le fait parce qu’il fait partie du courant humaniste, qui affirme des valeurs de civilisation, qui veut élever le niveau culturel.

Sa pensée emprunte ainsi à l’antiquité gréco-romaine:

« Je ne prends guère de bête vivante à qui je ne redonne la clé des champs. Pythagore en achetait aux pêcheurs et aux oiseleurs pour en faire autant. »

Ce qui l’amène jusqu’à considérer que la violence contre les animaux est une base de la violence en général, ce qui vu d’aujourd’hui correspond à la critique du patriarcat (qui commence avec la domestication et la soumission des animaux):

« Je crois que c’est du sang des bêtes sauvages,
que le fer a été maculé tout d’abord.
[Ovide, Métamorphoses, XV, 106]

Un naturel sanguinaire à l’égard des bêtes témoignent d’une propension naturelle à la cruauté.

Quand on se fut habitué, à Rome, aux spectacles de mises à mort d’animaux, on en vint aux hommes et aux gladiateurs.

La Nature, je le crains, a donné à l’Homme un penchant à l’inhumanité.

Personne ne prend plaisir à voir des bêtes jouer et se caresser –  et tout le monde en prend à les voir s’entre-déchirer et se démembrer. »

Ce qui est formidable, c’est que Montaigne arrive donc à une certaine compréhension de Gaïa, parlant des animaux mais également des arbres « et même les plantes. »

Montaigne est ici d’une valeur formidable, digne des pensées qui se sont développées en Asie (jaïnisme et bouddhisme notamment, mais également certains courants musulmans mystiques):

« Qu’on ne se moque pas de la sympathie que j’ai pour elles: la théologie elle-même nous ordonne d’avoir de la mansuétude à leur égard.

Elle considère que c’est un même maître qui nous a logés dans ce palais pour être à son service, et donc que les bêtes sont, comme nous, de sa famille; elle a donc raison de nous enjoindre d’avoir envers elles du respect et de l’affection.

Si on peut discuter de tout cela, il n’en reste pas moins que nous devons un certain respect et un devoir général d’humanité, non seulement envers les animaux, qui sont vivants et ont une sensibilité, mais envers les arbres et même les plantes.

Nous devons la justice aux hommes, et la bienveillance et la douceur aux autres créatures qui peuvent les ressentir.

Il y une sorte de relation entre nous, et des obligations mutuelles.

Je ne crains pas d’avouer la tendresse due à ma nature si puérile qui fait que je ne peux guère refuser la fête que mon chien me fait, ou qu’il me réclame, même quand ce n’est pas le moment. »

Le dernier passage montre bien l’ouverture nécessaire aux animaux, la discipline qu’il y a à reconnaître l’existence des animaux en tant qu’individus: c’est indéniablement révolutionnaire.

Il remet d’ailleurs en cause clairement la domination sur les animaux, la prétention de l’humanité:

« Mais quand je rencontre, parmi les opinions les plus modérées, des raisonnements qui tendent à prouver combien nous ressemblons étroitement aux animaux, combien ils participent de ce que nous considérons comme nos plus grands privilèges, et avec quelle vraisemblance on peut les comparer à nous, certes, j’en rabats beaucoup de notre présomption, et me démets volontiers de cette royauté imaginaire qu’on nous attribue sur les autres créatures. »

Et cette conception, comme la nôtre reliant libération animale et libération de la Terre, va jusqu’à reconnaître la grandeur de « mère Nature. »

Il refuse ainsi de critiquer les Amérindiens et montre même la valeur de la reconnaissance de Gaïa. Les lignes suivantes sont en conflit total avec toute la conception française de soumission totale et complète de la nature (dont le symbole est bien entendu les « jardins la française »):

« Et pourtant la saveur et la délicatesse de divers fruits de ces contrées, qui ne sont pas cultivés, sont excellentes pour notre goût lui-même, et soutiennent la comparaison avec ceux que nous produisons.

Il n’est donc pas justifié de dire que l’art l’emporte sur notre grande et puissante mère Nature.

Nous avons tellement surchargé la beauté et la richesse de ses produits par nos inventions que nous l’avons complètement étouffée.

Et partout où elle se montre dans toute sa pureté, elle fait honte, ô combien, à nos vaines et frivoles entreprises.

Et le lierre vient mieux de lui-même
Et l’arbousier croît plus beau dans les lieux solitaires,
Et les oiseaux, sans art, ont un chant plus doux,
[Properce, I, 2, 10.] »

Ce qui l’amène, chose formidable, à reconnaître que les humains sont des animaux, ce qui est une conception révolutionnaire à son époque, alors que la religion prédomine totalement, mais même aujourd’hui!

« La manière de naître, d’engendrer, de se nourrir, d’agir, de se mouvoir, de vivre et de mourir qui est celle des animaux est si proche de la nôtre que tout ce que nous ôtons aux causes qui les animent, et que nous ajoutons à notre condition pour la placer au-dessus de la leur ne peut relever d’une vision raisonnée.

Comme règle pour notre santé, les médecins nous proposent en exemple la façon de vivre des animaux, car ce mot a été de tout temps dans la bouche du peuple :

Tenez chauds les pieds et la tête;
Au demeurant, vivez en bêtes. »

D’ailleurs, quand il critique les philosophes, qui méprisent les animaux, on voit évidemment la formidable actualité, l’énorme force de celle-ci aujourd’hui encore:

« Chrysippe était aussi méprisant que tout autre philosophe en ce qui concerne la condition des animaux. Mais il avait observé à un carrefour de trois chemins les mouvements d’un chien à la recherche de son maître égaré ou poursuivant une proie qui fuyait devant lui.

L’ayant vu essayer un chemin après l’autre et, après s’être assuré qu’aucun des deux premiers ne portait la trace de ce qu’il cherchait, s’élancer dans le troisième sans hésiter, il fut contraint de reconnaître qu’en ce chien-là s’était opéré un raisonnement du genre : « J’ai suivi mon maître jusqu’à ce carrefour, il faut nécessairement qu’il ait pris l’un de ces trois chemins; puisque ce n’est pas celui-ci, ni celui-là, il faut donc forcément qu’il soit passé par le troisième. »

Fondant sa certitude sur ce raisonnement, le chien n’a plus besoin alors de son flair pour le troisième chemin et n’y fait plus d’enquête, il s’en remet à la raison.

Cette attitude proprement dialecticienne, cet usage de propositions divisées puis reconstruites, l’énumération complète des termes suffisant à entraîner la conclusion – ne vaut-il pas mieux dire que le chien tire cela de lui-même plutôt que de Georges de Trébizonde ? »

Et Montaigne ne fait pas les choses à moitié, reconnaissant le caractère formidable des animaux:

« Nous voyons bien dans la plupart de leurs ouvrages à quel point les animaux sont supérieurs à nous, et combien notre artisanat peine à les imiter.

Nous pouvons toutefois observer dans nos travaux, même les plus grossiers, les facultés que nous y employons, et comment notre âme s’y implique de toutes ses forces. Pourquoi en serait-il autrement chez eux ?

Pourquoi attribuer à je ne sais quelle disposition naturelle et servile les ouvrages qui surpassent tout ce que nous parvenons à faire, que ce soit naturellement ou par le moyen de l’art?

En cela d’ailleurs, nous leur reconnaissons un très grand avantage sur nous, puisque la nature, avec une douceur maternelle, les accompagne et les guide, comme si elle les prenait par la main, dans toutes les actions et les agréments de leur vie, alors qu’elle nous abandonne, nous, au hasard et au destin, contraints que nous sommes alors d’inventer les choses nécessaires à notre conservation ;
et qu’elle nous refuse parfois les moyens de parvenir par quelque organisation et effort de l’esprit que ce soit, à l’habileté naturelle qui est celle des animaux : leur stupidité de bêtes surpasse très facilement pour toutes les choses utiles, tout ce dont est capable notre divine intelligence. »

Nous avons vu qu’il considérait que les animaux pouvaient parler, à leur manière.

Thèse vraie et tellement en avance sur son temps, alors qu’aujourd’hui même cela est encore très largement incompris, en raison de la domination de la thèse de l’animal-machine!

Voici une belle citation du (non moins formidable) Lucrèce, que Montaigne cite:

« Les divers oiseaux ont des chants différents
Selon le temps et certains font varier leur chant rauque
en fonction de l’atmosphère…
[Lucrèce, V, vv. 1078, 1081 et 1083-84] »

Et cela laisse présager le futur, car Montaigne annonce inévitablement l’avenir: une nouvelle communication existera… Avec les animaux!

Telle est la quête de l’humanité: comprendre la nature de sa planète.

Impossible de ne pas voir ici que les fantasmes modernes d’une autre planète habitable, d’une communication extra-terrestre, ne sont que le reflet de notre besoin essentiel de comprendre les animaux, Gaïa dans son ensemble!

« Pourquoi les animaux ne se parleraient-ils pas entre eux, puisqu’ils nous parlent, et que nous leur parlons? De combien de façons parlons-nous à nos chiens! Et ils nous répondent !… Nous conversons avec eux en usant d’un autre langage et d’autres mots que nous ne le faisons pour les oiseaux, les pourceaux, les boeufs, les chevaux : nous changeons d’idiome selon les espèces auxquelles nous nous adressons.

« Ainsi, au milieu de leur noir bataillon
Les fourmis s’abordent-elles
S’enquérant peut-être de leur route et de leur butin.
[Dante, Purgatoire, XXVI] »

Montaigne est un formidable précurseur des thèses que défend La Terre d’abord!

Prosélytisme du lobby chasse envers les enfants

Voici un communiqué de l’ASPAS, Association pour la Protection des Animaux Sauvages, suite à un accord gouvernemental avec la Fédération nationale de la chasse, dans le sinistre but de parfaire l’éducation des enfants…

Un partenariat signé le 4 mars entre Luc Chatel, Jean-Louis Borloo et la Fédération nationale de la chasse permet aux amateurs d’armes d’entrer dans les écoles pour donner des leçons de « développement durable » aux enfants. L’ASPAS et de nombreux enseignants réclament l’arrêt immédiat de ces opérations illégales, immorales et inutiles. C’est ça, le Grenelle de l’Environnement ?

Chaque jour, les élèves du collège d’Agnetz, dans l’Oise, voient ces affiches mensongères situées à quelques centaines de mètres de leur établissement. Non, la chasse n’est un atout ni pour l’écologie ni pour l’éducation. En fait, il s’agit pour les chasseurs de faire la promotion d’une prétendument nécessaire « gestion de la nature » (entendez : la chasse, bien sûr) pour racoler de nouvelles recrues. Pourtant, le prosélytisme est illégal.

La propagande du lobby des chasseurs dans les écoles s’est officialisée il y a vingt ans avec les états Généraux de la chasse en 1990, puis en 1993 avec le colloque « Animations en milieu scolaire »*. Depuis cette époque l’ASPAS, soutenue par de nombreux enseignants, n’a eu de cesse de freiner ces grandes ambitions, et au fil des années ces opérations s’étaient essoufflées. Mais le 13 et le 14 octobre, deux articles de journaux ont remis le feu aux poudres. Dans l’un, une animatrice embauchée par une fédération des chasseurs a cherché à convaincre qu’il est « utile de tirer sur les animaux ; l’autre décrit un cours de SVT particulier : « montrer la chasse et en donner le goût à des enfants ». Une cinquantaine d’associations, dont l’ASPAS, co-signe alors une lettre ouverte adressée au ministre de l’éducation Nationale Luc Chatel : « Stop aux interventions des chasseurs en milieu scolaire ! ». On connaît la suite.

Les chasseurs n’ont aucune légitimité pédagogique. Leur passion de la chasse et leur concurrence avec les prédateurs naturels leur donne une vision déformée de la faune, qu’ils partagent entre « nuisibles » et « gibier ». Les chasseurs ne sont pas des biologistes et n’ont pas de compétence pour décrire un écosystème dans sa globalité. Leur opposition aux mesures de protection de la biodiversité, leur opposition aux ours et aux loups, leur absence dans les combats pour la défense des animaux sauvages, leurs contentieux quasi quotidiens contre les protecteurs ne rend pas leur discours « écologique » crédible.

Les chasseurs à l’école ?
Oui, mais en tant qu’élèves !

* Pour l’historique de la propagande des chasseurs en milieu scolaire, voir l’article « Les enfants pour cible » dans le magazine Goupil n°100, disponible sur demande par courrier ou par mail accueil@aspas-nature.org

La propagande du Centre d’information des viandes

Le « Centre d’information des viandes » (CIV) est une association loi 1901. Du moins sur le papier… En pratique, il s’agit d’un lobby de l’industrie de la viande, qui intervient dans les écoles, les collèges, les lycées, distribue sa propagande dans les hôpitaux, collaboration avec « L’Actu » (journal quotidien pour les adolescents, etc.).

Le CIV présente d’ailleurs ainsi ses activités: « édition de documents, actions de proximité, animations ludo-pédagogiques, organisation de conférences, participation à des salons, campagnes presse d’information, site Internet, service de presse, photothèque et vidéothèque. »

Cette « association » a de larges moyens et peut organiser des jeux concours, des promotions de la « viande » par l’intermédiaire de sites internet destinés à la jeunesse, avec des jeux, comme par exemple « Planet’Viandz. »

L’objectif idéologique du CIV: hors de la « viande » point de salut. L’être humain a besoin de protéines et bien entendu celles-ci ne pourraient venir que des cadavres d’animaux. Les brochures prétendent expliquer ce qui est bon pour la santé, de manière objective; il est toujours caché qu’il s’agit en fait du point de vue de l’industrie.

Les présentations sont toujours « neutres », en apparence. Ainsi concernant le fer, la « viande » est présentée comme le meilleur choix, le seul réellement valable, le plus sain, etc.

Cela veut dire aussi que le CIV prend les devants. Il n’attend pas la critique vegan, il l’a devance, il réagit de manière préventive, en en parlant en plein milieu d’une apologie de la « viande ».

Il présente donc le végétalisme, mais de manière à faire peur: les personnes végétaliennes sont forcément malades, carencées: elles doivent voir un médecin, prendre des compléments, car leur régime ne saurait être « naturel. »

De manière impressionnante dans l’hypocrisie, le CIV va jusqu’à expliquer que manger de la « viande » est une bonne chose car… on mange également des légumes ou des féculents avec! Même les légumes et les féculents deviennent un prétexte pour manger de la « viande »!

Dans ce genre de prise d’otage, pas étonnant de voir une brochure spécifique pour les femmes enceintes…

…Sans parler d’une brochure sur l’alimentation des enfants, avec bien entendu des enfants blonds aux yeux bleus…

Enfants qu’il s’agit naturellement d’éduquer, en les amenant chez le boucher par exemple…

…Ou bien en maquillant la « viande », comme il se doit, pour oublier l’animal assassiné!

Ce n’est pas un hasard si le CIV fait une brochure spécifique pour les femmes. Il ne s’agit pas tant de viser la « ménagère », mais d’influencer une partie de la population beaucoup plus ouverte à la compassion que les hommes qui sont eux bien souvent happés par le patriarcat.

Les animaux représentés perdent donc toute forme réelle…

Sauf bien entendu dans la brochure sur… le bien-être animal, qui est lénifiante au possible. Et qui prouve que la propagande du CIV est très bien compartimentée. Le discours s’adapte de manière opportuniste selon l’effet visé. En parlant du « bien-être animal » on montre des animaux réels, quand on parle de viande on ne les présente plus que comme formes fantomatiques.

Qu’en conclure? Que le CIV existe parce que l’industrie a peur. Elle a peur de la force de la compassion, de la formidable dimension du véganisme, en terme de valeurs, de mentalités, d’attitudes, de comportements. Le CIV est la démonstration que l’industrie connaît son identité criminelle… et qu’elle sait qu’elle est condamnée à disparaître!