« Vandalisme » à Trausse

Voici une information très intéressante du Midi Libre : l’article parle de ce qui est pour ce journal un « fait divers » qui s’est passé à Trausse, un village d’un peu plus de 400 habitants, dans l’Aude (situé dans le Languedoc Roussillon).

Le fait divers en question consiste en la destruction d’une cabane de chasseur comme on peut en trouver en forêt ; l’action n’a pas été signé et il n’y a pas eu de communiqué mais le site Bite Back mentionne tout de même cette action.

Mais plus que la critique de l’action faite par le journal, ce qui est ici vraiment très intéressant est la démarche de l’article. Le ton est badin, jouant sur la corde du copinage, de la tradition bon enfant.

A lire cet article, on croirait que les chasseurs sont des bisounours, que leur regroupement est une communauté parfaite devant servir de modèle de société.

Voici donc cet édifiant article du 19 août 2010:

FAITS DIVERS Trausse : acte de vandalisme à « l’Oustal des casaïres »

Quelle ne fut pas la consternation des chasseurs, en arrivant pour préparer leur cabane, de la voir vandalisée avec des graffitis précisant « Tu ne tueras point ». Même les non chasseurs sont atterrés et scandalisés.

On peut être « anti » sans pour cela tout saccager pour le plaisir de détruire. Edifié sur un morceau de terrain communal, ce refuge était ouvert à tous ; de nombreux randonneurs s’y arrêtaient et mangeaient sur les tables en granit.

Les vitres, la gazinière, le petit frigo, tout a été cassé, le récipient qui récupérait les eaux de pluie a été détruit. Cet acte, qui s’est déroulé en pleine nuit, est d’une bêtise sans pareil. Cette petite équipe de chasseurs comprend une quinzaine de bons copains qui chasse le matin, qui entretient les chemins, débroussaille et prend soin du cheptel.

Le (ou les) bon(s) samaritain(s) auteur(s) des dégâts aura oublié un des commandements : « Tu ne convoiteras pas le bien du voisin et surtout tu ne détruiras pas le bien de la communauté ».

Il va de soi que la pirouette de citer un des commandements pour contrer l’autre commandement est ridicule, mais malheureusement elle est correcte : la bible n’est nullement favorable aux animaux et le « Tu ne tuera pas » n’est aucunement censé être généralisé à tous les êtres vivants.

Il ne s’agit pas ici de critiquer pour critiquer, mais de faire la distinction entre la culture et la morale.

Par exemple, le récipient récupérant l’eau de pluie a été détruit: moralement on comprend, c’est l’idée de saboter le local des chasseurs. Mais inversement, culturellement, ce n’est pas participer à l’écologie, c’est contre-productif car cela va à contre-courant des exigences que l’on doit avoir: ne pas gâcher l’eau.

De même, citer un des commandements fait à Moïse, ou soit disant fait plus exactement à une personne qui se serait appelée Moïse, c’est en appeler à la morale. Une sorte de morale universelle, mais également abstraite.

Or, pour nous à LTD la morale n’est pas derrière nous, ou abstraite ou suspendue on ne sait trop où (voire dans les facultés, dans les cerveaux des professeurs membres honorables des institutions).

Non, la morale est devant nous… en tant que produit de la culture végane se généralisant, repoussant les valeurs d’exploitation et d’oppression. Une culture végane produite et vécue par des gens réels, vivant de manière végane au quotidien, sur le long terme, généralisant leurs expériences… et faisant vivre la libération animale.

Il faut arrêter les postures morales, qui n’ont pas prise sur la réalité matérielle. Il faut que la morale ait comme socle la culture, qui donne naissance à des pratiques bouleversant la réalité!

Critique de Gary Francione par Steven Best (et proposition d’un abolitionnisme radical pratiquant les alliances à l’extrême-gauche)

Nous n’aimons pas les discours universitaires, élitistes, le plus souvent juridiques ou philosophiques de type incompréhensible, illisibles, etc. Le droit et la philosophie sont des formes de pensée typiquement « bourges » et nous ne voyons aucun intérêt à perdre son temps à cela, à moins bien sûr de vouloir faire carrière…

Ce n’est pas propre à la France, aux USA on a le même phénomène, dont voici un exemple assez « bizarre »: Steven Best est un activiste américain, qui tente de mettre en avant ses idées de manière « formelle », par exemple avec un site où il se présente comme un universitaire, un philosophe, raconte qu’il a écrit des bouquins, met sa photo, etc.

Il utilise également des termes universitaires comme par exemple « post-modernisme » bref sa démarche est tout le contraire de la nôtre, qui considérons qu’il faut mettre en avant Gaïa et les animaux.

Mais, et c’est un phénomène propre aux USA, Steven Best met en avant des positions « radicales. »

Son dernier document a un titre assez éloquent: « Manifesto for Radical Abolitionism: Total Liberation By Any Means Necessary » (Manifeste pour un abolitionnisme radical: la libération totale par tous les moyens nécessaires).

Le document est disponible en anglais notamment ici. Pour les non anglophones, voici un petit résumé de sa critique, qui est un texte à charge contre le philosophe Gary Francione, qu’il accuse d’être devenu la principale figure du réformisme pour les animaux, ayant en quelque sorte pris la place qu’avait PeTA auparavant.

Pour les personnes intéressées par Francione, il y a ici une interview que nous avons fait de lui en août 2005. Et en France, la pensée de Francione est mise en avant par l’association Vegan.fr.

L’idée de base de Best est la suivante:

« Nous ne pouvons stopper la guerre spéciste et des entreprises contre les animaux non humains et la planète avec seulement des blogs, des tracts, des tables de presse et des livres de recette de cuisine.

Le capitalisme est destructeur de manière inhérente, et le changement ne viendra jamais seulement par l’éducation et la persuasion, ni sans un mouvement plus puissant que les agents et les institutions d’une destruction omnicide [génocide, écocide…]. »

Ce qui signifie en clair que Best reproche à Francione son pacifisme et son refus d’assumer la libération de la Terre; la figure de Francione lui est insupportable en raison du refus catégorique et absolu de celui-ci de reconnaître la moindre valeur aux actions violentes.

Poussant le raisonnement jusqu’au bout, Best va jusqu’à accuser Francione d’être une sorte de nouveau gourou (pour les personnes lisant directement en anglais, il est à remarquer qu’il utilise le terme de « Franciombes » pour désigner ceux voyant justement Francione comme une sorte de « gourou »), gourou promettant des résultats fabuleux pour le véganisme, sans avoir aucune preuve pour cela.

La ligne de Francione se résume, selon Best, à un simple « go vegan » qui n’aurait finalement de la valeur que pour les bourgeois blancs des USA, au lieu de focaliser son attention sur les « peuples de couleur, les familles ouvrières, les pauvres, ou la Chine et l’Inde. »

Best explique ainsi:

« Francione renforce par là les lamentables stigmates élitistes, de classes sociales et racistes allant avec les activistes pour les animaux non humains depuis le début de la « protection des animaux » au début du 19ème siècle, et il maintient l’isolement du véganisme et des droits des animaux des mouvements progressistes et du courant social principal.

Incapable d’articuler une théorie structurelle de l’oppression, de l’exploitation, et de l’hégémonie idéologique, et empêtré dans les dualismes occidentaux et la construction de fausses oppositions comme entre production et consommation, individu et société, et psychologie et institutions, Francione disculpe la machinerie globale et logique du capitalisme, faisant en sorte que le poids entier du blâme et de la responsabilité repose sur les consommateurs individuels. »

Best voit donc Francione comme une sorte de libéral, un libéral progressiste, mais un libéral quand même. Les partisans de Francione sont considérés comme déconnectés de la réalité sociale, au point de ne pas voir qu’avec l’évolution actuelle, pour une personne devenant vegan, des milliers d’autres découvrent la viande dans les pays comme l’Inde ou l’Afrique du Sud.

Best propose donc la ligne suivante pour les personnes véganes:

« Nous appuyons la forme d’abolition qui:

(1) défend l’utilisation de tactiques d’action direct de grande pression, notamment les raids illégaux, les sauvetages et les attaques dans des buts de sabotage;

(2) voit le capitalisme comme étant de manière inhérente un système irrationnel, exploiteur et destructeur, et qui voit l’Etat comme un outil corrompu dont la fonction est de promouvoir les intérêts économiques et militaires du système de domination des grandes entreprises et qui fait de son agenda la répression de l’opposition;

(3) qui a une compréhension large et critique de comment les différentes formes d’oppression sont reliées entre elles, voyant comme des projets inséparables la libération de l’animal humain, la libération de l’animal non humain et la libération de la Terre;

et ainsi

(4) qui fait la promotion de politiques d’alliance anti-capitaliste avec d’autres mouvements de droits, pour la justice et la libération, qui partagent le même but de démanteler tous les systèmes de domination hiérarchique et de reconstruction des sociétés par des processus décentralisés et démocratiques. »

C’est très certainement une proposition intéressante, et la seule praticable, car la seule réaliste. Il en va de la construction d’une nouvelle identité, d’une nouvelle culture, rien à voir avec les projets réformistes comme ceux en France de PeTA et de Droits Des Animaux.