Straight Edge:
un mouvement issu du punk hardcore


Le punk rock n'est pas une musique tombée du ciel. Il provient d'expérimentations musicales faites aux USA durant les années 1970 (STOOGES, MC5, Television, New York Dolls, mais aussi le Velvet Underground qui est le point de départ) ou en Allemagne (la scène dite Krautrock : Can, Faust). Le punk est la volonté de faire correspondre la musique à la rage.
Les instruments de musique sont utilisés brutalement, il n'y a pas de solos, le son est agressif et saturé, la sophistication est refusée.


Cette culture musicale, qui passe par le club de New York le CBGB ouvert en 1973, aboutira aux USA à la naissance d'un groupe de punk-rock qui marquera son époque : les RAMONES.
Le groupe joue comme qui dirait la même chanson, une sorte de punk-rock rapide, mélodique et accrocheur, avec des textes simples, ni engagés ni vraiment destroy, parfois provocateurs.


Mais c'est en Angleterre que naît le punk, avec notamment les SEX PISTOLS, lançant tout le mouvement punk en 1976-1977. Un album plutôt punk-rock avec une énergie débordante, des titres rageurs (Anarchy in the UK) et un texte allant avec (God save the Queen / Her fascist Regime), une attitude destroy (Sid Vicious s'automutilant sur scène).


L'Anarchy Tour des Sex pistols en 1976 se fait avec le second groupe phare du punk: THE CLASH. A l'opposé des Sex Pistols et de leur rage nihiliste et du trip No Future, les Clash ont une démarche plus socialement engagée, assumant clairement sa filiation historique avec le rock, pour mieux la dépasser et aller vers le reggae, le dub....


Mais dans leur majorité, les groupes punks ont plus une esthétique de la révolte que des revendications sociales précises; le punk est prétexte à un délire rock'n roll esthétisant comme pour les DAMNED, à une musique froide et mélancolique (par exemple Joy Division ou bien The Cure) ou bien à une poésie gothique (Siouxsie and the Banshees).


Le punk continue donc sans voir vraiment de contenu à part la revendication de la révolte; le groupe le plus connu dans cette option punk destroy est THE EXPLOITED, groupe assumant paradoxalement une continuité de 1979 jusqu'à la fin des années 2000.
A l'origine du slogan "Punk's not dead" et d'un album emblématique du punk "Troops of tomorrow" (1982), Exploited est le symbole du punk UK 82, d'un punk destructeur, esthétisant, (GBH, Chaos UK, Disorder, Blitz, Vice Squad...) et parfois ouvertement nihiliste.


Les DEAD KENNEDY'S forment alors l'un des groupes marquants refusant cette évolution du punk. Originaires de Californie, dont le chanteur Jello Biafra est aujourd'hui une figure de la scène alternative contestataire, les Dead Kennedy's ont systématisé l'esprit engagé, critique non seulement vis-à-vis de leur pays ("California über alles") que sur la scène punk elle-même ("Nazi Punks Fuck Off!").


Toujours en Californie, on a le groupe BLACK FLAG de Los Angeles, avec son chanteur Henry Rollins (ex chanteur de State Of Alert - S.O.A.) qui continuera par la suite en solo.
Là aussi on a la tentative d'un punk agressif mais constructif, cherchant plus à critiquer et construire qu'à se complaire dans la destruction.


A l'opposé de cette version engagée et critique du punk se cristallise en Angleterre le phénomène skinhead, qui reprend l'esthétique des skinheads reggae des années 1960 et prône une musique basique, lourde et agressive: la musique oï, parfois appelée street punk (4-skins, Cockney Rejects, Cocksparrer, Angelic Upstarts, Business...).
Le tube de SHAM 69, "If the Kids are United", synthétise tout l'esprit non critique du mouvement skinhead marqué de plus en plus par la violence et largement gangrenée par l'extrême-droite.


Sur la côté Est des USA naît alors une musique punk devenue hardcore: le tempo est accéléré, les chansons sont très courtes, le texte refuse l'autodestruction et prône un regard critique sur soi-même, de manière plus introvertie que sur la côte Ouest des USA.
On trouve alors des groupes comme les Bad Brains, les TEEN IDLES, SSD, Minor Threat, 7 seconds...


Le mouvement straight edge est directement issue de la scène de la côte est des USA; pendant longtemps la musique hardcore de type "straight edge" a été assimilé à ce son particulier, notamment par l'influence essentielle du groupe YOUTH OF TODAY, qui ajoute d'ailleurs le végétarisme à la culture straight edge, ainsi que l'esprit "Youth crew" ("équipe de jeunes"), c'est-à-dire un esprit résolument tourné vers l'optisime, d'où parfois le terme de posi-core ("positive hardcore").
C'est la vague de Hardcore culminant en 1988, avec des groupes comme Bold, Gorilla Biscuits, Slapshot, Judge, Chain of Strength... Puis Ten Yard Fight, Bane, Floorpunch, Strife...


La ville de New York est elle marquée par un hardcore beaucoup plus brutal, à l'esprit tourné vers l'affrontement, l'esprit de survie; les groupes les plus connus sont Biohazard, Agnostic Front, SICK OF IT ALL, 25 Ta Life...


La ville d'Umea, au nord de la Suède, devient, dans la foulée de la vague straight edge '88, l'un des bastions de la scène straight edge, avec des groupes comme Refused, THE FINAL EXIT, les Doughnuts...
Le mouvement straight edge va avoir une influence énorme sur la scène straight edge, de par son orientation vegan, et de par son côté militant: c'est la naissance du mouvement vegan straight edge en Europe.


Le groupe des années 1990 EARTH CRISIS va jouer un rôle similaire à celui de Refused, mais pour les USA. En étant l'un des premiers groupes de hardcore à s'ouvrir au métal, le groupe pave la voie au metalcore.
Et les textes du groupe sont ouvertement orientés vers le militantisme vegan straight edge: c'est le début d'une nouvelle identité, la scène vegan straight edge s'émancipant de la scène hardcore traditionnelle, et la scène straight edge adoptant dans sa très grande majorité le véganisme.


Apparaît alors une nouvelle génération de groupes vegan straight edge, tournés pour certains vers l'esprit "old school" c'est-à-dire '88 (GOOD CLEAN FUN, Vitamin X...) ou bien passant ouvertement dans le metalcore (Maroon, Deadlock, Purification...).


Existe, dans une version punk destroy mais engagée, la scène crust ou anarcho-punk (Choking Victim, CRASS, Conflict, Oi Polloï, Subhumans, Propagandhi...), plus ou moins ouverte au son et l'esthétique D-Beat (Discharge, Varukers, Totalitär...), plus ou moins sympathisante avec le véganisme (mais pas avec l'attitude straight edge).


Aujourd'hui, la scène vegan straight edge s'est totalement internatonalisée, et si sur le plan musical l'orientation est plutôt metalcore (Path of Resistance, LINHA DE FRENTE, Confronto, Nueva Etica...), il existe également désormais des groupes de hip hop (Deadprez, Goodfellas...) ou d'autres genres musicaux.