Des dents de la mer à l'invasion des rats : la propagande pour la domination

Dans le dernier Canard enchaîné du mois de juin 2005 on peut lire un entrefilet symptômatique de la logique de la société de consommation :

Ca laisse rongeur

Patron de la fiction sur TF1, Takis Candilis prépare l'arrivée de téléfilms-catastrophes ("Le Point", 23/6): "Imaginez des millions de rats qui envahissent Paris après une grève des éboueurs...

Pour le besoin de ce tournage, nous élevons en ce moment 450 rats à Fontainebleau.

Des gros rats de la taille de petits chiens."

Il va faire fuire la ménagère de moins de 50 ans!

Séparer abstraitement les humains des animaux, voilà l'idéologie de ces films. Dans une vision très religieuse, les animaux seraient "sauvages", auraient des comportements "absurdes", et seraient naturellement "agressifs".





Il est intéressant de voir que les animaux qui sont le plus victimes de cet ostracisme sont des animaux concurrencant la gente masculine dans la "virilité". King Kong est le symbole du grand singe plus costaud que les humains masculins et on est en plein fantasme de se faire "voler" "sa" femme par "plus viril que soi".



Le requin est le symbole de la force brute, de la guerre; le rat lui est le symbole de la sensualité et de la sexualité, il glisse partout, il se reproduit. Il est d'ailleurs invisible et cela sera prétexte aux nazis pour assimiler les personnes d'origine juive aux rats, propagande encore actuelle. On retrouve également l'assimilation fantasmatique classique aux pieuvres envahissantes, vampires suceurs de sang, etc.



Et naturellement aux araignées, qui forment un grand classique. De tous les animaux, les insectes sont la plupart du temps considérés comme les plus "immondes" (comme dans Indiana Jones n°2 par exemple, dans le premier on aura eu les serpents, dans le troisième les rats). Et les araignées sont les pires car elles piquent avec leur dard...



Il est intéressant de voir d'ailleurs que les films montrent les animaux comme des prédateurs pervers cherchant à s'approprier des femmes. De la même manière que les nazis accusaient les personnes d'origine juive de vouloir "s'approprier" les femmes "aryennes", il est assez symptômatique de voir les affiches de King Kong ou des Dents de la mer.



Même les affiches des oiseaux de Hitchcock reprennent cette tonalité de l'animal comme concurrent des hommes par rapport à la posession des femmes.



La domination masculine sur les femmes va de pair avec la domination masculine sur le monde. Même les piranhas, poissons ou poissons volants, sont de la partie !



Les animaux sont prétextes au courage, à l'ingénioisité d'hommes brillants, face à la "brutalité" animale, comme nous le rappelle Moby Dick !



Même les orques prennent le nom de "baleines tueuses" (alors qu'il s'agit d'un delphinidé et non d'une baleine) pour les besoins du culte du "sauvage" que l'homme civilisé parvient (ou pas) à dominer. Il est évident que les animaux représentent au fond quelque chose qu'il faut rejeter, un côté "sauvage", qu'il soit animal ou humain lorsqu'il y a un contact non conflictuel avec la nature. Les cowboys butent les indiens, les humains butent les animaux, tout est dans l'ordre.



Et quand on ne trouve pas d'animaux assez monstrueux, on les invente. On a ainsi Godzilla le monstre issu des mutations ou encore Alien. Ce qu'il a d'intéressant avec le film Godzilla et Orca c'est qu'il y a soi disant une morale éthique derrière. Godzilla est juste issu des expériences nucléaires humaines dans le pacifique, et Orca se venge du capitaine ayant tué son enfant. Mais ce sont des animaux et ils restent monstrueux.



En fait même "humanisé" les animaux restent inférieurs. C'est clairement le cas dans La planète des singes ou dans Star Wars, avec par exemple Chewbacca ou les Ewoks.