“Les yeux fixés sur les profondeurs de l’enfer maintenant je sais / Ce qu’est ma place dans ce monde / Car la justice ne sera obtenue que / Si je me jette dans la ligne de front”
Il y a énormément de choses qui sont mises sur la table par la pandémie et de ce fait il n’y a jamais eu autant à faire pour les amis des animaux, tant sur le plan pratique que sur celui de la réflexion.
Et il y a un constat absolument évident avant toute chose. Oui, il aurait mieux valu que l’humanité écoute l’ALF des années 1970-1990 et qu’il soit mis un terme à l’expérimentation sur les animaux, à l’utilisation généralisée des animaux pour les différentes industries dont l’agro-alimentaire. Oui, il aurait mieux valu que l’humanité écoute l’ELF des années 1990 et qu’elle cesse immédiatement la destruction des environnements sauvages.
Le Britannique Barry Horne est mort lors de sa grève de la faim en novembre 2001 dans l’indifférence de l’opinion publique internationale – vingt après il apparaît comme quelqu’un précurseur de la nécessaire bataille pour la compassion.
Le choix de la confrontation choisie alors reflétait l’exigence d’une époque : il portait les valeurs qui auraient pu permettre à l’humanité de ne pas se retrouver dans la situation où elle est aujourd’hui. La pandémie ne se serait pas produite si l’humanité ne s’était pas précipitée dans une démarche qui relève de l’élan destructeur pour l’ensemble de la planète.
Nous pensons donc, encore plus qu’avant, que tout a été dit déjà au début des années 1990 en ce qui concerne la question du rapport aux animaux et à la Nature en général. Oui, c’est bien d’une guerre dont il s’agissait et dont il s’agit.
C’est tellement vrai que même le repli, la retraite, le désengagement… avaient davantage de sens que la participation à une logique infernale. Il y a bien plus de dignité dans le Krishnacore des années 1990, ces gens alternatifs de la culture punk hardcore se tournant vers Krishna, comme les groupes 108 et Shelter, que dans tous ceux qui ont accepté comme une fatalité le triomphe de l’indifférence à l’égard de la misère – que celle-ci soit humaine ou animale.
Nous n’appartenons malheureusement pas à ces importantes années 1990 : nous faisons partie d’une génération formée au véganisme au début des années 2000. Nous pensions alors dans tous les pays que nous consistions la deuxième étape du mouvement : en réalité, nous étions les restes de la première vague.
Nous pensions que tout irait de l’avant : tout n’a cessé de reculer.
Les années 2010-2020 ont été marquées par l’apparition du véganisme à l’échelle du pays, là où c’était auparavant une démarche isolée, entièrement marginale, portée par des milieux uniquement alternatifs, que ce soit dans gens post-hippie ou dans la scène punk / hardcore. Le capitalisme « vegan » s’est massivement développé, les gens se définissant comme « militants » n’avaient plus rien à voir avec un quelconque esprit alternatif.
Fallait-il s’adapter, se corrompre, ou maintenir la flamme ?
Avant, assumer le véganisme, c’était assumer une marginalité de fait, à une époque où le mot n’était même pas connu de la société. Les gens qui ont fait le choix du véganisme dans les années 1990 subissaient une pression énorme, leur mérite n’en est que plus grand. C’est également vrai encore au tout début des années 2000 et nous saluons ce formidable combat mené.
Après, disons au fur et à mesure de la décennie 2010, adopter la pratique du véganisme, c’était de plus en plus simplement faire un choix de consommation, avec une prétention morale, mais bien souvent individuelle. Ce n’était plus une vision du monde, simplement un aspect considéré comme essentiel, mais plus relié à aucune culture alternative.
Nous n’avons bien entendu rien contre le nouveau et il faut bien évoluer. Mais ce que nous avons vu, c’est une nouvelle génération de personnes égocentriques, réduisant leur véganisme à une question individuelle. Cette démarche refusant toute dimension collective alternative est même allée avec la démarche générale de faire comme si l’ALF n’avait pas existé, comme si le véganisme serait né dans les années 2010, à partir de quelques obscurs intellectuels – des professeurs d’universités américaines – ayant écrit tel ou tel ouvrage.
C’est très clairement une tentative de liquidation de l’histoire du véganisme et de la libération animale. Et ce terme de liquidation, nous ne le choisissons pas par hasard.
Depuis 2008 et l’ouverture du site La Terre dabord ! (ou depuis le site Vegan Revolution en 2004), nous avons vu beaucoup de groupes et de structures se monter et disparaître, des gens s’impliquer et disparaître.
Nous avons vu beaucoup de gens prétendent à des choses très radicales, en contournant soigneusement la question de l’ALF et se contentant de rechercher finalement des gloires éphémères au moyen de l’éclat des flashs des photos ou la lumière des caméras.
Et à côté de cela, nous avons vu et rencontré des gens, relevant des couches populaires, très sympathiques s’impliquant, mettant la main à la pâte, aidant concrètement les animaux… mais strictement incapable d’acquérir des notions, des principes « théoriques » et courant derrière n’importe quelle initiative.
Nous ne savons pas si la pandémie va changer cette situation où, pour résumer, des gens opportunistes ont récupéré le véganisme pour mener une carrière médiatique ou pseudo rebelle. Une chose est certaine en tout cas : l’antispécisme s’est montré comme totalement vain avec sa critique d’un « spécisme » imaginaire et des structures comme L214 ont perdu toute crédibilité.
Il apparaît comme de plus en plus clair, pour de plus en plus de gens, que c’est tout ou rien, que soit l’humanité bascule dans le véganisme, soit c’est la catastrophe.
La pandémie montre très bien que le rapport à la Nature, tel qu’il existe, n’est plus tenable. L’humanité doit reculer, elle doit prendre une place constructive dans le système-Terre.
En même temps, l’écrasante majorité des gens maintient son refus de rompre avec le passé et considère encore qu’il suffit d’accompagner un hypothétique changement pour améliorer les choses. Le mouvement autour de Greta Thunberg est un exemple de cette hypocrisie « accompagnatrice ».
Il ne faut pas se leurrer : les gens ont leur confort. La rupture, pour qu’elle ait lieu, exige un déclic, une grande détermination, un engagement. Beaucoup de gens, prêts à faire le saut ou même l’ayant déjà fait, préfèrent se tourner vers une petite vie à l’écart, essayant d’aider de-ci de-là, en sachant pertinemment que c’est totalement insuffisant et que ce n’est pas de cela dont il s’agit.
La culture vegan straight edge est pour nous une clef essentielle pour avancer, parce qu’elle répond justement aux exigences de notre époque en exprimant, au début des années 1990, un grand sens de la rupture exactement sur les points essentiels en ce qui concerne les animaux et la Nature.
Nous ne disons pas qu’il n’y a pas d’autres questions qui se posent. Cependant, pour disposer d’une base personnelle adéquate dans la vie, nous pensons qu’il est fondamental de ne pas utiliser de produits d’origine animale, de ne pas consommer de drogues ni d’alcool, de pas avoir de rapport sexuel en-dehors de la perspective du couple.
C’est ainsi qu’on peut être authentique et avoir la base pour réellement construire sa personnalité, sans être contaminé par une société adepte de l’hypocrisie, de l’indifférence, de la fuite en avant.
Nous ne disons pas que cela suffit, mais c’est un préalable.
Et ce préalable implique, pour l’aspect positif, de se tourner vers les animaux et d’ailleurs les êtres vivants en général, de considérer la Nature comme un ensemble qu’il s’agit de défendre. Le mot d’ordre pour le 21e siècle doit être La Terre d’abord ! Et il va s’affirmer au fur et à mesure de la douloureuse « digestion » de la pandémie par l’humanité.
Le premier janvier 2020, il y a eu la fusion de l’Agence française pour la biodiversité et de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, pour former l’Office français de la biodiversité. Emmanuel Macron a tenu le 13 février 2020 un discours d’une heure pour en présenter les contours, comme aboutissement d’un « Conseil de défense écologique » s’étant réuni trois fois depuis mai 2019.
Emmanuel Macron n’a
toutefois pas tenu qu’un seul discours le 13 février 2020. Il en a
fait un autre « sur la biodiversité et la protection du Mont
Blanc », qui a duré une petite demi-heure.
Regardons d’abord
ce qu’a dit Emmanuel Macron « à l’occasion du lancement de
l’Office français de la biodiversité ». Ou regardons plutôt
ce qu’il n’y a pas. Il y a en effet quelque chose de tout à fait
significatif. Le mot animal, au singulier ou au pluriel, ne revient
qu’une seule fois, alors que le mot « espèce » revient
12 fois.
On dira, c’est logique puisqu’on parle de « biodiversité »
et pas des animaux ; Emmanuel Macron n’est pas en faveur du
véganisme et de l’amour des animaux. Il veut préserver les
espèces comme on protège un coffre-fort. C’est vrai.
Toutefois, on trouve le réchauffement
climatique tout autant mentionné que les espèces. C’est
même son axe central. Toute l’orientation de son discours va dans
le sens du « soutenable ». Et lorsqu’il parle
réellement, au sens strict, de la question de la biodiversité en
soi, c’est pour parler d’un :
« objectif de protection de 30 % de la surface de
la planète et donc d’avoir des aires protégées – qui sont des
aires de liberté, si je puis dire, du vivant »
Il faut voir que cela implique que 70 % de la planète ne
sera pas protégée ! Emmanuel Macron raconte d’ailleurs que
la fibre c’est super pour…
« recréer de l’activité économique,
industrielle, du travail au plus près de l’endroit où on habite »
L’écologie, c’est somme toute souhaitable,
mais dans la mesure du possible, et simplement pour un développement
soutenable. Emmanuel Macron a d’ailleurs
parlé du prix du « porc », des éleveurs qui sont
merveilleux car ils travaillent H24 en présence des animaux et pour
le bien de ces derniers, du manque d’organisation de la « filière
bovine », etc.
Quel rapport avec la biodiversité, mystère !
À
moins de saisir que par biodiversité, il entend la diversité des
ressources naturelles. Et c’est très précisément le cas. Il
reprend d’ailleurs la théorie du 70 %-30 % pour
l’appliquer à la France. Cela donne la chose suivante :
« A horizon 2022, 4 nouveaux parcs naturels régionaux — Mont Ventoux, Doux Horloger, Baie de Somme- Picardie maritime et Corbières Fenouillèdes — seront mis en place et 20 réserves naturelles nationales.
La Polynésie a créé une aire marine gérée de 5 millions de kilomètres carrés, Tainui Atea, qui pourrait à terme, si la Polynésie le souhaite et ça fait partie des échanges que j’aurai en avril prochain sur place, devenir elle aussi une aire protégée.
Tout cela, c’est le chemin que nous allons parcourir dans les deux années à venir pour tenir l’objectif que nous nous sommes donnés à nous-mêmes : protéger 30 % du territoire national, terrestre et maritime, dont un tiers à un niveau élevé de protection d’ici la fin du quinquennat. »
Tout cela sonne très bien. Encore
faut-il s’entendre sur ce qu’on entend par parc naturel. Car, dit
comme cela, on s’imagine un lieu où la Nature existe en-dehors de
l’humanité. Sauf que ce n’est pas le cas du tout ! Ainsi,
la commune de Saint-Quentin-en-Tourmont est certainement très
sympathique. Mais elle fait partie du parc naturel de la Baie de
Somme- Picardie maritime, comme 133 autres ! Le parc naturel du
Mont Ventoux concerne pareillement 39 communes, etc.
Et, s’adressant aux responsables de l’Office
français de la biodiversité, Emmanuel
Macron a dit la chose suivante :
« Vous êtes une police rurale de la nature, de la chasse, de la pêche, une police de tous les usages de la nature. (…)
Nous devons tout remettre à plat. A terme, vous aurez ces fameux 30 % du territoire à protéger, 10 % sous protection forte. C’est dire l’importance de votre rôle à cet égard, non seulement pour préserver la biodiversité, mais pour préserver les paysages de France, cette qualité de vie qui fait le rayonnement de notre pays. (…)
Vive la nature, vive la République et vive la France ! »
On a ici la clef pour tout comprendre, avec le mot « paysage ». Les Français rejetant la Nature, ils ne peuvent concevoir « l’environnement » que par l’intermédiaire du concept de « paysage ». C’est ici la prédominance de la conception cartésienne, de la prétention au « libre-arbitre » au-delà de la Nature, bref c’est l’anthropocentrisme sur toute la ligne.
Dans le second discours, moins destiné à des « professionnels »
et ayant comme prétexte le Mont Blanc, Emmanuel Macron dit
d’ailleurs que :
« Le constat est évidemment celui d’un fort déclin
de la biodiversité, mais rattrapable si un sursaut immédiat et une
action dans la durée sont conduites. »
Tout est dit. Car bien sûr que c’est « rattrapable »,
mais par la Nature elle-même, pas en forçant par en haut, en
s’imaginant tout contrôler. Il faut que l’humanité anéantisse
ses prétentions et même littéralement son ego, pour céder la
place à Gaïa comme système.
Il en est bien entendu hors de question pour la quasi totalité
des gens… Alors qu’en même temps, cette nécessité est perçue
comme la seule réelle option à l’arrière-plan. Les gens nient la
Nature, mais ne peuvent pas ne pas savoir que le retrait de
l’humanité par rapport à elle est inévitable.
Rien qu’avec le Mont Blanc, d’ailleurs, on
le voit bien. Emmanuel Macron peut-il stopper le réchauffement
climatique ? Non. L’autre grand thème local, dont il a été
obligé de parler en passant, est celui de la Vallée
de l’Arve, un bastion mondial de la
pollution. Peut-il la supprimer ? Non. Il peut simplement faire
en sorte de mettre à l’écart les camions les plus polluants.
Mais cela ne changera rien, car c’est à l’échelle mondiale
que cela se joue, et avec tout ou rien. L’humanité doit cesser
entièrement son anthropocentrisme, elle doit cesser de croire
qu’elle est comme « maître et possesseur » de la
Nature alors qu’elle n’est qu’une composante… Qui doit être
à son service.
Le seul avenir de l’humanité, c’est dans sa soumission à
Gaïa et son identification à son utilité pour elle.
Pas de compromis dans la défense de notre mère la Terre !
Les événements tout récents permettent de vérifier si était juste le fait de dénoncer Greta Thunberg comme étant anti-vegan dans sa démarche. Ainsi, l’hebdomadaire américain Time vient de la nommer personnalité de l’année. On ne peut pas évaluer ici un jugement de valeur, car du point de vue du Time, la personnalité est simplement considérée comme ayant joué un grand rôle, que ce soit positif ou négatif.
Cela étant, il faut relativiser cette « neutralité », car les photos de Greta Thunberg, toutes récentes avec notamment plusieurs mise en scène au bord de la mer au Portugal, montrent que le Time magazine a accompagné celle-ci depuis au moins début décembre pour une opération « séduction ».
Mais allons au compte-rendu de son activité, avec la très longue
présentation
de Greta Thunberg dans le Time. Le mot vegan revient une seule
fois, au moment où un militant de Greenpeace lui amène à manger un
pad thaï vegan, plat qu’elle découvre pour la première
fois. Super !
Le mot animal n’est pas présent dans le texte. Celui de Nature
non plus. Seul le mot naturel est présent pour parler de l’océan
qui mugit et fait comme un écho du monde naturel à la « petite
voix » de Greta Thunberg. Poétique. Mais sans intérêt.
Le mot écocide n’est pas dans le texte. Les mots écologistes
et écologie ne sont pas là, celui d’écologique est présent…
une fois, lorsque il y a une citation de Greta Thunberg disant que la
crise sociale serait aussi une « crise écologique ».
Le terme réducteur d’environnementaliste revient sept fois,
celui d’environnement une seule fois. Même pour faire semblant, il
semble que cela soit trop difficile.
Regardons aussi dans l’article
expliquant le « choix » du Time. Il est écrit par
son rédacteur en chef. Ici, aucun terme n’est trouvable.
Cela veut clairement tout dire. Il n’y a même plus de contenu,
c’est juste une sorte de protestation illuminée contre la fin du
monde. C’est une nouvelle religion. L’oubli des animaux est
vraiment incroyablement révélateur : les animaux sont les
premiers concernés sur la planète, mais ils n’existent pas !
Et ne parlons pas de ce refus de reconnaître la Nature, de
dénoncer l’anthropocentrisme, etc.
Mais regardons deux autres choses très récentes et consistant
cette fois en les propos de Greta Thunberg directement.
Elle était ainsi à la COP25 se tenant à Madrid (au lieu d’au Chili) et elle a tenu un petit discours le 11 décembre.
Dans ce discours
du 11 décembre 2019, Greta Thunberg ne parle ni du véganisme, ni
des animaux, ni de l’écocide, ni de la Nature.
Elle n’emploie pas le terme environnement non plus, ni même ceux
d’écologie, d’écologique, d’écologiste.
Là on peut dire que les choses sont franchement sans ambiguïté.
Elle a également accordé une interview exclusive à l’important quotidien suédois Dagens Nyheter, d’orientation libérale. Là c’est comme le Time, c’est un choix marketing très précis. Accorder une interview quand on ne le fait jamais, surtout dans son pays alors qu’on est connu mondialement, cela ne relève pas du hasard.
Pareillement, on n’y trouve rien du tout des termes mentionnés
plus haut. C’est un discours sur le réchauffement climatique, les
gouvernements qui ne font rien car ils sont méchants, qu’ils
réfutent la science, etc.
C’est un point de vue régressif, qui va très bien avec le côté
c’est la fin du monde, les gouvernements nous ont trahi, etc. Zéro
remise en cause des mentalités, zéro transformation de soi, zéro
morale, rien !
Concluons sur une anecdote révélatrice. L’association
américaine PeTA vient tout juste de nommer Greta Thunberg comme
modèle
pour la jeunesse 2019 à l’occasion d’une remise
annuelle de prix. Tout cela parce qu’elle contribuerait au
véganisme et qu’elle parlerait « passionnément » de
son « amour pour les animaux ». Incroyable, PeTA n’a
peur de rien. C’est de la récupération pure et dure, de manière
ultra-forcée.
Mais voilà ce qu’est Greta Thunberg. Une adolescente idéaliste,
sans contenu, utilisée par n’importe qui pour projeter n’importe
quoi. C’est un faire-valoir généralisé, une gigantesque bulle
relevant des médias et des réseaux sociaux. Encore une fois,
comment va-t-elle s’en sortir sur le plan personnel après avoir
été le jouet de tout cela ?
37 scientifiques avaient lancé une campagne
intitulée EAT-Lancet
Commission on Food, Planet, Health, liée à
la revue scientifique médicale britannique The Lancet, pour que soit
mangé moins de viande dans une optique de développement durable. Le
critère était le suivant : au maximum 14 grammes de « viande
rouge » par jour, au maximum 29 grammes de poulet par jour, au
maximum 13 grammes d’oeufs par jour.
Le financement était
réalisé par la fondation Wellcome
Trust qui dispose de
milliards et investit ses bénéfices dans différents projets ;
la campagne passait par Twitter.
Une contre-campagne a immédiatement lancé, sous le nom de #yes2meat et touchant 26 millions de personnes contre 25 millions pour la campagne d’Eat-Lancet Commission. Voici le tableau comparant l’impact de chaque campagne sur Twitter.
Saisir cette opposition est très
importante pour aborder le rapport sur les gaz à effets de serre de
l’Organisation météorologique mondiale. Car
il est beaucoup parlé dans les médias de Greta Thunberg,
d’Extinction Rébellion, etc., c’est-à-dire de gens découvrant
en 2019 le réchauffement climatique et en appelant à la
« science ».
Mais ce n’est pas la « science » qui décide – pas
dans cette société. C’est le profit qui décide et l’écologie
n’est rien d’autre qu’un thème prétexte à la concurrence. Il
y a d’un côté l’industrie de la viande qui veut faire comme
avant. Il y a de l’autre des gros industriels se disant qu’il y a
une opportunité pour prendre la place en surfant sur l’écologie,
ou même le véganisme.
Tout l’irrationalisme de la mise en valeur de Greta Thunberg,
présentée comme une autiste géniale seule capable de rompre avec
les adultes passéistes, etc., tient à cela. L’humanité ne fait
pas encore de choix rationnels, malgré l’urgence. Elle est
ballottée entre deux tendances du business.
Le caractère erroné de tout cela apparaît avec les chiffres donnés par l’Organisation météorologique mondiale. Lors des différentes COP, nous avions dit : tout cela ne changera rien. Voici un tableau du dernier rapport, du 25 novembre 2019, indiquant les modifications entre l’année 2017 et l’année 2018.
On a la présence de dioxyde de carbone (C02), de méthane (CH4),
de protoxyde d’azote (N2O), le pourcentage de comparaison avec
l’année 1750, la croissance absolue entre 2017 et 2018 puis la
croissance relative en pourcentage, puis l’augmentation annuelle
moyenne de ces dix dernières années.
Dans ce dernier cas, on s’aperçoit qu’on est au-dessus de la
moyenne de 2017 à 2018.
Voici les tableaux présentant l’évolution de chacun des gaz à
effet de serre.
Le Finlandais Petteri Taalas, secrétaire général de
l’Organisation météorologique mondiale, a résumé la situation
par les termes suivants :
« Il n’y a aucun signe de ralentissement, et
encore moins de diminution, de la concentration des gaz à effet de
serre dans l’atmosphère malgré tous les engagements pris dans le
cadre de l’Accord de Paris sur le changement climatique. »
La croissance est en effet très clairement visible. Et aucune
réduction n’est possible à moins de renverser la tendance, de la
renverser donc dans ses fondements mêmes. Selon l’ONU, il faudrait
pourtant la chose suivante :
« une réduction des émissions de gaz à effet de serre de 2,7% par an entre 2020 et 2030 pour l’objectif de 2 °C et de 7,6% par an pour l’objectif de 1,5 °C »
Ce n’est bien sûr pas du tout possible quand on voit les
tableaux. La croissance que l’on voit reflète une tendance de
fond, une tendance mondiale. Toute l’économie mondiale est
imbriquée, fonctionne selon le principe de la société de
consommation pour maximiser les profits.
Quand quelqu’un comme Greta Thunberg dit qu’elle change le
monde en n’utilisant pas l’avion elle ment (d’ailleurs
également car ses transports comme aux Etats-Unis sont
surconsommateurs). Il ne s’agit pas d’un souci de consommation.
C’est la production qui est un souci, non pas qu’il faille faire
comme les zadistes et retourner à l’âge de pierre, mais il faut
tout révolutionner. Sans cela, c’est la catastrophe.
Le pré-rapport de 2019 parle déjà d’une « décennie de
perdue – aucun changement substantiel dans la tendance mondiale aux
émissions [de gaz à effets de serre] ». En fait, l’humanité
n’a même jamais autant produit de gaz à effets de serre qu’en
ce moment.
Beaucoup de gens ont voté EELV et on a parlé de prise de
conscience écologique. Mais que disait EELV à la suite de la COP
21 ? La chose suivante :
« Cet accord de Paris permet donc de trouver un
socle commun de discussion et de dynamique vers une économie
décarbonée pour l’avenir. »
Où est la discussion ? Où est la dynamique ? Les gens
comme EELV, Greta Thunberg, L214… sont des marchands d’illusions.
Leurs variantes réformistes radicales comme Extinction Rébellion,
269… n’ont pas une nature différente.
Ils sont des obstacles à la prise de conscience complète de la
situation. Ce qu’il faut, comme dit en 2016, c’est affirmer les
points suivants :
– la division de l’humanité en nations est un obstacle ;
– un gouvernement mondial est inévitable ;
– il faut centraliser les initiatives et les imposer ;
– il faut des chiffres, des bilans, le tout de manière publiée,
disponible, avec des discussions à ce sujet dans toute la population
mondiale ;
– tout cela passe par une remise en cause de l’anthropocentrisme
et la reconnaissance de la Nature.
Nous avons besoin d’une, dix, cent Operation Thunderball. Car à défi planétaire, réponse planétaire : seule une humanité unifiée est capable d’être elle-même, en se plaçant au service des animaux, de la Nature. Cela doit devenir son identité, sa fonction !
L’Operation Thunderball s’est tenue tout le long du mois de juin et elle a été rendue publique hier par Interpol. Il s’agit d’une opération contre le trafic d’animaux sauvages, mais aussi de plantes et de bois, menée dans 109 pays ! C’est la preuve d’une tendance irrépressible à la fusion de l’humanité dans son rapport à la planète.
Voici le tableau fournir par Interpol pour symboliser ses résultats. On notera qu’en plus des animaux, on a bien les plantes (2600) et le bois (ici l’équivalent de 74 camions).
Par contre, évidemment et malheureusement, il y a la comptabilité macabre d’éléments d’origine animale (ainsi 545 kilos d’ivoires, 10 000 éléments provenant de dauphins, de requins, de coraux…).
Les chiffres sont terribles, mais il faut bien saisir qu’ils ne sont qu’une goutte d’eau dans une souffrance d’ampleur inimaginable. Le marché du trafic d’animaux est évalué à entre 5 et 23 milliards de dollars, en toute illégalité.
La passivité est de rigueur. Une étude de 2018 de l’association IFAW avait montré qu’en un an il était possible de trouver en France et en Allemagne 3 312 annonces sur internet proposant 8 244 animaux sauvages menacés ou en danger.
Seule une conception planétaire permet de saisir le problème et de poser les moyens de le résoudre. Interpol a d’ailleurs mené l’année dernière l’Operation Thunderstorm, dans 93 pays, et auparavant l’Operation Thunderbird.
Voici des images de crimes dévoilées dans l’Operation Thunderstorm. Ici, dans un container, 4100 tortues de Horsfield (ou encore « russe », ou encore « des steppes ») sont amassées. Elles viennent du Kazakhstan, ces tortues vivant dans des zones de montagne ou bien les dunes de sable.
On notera que c’est une espèce protégée… mais qu’on peut en acheter en France comme « animal de compagnie » !
Voici une image d’Inde, où l’on voit pareillement comment les animaux sont entassés dans des conditions terrifiantes. Ce sont des marchandises pour ceux qui les utilisent, rien de plus.
Sur cette photographie, on voit une policière chilienne en train d’ausculter un conure à long bec, un oiseau vivant dans ce pays.
Ce flamant nain est quant à lui en Inde, intercepté au Maharashtra. Il était en vente dans un magasin d’animaux « de compagnie ».
Nous ne montrons normalement ce genre d’images, mais c’est sans doute nécessaire ici pour donner un exemple terrible. Il s’agit de peaux de crocodiles, trouvés en Grande-Bretagne. Il est important de ne pas attribuer au trafic une nature simplement « asiatique » ou quoi que ce soit de ce genre. Le trafic va et part aussi depuis les pays les plus riches, car c’est une question de goût décadent et de profit.
D’ailleurs, ce bébé lion a été trouvé au Bengale, alors qu’il allait rejoindre la Grande-Bretagne. Face à une telle dimension internationale, il faut une réponse internationale, et implacable.
Ce bébé Langur a également été trouvé dans la même zone.
Autre exemple : le corail ici trouvé en Italie provenait de Grèce et avait comme destination la France. Les responsables ne sont pas qu’en Grèce : ils sont aussi en France, avec ceux qui importaient et ceux qui comptaient acheter !
La photo suivante a été prise en Équateur dans le cadre de l’Operation Thunderball. On y voir un mazama rufina, un cerf vivant dans les Andes de ce pays.
Ici, il s’agit de la Dalbergia melanoxylon, une plante à fleurs qu’on trouve dans de nombreux pays africains, ici au Kenya. Elle est pratiquement menacée.
Sur la photo suivante, on voit comment en Chine le trafic utilise des caches. Ici, il s’agit de pangolins décédés, de pattes d’ours, d’os de léopards…
Les biens suivants ont été interceptés en Espagne. Ils étaient en vente en ligne. Les peaux utilisés sont celles de jaguar (en haut sur la photo), de léopard (en bas), de lynx (derrière).
Ces hippocampes décédés ont été trouvé à Singapour (au moyen de rayons X lors d’un contrôle). Ils provenaient d’Indonésie et devaient aller au Vietnam.
Voici un dynaste Hercule, dont la corne des mâles est particulièrement grande. Cet insecte a été trouvé en Équateur, avec de très nombreux autres, une véritable « collection ».
Ces pléco-zèbres, décédés ont été trouvés au Brésil, pays qui les a exportés en masse pour les aquariums, faisant qu’il est menacé. Beaucoup meurent évidemment lors du transport. La photographie du dessous montre par quel moyen celui-ci a lieu.
Voici une autre photographie montrant le transport d’oiseaux, ici en Équateur.
En juin, Interpol avait également pour la première fois fait un grand appel de recherche pour trouver des criminels liés au trafic d’ivoire et de bois.
Il ne peut ici y avoir que deux idées comme conclusion. Il faut que ces opérations se systématisent et qu’elles soient implacables. Seule une humanité unifiée, cessant sa guerre en son sein et posant un rapport positif à la planète, pourra amener la cessation de la guerre à la Nature (dont l’humanité est un simple élément) et le travail de protection que l’humanité doit assumer.
Il ne s’agit pas de « préserver » la vie, mais bien
de la défendre, de permettre son expansion, d’en faire le sens de
l’existence. L’humanité ne peut exister à l’avenir que comme
vecteur de cette défense, c’est là sa nature même désormais.
Il existe cinq « informations complémentaires sur les sujets clés traités dans le rapport ». En voici la première, qui est courte, très ramassée. C’est une sorte de synthèse de l’évolution de ce qui se passe à la surface de la planète depuis cinquante ans, du point de vue de l’IPBES bien sûr.
De très nombreux aspects sont totalement oubliés, le principal étant, conceptuellement, ce qu’on peut appeler la vie sauvage (en plus du refus de reconnaître la Nature en général, la planète comme Gaïa). En effet, ce paragraphe de l’IPBES dit qu’il se déroule des phénomènes à la surface de la planète, et que cela a un impact sur l’environnement de des phénomènes.
Comme ces phénomènes ont pris une ampleur mondiale, l’environnement à l’échelle planétaire est modifié, bouleversé et là le déséquilibre aurait pris une telle proportion qu’il faudrait corriger le tir.
Chaque paragraphe raisonne pour cette raison en termes de surface, d’occupation de la surface. Quelques lignes entre crochets sont ajoutées pour cette raison ici à chaque paragraphe, pour bien montrer cet aspect de « l’information complémentaire » de l’IPBES.
Ampleur de la destruction de la nature
[L’ampleur est à considérer en termes de surface, de longitude, de latitude.]
Les gains obtenus grâce aux réponses sociétales et politiques, bien qu’importants, ne permettent pas d’enrayer les pertes massives.
[Ces pertes concernent la surface, les terrains planétaires.]
Depuis 1970, les tendances de la production agricole, de la pêche, de la production de bioénergie et de la récolte de matériaux ont augmenté en réponse à la croissance démographique, à la hausse de la demande et au développement technologique ; une augmentation qui s’est faite à un coût élevé, qui a été inégalement réparti à l’intérieur et entre les pays. Cependant, de nombreux autres indicateurs clés des contributions de la nature aux populations, tels que le carbone organique du sol et la diversité des pollinisateurs, ont diminué, ce qui indique que les gains en contributions matérielles ne sont souvent pas durables.
[Les activités humaines pour l’alimentation, l’énergie, les matières premières… occupent beaucoup plus de surface qu’auparavant. Certaines surfaces ont perdu en vigueur.]
Le rythme d’expansion de l’agriculture dans des écosystèmes intacts a varié d’un pays à l’autre. Les pertes d’écosystèmes intacts se sont produites principalement dans les tropiques, qui ont les plus hauts niveaux de biodiversité de la planète. Par exemple, 100 millions d’hectares de forêts tropicales ont été perdus entre 1980 et 2000, en raison principalement de l’augmentation de l’élevage du bétail en Amérique latine (environ 42 millions d’hectares) et des plantations en Asie du Sud-Est (environ 7,5 millions d’hectares, dont 80 % destinés à l’huile de palme, utilisée surtout dans l’alimentation, les cosmétiques, les produits de nettoyage et les carburants) entre autres.
[L’expansion territoriale a concerné de vastes surfaces planétaires.]
Depuis 1970, la population mondiale a plus que doublé (passant de 3,7 à 7,6 milliards), augmentant de manière inégale selon les pays et les régions. Par habitant, le produit intérieur brut est quatre fois plus élevé qu’alors, avec des consommateurs toujours plus éloignés transférant la pression exercée sur l’environnement par la production et la consommation dans toutes les régions.
[La population humaine prend plus de surface, exerçant une pression qui plus est sur son environnement.]
Depuis 1900, l’abondance moyenne des espèces locales dans la plupart des grands habitats terrestres a, en général, diminué d’au moins 20 %.
[Les espèces propres à une surface ont, en raison de la diminution de celle-ci, diminué.]
Le nombre d’espèces exotiques envahissantes par pays a augmenté d’environ 70 % depuis 1970, dans les 21 pays qui ont présenté des données détaillés. [Les conquêtes en termes de surface ont amené le déplacement d’espèces d’une surface à une autre.]
La répartition de près de la moitié (47 %) des mammifères terrestres non volants et de près d’un quart des oiseaux menacés peut déjà avoir été affectée par le changement climatique.
[L’évolution globale des surface aboutit à une modification générale de la répartition des espèces.]
La première partie
du communiqué de l’IPBES se veut une présentation « maîtrisée »
de la situation. D’un côté, il vise à présenter la gravité
absolue de ce qui se passe, mais de l’autre, il doit prétendre que
les événements peuvent encore être contrôlés. S’il y a ainsi
accélération du taux d’extinction des espèces, et cela « sans
précédent », la « réponse mondiale actuelle est
insuffisante », ce qui signifie qu’elle peut être
suffisante.
Cette opposition
entre ce qui se passe et ce qu’il faut faire est le leitmotiv du
discours de la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité
et les services écosystémiques). Cela fonde sur la lecture
entièrement anthropocentriste qu’elle a de la situation. Elle ne
reconnaît pas la Nature, ni la valeur en soi de la vie.
Les premières
lignes du communiqué sont exemplaires d’une telle approche :
« La nature décline globalement à un rythme sans précédent dans l’histoire humaine – et le taux d’extinction des espèces s’accélère, provoquant dès à présent des effets graves sur les populations humaines du monde entier », alerte le nouveau et historique rapport de la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), dont le résumé a été approuvé lors de la 7ème session plénière de l’IPBES, qui s’est réunie la semaine dernière (du 29 Avril au 4 mai) à Paris. »
L’histoire
humaine, des effets graves sur les populations humaines… on l’a
compris, au-delà même de son approche anthropocentriste, l’IPBES
part du principe qu’au mieux les gouvernements ne s’occuperont
que de leurs populations. Les lignes qui suivent immédiatement les
premières appuient donc l’idée qu’un rapport « objectif »
de la situation a été réalisé et que les économies vont être
touchées. Et là, forcément, si on touche l’économie… A cela
s’ajoute le risque d’instabilité puisque vont être touchées la
sécurité alimentaire, la santé, la qualité de vie, etc.
« Les preuves accablantes contenues dans l’évaluation globale publiée par l’IPBES et obtenues à partir d’un large éventail de domaines de connaissance, présentent un panorama inquiétant », a déclaré le président de l’IPBES, Sir Robert Watson. « La santé des écosystèmes dont nous dépendons, ainsi que toutes les autres espèces, se dégrade plus vite que jamais. Nous sommes en train d’éroder les fondements mêmes de nos économies, nos moyens de subsistance, la sécurité alimentaire, la santé et la qualité de vie dans lemonde entier ».
On lit régulièrement
des arguments de ce type ; en voici un autre exemple :
« La perte de biodiversité est donc non seulement un problème environnemental, mais aussi un enjeu lié au développement, à l’économie, la sécurité, la société et l’éthique. »
L’IPBES s’adresse
uniquement aux gouvernements, aux institutions. Et uniquement à
elles. C’est un point essentiel qui est frappant dès le début de
sa déclaration. C’est un fait très grave, car la démocratie est
littéralement expulsée de tout choix, de toute orientation. On est
ici dans un programme de gestion qui va être mis en place, au-dessus
des gens, et avec les mêmes systèmes, les mêmes gens qui sont
responsables ou au moins ont accompagné la catastrophe en cours.
Les lignes qui
suivent juste après les premières citées plus haut – on voit
comment le document est savamment construit – soulignent donc qu’on
peut gérer de manière correcte, qu’on peut rétablir la situation
sans soucis, qu’il faut juste s’en donner les moyens. On a ici un
vocabulaire technocratique, disant ouvertement que la « nature »
est juste un paramètre de gestion. C’est moralement réducteur et
totalement faux pour une analyse concrète de la réalité, qui
relève totalement de la Nature.
« Le rapport nous dit aussi qu’il n’est pas trop tard pour agir, mais seulement si nous commençons à le faire maintenant à tous les niveaux, du local au mondial », a-t-il ajouté « Grâce au « changement transformateur », la nature peut encore être conservée, restaurée et utilisée de manière durable – ce qui est également essentiel pour répondre à la plupart des autres objectifs mondiaux. Par «changement transformateur », on entend un changement fondamental à l’échelle d’un système, qui prend en considération les facteurs technologiques, économiques et sociaux, y compris en termes de paradigmes, objectifs et valeurs.
A lire les lignes
précédentes, on a tout de même l’impression qu’à l’IPBES on
a trop lu ou regardé Harry Potter. Comment peut-on expliquer qu’il
y a un phénomène d’extinction de masse d’un côté, qu’il
faudra simplement y réponde par des mesures par en haut de l’autre ?
Surtout que des chiffres sont donnés et ils montrent bien que la
rupture est qualitative, pas quantitative. Mais ce n’est pas le
point de vue de l’IPBES.
Le rapport constate
pourtant lui-même de l’ampleur de ce qui se passe. Cela touche
l’ensemble de la planète, dans des proportions énormes. Citons
ici simplement quelques faits constatés par le rapport lui-même :
« Plus de 40 % des espèces d’amphibiens, près de 33 % des récifs coralliens et plus d’un tiers de tous les mammifères marins sont menacés. »
« Les trois quarts de l’environnement terrestre et environ 66 % du milieu marin ont été significativement modifiés par l’action humaine. »
« Plus d’un tiers de la surface terrestre du monde et près de 75 % des ressources en eau douce sont maintenant destinées à l’agriculture ou à l’élevage. »
« Les zones urbaines ont plus que doublé depuis 1992. »
« La pollution par les plastiques a été multipliée par dix depuis 1980. »
Pour qu’on ait
atteint une telle dimension, c’est évidemment que le processus est
profondément ancré, déjà développé, en croissance
exponentielle. Lorsqu’on voit que 75 % des ressources en eau
douce sont pour l’agriculture et l’élevage, alors c’est dans
la matrice même de l’agriculture et de l’élevage. Ces deux
formes ont été structurées pour aller à ce degré-là
d’utilisation. La seule réponse peut être la modification
fondamentale de l’agriculture et la suppression de l’élevage.
Si on raisonne en
termes quantitatifs, on peut reculer les chiffres donnés de quelques
pourcents, c’est cela l’idée du rapport de l’IPBES. Mais c’est
une perspective vaine car pour qu’on ait atteint de tels chiffres,
il faut déjà qu’à la base même il y a un système déjà formé
et qui n’est pas ajustable. L’IPBES, elle, considère cependant
que le point de rupture n’est pas atteint.
Cela est dit de
manière formelle :
« Les contributions apportées par la biodiversité et la nature aux populations sont notre patrimoine commun et forment le plus important ’filet de sécurité’ pour la survie de l’humanité. Mais ce filet de sécurité a été étiré jusqu’à son point de rupture », a déclaré la professeure Sandra Díaz (Argentine), qui a co-présidé l’évaluation avec les professeurs Josef Settele (Allemagne) et Eduardo S. Brondízio (Brésil et États-Unis).
« La diversité au sein des espèces, entre les espèces et celles des écosystèmes, ainsi que de nombreuses contributions fondamentales qui proviennent de la nature se dégradent rapidement, même si nous avons encore les moyens d’assurer un avenir durable aux êtres humains et à la planète.»
Ce refus de
reconnaître que le point de rupture est passé montre que l’IPBES
est totalement lié au monde qui le porte. Il est aveuglé par les
institutions existant dans les différents pays, par les traditions,
par la croyance que finalement, rien ne peut vraiment arriver, car au
pire on se donnera les moyens de changer les choses.
Si le problème
n’était que quantitatif, l’idée d’une gestion par en haut
pourrait il est vrai grosso modo tenir, au moins en théorie. On va
dans un sens, on décide d’aller dans un autre sens. Mais une
dimension qualitative que les choses se sont déjà emballés, que
c’est une tendance de fond qui est apparu à la surface. Dans ces
cas-là, on ne peut pas tergiverser, car tout s’accélère dans
tous les cas, quoi qu’on fasse… A moins d’un renversement total
de l’approche, sans quoi cela ne peut que continuer.
L’IPBES est donc
obligé de s’effondrer, à moyen terme, et même à court terme
d’ailleurs. L’ampleur de ce qui se passe va la mettre en déroute
totale, et ce rapidement. Surtout qu’elle assume paradoxalement un
discours à terme, par ailleurs totalement flou, qui va d’autant
plus la condamner. Que dire en effet quand on lit quelque chose
comme :
« Les objectifs pour 2030 et au-delà ne pourront être atteints que par un changement transformateur dans les domaines de l’économie, de la société, de la politique et de la technologie. »
Ce qu’on lit à la
fin montre d’ailleurs comment, de toutes façons, l’IPBES remet
la patate chaude aux « décideurs », en axant bien sur le
« bien-être humain » comme seule préoccupation
véritable. Cela montre bien comment l’IPBES n’est pas un apport
extérieur, « objectif », aux gouvernements, mais en fait
simplement leur expression.
« L’IPBES présente aux décideurs une base scientifique fiable, les connaissances et les options stratégiques pour qu’ils les analysent », a déclaré la Docteure Anne Larigauderie, secrétaire exécutive de l’IPBES. « Nous remercions les centaines d’experts, issus du monde entier, qui ont donné de leur temps et partagé leurs connaissances pour aider à combattre la disparition des espèces, des écosystèmes et de la diversité génétique – une menace véritablement mondiale et générationnelle contre le bien-être humain. »
Normalement, face à
ce point de vue de l’IPBES, il en faudrait un autre, mis en place
par toute une série d’organisations cherchant à établir de
solides ancrages dans la population. On en est extrêmement loin et
même, ce n’est pas du tout à l’horizon. Il y a encore trop de
confiance en le monde tel qu’il existe. La plupart des gens savent
que tout doit changer, que tout va changer, mais ils ne pensent en
même temps pas que ce soit possible. Cela leur coupe toute volonté
d’engagement.
Le rapport de
l’IPBES le sait très bien et c’est pour cela il ne fait même
pas semblant d’avoir une perspective démocratique. Il s’adresse
aux décideurs, et rien qu’à eux. En ce sens, au-delà de la
critique aux décideurs, il faut bien voir qu’il y a une faillite
démocratique en soi à la base. Le réveil ne va en être que
d’autant plus difficile.
Voici la première partie, la principale, du communiqué de l’IPBES (Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques). Un commentaire, forcément, suivra.
Le dangereux déclin de la nature : Un taux d’extinction des espèces « sans précédent » et qui s’accélère
La réponse mondiale actuelle est insuffisante ;
Des « changements transformateurs» sont nécessaires pour restaurer et protéger la nature Les intérêts particuliers doivent être dépassés pour le bien de tous
C’est l’évaluation la plus exhaustive de ce type ; 1.000.000 espèces menacées d’extinction
« La nature décline globalement à un rythme sans précédent dans l’histoire humaine – et le taux d’extinction des espèces s’accélère, provoquant dès à présent des effets graves sur les populations humaines du monde entier », alerte le nouveau et historique rapport de la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), dont le résumé a été approuvé lors de la 7ème session plénière de l’IPBES, qui s’est réunie la semaine dernière (du 29 Avril au 4 mai) à Paris.
« Les preuves accablantes contenues dans l’évaluation globale publiée par l’IPBES et obtenues à partir d’un large éventail de domaines de connaissance, présentent un panorama inquiétant », a déclaré le président de l’IPBES, Sir Robert Watson. « La santé des écosystèmes dont nous dépendons, ainsi que toutes les autres espèces, se dégrade plus vite que jamais. Nous sommes en train d’éroder les fondements mêmes de nos économies, nos moyens de subsistance, la sécurité alimentaire, la santé et la qualité de vie dans le monde entier ».
« Le rapport nous dit aussi qu’il n’est pas trop tard pour agir, mais seulement si nous commençons à le faire maintenant à tous les niveaux, du local au mondial », a-t-il ajouté « Grâce au « changement transformateur », la nature peut encore être conservée, restaurée et utilisée de manière durable – ce qui est également essentiel pour répondre à la plupart des autres objectifs mondiaux. Par «changement transformateur », on entend un changement fondamental à l’échelle d’un système, qui prend en considération les facteurs technologiques, économiques et sociaux, y compris en termes de paradigmes, objectifs et valeurs.
Les États membres de la plénière de l’IPBES ont reconnu que, par sa nature même, un changement transformateur peut susciter une opposition de la part de ceux qui ont des intérêts attachés au statu quo, mais également que cette opposition peut être surmontée pour le bien de tous.
Le rapport d’évaluation mondiale sur la biodiversité et les services écosystémiques est le document le plus exhaustif réalisé à ce jour. Il s’agit du premier rapport intergouvernemental de ce type. Il s’appuie sur l’évaluation historique des écosystèmes pour le millénaire (Millenium Ecosystem Assessment) de 2005 et introduit de nouveaux moyens pour d’évaluation des preuves.
Élaboré par 145 experts issus de 50 pays au cours des trois dernières années, avec des contributions additionnelles apportées par 310 autres experts, le rapport évalue les changements au cours des cinq dernières décennies et fournit un aperçu complet de la relation entre les trajectoires de développement économique et leurs impacts sur la nature. Le document propose également un éventail de scénarios possibles pour les décennies à venir.
Basé sur une revue systématique d’environ 15 000 références scientifiques et sources gouvernementales, le rapport s’appuie aussi (et pour la première fois à une telle échelle) sur les savoirs autochtones et locaux, et aborde en particulier les questions concernant les peuples autochtones et les communautés locales.
« Les contributions apportées par la biodiversité et la nature aux populations sont notre patrimoine commun et forment le plus important ’filet de sécurité’ pour la survie de l’humanité. Mais ce filet de sécurité a été étiré jusqu’à son point de rupture », a déclaré la professeure Sandra Díaz (Argentine), qui a co-présidé l’évaluation avec les professeurs Josef Settele (Allemagne) et Eduardo S. Brondízio (Brésil et États-Unis). « La diversité au sein des espèces, entre les espèces et celles des écosystèmes, ainsi que de nombreuses contributions fondamentales qui proviennent de la nature se dégradent rapidement, même si nous avons encore les moyens d’assurer un avenir durable aux êtres humains et à la planète.»
Le rapport estime qu’environ 1 million d’espèces animales et végétales sont aujourd’hui menacées d’extinction, notamment au cours des prochaines décennies, ce qui n’a jamais eu lieu auparavant dans l’histoire de l’humanité.
Depuis 1900, l’abondance moyenne des espèces locales dans la plupart des grands habitats terrestres a diminué d’au moins 20 % en moyenne. Plus de 40 % des espèces d’amphibiens, près de 33 % des récifs coralliens et plus d’un tiers de tous les mammifères marins sont menacés. La situation est moins claire pour les espèces d’insectes, mais les données disponibles conduisent à une estimation provisoire de 10 % d’espèces menacées. Au moins 680 espèces de vertébrés ont disparu depuis le 16ème siècle et plus de 9 % de toutes les races domestiquées de mammifères utilisées pour l’alimentation et l’agriculture avaient disparu en 2016, et 1 000 races de plus sont menacées.
« Les écosystèmes, les espèces, les populations sauvages, les variétés locales de plantes et les races locales d’animaux domestiques diminuent, se réduisent ou disparaissent. Le tissu vivant de la Terre, essentiel et interconnecté, se réduit et s’effiloche de plus en plus », a déclaré le professeur Settele. « Cette perte est la conséquence directe de l’activité humaine et constitue une menace directe pour le bien-être de l’humanité dans toutes les régions du monde. »
Pour accroître la pertinence politique du rapport, les auteurs de l’évaluation ont classé, pour la première fois à une telle échelle et sur la base d’une analyse approfondie des données disponibles, les cinq facteurs directs de changement qui affectent la nature et qui ont les plus forts impacts à l’échelle mondiale. Les facteurs responsables sont, par ordre décroissant : (1) les changements d’usage des terres et de la mer ; (2) l’exploitation directe de certains organismes ; (3) le changement climatique ; (4) la pollution et (5) les espèces exotiques envahissantes.
Le rapport souligne que, depuis 1980, les émissions de gaz à effet de serre ont été multipliées par deux, provoquant une augmentation des températures moyennes mondiales d’au moins 0,7 degré Celsius. Le changement climatique a déjà un impact sur la nature, depuis le niveau des écosystèmes jusqu’à celui de la diversité génétique – impact qui devrait augmenter au cours des décennies à venir et, dans certains cas, surpasser l’impact dû au changement d’usage des terres et de la mer et des autres facteurs de pression.
En dépit des progrès réalisés pour conserver la nature et mettre en œuvre des politiques en faveur de celle-ci, le rapport met aussi en évidence que les trajectoires actuelles ne permettent pas d’atteindre les objectifs mondiaux visant à conserver et exploiter durablement la nature. Les objectifs pour 2030 et au-delà ne pourront être atteints que par un changement transformateur dans les domaines de l’économie, de la société, de la politique et de la technologie. Avec seulement quatre des vingt objectifs d’Aichi pour la biodiversité présentant des progrès réels dans leurs déclinaisons, il est probable que la plupart d’entre eux ne seront pas atteints d’ici l’échéance de 2020. Les tendances négatives actuelles concernant la biodiversité et les écosystèmes vont freiner les progrès en vue d’atteindre les objectifs de développement durable dans 80% (35 sur 44) des cas où les cibles ont été évaluées ; en particulier ceux liées à la pauvreté, la faim, la santé, l’eau, les villes, le climat, les océans et les sols (ODD 1, 2, 3, 6, 11, 13, 14 et 15). La perte de biodiversité est donc non seulement un problème environnemental, mais aussi un enjeu lié au développement, à l’économie, la sécurité, la société et l’éthique.
« Pour mieux comprendre et, plus important encore, pour s’attaquer aux principales causes des dommages causés à la biodiversité et aux contributions apportées par la nature aux populations, nous devons comprendre l’histoire et les interconnections mondiales qui existent entre les facteurs indirects complexes de changement démographiques et économiques, ainsi que les valeurs sociales qui les sous-tendent », a déclaré le professeur Brondízio. « Les principaux facteurs indirects comprennent l’augmentation de la population et de la consommation par habitant ; l’innovation technologique, dont les dommages causés à la nature ont diminué dans certains cas tandis qu’ils ont augmenté dans d’autres; et, de manière critique, les questions de gouvernance et de responsabilité. Une tendance qui émerge est celle dite de l’interconnectivité mondiale et du « telecoupling ». Dans ce cas, l’extraction des ressources et leur production ont lieu dans une partie du monde, mais servent souvent à satisfaire les besoins de consommateurs éloignés, qui vivent dans d’autres régions.»
D’autres résultats majeurs du rapport sont à prendre aussi en compte (Vous trouverez de plus amples informations sur un large éventail de résultats dans la section « Informations complémentaires » du présent communiqué) :
• Les trois quarts de l’environnement terrestre et environ 66 % du milieu marin ont été significativement modifiés par l’action humaine. En moyenne, ces tendances ont été moins graves ou évitées dans les zones qui appartiennent à ou sont gérées par des peuples autochtones et des communautés locales.
• Plus d’un tiers de la surface terrestre du monde et près de 75 % des ressources en eau douce sont maintenant destinées à l’agriculture ou à l’élevage. La valeur de la production agricole a augmenté d’environ 300 % depuis 1970, la récolte de bois brut a augmenté de 45 % et environ 60 milliards de tonnes de ressources renouvelables et non renouvelables sont maintenant extraites chaque année dans le monde – quantité qui a presque doublé depuis 1980.
• La dégradation des sols a réduit de 23 % la productivité de l’ensemble de la surface terrestre mondiale ; une partie de la production agricole annuelle mondiale, d’une valeur marchande pouvant atteindre 577 milliards de dollars US, est confrontée au risque de disparition des pollinisateurs et de 100 à 300 millions de personnes sont exposées à un risque accru d’inondations et d’ouragans en raison de la perte d’habitats côtiers et de leur protection.
• En 2015, 33 % des stocks de poissons marins ont été exploités à des niveaux non durable ; 60 % l’ont été au niveau maximum de pêche durable, et seulement 7 % à un niveau inférieur à celui estimé comme étant durable.
• Les zones urbaines ont plus que doublé depuis 1992.
• La pollution par les plastiques a été multipliée par dix depuis 1980 ; environ 300-400 millions de tonnes de métaux lourds, solvants, boues toxiques et autres déchets issus des sites industriels sont déversés chaque année dans les eaux du monde, et les engrais qui arrivent dans les écosystèmes côtiers ont produit plus de 400 « zones mortes» dans les océans, ce qui représente environ 245.000 km2, soit une superficie totale plus grande que le Royaume-Uni.
• Les tendances négatives de la nature continueront jusqu’en 2050 et au-delà, dans tous les scénarios politiques explorés dans le rapport, sauf dans ceux qui proposent un changement transformateur – cela en raison de l’impact qu’aura l’augmentation du changement d’usage des terres, l’exploitation de certains organismes et le changement climatique, toutefois avec des différences significatives selon les régions.
Le rapport présente également un large éventail d’exemples d’actions en faveur du développement durable et les trajectoires pour les réaliser dans des secteurs tels que l’agriculture, la foresterie, les écosystèmes marins, les écosystèmes d’eau douce, les zones urbaines, l’énergie, les finances et bien d’autres. Le document souligne combien il est important, entre autres, d’adopter une gestion intégrée et des approches intersectorielles qui prennent en compte les compromis entre la production alimentaire et celle de l’énergie, les infrastructures, la gestion de l’eau douce et des zones côtières, ainsi que la conservation de la biodiversité.
En vue de créer une économie mondiale durable, l’évolution des systèmes financiers et économiques mondiaux a également été identifiée comme un élément clé des politiques futures plus durables. Elle s’éloigne du paradigme actuel trop limité de la croissance économique.
« L’IPBES présente aux décideurs une base scientifique fiable, les connaissances et les options stratégiques pour qu’ils les analysent », a déclaré la Docteure Anne Larigauderie, secrétaire exécutive de l’IPBES. « Nous remercions les centaines d’experts, issus du monde entier, qui ont donné de leur temps et partagé leurs connaissances pour aider à combattre la disparition des espèces, des écosystèmes et de la diversité génétique – une menace véritablement mondiale et générationnelle contre le bien-être humain. »
Le fait que le rapport de l’IPBES sur la biodiversité n’ait pas été rendu public est très important. Il ne faut pas croire que l’idée est de faire un bilan de la biodiversité et d’en donner les résultats. L’objectif est de présenter ce bilan d’une certaine manière et de le fournir immédiatement avec la manière de l’interpréter. C’est une manière de contourner toute critique possible et d’immédiatement encadrer tout ce qui peut être dit.
Comment l’IPBES a-t-elle procédé ? Elle a fait en sorte
d’ajouter quelque chose au petit communiqué sur l’accord au
sujet d’un rapport commun faisant le bilan de la biodiversité. Cet
ajout consiste en des « Informations complémentaires »,
formées des catégories suivantes :
Ampleur de la destruction de la
nature
Peuples autochtones, communautés
locales et nature
Objectifs mondiaux et scénarios
politiques
Instruments politiques, options
et bonnes pratiques
Quelques chiffres : statistiques clés et faits
Il faut voir chaque chose présentée plus en détail. Cependant,
il est essentiel de comprendre ici que ces « informations »
sont parfaitement structurées, dans un véritable petit scénario.
Ce n’est pas comme si l’IPBES avait livré un rapport sur la
situation, de manière « neutre », que chacun pourrait
prendre en considération, puis proposer démocratiquement des
solutions.
On pourrait d’ailleurs imaginer que, logiquement, le rapport est
rendu public, traduit évidemment dans toutes les langues,
disponibles en pdf et en version papier, le tout étant fourni
gratuitement à tous les membres des appareils d’État du monde
entier, ainsi qu’aux institutions économiques, éducatives,
scientifiques, etc.
Ce n’est pas du tout le cas, malheureusement. Le fait de ne pas
rendre public le rapport vise même à empêcher cela. Il n’y a
même pas de date pour la rendue publique ! C’est dire tout de
même à quel point l’IPBES maintient un contrôle total sur
l’ensemble. Rien que ce procédé devrait interpeller.
Regardons maintenant quelle est la logique du scénario sous-jacent à ce qui a été rendu public le 6 mai 2019. La « Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques » a agi de la manière suivante :
a) l’IPBES annonce dans un petit communiqué qu’elle a réussi à établir un document commun aux différents pays pour établir une « base scientifique » sur les dégâts causés à la « biodiversité » ;
b) le petit ajout sur « l’ampleur de la destruction de la nature » ne parle paradoxalement pas vraiment de cela, mais raconte comment l’humanité s’est récemment agrandie numériquement et a renforcé ses industries, établi un mode de vie plus consommateur de ressources ;
c) le petit ajout sur les « Peuples autochtones, communautés
locales et nature » présente un mode de vie censé être à
l’inverse de ce qui est présenté au point précédent ;
d) le petit ajout sur les « Instruments politiques, options
et bonnes pratiques » prend bien évidemment comme modèle ce
qui est exposé au point précédent, appelant à une « bonne
pratique » ;
e) le petit ajout « Quelques chiffres : statistiques clés
et faits » consiste en une avalanche de chiffres pour bien
souligner l’importance de ce qui est présenté.
Conclusion : on doit considérer que le point a) reflète un
pas en avant, qui est impliqué par b), ce dernier point étant
contrebalancé par le point c), qui sert alors de modèle de « bonne
gouvernance » comme le veut le point d). Pour bien asseoir
l’ensemble, on a le point e) qui montre de manière comptable ce
qui est en train d’être perdu.
Il faut encore analyser en détail ce qui est établi et fourni
comme conclusions. Mais au-delà de cela, au-delà même des
considérations sur l’opposition entre le biocentrisme et
l’anthropocentrisme au sein de ce rapport, il y a lieu de souligner
le caractère anti-démocratique de la démarche.
Dans l’ordre des choses, l’ONU aurait dû dire : voilà
quel est l’état du monde, je vous le montre tel quel. Chaque
personne devrait, en son âme et conscience, être confrontée à cet
état du monde, le prendre en considération et l’assumer dans un
sens ou dans un autre. C’est la base d’une lecture rationnelle de
la part des gens, pour un choix exposé et partagé ou non par la
majorité, par l’ensemble.
Ici, le fait est qu’on n’ait pas accès à cet état du monde.
On a droit à des résumés, à des informations distillées selon
les choix des rédacteurs. L’information brute n’est pas
disponible. On ne peut pas l’évaluer, on ne peut même pas évaluer
la valeur de cette information brute, puisqu’on ne sait même pas
en quoi elle consiste.
On nous demande de croire sur parole. C’est la soumission aux
experts, la porte ouverte aux fantasmes complotistes
climato-sceptique, qui auront beau jeu d’attaquer le procédé,
comme ils le font pour les rapports du GIEC sur le réchauffement
climatique.
Toutefois, il ne faut pas croire que cela soit tout. L’IPBES a
également produit un « résumé pour les décideurs ».
C’est un petit document à part, présentant les « clefs »
du rapport, avec les éléments de langage, la manière de comprendre
les choses, etc. C’est quelque chose de totalement orienté.
Le contenu reste à voir, mais encore une fois, au-delà de cela,
il y a la question de la forme. On peut considérer qu’une
initiative visant à établir un état d’esprit à l’échelle
mondiale est une bonne chose. Sauf que là cela se déroule de
manière non démocratique. Un organisme explique comment voir les
choses aux « décideurs ». Déjà que ces derniers
décident sans demander l’avis des gens, si en plus on leur
explique certaines choses en passant au-dessus de tout le monde, même
des décideurs… Qui décide de quoi ?
Et comment veut-on que les gens s’impliquent dans l’écologie,
si les décisions leur sont étrangères ? Il y a ici un
problème de fond dans la méthode, qui reflète il est vrai une
panique générale. Car la seule conclusion est évidemment : on
renverse tout le système et on adopte la morale vegan straight edge,
soumettant l’humanité aux intérêts planétaires.
Cela présuppose un gouvernement mondial, et pas une ONU diffusant
des points de vue de manière transnationale.
A Paris vient de commencer un travail de discussion sur la biodiversité mené par un groupe intergouvernemental issu de l’ONU. Cela durera jusqu’au 4 mai, avec un document final publié le 6 mai.
Il s’agit de la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services, IPBES). Il s’agit d’une sorte de GIEC, mais pour la biodiversité, fondé en 2012.
La réunion parisienne doit en fait valider un document d’évaluation générale de la situation de 1800 pages, qui n’est malheureusement pas encore disponible, et ne le sera jamais. Il est réservé aux « experts », ce qui est une honte. Seule la version finale, qu’on devine relativisée en bien des aspects, sera accessible.
On voit encore comment les questions en rapport avec la Nature sont soigneusement contrôlées en amont par les États, afin d’éviter toute saisie démocratique, toute analyse réelle et conséquente.
Et même ce qui est simplement évalué pourrait suffire à transformer les consciences. Les informations diluées diffusées dans les médias parlent de jusqu’à un million d’espèces animales et végétales qui vont disparaître, souvent dans les prochaines décennies.
L’IPBES a pour cette raison même publié un communiqué de démenti ! Les médias s’appuient sur un document non validé par les 132 États membres, ils utilisent un document confidentiel réservé aux gouvernements et aux experts… et ce serait une bonne chose pour en conserver… la « transparence » ! L’IPBES n’a peur de rien !
L’organisation explique également que les médias auront droit à
la version finale le 4, mais sans le droit d’en parler avant la
publication publique le 6.
Il va de soi également que les discussions ne seront pas publiques… Le déni de la démocratie est total. Et la paralysie face à cela totale. On devine bien sûr que les États ne vont pas crier sur tous les toits qu’ils soutiennent un massacre planétaire… Mais, à cela s’ajoute le fait que, il faut bien le dire, les opinions publiques sont bien contentes de ne pas trop en savoir et de pouvoir déléguer toute responsabilité.
Quant aux gens conscients, ils ne sont pas engagés suffisamment à fond, pas prêts à la rupture totale, à partir en guerre. Il le faudra bien, pourtant.
Pour se faire une idée sur l’IPBES à Paris, voici une vidéo de plusieurs heures de vidéo en français de la conférence introductive (une « journée des parties prenantes), qui s’est tenue la veille de l’ouverture officielle.
Cette incapacité à affronter ne serait-ce que l’opinion publique quant au désastre concernant la biodiversité en dit donc très long. Mais le rapport final du 6 mai lui-même ne pourra-t-il pas présenter autre chose qu’une perspective d’effondrement ?
Il est impossible qu’il n’y ait pas une prise de conscience, ne
serait-ce qu’a minima, à la suite de la publication du rapport. Nous
entrons dans une période nouvelle où cela va être le tout pour le
tout, où la bataille pour le soulèvement des consciences va être
décisif.
Quelqu’un comme Bruno Retailleau, membre du Mouvement pour la France (MPF) de Philippe de Villiers et président du groupe UMP puis Les Républicains au Sénat, l’a bien compris…
➡️Nous souhaitons combattre l’ultra-violence des #Vegans qui font beaucoup de mal à nos agriculteurs, à nos bouchers… ➡️Derrière le #Véganisme, il y a un projet de société qui est parfaitement déconstructeur et nous voulons nous élever contre cela !pic.twitter.com/QBhrDk7cao
— Bruno Retailleau ن (@BrunoRetailleau) 25 avril 2019
Les réseaux sociaux sont désormais parfaitement maîtrisés par des experts en faisant un business lié à des « causes » : l’exemple de la jeune suédoise Greta Thunberg est un parfait modèle de ce type d’escroquerie. Elle vient d’ailleurs de rencontrer le pape, qui l’a naturellement salué chaleureusement, le Vatican s’empressant d’informer la chose suivante :
« De son côté, Greta Thunberg, qui avait demandé à rencontrer le pape, l’a remercié pour son grand engagement en faveur de la création. »
Par la suite, Greta Thunberg a rejoint Londres, épicentre d’une
« première semaine internationale de la rébellion »,
qui vient de se terminer. Elle était organisée par « Extinction
Rébellion », une nouvelle structure née en octobre 2018 en
Angleterre. Greta Thunberg y était bien entendu déjà présente…
« Extinction Rébellion » est appuyée par grosso modo
toute la mouvance équivalent en France au quotidien Le Monde. C’est
une sorte de Greenpeace version réchauffement climatique, avec donc
un appui financier et médiatique important.
Lors de la semaine de désobéissance civile, des centaines de
personnes ont occupé plusieurs places centrales de Londres,
aboutissant par ailleurs à plus d’un millier d’arrestations. En
France, le vendredi 19 avril, c’est à La Défense que pareillement
deux mille personnes (avec plusieurs ONG se mobilisant) ont bloqué
les sites du ministère de la Transition écologique, de la Société
générale, d’EDF et de Total. Il y a également l’entrée du
ministère de l’agriculture qui a été bloquée en « soutien
au monde paysan », etc.
La question est évidemment : qui sont ces gens ? D’où
viennent-ils ? Depuis quand la France dispose-t-elle de
tellement d’activistes engagés dans un combat ouvert contre le
réchauffement climatique et la destruction des espèces qui en
découle ? Surtout que « Extinction Rébellion »
revendique pour la France 900 membres en janvier 2019, 3 000 en
avril.
En fait, on l’aura compris, c’est une mode passant par les réseaux sociaux. Il ne s’agit pas d’activistes menant un patient travail de fond, sur des bases solides, durables, avec des perspectives morales et culturelles fortes.
« Extinction Rébellion » profite de cet engouement passager et « radical » pour une cause indéniablement juste, mais qui est totalement desservie par des attitudes consommatrices consistant à « témoigner ». On s’inscrit par internet, on suit sur Facebook et Twitter (voire Instagram), on vient témoigner lors d’une action, et on s’imagine activiste ou militant. Des structures comme L214 ou 269 n’agissent pas différemment.
Voici le document de naissance de cette structure en France, rendu
public lors de l’occupation le 24 mars 2019 d’une salle du Muséum
d’histoire naturelle à Paris. L’étudier avec un regard approfondi
apporte un éclairage significatif.
« À l’aube de la seconde guerre mondiale, le 1er ministre britannique Winston Churchill alerte les grandes puissances européennes qui ne réagissent pas à l’invasion de la Tchécoslovaquie par les forces nazies parce qu’elles espèrent, par leur inaction, maintenir la paix. Il leur dit : “Vous avez voulu éviter la guerre au prix de la honte. Vous avez choisi la honte mais vous aurez la guerre.”
Aujourd’hui, à l’aube d’un basculement sans précédent des équilibres écologiques de la planète, le mouvement international Extinction Rebellion alerte les citoyens et les gouvernements qui ne réagissent pas à l’emballement climatique et à l’effondrement de la biodiversité. Il alerte ceux qui espèrent, par leur inaction, maintenir la paix sociale. ”Vous avez voulu sauver un système et son mode de vie au prix de la survie de vos propres enfants. Vous avez choisi la honte mais vous aurez la guerre” – car vous serez inévitablement contraint de vous adapter à des conditions impossibles – et chaque mois perdu à repousser les dures décisions qui s’imposent rendra cette transition plus titanesque encore. C’est d’un effort de guerre dont nous avons besoin aujourd’hui.
Les faits sont là. Le dernier rapport du GIEC, qui acte de l’état actuel de nos connaissances scientifiques sur le climat, élève une nouvelle fois la voix. Il nous exhorte à des changements sociétaux rapides, profonds et de grande envergure pour limiter l’impact d’une augmentation mondiale de la température, dont les conséquences frappent déjà les plus démuni.e.s : montée des eaux, inondations, sécheresses, phénomènes météo extrêmes, épidémies, famines, conflits et migrations.
Notre logique industrielle expansionniste détruit en ce moment même tout ce dont nous dépendons. L’eau, l’air et les sols sains se raréfient. Toutes nos ressources s’épuisent. La Vie s’effondre partout autour de nous. Ce n’est pas une crise passagère. C’est un changement irréversible. Toutes les espèces qui disparaissent ne réapparaîtront pas. Le charbon, le pétrole, le gaz partis en fumée ne se régénèreront pas. Pour nous, il n’y aura pas de retour en arrière.
Mais tout doit être tenté car on aperçoit déjà la conséquence de ce chemin, conséquence à la fois logique et inimaginable : allons-nous être les témoins de l’effondrement de notre population, et peut-être de notre propre disparition ? En ce jour de Déclaration de Rébellion, nous sommes ici, au Muséum National d’Histoire Naturelle, pour proclamer notre rébellion symbolique contre notre extinction et notre rébellion politique contre tout ce qui nous y mène à grands pas.
Nous sommes ici pour remettre notre espèce à sa juste place, au sein de cette fragile toile du Vivant sans laquelle rien n’est possible, cette toile qu’il faudrait honorer et qu’à la place nous détricotons consciencieusement. Ici, dans ce lieu de culture qui tente de rappeler la magie et la diversité du Vivant, où est l’humain ? Où est l’humain dans cette grande fresque de la Vie ? Sera-t-il lui aussi bientôt empaillé, prêt à rejoindre toutes les espèces qui disparaissent à cet instant, et qui disparaitront demain et après demain encore ?
Nous laissons à nos enfants l’enfer en héritage. Ce n’est pas une image. Nous les envoyons vers une mort prématurée si nous ne changeons pas les règles du jeu.
Nous commençons par adresser avec humilité nos excuses à la génération qui aujourd’hui fait ses premiers pas, et nous nous engageons, avec une créativité sans fin, à repeupler nos imaginaires, pour inventer un monde vivable et souhaitable.
Nous savons, qu’au fond de nous, c’est l’instinct de survie qui nous pousse enfin à faire face à notre déni, à nos peurs, à notre colère et à notre désespoir. Nous sommes reconnaissant.e.s envers cet instinct. Mais nous restons lucides.
Nous voyons autour de nous l’impératif de survie devenir une entreprise individuelle et prendre le dessus sur notre dimension collective. S’il se répand, ce réflexe de repli sur soi écrasera les enjeux de justice sociale, d’équité, de transformation de notre modèle économique. S’il se répand, il rendra impossible les choix de société qu’il est vital de faire.
Nous combattons ce repli, conscients que la survie individuelle est une chimère, que les dictatures vertes sont un vrai risque pour la démocratie, et que notre seule solution réaliste est de nous imposer collectivement de nouvelles règles.
Nous n’avons plus confiance en la capacité, ni en la volonté de ce gouvernement comme des prochains, de porter et d’encourager cette transformation profonde. C’est pourquoi, nous, membres d’Extinction Rebellion, appelons tous les arrières-grands-parents, les grands-parents, les parents, les étudiants, et les plus concernés par le climat de demain – les jeunes et les enfants – à entreprendre des actions directes de désobéissance civile, ouvertes à tous, créatives, déterminées, et non-violentes.
Nous sommes pleins de rage contre un système qui organise la destruction du vivant. Nous sommes emplis d’amour pour cette planète.
Nous nous engageons à entrer en rébellion contre des adversaires qu’il est possible d’identifier. Car pendant que des citoyennes, des citoyens et des élu.e.s se battent sur leur territoire pour préserver forêts, montagnes et rivières, de « grands » projets industriels délirants soutenus par les finances publiques continuent de voir le jour. Car pendant que les accords climatiques se succèdent en vain, des banques, des assureurs, des entreprises, des gouvernements criminels continuent d’extraire les énergies fossiles qu’il faut pourtant bannir et garder sous terre pour espérer survivre. Nous viserons ces cibles sans fléchir.
Enfin, en refusant de reconnaître qu’une croissance infinie dans un monde aux ressources limitées est suicidaire, nos gouvernements sont complices. Quand l’État abandonne délibérément sa responsabilité de protéger ses citoyennes et citoyens, il rompt ses engagements. La révolte devient alors notre droit le plus sacré, et notre devoir le plus indispensable.
Parce que chaque dixième de degré compte, parce que chaque espèce disparue compte, parce que chaque minute compte, parce qu’agir nous ramène à la Vie, nous appelons à la désobéissance civile à grande échelle.
Nous avons tous la responsabilité et le devoir de passer à l’action, nous devons nous rébeller pour la vie. La désobéissance civile non violente est notre dernière chance, notre meilleure option, la voie plus efficace pour forcer un changement de système.
Nous sommes désormais prêtes et prêts à enfreindre la loi et à en subir les conséquences. Nous sommes prêtes et prêts à inonder les prisons pour que tout ce que l’on aime ne disparaisse pas sous les eaux. Quand l’espoir meurt, l’action commence.
L’action commence maintenant.
-XR France, 24 mars 2019 »
En réalité, ces gens ne sont prêts à enfreindre rien du tout. Ils sont un phénomène de mode. Dures paroles ? Nous avons dit la même chose au moment de la « grève » pour le climat dans les lycées français et force est de constater que nous avions alors vu juste. Tout cela est du cinéma et des pitreries conformistes, sans aucune analyse de fond des enjeux.
Pour qu’un mouvement dure, il faut des valeurs et une culture. Sinon, cela peut faire du bruit, mais c’est passager et cela n’apporte rien. Et il est difficile de produire des valeurs et une culture! Cela demande du temps, un engagement énorme. Qui est dans un esprit consommateur n’a aucune chance d’y parvenir.
Tout ce que dit d’ailleurs « Extinction Rébellion »,
c’est qu’on va à la catastrophe et que les gouvernement doivent
impérativement cesser les énergies fossiles le plus rapidement
possible. C’est là une expression de panique, pas un projet réel.
Et il est marquant que cette désobéissance passe sous silence de
manière radicale le véganisme.
Il est pourtant parlé de la destruction en cours de nombreuses espèces. Mais il n’en découle rien de positif, aucune reconnaissance positive des animaux, de la Nature dans son existence sauvage, de la planète comme système.
Tout comme les antispécistes font comme si le véganisme n’avait
pas existé depuis les années 1990, « Extinction Rébellion »
fait comme si l’écologie engagée de manière absolue n’existait pas
pareillement depuis les années 1990, voire bien avant. C’est comme
si les hippies ou Earth first !, l’ELF ou la scène vegan
straight edge n’avaient jamais existé, comme si le biocentrisme
était un concept jamais formulé.
Cela étant, ce n’est guère étonnant. Ce que dit « Extinction
Rébellion » c’est qu’il faut préserver la possibilité de
faire comme avant. Il y a une critique des grandes entreprises
polluantes, d’un mode de vie trop consommateur en énergie polluantes
ou productrices de Co2, mais aucune remise en cause du rapport à la
Nature en général. Il faut juste stopper les pollueurs. Il faudrait
un capitalisme « durable ».
« Extinction Rébellion » a pour cette raison pris comme logo un sablier placé au milieu d’un cercle représentant la planète, avec le vert pour l’écologie et le noir pour le deuil de la situation. C’est une expression de panique, sans ambition révolutionnaire ni volonté d’assumer une morale nouvelle et une identité non anthropocentriste. Pour tout dire, on peut les qualifier de gilets verts.
Ils expriment une panique, celle d’un monde changeant inévitablement de manière totale. Et ils ne veulent pas d’une Nouvelle Gaïa, ils veulent retourner en arrière.
A l’occasion du printemps, deux actes destructeurs ont été
commis en Haute-Savoie qu’on peut considérer comme en rapport avec
l’arrivée de la saison de la vie… Le second était une réponse
au premier, comme l’affirme ce communiqué :
« Dans la nuit du 20 au 21 mars, nous avons versé de la peinture sur les vitres du tractopelle qui commençait le chantier du centre commercial « Snow » à Sallanches.
Quelle honte que de débuter des travaux de destruction de la végétation de la zone humide le jour du printemps. Normalement à cette saison la nature ne meurt pas, elle revit. Cet acte est donc là pour gêner ce chantier qui détruit la nature alors qu’il faut la respecter ! »
Sallanches est une ville de 16 000 habitants dans une vallée
peuplée et industrielle, entre Annecy et Chamonix. Le supermarché
Carrefour en périphérie de la ville n’est pas jouxté par une
galerie commerciale : un promoteur spécialisé dans ce domaine
a considéré qu’il y avait pourtant là un potentiel économique.
Il a malheureusement réussi à l’emporter malgré la lutte.
La prairie attenante au supermarché est restée vierge suite à
un combat juridique de longue haleine permettant d’assurer sa
reconnaissance en tant que zone humide, permettant de gagner de
précieuses années pour en empêcher l’assèchement. Les opposants
locaux se sont appuyés sur ces démarches et ont reconnu ce travail
mené depuis les années 2000, surtout par la personne d’ Yvonne
Vuillaume, décédée en 2016. De nombreux recours juridiques avaient
empêché un premier projet en 2010.
C’est là quelque chose d’essentiel. Défendre une zone
humide, c’est défendre la Nature dans ce qu’elle a de plus
concrète, de plus essentielle. Il ne s’agit pas de lieux ou
d’espaces exceptionnels, spectaculaires, qui émeuvent à grande
échelle. Ce sont des endroits d’apparence banale, tout à fait
courants, bien que malheureusement de moins en moins présents.
Ce sont en effet de simples prairies marécageuses auxquelles
presque personne ne prête attention. Il y a pourtant là
quelque-chose d’essentiel, un moment de synthèse entre l’eau et
la terre, qui conditionne l’ensemble de la vie sur Terre, et donc
la vie de la Terre elle-même.
Défendre les zones-humides, s’opposer à leur asséchement, est
donc quelque chose de fondamental, presque basique en matière
d’écologie. Ou cela devrait l’être, et il y a eu en tout cas,
donc, depuis un certain temps maintenant tout un mouvement à
Sallanches en Haute-Savoie pour s’opposer à l’implantation d’un
centre-commercial appelé « The Snow » sur une grande
prairie, qui est une zone humide du bassin versant de l’Arve, aux
pieds du Mont-Blanc.
Leur lutte a échoué, mais elle est une leçon, d’une grande
importance même, car il y a eu la tentative de mobiliser directement
la population, posant ainsi la lutte écologiste de manière
démocratique, en ayant compris la nature du système économique qui
produit forcément ces destructions.
C’est là quelque chose de fondamental : on a à la fois
les gens et à la fois le contenu posé clairement. Ce n’est pas
quelque chose d’abstrait poussé par en-haut. C’est quelque chose
de difficile, mais incontournable. C’est une expérience précieuse.
Essayons de résumer, à grands traits, ce qui s’est passé,
avec son arrière-plan. Les fonctions naturelles des zones humides
étant facilement reconnaissables par la science, en tout cas pour
leur nature la plus essentielle, il y a eu une prise en considération
de cette question par les gouvernements à la fin du XXe siècle. Un
ensemble législatif permettant de limiter les dégâts en organisant
une certaine protection a été mis en place internationalement, puis
dans la plupart des pays. Il s’agit en France notamment de la loi
sur l’eau, qui est en général très connue des personnes
s’intéressant à l’écologie – il en a été énormément
question par exemple à Notre-Dame-des-Landes.
Seulement, cette loi est insuffisante, car elle ne protège pas de
manière systématique les zones humides. Elle organise même les
moyens de son propre contournement, ce qui fait que plus de la moitié
d’entre elles ont disparues en France depuis les années 1960. Ce
que ne peuvent pas les petites entreprises, les grandes le peuvent,
en donnant l’impression de « compenser ».
Ce qui a donc été possible à Sallanches pendant de nombreuses
années pour défendre cette zone humide, l’a été parce que le
rapport de force démocratique était favorable par rapport à des
recours juridiques. Mais tout a changé lorsqu’un promoteur de
grande envergure s’est intéressé à la chose, avec l’appui des
autorités locales.
Ce qui s’est passé est tout à fait habituel, et expliqué dans
le détail par les opposants dans leurs différentes documentations,
via surtout le site contrethesnow.fr : la législation
protégeant la zone humide n’a pas fait le poids face à des
intérêts capitalistes puissants et très bien organisés.
Le groupe Les Arches Métropole, qui explique avoir livré 180 000
m² de surfaces commerciales à travers la France en dix ans et
détenir 65 millions d’euros d’actifs foncier, a en effet très
facilement fait sauter les protections juridiques afin de détruire
la zone humide. Cela en toute légalité, du moins sans qu’il soit
possible de s’y opposer suffisamment sur le plan juridique.
En l’occurrence, à partir du moment où le promoteur a défini
lui-même ce qui relevait ou non de la zone humide et qu’il
s’engage à « compenser » au moins le double de la
surface qu’il a considérée comme étant une zone humide, il est
impossible d’empêcher le projet sans un grand rapport de force
populaire.
Il s’agit prétendument de recréer artificiellement les
fonctions écologiques (biologiques et hydrologiques surtout) de la
prairie humide, ailleurs. C’est une procédure tout à fait
courante, à laquelle les bétonneurs sont habitués, avec tout un
tas d’écologues et d’universitaires qui les aident dans leur
démarche destructrice. Ces gens sont des criminels, des
collaborateurs de la destruction de mère Nature.
Il faut bien voir ici que presque systématiquement, donc, lors de
la création d’un lotissement ou d’une zone d’activité, d’un
grand bâtiment, d’une route ou d’un échangeur, on a une petite
zone humide qui est asséchée, et plus loin un trou qui est creusé
avec de l’eau mis dedans, en guise de « compensation ».
La prairie attenante au Carrefour de Sallanches a donc été
considéré comme étant simplement une ressource foncière, qui plus
est « sur un site exceptionnel, à l’environnement arboré
qui fait face aux monts des Aravis », et sa nature humide a été
considérée comme secondaire.
L’erreur serait de croire que la question est ici d’ordre
juridique, avec la nécessité d’une expertise pour reconnaître le
niveau de « fonctionnalité » de la zone humide, pour
prouver la nécessité de la préserver. La question se pose en fait
bien plus profondément : il s’agit de savoir si l’on
considère ou non la Terre comme un organisme vivant, organisée de
manière complexe et minutieuse, avec sa propre valeurs à défendre
en tant que tel. C’est une question de vision du monde.
Le problème est ensuite démocratique : il s’agit de
convaincre la population que les gens qui nient la Nature ont tort,
et s’exposent forcément à de grands dangers, alors qu’il faut
au contraire reconnaître la Terre comme un être vivant, dont
l’humanité est une composante.
Le grand mérite du collectif local qui s’est lancé dans la
dernière grande bataille a été de comprendre dans ses grandes
lignes l’enjeu de ce qui se passait, et de poser dès le début le
combat pour la zone humide comme un combat démocratique, par en bas.
Ce qu’il fallait, c’était le soutien de la population, et
précisément de la population ouvrière, qui, objectivement, n’a
pas les mêmes intérêts que les entrepreneurs et leur besoin
d’accumulation de richesse avec le projet de galerie commerciale
« The Snow ».
Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas des gens subjectivement
conquis par la possibilité d’aller à un centre commercial, ou
bien qui monnaient leur âme dans la perspective d’un emploi. Nous
savons tous comment le mode de vie dominant lave le cerveau des gens
et fait perdre tout sentiment naturel, ainsi que toute mise en
perspective de l’avenir. Il faudrait consommer immédiatement, sans
réfléchir au lendemain, et s’éloigner le plus possible d’une
nature sans intérêt voire « hostile ».
Mais il s’agit de bien mener la bataille pour que les gens
comprennent ce que sont les destructions et à qui elles profitent.
Cela ne sert à rien parler d’écologie sans cela, à moins de
faire comme les riches ONG et de se complaire dans le témoignage et
la bonne conscience. Le fait que le directeur du WWF vienne de tout
abandonner du jour au lendemain pour rejoindre la liste d’Emmanuel
Macron pour les Européennes est encore un exemple de plus du manque
de sens de valeurs parmi tous ces gens qui vivent trop dans le
confort pour ne pas être corrompu.
Dès le début a donc été mené à Sallanches une intense
campagne d’information de la population, avec justement ce thème
que l’on pourrait résumer en : pour la nature, contre un
projet destructeur des entrepreneurs.
Cela n’a pas été suffisant, avec au plus fort du combat
seulement un noyau d’une grosse centaine de personne mobilisées,
et quelques milliers soutenant la démarche. Il appartient aux
personnes ayant mené ce combat d’en comprendre les raisons, les
difficultés, les éventuelles erreurs, les limites historiques. Il
n’en reste pas moins que ce fut une grande expérience, avec une
démarche à développer, là-bas et ailleurs, pour inverser enfin la
tendance contre la destruction de la Nature en général et des zones
humides en particulier.
C’est en systématisant les luttes démocratiques, portées par
la base, que les valeurs de défense de la Nature et de protection
des animaux se généraliseront et qu’un espace sera ouvert pour un
changement complet de la société française… A la condition de
bien définir ces luttes en s’appuyant sur le principe de la
défense de notre mère la Terre !
La grande actualité
écologiste, cela a été les deux manifestations pour le climat :
celle des lycéens le vendredi 15 mars 2019, celle appelée « marche
du siècle » le lendemain. Il s’agit là de deux événements
d’importance, parce que c’est la première fois que, au sens
strict, la question de la « catastrophe » est posée par
un mouvement d’en bas, du moins en apparence.
En théorie en
effet, ce sont les lycéens eux-mêmes qui se sont lancés dans
l’initiative, à l’appel de la jeune suédoise Greta Thunberg, et
la manifestation du samedi a été portée par la « société
civile ». En pratique, évidemment, les choses sont bien
différentes, et c’est pour cela que le terme à employer pour
parler de cela est aisément trouvé : c’est celui de vanité.
Vanité, car Greta
Thunberg est une construction médiatique lancée par des businessmen
faisant de la protestation un commerce en ligne, vanité car la
société civile n’a consisté qu’en les réseaux des ONG et des
milieux bobos. Le terme de vanité est important, car il ne s’agit
pas ici de critiquer la sincérité des gens présents. C’est
justement bien le problème, que cette sincérité.
Pourquoi ? Parce que cette sincérité est totalement en décalage avec la réalité. C’est de la mise en scène conforme à la domination de Facebook, d’Instagram et de Snapshat, cela n’a aucune incidence sur rien et cela ne porte strictement rien. C’est l’achat de la bonne conscience à bas prix, c’est digne de l’achat d’indulgences auprès du pape à la fin du moyen-âge
Les gens présents
ont comme mot d’ordre, pour résumer : nous avons péché,
mais nous ne le ferons plus. Et une fois cela fait, ils continuent.
Et ils n’échappent même pas à la vanité.
Prenons le terme de
« marche du siècle ». C’est une expression qui a un
sens et celui-ci est lourd ; elle veut dire par là que c’est
sensé être la plus grande marche du siècle, avec le plus de gens,
d’engagements, etc. On s’attend donc à quelque chose de fort, de
grandiose, en tout cas de très parlant.
Las ! Elle n’a
concerné à Paris, selon la police, que 45 000 personnes, et cela
alors que 140 ONG y appelaient. Prenons simplement une calculatrice
et faisons la division de 45 000 par 140 : cela fait un peu plus
de 321. Cela veut dire que chaque association n’a été en mesure
d’amener qu’un peu plus de 300 personnes pour une initiative se
voulant totale…
Même si on prend le
chiffre des organisateurs, soit 105 000, cela fait 750 personnes.
Cela reste infime si l’on part du principe que que les médias en
ont parlé de manière récurrente. Il ne faut donc pas se voiler la
face : on est ici dans un petit milieu, celui des associations,
des ONG, du mode de vie bobo, des gens liés à EELV.
Il y a bien plus à
attendre des efforts faits dans les 220 autres villes dans tout le
pays, où selon les organisateurs 250 000 personnes étaient
mobilisées. Mais cela sera sur le long terme, car dans le fond c’est
le style parisien qui prédomine, et c’est totalement vain.
Critique facile, critique tout aussi vaniteuse ? L’avenir
le dira, puisque si la marche du siècle a vraiment été ce qu’elle
prétendait être, alors son impact va être énorme. Sinon, cela
n’aura été qu’une anecdote de plus, tout comme les
mobilisations au moment de la COP21. Et on pourra dire que le slogan
« Macron t’es foutu, les pandas sont dans la rue » aura
été d’une profonde ironie criminelle à une époque d’écocide
généralisé.
Notons au passage d’autres vanités du même niveau de mauvais
goût, d’inconscience et de décalage avec la réalité. La fin du
cortège parisien parlait de tout sauf le climat (le logement,
Emmanuel Macron, les étudiants étrangers, etc.). Il y avait un bus
du mouvement GAF (give a fuck) avec de la musique pour une rave party
pour le climat avec comme mot d’ordre « Parce que danser,
c’est aussi militer ». Mais bien sûr !
Et L214 était avec le parti animaliste, entonnant « Lâche
ton couteau pour les animaux. Lâche ton steak, pour la
planète. » Faut-il également mentionner la présence de
Cécile Duflot, ex-ministre de l’écologie dont on ne rappellera
jamais assez le coup de Copenhague, qui était ravie de la marche et
parlait « d’énergie du désespoir » ?
Il y a évidemment
plus d’espoir chez les jeunes, qui eux ont bien compris que les
choses allaient mal tourner. Ils ne sont pas dupes et c’est pour
cela qu’ils ont manifesté en masse. Il y a ainsi eu 40 000
personnes à Paris, 15 000 à Lyon, plusieurs milliers à
Montpellier, Strasbourg, Rennes, Bordeaux, plusieurs centaines à
Lille, Clermon-Ferrand, etc.
Le problème, c’est
que si les jeunes savent, ils restent consommateurs. Tout le contenu
leur a été fourni par des ONG internationales qui en profitent pour
s’installer. Rappelons que cette marche des lycéens a eu lieu
d’ailleurs dans 123 pays, avec l’appui ouvert des médias, voire
des institutions elles-mêmes…
De plus, l’horizon
ne va pas plus loin que le tri sélectif et la moindre utilisation de
plastique, avec l’inévitable rhétorique sur le fait que
l’humanité va vivre moins bien en raison du réchauffement
climatique, et que les jeunes sont les premiers concernés.
Si l’on est
bienveillant ou naïf, on dira : c’est élémentaire, mais un
début. Si l’on est objectif ou circonspect, on dira : ces
jeunes ne comprennent rien à rien et ont 10, 20 ou 30 ans de retard.
Dans tous les cas, impossible de nier que toute l’approche reste
fondamentalement anthropocentriste, malgré de beaux slogans pour la
Nature ici ou là, ainsi que des mots d’ordre en faveur de la
planète en général. Cela ne dépasse le plus souvent pas le cadre
de la poésie ou de la sensibilité, ce qui n’est déjà pas si
mal, mais cela n’apporte rien.
Disons les choses franchement, ou plutôt posons la question. Même en admettant que toutes ces critiques soient erronées et que, donc, ces deux marches étaient de très bons signes, tout au moins des signes allant dans le bon sens… Comment va-t-on aller à un changement total de perspective d’ici 20 ans
Car le temps passe.
Chaque jour qui passe, ce qui est à faire s’avère encore plus
immense. La consommation de la viande est en train de doubler de
volume, la déforestation de l’Amazonie c’est grosso modo un
terrain de football en superficie toutes les secondes. A cela
s’ajoute la pollution toujours plus grande, dans tous les domaines,
le réchauffement climatique, l’écocide généralisé.
Tout cela doit être
résolu dans les 20 ans, sans quoi il va y en avoir pour au minimum
30-40 ans de profonds tourments à l’échelle planétaire, et cela
dans le meilleur des cas. Ainsi, même avec la meilleure volonté du
monde, il faut oser le dire : tout cela est de la vanité, de
l’achat de bonne conscience comme hier on achetait des indulgences.
Tout cela n’est
pas à la hauteur de ce qu’exige la planète à notre époque !
L’une des plus
grandes faiblesses de la défense des animaux en France est
l’incapacité à former un mouvement anti-vivisection avec une
grande base populaire. Il y a toujours eu des gens avec une très
grande abnégation pour ce combat, comme International Campaigns,
mais malheureusement les personnes défendant les animaux n’ont
jamais compris la signification de la question.
Essayons de
contribuer à ce grand travail restant à mener, avec un regard sur
un ouvrage important écrit par celui qui est considéré comme la
plus grande figure de la vivisection : Claude Bernard. L’ouvrage
en question, de 1876, est intitulé les Leçons sur la chaleur
animale sur les effets de la chaleur et sur la fièvre.
L’auteur y est
présentée de la manière suivante :
« Membre de l’Institut de France et de l’Académie de médecine, Professeur de médecine au Collège de France, Professeur de physiologie générale au Muséum d’histoire naturelle, etc. »
On a ici ce qu’on
appelle une sommité. Précisons d’ailleurs tout de suite qu’il
ne s’agit pas ici de dénoncer la science ou la médecine, ni les
scientifiques ou les médecins. Il s’agit de critiquer une méthode,
en soulignant que science sans conscience n’est que ruine de l’âme.
Le piège est ici
bien entendu qu’il n’y a pas de science sans expérience et c’est
là qu’intervient la véritable déconnexion de toute sensibilité.
Claude Bernard rappelle l’importance de l’expérience en la
définissant ainsi dans son rôle par rapport à la science :
« La médecine, ainsi que toute science, peut être envisagée par ceux qui la cultivent à deux points de vue : ou bien on se contente d’observer les phénomènes, d’en constater les lois, ou bien on se propose de les expliquer et d’en dévoiler le mécanisme à l’aide d’expériences.
Il y a donc une médecine d’observation, et, si vous me permettez le mot, une médecine d’explication expérimentale. C’est cette dernière que nous revendiquons comme le domaine de cette chaire. »
Seulement voilà,
Claude Bernard a une conception totalement étroite du domaine de
l’expérience. Il appelle cela la « physiologie ». En
apparence, c’est très bien parce qu’il veut dire par là que les
êtres vivants n’existent pas par magie. Il n’est pas religieux,
si l’on préfère. Ils ne croient pas que les êtres vivants
existent parce qu’il y aurait une sorte de souffle mystérieux ou
on ne sait quoi encore.
Mais cela l’amène
à séparer totalement le corps de tout le reste de la nature.
Faisons ici une citation pour bien cerner son point de vue :
« La conception de Descartes domine la physiologie moderne. « Les êtres vivants sont des mécanismes. » La cause immédiate des phénomènes de la vie ne doit pas être poursuivie dans un principe ou dans une force vitale quelconque.
Il ne faut pas la chercher dans la psyché de Pythagore, dans l’âme physiologique d’Hippocrate, dans la pneuma d’Athénée, dans l’archée de Paracelse, dans l’anima de Stahl, dans le principe vital de Barthez.
Ce sont là autant autant d’êtres imaginaires et insaisissables. (…)
Il ne serait pas exact de dire que nous vivons dans le monde extérieur. En réalité, je ne saurais trop le répéter, nous n’avons pas de contact direct avec lui, nous n’y vivons pas.
Notre existence ne s’accomplit pas dans l’air, pas plus que celle du poisson ne s’accomplit dans l’eau ou celle du ver dans le sable. L’atmosphère, les eaux, la terre, sont bien les milieux où se meuvent le animaux, mais le milieu cosmique reste sans contact et sans rapports immédiats avec nos éléments doués de vie.
La vérité est que nous vivons dans notre sang, dans notre milieu intérieur. »
Ce que rejette
Claude Bernard ici, c’est le principe de Gaïa, d’une planète
vivante. Pour lui chaque être vivant est replié sur lui-même, en
lui-même. A l’époque, cela faisait très sérieux ;
aujourd’hui même quelqu’un rejetant le principe de Gaïa est
bien obligé d’admettre qu’il existe une interaction entre les
êtres vivants et leur environnement, rien que par les bactéries.
De notre point de
vue, l’humanité est d’ailleurs condamnée si elle ne cesse pas
son anthropocentrisme et ne se rattache pas au grand « tout »
que forme la Nature sur la planète.
Ce n’est cependant
pas l’aspect qui nous intéresse directement ici. Ce qui compte,
c’est que la considération d’un « milieu intérieur »
aboutit à le prendre comme un chose distincte de tout le reste, et
perdant donc son rapport avec tout le reste. Par conséquent, on peut
prendre cette chose séparément et faire ce qu’on veut avec. C’est
un objet indépendant de tout le reste.
Le lapin n’est
donc plus un lapin dans une prairie, mais un lapin, un seul lapin, un
« milieu intérieur » unique. Si on reproche à Claude
Bernard sa vivisection d’animaux, il répondrait qu’il ne
pratique pas la vivisection sur les animaux, mais sur des animaux, et
plus exactement sur tel pigeon, tel cheval, tel chien.
Le rejet de la
Nature aboutit à la choséification des êtres vivants, mais ce
rejet ne voit pas le rapport avec l’ensemble, il sépare tout. D’où
son incapacité à comprendre les reproches qui lui sont faits.
Il y a pire,
pourtant ! Car à cela s’ajoute une terrible perversion !
Et si on rate cette dimension, alors on rate la substance de ce
qu’est la vivisection.
Si en effet un
milieu intérieur est un petit univers en soi, alors cela veut dire
qu’il faut expérimenter cet univers dans toutes ses possibilités.
Cela aboutit à des expériences toutes plus différentes les unes
que les autres, non pas pour trouver quelque chose qu’on
chercherait, mais simplement pour tester, histoire de voir.
On parti ici à la
« découverte ». On ne peut pas apprendre les choses « de
l’extérieur », puisqu’il n’existe qu’un « intérieur ».
Cela veut dire que la vivisection est un processus sans fin, n’étant
pas là pour chercher quelque chose, mais pour découvrir !
D’où les
multiplications à l’infini des variantes. Ce qui donne par
exemple :
« 1° Couper la moelle épinière ;
2° Refroidir directement l’animal en l’exposant à l’action d’un milieu réfrigérant ;
3° Immobiliser l’animal pendant un temps suffisant ;
4° Enduire l’animal d’une couche de vernis imperméable ;
5° Soumettre l’animal à des mouvements de balancement. »
C’est cela, très
exactement, qui est l’idéologie de la vivisection. Essayer, juste
pour essayer, jusqu’à quel point le liquide reste liquide, comment
il réagit à tout ce qu’il est possible d’imaginer, dans
l’abstraction totale de la réalité extérieure ainsi que de la
nature sensible de la vie, c’est la vivisection.
Il faut essayer ce
qui se passe à 10, 11, 12 degrés etc. et ce dans tout ce qu’il
est possible matériellement d’essayer ; il faut essayer
toutes les combinaisons, il faut épuiser toutes les possibilités.
La vivisection n’est pas une science de la recherche, mais une
logique de la découverte.
La vivisection ne
veut pas étudier la vie comme réalité sensible, comme processus
vivant ; elle regarde tous les paramètres, même ceux
totalement impossibles en situation naturelle, du « milieu
intérieur ». Ce « milieu intérieur » est une fin
en soi, c’est comme une sorte de micro univers à explorer. Le
vivisecteur s’imagine avant tout comme un explorateur.
Faut-il y voir un
rapport avec l’esprit colonial prédominant dans les mentalités
alors ? En tout cas, la vivisection ne peut pas être réformée ;
elle est une véritable philosophie, une vision du monde très
particulière. Si l’on admet la vivisection, alors celle-ci est la
seule forme de connaissance du vivant.
Voici un exemple de
ce que cela donne très concrètement, raconté donc par Claude
Bernard dans son ouvrage, avec une froideur « scientifique »
qui est en réalité le fruit d’une lecture anti-naturelle et d’une
perversion de la connaissance.
« Les expériences furent faites dans mon laboratoire sur des chiens, et dans les abattoirs sur des moutons. Dans ces deux séries d’expériences, d’une part sur les chiens, d’autre part sur les moutons, le sang du cœur droit fut toujours trouvé plus chaud que le sang du cœur gauche.
J’opérais sur des animaux vivants et non anesthésiés. Le thermomètre était introduit successivement par la veine jugulaire et par la carotide jusque dans les ventricules du cœur. »
On a ainsi Claude
Bernard qui refuse d’utiliser les anesthésiants, car ceux-ci
perturberaient l’expérience, mais qui utilise du curare pour
paralyser les nerfs moteurs (l’animal ressentant tout par contre),
pour plonger du matériel le long des veines, le plus loin possible,
jusqu’aux cavités du cœur pour mesurer la température.
C’est une approche
systématique ; Claude Bernard coupe par exemple la moelle
épinière pour mesurer la température de deux muscles, un en
contraction et l’autre pas, il broie le ganglion thoracique pour
mesurer la température de l’oreille et de la patte antérieure du
côté concerné, etc.
Cette logique de
l’exploration, dans le cadre de la vivisection, exige de souligner
un autre aspect. Car, à la douleur d’être littéralement
massacré, s’ajoute bien sûr également la terreur. Il ne faut
jamais oublier cela !
La vivisection n’est
pas seulement un crime parce qu’elle torture. La torture est déjà
un crime en soi, inacceptable, mais il est bien connu que l’on y
résiste mieux, si on ose dire, si on sait pourquoi on l’est, par
exemple pour des raisons politiques.
Là, les animaux ne
peuvent rien comprendre à part avoir l’impression d’être tombé
dans une sorte d’enfer. C’est du terrorisme et c’est également
condamnable.
Certains diront
peut-être : c’est regrettable, mais la science ne pouvait pas
procéder autrement pour savoir. L’expérience serait inévitable.
La thèse semble juste mais elle est erronée si elle ne précise pas
la nature de l’expérience, son rapport avec le monde réel. Sans
cela une expérience est au mieux quelque chose de farfelu, au pire
une escroquerie intellectuelle, servant ici à la pratique
criminelle.
Prenons à ce titre
ce que Claude Bernard raconte dans son étude de la chaleur
corporelle. On notera que le ton neutre de l’ouvrage est
systématique, qu’il parle des expériences sur des animaux ou
qu’il présente des théories générales sur des questions
médicales.
« Si l’on place dans une étuve sèche à 60 ou 80 degrés deux lapins, – l’un vivant, l’autre mort mais encore chaud et venant d’être sacrifié par la section du bulbe rachidien, – on constate que les deux lapins s’échauffent inégalement ; l’animal vivant s’échauffe bien plus rapidement que l’animal mort placé dans les mêmes conditions. »
Cette expérience
est totalement absurde sur le plan intellectuel. Elle ne se justifie
en rien scientifiquement, puisque ce qui s’y produit était connu
par avance même. C’est une preuve que la vivisection se nourrit
d’elle-même. En voici un autre exemple, car la vivisection
s’appuie de manière ininterrompue sur de thèmes pseudos
expériences qui seraient en même temps des preuves.
Claude Bernard y
explique comment il place des animaux dans des situations d’une
chaleur insoutenable.
On a ainsi Claude
Bernard découvre qu’en plaçant des animaux dans une étuve, au
bout d’un temps, ils meurent ! Il faut ici être totalement en
décalage avec la réalité pour ne pas voir qu’on est ici dans une
folie furieuse, pas dans la science. On se croirait revenu à
l’antiquité, lorsque pour tuer atrocement on plaçait des gens
dans un taureau de métal que l’on faisait chauffer à blanc, les
cris des suppliciés passant dans le nez du taureau par un réseau de
tubes !
La seule motivation
de tout cela, c’est l’exploration avec une fascination morbide
pour la réaction de la sensibilité. Cela relève de la perversion,
du crime.
Et que dire lorsque
Claude Bernard raconte qu’on peut enlever une paroi pour y placer
une vitre, afin de voir ce qui se passe, à quoi est-on obligé de
penser ? Aux chambres à gaz des nazis, avec leurs vitres pour
surveiller le « succès » de l’opération.
La vivisection est
l’idéologie des variantes infinies de ces perversions. Claude
Bernard modifie la température, change d’animaux, met le corps
entier ou bien sort la tête de l’étuve, etc. Sa seule orientation
est l’accumulation de ces expériences, dont il fait des tableaux
de chiffres, toute la réalité sensible ayant disparu.
A ceux qui disent
que cela permet de mieux connaître le vivant, on pourra répondre
simplement : lorsque Claude Bernard fait cette expérience avec
deux lapins, dont un recouvert d’huile pour empêcher la
transpiration, ne sait-il pas déjà ce qui va se passer ? Quel
est l’intérêt, si ce n’est d’aligner toutes les perversions
possibles ?
Ce qui est fou ici
en plus, c’est que cette image illustre les propos de Claude
Bernard au sujet d’expérience de jeunesse, menées sur le tas,
avec des plaques de fonte achetées dans un bric-à-brac, etc.
Ce n’est pas une
approche scientifique, c’est un empirisme érigé en science par sa
systématisation. Alors évidemment, quand on teste tout, on trouve
des choses. Cela n’en fait pas une science, juste des expériences
accumulées.
La froideur complète
du vivisecteur en est la conséquence. En voici une illustration
qu’on trouve dans l’ouvrage de Claude Bernard. Le dessin ici
représenté présente la machine dont il parle.
« Dans l’étuve, nous plaçons un moineau ; la température est d’environ 65 degrés. Au bout d’un instant, nous voyons l’animal ouvrir le bec, manifester une anxiété qui devient de plus en plus vive, repirer tumultueusement ; enfin, après un instant d’agitation, il tombe et meurt. Son séjour dans l’étuve a duré quatre minutes. (…)
Nous faisons la même expérience sur un lapin : la même série de phénomènes se déroule, avec plus de lenteur il est vrai, car il ne meurt qu’au bout de vingt minutes environ. »
Le processus de
désensibilisation propre à ces expériences fabrique des criminels.
Comment s’étonner de ce que les médecins nazis ont pu faire
ensuite dans les camps ?
Voici un autre
exemple de la prose de l’assassin :
« Engourdissons par le froid une grenouille sur laquelle le sternum enlevé permet d’apercevoir le cœur à nu. Les battements sont très ralentis ; alors plongeons un des membres postérieurs de l’animal dans l’eau tiède, presque instantanément une accélération se manifeste dans les battements du cœur. »
En voici un
dernier :
« Quand on opère sur des animaux dans l’état ordinaire, qui ne sont ni contenus par le curare, ni anesthésiés par le chloroforme, le premier effet des atteintes de la douleur est toujours de provoquer une sorte de réaction de sensibilité, réaction qui se traduit par une paralysie instantanée des nerfs vaso-moteurs, avec dilatation des vaisseaux périphériques et chaleur ; puis des mouvements violents apparaissent sur le sujet en expérience : l’animal se débat, il résiste, il essaie de s’échapper.
De là des contractions musculaires qui sont encore une source puissante de calorique. A cette première période d’agitation, à laquelle correspond l’élévation de température du début, succèdent bientôt les effets propres de la douleur ; on voit alors la température s’abaisser d’une façon définitive et descendre au-dessous du niveau naturel. »
On a ici une
désensibilisation complète. Elle est peut-être inévitable :
on sait comment les croque-morts font des blagues sur les morts,
comme les médecins établissent un rapport assez mécanique avec le
corps des autres, qu’ils « réparent ».
Mais cela ne veut
pas dire qu’ils explorent comme bon leur semble un corps sensible,
en le charcutant ! Et ils ne prétendent pas faire de la science
en essayant tout et n’importe quoi pour dire après : on a
trouvé quelque chose !
Il y a
malheureusement une affaire Greta Thunberg, qui a même, pour
renforcer le côté catastrophique de la chose, été lancé par les
milieux d’extrême-droite. Cette dernière est en effet
climato-sceptique, elle ne croit pas en le réchauffement climatique,
qu’elle voit comme un « complot » visant à
collectiviser le monde.
Ce en quoi elle
porte un regard assez conséquent, dans la mesure où le
réchauffement climatique implique la fin de tout un style de vie
individualiste et égoïste, que ce soit pour les gens comme pour les
nations. L’extrême-droite étant nationaliste, elle est donc
obligée de nier le réchauffement climatique.
S’il y a une
affaire Greta Thunberg, c’est parce que cherchant à discréditer
celle-ci, les milieux d’extrême-droite ont réussi à mettre la
main sur l’arrière-plan de la promotion médiatique de cette jeune
fille qui a désormais 16 ans. Tout a été, selon eux,
méticuleusement organisé par des experts qui ont organisé toute
une mise en scène.
Ont-ils raison ?
A vrai dire à moitié, parce qu’il y a à la fois une opération
marketing et, ce qui est terrible, la volonté pragmatique de servir
la « cause ». Entendons-nous bien : les gens qui ont
fait la promotion de Greta Thunberg ont des valeurs qui sont
certainement très proches de celle de LTD. Le souci est qu’au lieu
de faire un travail démocratique auprès des gens, ils ont construit
une sorte de bulle médiatique semi-sincère, afin d’être
« efficace ».
Ce pragmatisme est
moralement faux et qui plus est ne touche qu’à la surface des
choses. Les actions spectaculaires, médiatiques, ne travaillent pas
la société dans ses fondements. L214 et « 269 animal
liberation » ont l’attention des médias, mais jamais ils ne
changeront la société française et ses fondements. Pour cela il
faut un travail local, culturel, militant, en profondeur et ce
travail n’est que réalisé ici et là par des gens très
courageux, dans l’ombre.
Cette ombre est
juste et c’est même le seul endroit pour travailler, à l’abri
des regards indiscrets, que ce soit de la police, des médias ou
l’extrême-droite. Passer à la télévision c’est comme se faire
arrêter par la police ou frapper par des fachos : cela paralyse
le travail démocratique chez les gens « normaux ».
L’affaire Greta
Thunberg est un exemple de ce pragmatisme qui amène des
mobilisations en surface, avec de l’attention et même parfois du
monde, mais toucher les fondements de la société. C’est une
opération qui vise à plaire, à engourdir les mentalités pour
« faire passer le message ». Comme on le dit, l’enfer
est pavé de bonnes intentions.
S’il y a en tout
cas un problème à la base même de l’affaire Greta Thunberg, ce
n’est pas sa jeunesse, car on peut tout à fait être militant,
avec un haut niveau d’engagement, à cet âge-là. L’extrême-droite
ne se prive pas naturellement de l’attaquer sous cet angle,
dénonçant une « gamine », ainsi que le fait qu’elle
soit une fille.
Non, le problème de
fond est bien plus triste, voire sordide. Si l’on prend le dernier
« Predators », un film qui vient de sortir et qui est un
navet touchant le fond, on y voit que les tueurs extra-terrestres
s’entraînant sur chaque planète assimilent l’ADN des meilleurs
combattants qu’ils rencontrent. Et sur Terre il y a un enfant
autiste qui s’avère génial, capable d’utiliser leurs soucoupes
volantes et leurs armures : il représente l’homme de demain,
les tueurs de l’espace veulent donc se l’approprier.
Cela est naturellement une sorte de cliché terrible. Le souci est qu’on a la même chose avec Greta Thunberg. Celle-ci a de nombreux soucis, étant atteint de ce qui est défini comme l’autisme dans sa version Asperger, ainsi que des problèmes de mutisme. Quiconque sait à quoi cela ressemble comprend immédiatement l’ampleur de la question : on ne peut agir qu’avec une grande délicatesse avec ce genre de personnes.
Or là Greta Thunberg se retrouve précipitée dans un bain médiatique. Peut-elle l’assumer, elle qui à onze ans a connu une période où elle n’a plus voulu parler ? C’est très difficile comme situation. Et au lieu d’une protection de la jeune fille, cela va avec une théâtralisation énorme. Elle se serait intéressée au réchauffement climatique à huit ans, aurait amené sa famille à assumer le véganisme et à ne plus prendre l’avion, etc. C’est l’image du petit génie mêlée à la pureté de la jeunesse pour une opération de rédemption.
C’est quand on voit cela qu’on se dit qu’il y a là un problème, et c’est là que Ingmar Rentzhog rentre dans l’histoire de tout ça. C’est à la base un businessman, qui a vendu récemment son entreprise Laika, en partie seulement, puisqu’il fait encore partie de la direction. Elle était spécialisée dans le conseil d’entreprises financières pour tout ce qui touche internet et a été revendue à FundedByMe, une entreprise suédoise de crowdfunding.
Ingmar Rentzhog a alors fondé dans la foulée « We Don’t Have Time ». C’est une start up qui, depuis un an, cherche à jouer sur les réseaux sociaux pour promouvoir la lutte contre le changement climatique. On est ici un milieu d’entrepreneurs et de bobos, qui entendent se faire de l’argent tout en agissant pour que les choses aillent dans le bon sens, etc.
On est, en tout cas, chez des pros de l’utilisation des réseaux sociaux, dont c’est directement le métier : We don’t have time est une entreprise qui veut monter un réseau social de 100 millions de personnes qui soit une marque, avec une fondation derrière qui œuvre pour la « pour la bonne cause »
Pour résumer sommairement l’idée de la start up est de disposer d’une base de gens cherchant à bien faire et formant une base pour Facebook et Twitter. Quand un nombre suffisamment grand sera atteint, alors des « partenariats » avec des entreprises cherchant à disposer d’une bonne image pourra être effectué. Le modèle assumé de cette entreprise est Tripadvisor
Ce mélange de genre est ignoble, mais voici donc ce qu’on ne peut considérer que comme une légende, pour ne pas dire un pieux mensonge. Ingmar Rentzhog amène son fils au jardin d’enfant, son fils est triste de quitter son père, lui-même ne se sent pas bien
Puis il va au travail et sa route passe, comme par hasard, devant le parlement. Et là, alors qu’il est tout plein encore d’émotions par rapport à son fils de trois ans, il découvre une jeune adolescente « en grève » devant le parlement !
C’était le premier jour d’une grève devant aller jusqu’aux élections, une mobilisation en faveur de la lutte contre le changement climatique ! Quel curieux hasard… Donc, Ingmar Rentzhog raconte tout cela dans un post larmoyant sur les réseaux sociaux, expliquant que, de manière scandaleuse :
« Pendant le temps que j’étais là-bas, il n’y avait qu’un seul passant qui a pris sa fiche d’information. Personne sauf moi ne lui a parlé! »
Il faudrait donc la soutenir :
« Passez devant le Parlement. Parlez à Greta et montrez qu’elle n’est pas seule. ♥ ️ Elle a besoin de votre soutien maintenant ! »
Cette publication sur Facebook et Instagram a évidemment dès l’origine été publiée sur le compte de We don’t have time. Depuis, Greta Thunberg en est devenue une des « conseillères pour la jeunesse ». Et tout cela a l’air bien trop gros pour être vrai.
Il y a d’ailleurs un élément de plus qui ajoute à la dimension « opérative » de tout cela. Greta Thunberg a son père et deux grands-parents qui sont des acteurs connus en Suède, sa mère Malena Ernman est une chanteuse d’opéra, qui a été également à l’eurovision en 2009, et prix du WWF l’année dernière pour ses positions pour l’environnement.
Or, que fait-elle juste au moment où la grève scolaire de Greta Thunberg est lancée ? Elle publie un ouvrage, Scener ur hjärtat, Des scènes venant du coeur, où elle raconte la maladie de sa fille et l’importance qu’a eu la lutte contre le réchauffement climatique pour résoudre la crise familiale.
Et, comme par hasard, les parents de Greta Thunberg travaillent maintenant – sans être rémunérés – avec We don’t have time. Ces gens pensent-ils bien faire, en mettant en avant la lutte contre le réchauffement climatique ? Ou bien sont-ils seulement un peu sincères, ayant en tête un plan machiavélique pour faire booster une entreprise cherchant à être le roi du pétrole de la cause du réchauffement climatique sur les réseaux sociaux ?
Dans tous les cas, c’est totalement anti-démocratique. Et on a vu comment les médias se sont précipités dans cette brèche, répondant à l’appel du marketing et du branding, c’est-à-dire du fait de mettre en avant une marque. Greta Thunberg fait vendre !
Certains médias ont même dit que la télévision suédoise avait trafiqué la présentation du discours de Greta Thunberg à Katowice, à l’occasion de la COP 24. Il n’y aurait eu personne dans la salle et cela aurait été maquillé comme un succès fermant le clapet aux puissants de ce monde. Est-ce vrai ? Peu importe au final, car dans tous les cas on est ici dans quelque chose de douteux, d’hostile au principe de participation populaire.
Quand on voit que Greta Thunberg va au forum économique mondial de Davos avec son père, à une conférence avec les plus puissants de la planète, on se dit bien que cela n’a aucun intérêt, alors quel intérêt que ce soit vrai, faux ou entre les deux ?
En tout cas, il est certain que la valorisation de Greta Thunberg au moyen de photos habilement construites (et professionnelles dans l’esprit) est savamment construite. Sa venue à Davos en 32 heures de train a été bien médiatisé, tout comme le fait qu’elle dorme dans un camp de tentes.
Cela plaît aux médias qui trouvent matière à promouvoir quelque chose de « positif » et attirant l’attention, donnant qui plus est l’impression qu’on peut changer les choses sans les changer. « À Davos, Greta Thunberg éclipse patrons et présidents » dit France 24, avec un lyrisme entremêlé de pathétique :
« Ni un chef d’État tonitruant, ni un millionnaire flamboyant ou un patron innovant: la vraie vedette de l’édition 2019 du Forum de Davos a 16 ans, deux longues nattes, et une détermination à sauver la planète qui a impressionné l’élite mondiale.
« Elle a réduit tout le monde au silence… Cette jeune fille était extrêmement émouvante », dit à l’AFP le patron du site de voyages en ligne Expedia, Mark Okerstrom, après l’intervention devant une salle comble de la Suédoise Greta Thunberg.
Dès son arrivée à la gare de la station de ski huppée mercredi, après 32 heures de voyage, les caméras se sont massées pour suivre cette adolescente menue aux joues rondes, icône de la lutte contre le changement climatique pour de nombreux jeunes dans le monde.
« La maison brûle », assène-t-elle pendant son discours. « Les adultes disent qu’il faut donner de l’espoir aux jeunes », continue Greta Thunberg, sourcils froncés en triturant ses fiches.
Et de lancer: « Je ne veux pas de votre espoir mais je veux que vous commenciez à paniquer ». »
Ses réseaux sociaux répondent évidemment de manière habile et très construite. Arnold Schwarzenegger, qui se targue d’être un grand écologiste, l’invite à Vienne, pour l’Austrian World Summit, et sur son compte la réponse dit : « Comptez sur moi. Hasta la vista baby. » Il y a tout de même peu de chances que ce soit elle, mais c’est rondement mené.
Le paradoxe, c’est que cela ne marche même pas tant que cela. Greta Thunberg a 130 000 personnes la suivant sur Twitter, ce qui est peu pour quelqu’un avec une image aussi bienveillante et une renommée mondiale. C’est que les gens consomment et là où il n’y a pas de fond, il ne reste rien. Non pas que Greta Thunberg dise des choses fausses, mais ce sont des propos moralistes, appelant à se bouger. Cela n’engage en rien, ce n’est pas une vision du monde.
On peut faire du bruit avec ce genre de choses, avoir du monde en proposant quelques actions, mais qu’en restera-t-il ? De l’égo, des likes sur facebook, la fausse impression d’avoir fait avancer les choses, un grand turn over car les gens ne restent pas, puis à la fin l’échec, le ressentiment, et le retour de l’apathie.
Qui se souvient en France de Droit Des Animaux, dont les activistes ont été hyper actifs ? Ou bien des « Furieuses carottes » ? Personne, et la même chose arriver à L214, « 269 animal liberation ». En un sens, cela aura fait avancer les choses, en fin de compte cela n’aura rien changé.
Et ce qui est le plus odieux, pour conclure, est que ces gens auront obtenu de la reconnaissance, alors que les vrais travailleurs de l’ombre auront été oubliés. Prenons l’association vegan.fr, dont nous ne partageons pas la vision du monde, donc nous pouvons le dire encore plus facilement. Pendant des années, elle a diffusé la pensée de Gary Francione tout en faisant la promotion du véganisme, ayant compris que sans philosophie à l’arrière-plan, le véganisme ne peut pas se maintenir. Elle n’a pourtant jamais obtenu l’attention qu’elle méritait.
Les gens ont préféré apparaître sur le net, consommer en masse des produits Sea Shepherd (un énorme succès commercial !), participer à des actions « concrètes » sans lendemain, être révolté un bon coup pour disparaître ensuite. Voilà quel est le problème de fond et c’est là-dessus que table les gens utilisant Greta Thunberg.
Demain il n’y aura même plus de place pour la Fondation Brigitte Bardot ou L214 ; il n’y aura que des monstres internationaux comme le WWF, utilisant les réseaux sociaux comme une arme absolue pour « exister » et capter toute attention.
Ce qui montre bien qu’à la base même, tel n’était pas le chemin qu’il fallait prendre. Seule une lutte de mobilisation démocratique peut faire passer les valeurs du véganisme dans la société ; seule une philosophie résolument claire – et pour nous c’est la défense de la Nature, avec la morale vegan straight edge – peut faire du véganisme une citadelle imprenable.
Et cela implique une révolution complète des mentalités, l’écrasement matériel des forces sociales détruisant la planète et asservissant les animaux, un engagement sans compromis en défense de notre mère la Terre.
Voici le texte très intéressant lu lors d’un rassemblement d’une centaine de personnes pour protéger la zone humide de Sallanches, le 6 janvier 2019. La construction d’un centre commercial, dénommé « The snow », doit la détruire.
En apparence, du
point de vue dominant, c’est en effet absurde : on a des gens
refusant la destruction de quatre hectares de zone humide pour
laisser la place à un centre commercial. Si pourtant cette zone est
compensée, que cela crée des emplois, pourquoi se révolter ?
N’est-il pas dans
l’ordre des choses de bétonner et de proposer un certain type de
consommation, allant avec un style de vie ?
Le maire,
d’ailleurs, s’est empressée de porter plainte à la gendarmerie
pour les affiches collées appelant au rassemblement… On ne
plaisante pas avec les lois du marche !
C’est cette fausse
rationalité à laquelle les opposants se confrontent, qui plus est
dans la vallée de l’Arve, marquée par une terrible pollution.
Car, comme l’a expliqué un opposant à la presse :
« On ne peut pas remplacer le résultat de milliers et de milliers d’années d’évolutions naturelles complexes à coups de pelleteuses en quelques mois. »
Espérons que cette
mobilisation parvienne à se renforcer, alors que pour l’anecdote,
les gilets jaunes sont passés lors du rassemblement en espérant
happer le mouvement, mais l’opération a heureusement échoué.
Prise de parole lors du rassemblement du 06/01/2019
Bonjour et merci à toutes et à tous d’être présent a ce rassemblement pour défendre la Zone humide de Sallanches.
Si nous sommes réunis ici c’est pour exprimer une nouvelle fois notre refus du projet de centre commercial « The Snow » qui vise la destruction de plus de 4 hectares de zone humide à la Paccoterie.
Ce rassemblement a pour objectif de remettre à monsieur le maire, Georges Morand, la pétition d’opposition au projet qui a été créée à l’automne 2017 et a recueilli plus de 2 150 signatures. C’est un véritable succès populaire qui rappelle que l’enjeu écologique est pris au sérieux par la population locale. Précisons qu’avec cette pétition, nous adressons également une lettre exigeant du maire une mise au point publique et complète sur l’avancée de ce projet.
Nous l’adressons à Mr Morand en tant que Maire de la commune mais aussi en tant que membre de la Commission Départementale d’Aménagement Commerciale (CDAC), lors du vote qui a validé le projet en décembre 2016. Malgré les multiples alertes sur l’intérêt écologique fondamental de la zone humide de la Paccoterie, les autorités, dont le préfet qui est président de la CDAC, ont voté ce projet en toute connaissance de cause.
Les autorités locales peuvent-elles prendre le risque de maintenir un projet qui se révèle être anti-écologique et anti-démocratique ? Non, mais ne nous leurrons pas !
Au vue de l’avancée du projet, cette pétition bien qu’importante n’est qu’une bien maigre pierre dans l’édifice immense que doit être la mobilisation populaire pour sauver la zone humide.
En effet, d’un point de vue purement légal, plus rien ne s’oppose au commencement des travaux de ce village commercial car tout a été validé par les commissions et les instances référentes.
Malgré que les zones humides soient reconnues et protégées par les différentes lois dites sur l’eau, les intérêts capitalistes parviennent toujours à contourner les obstacles légaux qui s’opposent à leur marche mortifère.
Ce nouveau cadre législatif annule donc de fait les lois sur l’eau qui plaçaient les zones humides comme d’intérêt général devant être protégés de manière absolue. La classe dirigeante prouve ici son désintérêt profond et son mépris affiché pour la Nature, la vie sur la planète, et l’avenir des générations futures.
C’est pourtant sur ce nouveau cadre législatif que s’appuient le promoteur immobilier, la mairie et la préfecture pour maintenir la construction du centre commercial « The Snow » prévu à la livraison cette année 2019.
Pourtant, les zones humides sont des espaces naturels qui se sont formés au cours de plusieurs dizaines de milliers d’année grâce au mouvement de l’eau. Elles servent d’espace de filtration et de stockage de l’eau ainsi que de zone de transition entre la terre est l’eau pour des milliers de micro-organisme. Une zone humide c’est tout simplement une zone tampon fondamentale où la vie naît, se développe et se reproduit.
Quelle pure folie de penser qu’une telle complexité naturelle puisse être « recréée » à coup de pelleteuse !
Si l’on peut se dire qu’un tel projet se paiera cher pour la majorité sortante lors des prochaines élections municipales, il n’en reste pas moins que la zone humide sera quant à elle détruite à jamais. Il nous faut donc réfléchir collectivement dès maintenant sur toutes les manières d’agir pour s’opposer aux travaux qui menacent de commencer.
Mais alors, sommes-nous des opposants animés par la seule envie de « critiquer » ? Non. Nous sommes ici pour réclamer un droit des plus élémentaires et démocratiques dans notre époque.
Le droit que nous réclamons c’est celui de léguer une nature riche et variée aux générations futures pour avoir un cadre de vie épanouissant.
Quel épanouissement peut-on avoir dans ces horreurs bétonnées à la périphérie des villes ? Que lien social authentique peut-on espérer dans ces zones où priment l’individualisme et une consommation superficielle ?
A l’heure où la biosphère et les formes de vie sont chaque jour piétinés et saccagés par un mode de production capitaliste toujours plus chaotique, nous exprimons ici notre volonté de bâtir une société respectueuse de la nature, basée sur la dignité et la solidarité humaine.
Pour nous, la situation environnementale de la vallée de l’Arve est alarmante. Nous sommes sur un territoire où la qualité de l’air est la plus exécrable de France, où la pénurie d’eau sévit toujours alors que les canons à neige sont déjà à l’œuvre pour une clientèle richissime, où le réchauffement climatique peut se constater à l’échelle d’une petite vie humaine, où partout règne le primat destructeur du béton sans aucune vision à long terme…
En tant qu’habitants d’une vallée à l’avant-poste du drame écologique, nous avons une grande responsabilité à assumer. En ce sens, la Zone Humide de la Paccoterie doit être vue est défendue pour ce qu’elle est, c’est-à-dire une zone sans aucune valeur marchande, rare et précieuse, irremplaçable, et à la source même de la vie.
Par conséquent, le projet « The Snow » doit être abandonné et la zone humide doit devenir un espace préservé de toute activité humaine en devenant un sanctuaire pédagogique.
Notre combat doit servir d’exemple. Il doit apprendre à celles et ceux qui ne le savent pas encore qu’un espace qui semble n’être qu’un « champ » est en réalité une zone où il y a toute une dynamique naturelle que l’on se doit de respecter sans tergiverser.
Une folie collective, voilà comment vu de l’avenir on évaluera le mouvement des gilets jaunes. La COP24 sera interprétée selon la même approche. Tout comme d’ailleurs la pétition « l’affaire du siècle » à l’initiative de Notre Affaire à Tous, la Fondation pour la Nature et l’Homme, Greenpeace France et Oxfam France, avec comme exigence, « au nom de l’intérêt général, d’attaquer l’Etat français en justice pour qu’il respecte ses engagements climatiques et protège nos vies, nos territoires et nos droits ».
On dira, dans le monde futur, que les humains étaient alors
pétrifiés par leurs egos. Que leur seule boussole était leurs
possessions matérielles, sacralisées. Que l’apparence de cette
possession était le seul critère de valeur aux yeux de la société.
Que les actions des gens dépendaient de raisonnements en termes de
curseur, de quotas, d’intérêt, d’objectifs, de gain.
Que le véganisme n’avait pas été assumé alors, parce que les
gens étaient trop fainéants psychologiquement, manquant d’intensité
dans leur esprit, tellement leur vie était encadrée, façonnée,
soumise à une société de consommation célébrant les egos.
Que la planète comme mère de la vie ne profitait d’aucune
considération, tout intérêt écologique passant derrière les
images d’instagram et les commentaires à l’emporte-pièces de
facebook, que la vie sauvage était passée à la trappe parce que
« le nutella c’est trop bon ».
Les Français s’imaginent en ce moment vivre plein de choses :
en réalité, ils ne vivent rien, ils sont dans le néant, et ils
cultivent le néant, ils s’entraînent eux-mêmes dans une chute
vertigineuse. Ils croient se révolter alors qu’ils ne flattent que
leurs egos.
Si l’on veut une preuve simple de tout cela, celle-ci est facile
à trouver. Que demande les Français, que ce soit les gilets jaunes
ou bien la pétition lancée par les associations ? Que l’État
fasse quelque chose.
Il n’y a aucun mouvement d’en bas où les gens disent vouloir
vivre différemment. Les gens veulent vivre pareillement. Et ils
demandent à l’État de maintenir les choses telles qu’elles
sont. C’est une démission morale complète et absolue.
Or, l’État n’est pas un objet neutre surplombant la société,
il est produit par elle, et à moins d’être un naïf ou quelqu’un
à l’esprit carriériste, il est évident que l’État est au
service de grandes entreprises. S’il faut des preuves, prenons en
dans les événements les plus récents, justement sur la question de
l’écologie.
On sait qu’Emmanuel Macron s’est présenté comme un grand
combattant de la cause de la COP21, faisant même la leçon à Donald
Trump, en disant « make our planet great again ».
Or, lors de son intervention télévisée en réponse aux gilets
jaunes, il n’a même pas cherché à faire semblant à ce sujet, il
n’a tout simplement pas parlé d’écologie du tout. Finie
l’écologie, fini de faire semblant. Ce qui compte, c’est que la
machine tourne.
Il ne s’est pas non plus déplacé en Pologne à
l’occasion de la COP24, alors que celle-ci avait comme tâche
d’établir un programme d’application de la COP21 qui s’était
tenue à Paris. S’il avait été sincère ou cohérent, il aurait
été en première ligne. Mais l’État n’a pas dans sa matrice de
faire de l’écologie la priorité.
François de Rugy , le ministre de la Transition écologique et solidaire, Brune Poirson, secrétaire d’État du même ministère, se sont quant à eux bien déplacés en Pologne, mais… ils sont partis plusieurs jours avant la fin, évitant la phase finale de négociation. Ce qui montre bien que celle-ci n’a joué qu’un rôle symbolique, portée par des experts et des technocrates, en sachant pertinemment que rien de ce qui est négocié n’aura d’incidence sur le réel.
Ce sont là des preuves accablantes et ce n’est pas
une question de gouvernement, c’est une question de la nature même
de l’État. L’État est là pour que l’économie tourne, que la
société soit adaptée à cela, et c’est tout.
Un autre exemple parlant est qu’Emmanuel Macron a aussi répondu directement à une pétition d’une gilet jaune, qui reçu plus d’un million de signatures. Là encore, les intérêts défendus sont flagrants :
« Vous me dites : « Nous sommes déjà dépendants des cours du pétrole, il n’est pas question qu’en plus nous subissions une augmentation des taxes ! »
Et vous avez raison : l’action contre le réchauffement climatique est un combat nécessaire, mais il ne doit pas opposer les problèmes de fin du monde aux problèmes de fins de mois.
Le gouvernement a donc annoncé l’annulation de l’augmentation de la taxe sur le carburant et qu’aucune hausse des tarifs de gaz et d’électricité n’interviendrait pendant l’hiver. »
Le rapprochement stylistique entre « problèmes de fin du
monde » et « problèmes de fins de mois » est au
minimum bizarre et ajoute plus de confusion qu’autre chose.
Surtout, le reste du message d’Emmanuel Macron ne parle même pas
d’écologie.
Faut-il alors prendre le changement climatique au sérieux ou
non ? Apparemment pas. Parce que la société ne le veut pas. Et
la preuve de cela, on la voit de manière évidente : les gilets
jaunes ont réussi à assassiner l’écologie, déjà inexistante en
France pratiquement, à part pour le symbolisme ou les élections. Il
y a un mouvement en droite ligne de l’éjection de Nicolas Hulot de
son poste de ministre par les chasseurs à la révolte des gilets
jaunes contre le prix des carburants.
Certains diront : cela a donné naissance à un mouvement de
contestation sociale plus large. Même si on l’admet, ce qui est
discutable par ailleurs vue la nature du mouvement en question avec
ses drapeaux français et ses fachos partout, il faut pourtant
reconnaître une chose : les gilets jaunes n’ont porté
strictement aucune revendication écologiste.
Tout partisan des gilets jaunes ne peut que l’admettre :
l’écologie a été un thème inexistant, et même totalement
incongru.
Or, peut-il y avoir une contestation réelle au 21e
siècle qui ne fasse pas de l’écologie une valeur essentielle ?
De notre point de vue, absolument pas. Donc, les gilets jaunes ne
représentent pas le futur, mais le passé.
Et encore ne parle-t-on que d’écologie. Si en plus on prend le
critère du véganisme, ou disons au moins de la condition animale,
alors là les gilets jaunes ne sont pas que le passé, ils sont
carrément réactionnaires.
Si on fait abstraction de cela ou qu’on s’en moque, peut-être
qu’on peut fantasmer ce qu’on veut sur les gilets jaunes, sur un
éveil des consciences, une prise de conscience, une critique qui
s’élance, ou on ne sait quoi encore.
Mai si l’on raisonne en termes de principes, de critères, alors
on doit dire : la France beauf s’exprime avec rage, elle ne
veut rien à part ce qu’elle connaît, et ce qu’elle connaît,
c’est son mode de vie « indépendant ». La valeur
suprême, c’est d’avoir son logement, son moyen de transport, son
capital à la banque, son poste au boulot, sa vie à soi, unique.
Pure illusion, car tout cela est de la vanité complète, pour un
mode de vie superficiel, polluant et vide toute valeur naturelle et
culturelle, mais c’est la norme, c’est comme ça qu’on est
censé vivre !
Les gilets jaunes ne font pas qu’avoir des revendications
sociales, ils affirment également en même temps un mode de vie,
qu’ils trouvent très bien. Ils posent la forme de leur existence
sociale comme quelque chose devant être accepté, reconnu, soutenu.
Ils ne veulent pas que de l’argent, ils veulent un statut. C’est
l’anti-révolution, c’est l’aliénation qui se veut voir
accorder un statut !
Les implications sont énormes. Car si l’on part du postulat que
les gilets jaunes sont nés d’un refus de payer plus cher le
carburant, ou bien d’une question financière, mais qu’en réalité
ils ont peur pour leur mode de vie… alors cela veut dire qu’en
plus de défendre leur mode de vie, ils vont le valoriser, le
diffuser.
La première conséquence, directe, des gilets jaunes, c’est la
défense du mode de transport à échelle individuelle. Que ce soit
la voiture, la moto, le scooter, le taxi ou Uber, les gens
privilégient un mouvement « en toute indépendance », et
là les gilets jaunes relancent totalement cette approche.
S’il n’en était pas ainsi, on aurait vu émerger le thème
des transports en communs, de la forme des villes… cela n’a pas
été le cas.
Par conséquent, c’est une révolution culturelle de droite à
laquelle on a droit, si l’on veut. C’est un mai 68 de droite. Et
il faut avoir le courage de le dire : mai 68 qui a changé les
valeurs de la société a donné en 1981 François Mitterrand qui
voulait « changer la vie »… Les gilets jaunes qui
veulent maintenir les valeurs de la société vont donner une France
facho.
En fait, la France a toujours eu des valeurs de droite, même si
elle s’imaginait parfois de gauche, et la question du mode de vie a
a été le grand révélateur. L’écologie et ses exigences, c’est
le crashtest des valeurs. On ne peut pas faire semblant !
On ne peut pas faire semblant d’être vegan, on ne peut pas faire semblant d’aimer les animaux. On ne peut pas semblant d’être écologiste, on ne peut pas faire semblant de placer la Terre au centre des exigences, comme priorité absolue.
Ainsi, lorsque Nicolas Hulot a démissionné de son poste de ministre, les sondages disaient que 80 % des Français pensaient que la « transition écologique » allait trop lentement. C’était hypocrite : avec les gilets jaunes, on voit surtout que les Français pensent que cela va trop vite. Ils n’avaient pas compris qu’il fallait qu’on touche aux ronds-points, et ils tiennent à leurs ronds-points, plus que tout…
Quant à la pétition mentionnée plus haut, qui a déjà 1,5
million de signataires en 24 heures, elle est sur la même longueur
d’onde que les gilets jaunes, parce qu’elle dit : l’État
doit prendre les choses en main.
C’est là encore au fond la grande capitulation. Les gens ne
veulent pas assumer quoi que ce soit, ils veulent que l’État le
fasse. Ils ne veulent pas changer leur comportement, ils rêvent
éveillés et espèrent que l’État va aménager tout ce qu’il
faut.
En fait, tout le monde est hypocrite, parce que le système est
intenable, mais comme il y a encore un peu de temps avant
l’effondrement, l’attitude générale c’est après moi le
déluge. Et les derniers arrivés, les plus jeunes, sont seulement
dégoûtés de ne pas pouvoir être aussi indifférent et
consommateurs que leurs prédécesseurs…
Dans 50 ans, un
parallèle direct sera également fait entre la COP24 et les gilets
jaunes. On dira : l’humanité savait. Elle savait que le
changement climatique s’amplifiait, menaçant des formes de vie
innombrables. Elle savait que la condition animale prenait un
tournant toujours plus sordide, avec l’exploitation et la mise à
mort sous une forme industrielle à caractère exponentiel.
Elle savait que les
zones naturelles étaient en voie d’anéantissement, que le mode de
vie dominant impliquait pollution, destruction, éloignement toujours
plus grand de la Nature, tant concrètement que sur le plan de la
vision du monde (la PMA et la GPA en sont de bons exemples).
Cependant,
l’humanité se cantonnait dans ce qu’elle connaissait et dans ce
que le capitalisme pouvait proposer. Elle ajoutait donc de la crise à
la crise, dira-t-on dans 50 ans.
Les gilets jaunes
sont représentatifs d’une telle approche totalement folle. En
France, un pays riche, avec un niveau d’éducation élevé, le
modèle reste l’acquisition de sa petite propriété, à tous les
niveaux (son logement, son moyen de transport, sa petite personne,
ses habits, son ordinateur, son choix de séries, son choix
d’habillement, etc.). L’individualisme est la règle, la norme,
la seule vérité, dans la stricte obéissance à la société de
consommation.
Les gilets jaunes
sont le produit de la France version McDonald, celle qui va en
voiture d’un rond-point à une autre, n’ayant aucune ouverture
d’esprit, se bornant à vivre comme ses parents, toujours prête
aux raccourcis, et surtout ne comprenant même pas que cela puisse
être remis en cause. C’est la France beauf.
Concevoir un
quelconque sacrifice est totalement impossible dans ce cadre.
L’abnégation pour les animaux est inconcevable, celle pour la
Nature semble une abstraction. Et de toutes façons personne ne veut
prendre de responsabilité, même les gilets jaunes demandent à
l’État de s’occuper de tout. On est au degré zéro de
l’engagement. Le seul engagement, c’est pour soi-même.
Et le seul avenir
envisagé, c’est le passé, c’est vivre comme auparavant. Voire
même, vivre comme avant. Car même quand il y a une lutte sur une
base correcte, il y a cette tendance à l’individualisme total,
rêvant d’une sorte de moyen-âge fantasmé composé de petits
paysans libres et de guildes de marchands.
Pensons aux
zadistes, ces gilets jaunes du bocage, qui voulaient encore être
encore plus indépendants qu’indépendants, en produisant tout tout
seul directement ! Ils ont littéralement défiguré la lutte
pour les zones humides. Au lieu d’avoir une bataille écologiste,
on a eu droit au village d’Astérix.
Comment se fait-il d’ailleurs que personne n’ait remarqué à quel point les mentalités des gilets jaunes et des zadistes sont similaires ? On a affaire à une génération de gens dont la conception ne dépasse pas Astérix et Obélix contre les Romains. Quand on voit un type faire des vidéos youtube en faveur des gilets jaunes, avec un t-shirt « Earth Resistance » (un groupe prétendant depuis quelques années défendre somme toute les mêmes idées que LTD, mais sans l’assumer), en disant les gens sont cons il faut prendre un dénominateur commun de bas niveau, on a tout compris.
On sait bien qu’il
y a des gens qui ont dit : les gilets jaunes ne sont pas contre
l’écologie, une convergence est possible, d’ailleurs il y a eu
des points de rencontre, comme lors de marches pour le climat. La
belle affaire : qui refuserait d’être pour l’écologie ou
contre la faim dans le monde ? Le problème n’est pas
l’intention ou la manière avec laquelle on s’imagine être, mais
bien le mode de vie.
Les gilets jaunes
sont l’expression d’un refus de le modifier et, pire que tout,
ils ont prétendu représenter la normalité, les choses comme il
faut, la manière normale d’exister. C’est pour cela que
l’écologie a totalement disparu des radars. Elle a été liquidé.
Tous ces gens l’ont cyniquement assassiné, fait disparaître,
derrière des « priorités », des choses non
« abstraites ». Pour eux, le véganisme, l’écologie,
le changement climatique, sont des abstractions, des idées vagues,
sans consistance.
On a atteint le
degré zéro de la conscience, celle où les raccourcis priment… La
France est mûre pour le fascisme.
La COP24 s’est d’ailleurs brisée sur cette question du mode de vie. Il a été question des gilets jaunes même là-bas, mais de toutes façons ils étaient déjà dans toutes les mentalités, dans tous les esprits, parce qu’aucun État, aucune société, aucune institution internationale, absolument personne n’est prêt à assumer une transformation impliquant un changement total des mœurs.
Donc, tout continue comme avant, ce qui a comme conséquence que rien n’est concrètement possible. Tous les journalistes ont bien été obligés d’ailleurs de reconnaître que cette conférence de l’ONU sur le climat a été un échec, reprenant les mêmes arguments… que nous avions déjà formulés à l’époque de la COP21. En fait, n’importe quel observateur avisé savait bien alors que ce qu’on avait dit été juste et pensait de même, mais tout le monde s’est menti mutuellement, afin de faire semblant d’y croire.
La croyance en les capacités du système à tout surmonter était
plus forte que tout. Résultat, c’est le désarroi et le cynisme.
Voici à titre d’exemple ce que dit Le canard enchaîné du 5
décembre, avant la conférence, en jouant les Ponce Pilate :
« Récapitulons : en décembre 2015, la planète applaudit des deux mains ses dirigeants qui, à Paris, viennent de décréter à la quasi-unanimité que le réchauffement climatique n’était finalement pas une blague. Ils s’engagent à faire en sorte de ne pas dépasser 1,5° C de plus à la fin de ce siècle. (…)
Trois ans plus tard, où en est-on ? Les émissions mondiales de CO2 n’ont cessé d’augmenter. Les années 2015, 2016 et 2017 ont été les plus chaudes jamais vues depuis que les températures sont enregistrées. (…)
Vous souvenez-vous du fiasco de la COP de Copenhague en 2009 (que Sarkozy avait essayé de présenter comme une formidable réussite personnelle) ? Katowice devrait faire encore plus fort. »
C’est là ce qu’on appelle le cynisme. C’est très français,
dans le fait de se poser en observateur extérieur, neutre, au-dessus
de la mêlée, distribuant bons et mauvais points, sans s’impliquer…
Alors que justement la COP est censée être une exigence mondiale,
avec une implication mondiale, et donc exigeant de chaque personne
sur terre d’avoir un rapport concret avec ce qu’elle pose comme
problématique.
Mais évidemment le Canard enchaîné ne va pas devenir vegan ni
assumer que la Terre est comme une mère, qu’il faut préserver la
vie et s’orienter par rapport à elle, dans une démarche
biocentriste. D’ailleurs, personne n’est prêt à assumer cela,
même si évidemment les gens les plus conscients savent que c’est
inévitable.
Pour se donner bonne conscience, la COP24 a par ailleurs été
obligé de faire dans la mise en scène, avec un discours d’une
jeune suédoise de 15 ans, Greta Thunberg, accusant les puissants de
ce monde de voler l’avenir de leurs propres enfants. C’est
certainement sincère, mais pour qui connaît l’histoire de
l’écologie, c’est une manipulation morale et médiatique de la
part de la COP24. Greta Thunberg a été un moyen de faire du
greenwashing à peu de frais, de manière très lisse et très
anthropocentrée.
Il s’agit concrètement d’une opération marketing,
caricaturant quelque chose de bien plus authentique :
l’intervention en 1992 d’une intervention d’une jeune de douze
ans, Severn Cullis-Suzuki, au sommet de la Terre à Rio de Janeiro,
au Brésil.
Greta Thunberg dit d’ailleurs surtout deux choses : les
médias doivent assumer que le changement climatique est une crise,
et les dirigeants doivent agir, sinon on prend leur place. Cela
s’arrête là et il n’y a bien entendu aucune critique de fond,
alors que le discours de Severn Cullis-Suzuki, il y a 25 ans, avait
une vraie dynamique de remise en cause sur le plan des valeurs
écologistes en général.
La « dramatisation » de la situation présentée par
Greta Thunberg ne sert qu’à étouffer une éventuelle critique
radicale, dont l’émergence générale est de toutes façons
inéluctable. Il est obligé que les prochaines générations
s’aperçoivent qu’en fait, sur le plan de l’écologie, tout a
déjà été dit dans les années 1980 et 1990, par le mouvement
vegan straight edge, l’ALF, l’ELF, le mouvement hardline… tous
les gens disant qu’il faut reconnaître les animaux, la Nature, et
cesser la guerre contre la vie.
Une guerre qui ne faisait alors que commencer à se généraliser, s’industrialiser de manière exponentielle, et les gens ne voyaient pas l’ampleur du désastre en cours. Là c’est devenu flagrant, et impossible de freiner cela, à moins de tout changer!
Le rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) publié en octobre dit qu’il faudrait diviser les gaz à effets de serre par deux, en… douze ans. Qu’il faudrait les amener à zéro, en… 2050. Peut-on réellement croire que cette société, qui produit des gilets jaunes, peut être à la hauteur de cela?
Hier a eu lieu la troisième marche pour le climat, après celle d’octobre et de novembre. Environ 20 000 personnes se sont déplacées à Paris, 10 000 à Marseille, 3 000 à Lille, avec dans les deux derniers cas des cortèges rejoignant les gilets jaunes. C’est une tentative d’aller de l’avant, dans un climat de grande inquiétude écologiste face aux gilets jaunes.
Car ceux-ci sont la grande actualité pour l’écologie et le véganisme : quoi qu’on en dise, c’est une révolte née contre une taxe sur les carburants mise en place par le gouvernement au nom de l’écologie. On peut penser ce qu’on veut de la justesse de revendications sociales faites, force est de constater que sur le plan de la démarche, on fait mieux.
Quand on sait l’ampleur de la question, on est amené à se dire que vraiment les Français ne raisonnent qu’en termes de pouvoir d’achat, et que cela s’arrête là. Il y a comme une barrière infranchissable, celle qui empêche se remettre en cause dans sa vie.
Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas des gens très sympas chez les gilets jaunes, ni que le pouvoir d’achat ne compte pas. Mais que tout est en décalage avec ce qui est nécessaire en pratique comme sur le plan des idées.
A bien y regarder, ne peut-on pas penser que les gilets jaunes sont une manière de dire : on veut que tout continue comme avant, le véganisme et l’écologie ne doivent pas être notre actualité ? Les gilets jaunes, dans leur style, ne sont-ils pas après tout une expression politico-sociale de la beauferie propre à une société de consommation en train de déraper dans tous les sens ?
Afin de contribuer à une réflexion, voici un pdf (cliquer sur l’image) avec de nombreuses choses piochées chez et autour de la question des gilets jaunes.
Car on ne fera pas l’économie de faire avancer les choses sans avoir une vraie capacité à délimiter les enjeux et à analyser les phénomènes en fonction de ces enjeux !
La grande actualité, c’est bien entendu la démission « surprise » de Nicolas Hulot, qui a annoncé à la radio qu’il abandonnait sans prévenir son poste de ministre de la transition écologique et solidaire.
Cela est directement relié à la question des chasseurs sur laquelle nous avons mis l’accent ces derniers jours. La démission de Nicolas Hulot était en effet dans l’air du temps et c’est un coup de force des chasseurs qui l’a déclenché.
Ceux-ci avaient encore une fois leur représentant à l’Elysée, Willy Schraen (président de la fédération nationale de la chasse), et celui-ci avait emmené avec lui le lobbyiste Thierry Coste.
Étaient également présents le secrétaire d’État à la transition écologique Sébastien Lecornu, le conseiller énergie de l’Élysée Antoine Peillion, et un ami d’Emmanuel Macron, le chasseur et sénateur de Côte d’Or François Patriat.
A la fin de la réunion, Nicolas Hulot s’est accroché avec Thierry Coste, arguant qu’il n’avait rien à faire là en tant que lobbyiste. Il faut dire aussi que Thierry Coste n’a cessé de faire monter la sauce, racontant en riant en janvier au quotidien Le Monde :
« Quand Nicolas Hulot n’est pas content, j’adore lui rappeler qu’aujourd’hui, on est dans le même camp, celui d’Emmanuel Macron. C’est presque jouissif pour moi. »
Si l’on ajoute le fait qu’Emmanuel Macron avait expliqué à Nicolas Hulot qu’il n’aurait pas été au courant pour la présence de Thierry Coste, on a une situation qui ne rimait plus à rien, et précipitant la démission.
C’est une grande victoire pour les chasseurs, d’autant plus qu’ils ont obtenu l’officialisation de la réforme dont nous avons parlé, faisant passer le permis de chasse de 400 à 200 euros, à quoi s’ajoute la « gestion adaptative » de six espèces d’oiseaux :
l’oie cendrée,
la barge à queue noire,
le courlis cendré,
la tourterelle des bois,
le grand tétras,
le fuligule milouin.
Cela signifie que selon les « évaluations », les chasseurs pourront se mettre à chasser ces oiseaux… Rappelons ici qu’en France, la loi autorise la chasse de 64 types d’oiseaux – bien plus dans les faits – dont 20 son sur la liste rouge de l’Union internationale de la protection de la nature.
C’est également une victoire pour les chasseurs sur la question de la chasse à courre, dont Nicolas Hulot espérait saper les fondements. Las ! Avec un Emmanuel Macron pour qui la chasse n’est « ni un loisir ni un sport mais un mode de vie », à un moment donné cela devait inévitablement aboutir à un conflit insoluble.
Nicolas Hulot espérait aussi taper sur la chasse de la grive à la glu, les piégeages appelés « tenderie » et « matole » : c’est là aussi un échec.
Il y aura également dans le futur une « police de la nature et des territoires », qui va passer par la fusion de l’Agence française pour la biodiversité (AFB) et de l’Office nationale de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS). Cela participe à ce que remarque le document pdf dont nous avons parlé, à savoir la mainmise des chasseurs sur l’écologie et la « gestion » de la Nature.
C’est d’ailleurs évidemment la ligne officielle de la fédération nationale de la chasse quant à la démission de Nicolas Hulot, présentant les chasseurs comme les « écologistes de terrain » !
A cela s’ajoute l’interdiction de l’engrillagement des domaines chassables par certains propriétaires.
Bref, c’est une défaite sur toute la ligne et Nicolas Hulot allait se faire sévèrement critiquer une fois de plus. Il avait déjà très mal pris la critique faite par Brigitte Bardot dans Var matin, le qualifiant de « trouillard de première classe. Un indécis. Un type qui ne sert à rien », répondant lui-même de manière véhémente (« Il y a un moment ou un autre où il faut arrêter de céder à la simplicité, de donner des conseils à distance, tout ça avec vue sur la Méditerranée. C’est très sympathique, mais ça ne fait pas avancer la cause »).
Il a préféré fuir plutôt de passer pour quelqu’un s’étant fait littéralement broyé. Il n’en reste pas moins que les problèmes restent entier ! Et que la première chose à faire, c’est de soutenir l’opposition à la chasse à courre et d’affirmer son soutien à AVA confronté à une plainte de l’Office National des Forêts !
Nous parlions il y a peu du relativisme terrible de la presse se voulant « contestataire », comme Le Monde ou Libération, publiant régulièrement des points de vue sur le véganisme qui sont parfois pour, parfois contre, le tout servant la confusion et le relativisme.
Ce qui ne peut que ressortir, c’est le discours pétainiste, notamment sous sa forme moderne zadiste, et là cela ne manque pas avec une ode au pétainisme publié dans Libération. Le texte est rempli de références idéologiques que l’auteur ne connaît peut-être même pas : quiconque a lu Maurras ou Heidegger, Giono ou Bernanos, en comprend immédiatement la nature.
On y trouve tout : de l’éloge du paysage au refus de l’humanité unifiée à l’échelle mondiale, de la défense des petits savoirs-faires « authentiques » au refus d’une morale universelle, de l’utilisation de concepts pseudo-philosophiques (« élevage-paysan ») au rejet du monde moderne.
Ce texte est un classique du genre, reflétant toute une tendance historique : les zadistes et apparentés n’ont fait que réactualiser la critique pétainiste du monde moderne, sur les mêmes bases, et son agressivité envers le véganisme est obligatoirement présente et inévitablement toujours plus offensive.
Repli individuel sur son lopin de terre avec la ZAD ou véganisme universel d’une humanité unifiée organisant la production à l’échelle mondiale, l’opposition ne peut être que totale !
Plaidoyer pour les territoires d’un paysan végano-sceptique
Par Pierre-Etienne Rault, Eleveur-tanneur dans le Morbihan —
Il ne devrait pas y avoir de tentation à devenir végan dès lors que l’on a bien compris l’élevage-paysan. Mais pour bien comprendre l’élevage-paysan, il faut avoir saisi l’esprit de territorialité auquel celui-ci est étroitement lié. La territorialité relève du sensible, de notre rapport au monde, et gagne celles et ceux dont une partie de la conscience est profondément reliée à un territoire. Si elle est en première évidence un cordon à travers lequel circule l’avitaillement des biens nourriciers et matériels, la territorialité n’en demeure pas moins le terreau des relations sociales ainsi qu’une source de diversité culturelle et spirituelle.
Un rapport fusionnel a longtemps lié l’homme et son territoire, l’être fait d’os et de chair à son environnement organique et minéral. Si quelque part, au pays, une grange était à bâtir, alors un instinct de territorialité guidait naturellement le paysan vers le plus proche filon d’argile pour l’entreprise de maçonnerie, vers l’arbre multicentenaire pour l’entreprise de charpente, vers les champs de seigle pour l’entreprise de couverture. L’ensemble constituait un ouvrage indigène bâti à coups d’ingéniosité. Les objets du quotidien, comme les outils de travail, étaient également faits de particules arrachées aux territoires. Chacun d’eux était façonné par l’habileté de mains savantes, à partir de matériaux débusqués dans le pli d’une roche, la lisière d’un bois, le lit d’une rivière, les entrailles d’une bête.
Os, cuirs, laines, plumes, crins, tendons, cornes, bois, graisses et suints sont autant de matériaux provenant du monde animal et dont l’Homme a su, un jour, trouver une utilité. Jusqu’à l’ère thermo-industrielle et l’avènement de la plastochimie, on recourait autant qu’il était possible de le faire à ces matériaux naturels, indigènes et renouvelables. On leur trouvait des propriétés dont les qualités multiples concordaient avec un grand nombre d’usages : vêtements, colles, harnais, bougies, brosses, lubrifiants, isolants, sacs, selles, chaussures… On trouvait dans le monde végétal ou minéral d’autres matériaux tout aussi utiles mais dont les propriétés ne pouvaient pas toujours rivaliser ou même simplement remplacer les matériaux d’origines animales. Il fallait donc compter sur les trois mondes, animal, végétal, et minéral pour que le territoire déploie l’ensemble de ses richesses et pourvoie ainsi aux besoins élémentaires des sociétés.
Progrès et déterritorialisation
Aujourd’hui, l’économie marchande mondialisée est dotée d’une redoutable logistique permettant de se nourrir, de se vêtir, de s’abriter et de se chauffer sous toutes les latitudes sans que l’approvisionnement des biens primaires provienne nécessairement des ressources du territoire habité. Le progrès technique dans de multiples domaines a fait de nous des êtres confortablement déterritorialisés. Ainsi, l’Homme moderne ne concentre plus ses efforts à la recherche d’une communion avec son environnement naturel. Repus de la vacuité des choses artificielles, déraciné, il s’est égaré en perdant la conscience de sa présence sur son territoire. Ce manquement fragilise dangereusement le sens qu’il donne à son existence. Il passe à côté de splendeurs sans être atteint par leurs beautés et trépasse de ses peurs sans goûter à l’intensité d’exister.
Un pareil constat devrait nous interroger sur le rapport que nous entretenons aux territoires mais aussi aux objets et à la matière. Tandis que laines et peaux sont aujourd’hui considérées par la loi française comme des déchets d’équarrissage soumis à des réglementations si strictes qu’elles contraignent considérablement les éleveurs et les artisans dans la mise en place de filières de valorisation, le marché textile en provenance de la Chine inonde littéralement l’Hexagone de vêtements, sacs et chaussures en fibre coton ou synthétique.
Au-delà des considérations éthiques liées aux conditions de travail dans les usines chinoises, que devons-nous penser de ce dispositif marchand, libéral, orchestré politiquement et consenti sociétalement qui consiste à déterritorialiser notre économie en même temps que nos consciences? Nos savoirs-faire disparaissent. Les artisans tanneurs, maroquiniers, lainiers, matelassiers ne peuvent résister devant l’implacable concurrence des forces productives dont le modèle néocolonial conduit à une uniformisation planétaire des biens de consommations. Selon l’anthropologue Arturo Escobar, la lutte contre cette nouvelle forme d’impérialisme ne peut que surgir que des tréfonds des territoires par des femmes et des hommes portant des revendications d’autres mondes. Les ZAD qui émergent ici et là pour s’opposer à la bétonisation et à l’aménagement standardisé par toutes les formes de rationalités productives seraient des lueurs de ces autres mondes.
Maintenant, pouvons-nous dire que le véganisme préfigure ou est en mesure d’inspirer des lueurs d’autres mondes ? C’est loin d’être évident. D’abord parce que le véganisme est à bien des égards la traduction idéologique même de l’«aterritorialité». Pour le paysan que je suis, un territoire sans élevage est un territoire en souffrance, auquel on prive la possibilité de déployer son panel de vie et de biodiversité. Car le ré-ensauvagement de la nature que certains appellent de leurs fantasmes n’est en rien un gage de sauvegarde de la biodiversité. La plupart des espèces dont on déplore tous aujourd’hui la disparition ont pu pendant des siècles bénéficier de territoires propices à leurs implantations. Ces territoires étaient constitués de prairies naturelles, maillées de haies et de talus, parsemés de bosquets et parcourus de cours d’eau dont on prenait le soin de curer les lits. Dans ces prairies on y trouvait des animaux au pâturage dont le rôle était essentiel à une valorisation efficiente des espaces et permettait de garantir une alimentation saine et abondante. C’est ce modèle de territorialité, empirique, écologique et résilient que certains aimeraient voir remplacé créant ainsi la stupeur du paysan. Car un paysan à qui on interdirait aujourd’hui d’élever des animaux serait aussi malheureux et désœuvré qu’un pianiste à qui on enlèverait la moitié des touches de son piano.
Idéologie hégémonique
Par ailleurs, outre le fait que la viabilité de l’idéologie végane repose dans bien des domaines (fertilisation des sols, synthèse des fibres synthétiques…) sur l’acceptation de l’extractivisme, lequel est en tout point contraire au commun des ontologies territoriales, le véganisme est enraciné sur les vieux dualismes nature/culture, humain/non humain, bien/mal, gentil/méchant. L’idéologie végane semble ainsi concourir au renforcement d’un «système monde» uniforme, aussi bien mono-culturel que mono-cultural.
Sans se laisser aller à la caricature qui consisterait à rapprocher outrancièrement le véganisme du transhumanisme, on peut toutefois établir un lien entre la promotion de l’utopie végane et une implication (volontaire ou non?) dans un processus d’acculturation par la prescription morale. En effet, de la même manière qu’il est difficilement concevable qu’une personne qui se pense «bonne» ne désire pas un tant soit peu participer à réformer une société déviante pour la rendre plus juste, les végans, convaincus d’être les avant-gardistes d’une cause juste et noble que l’Histoire retiendra, ne peuvent que conférer à leur idéologie une dimension hégémonique. Par conséquent, la vérité et le bien que les végans pensent incarner doivent être colportés pour que la culture végane, la «culture du bien» devienne la norme.
La morale végane a toute sa place dans un monde dualiste, héritier de la culture judéo-chrétienne qui envisage les relationnalités selon des considérations de «bien» et de «mal». Mais cette même morale n’est pas introductible dans le cadre des interrelations et des interdépendances qui engendre l’adaptabilité des êtres sur leurs territoires dont dépend leurs (sur)vies. Pour penser la question végane il faudrait donc arriver à substituer l’analyse morale – et son récit rationnel et dualiste auquel nous sommes biberonnés depuis toujours — à une nouvelle grille de lecture qui prenne en compte pleinement l’ontologie des territoires.
Pierre-Etienne Rault est l’auteur de Végano-sceptique, éditions du Dauphin, 2017.
Naturellement, il y a de grandes limites : toujours ces précautions oratoires, ces tournures plus que prudentes, ce refus d’assumer une vision du monde combative. Comment peut-on être aussi timoré tout en soutenant dans l’association que nous allons à une catastrophe écologique majeure ?
Et où le véganisme, dans tout cela ? La mise en valeur de Gaïa comme système planétaire ? A un moment il faut y aller quand même, au lieu de tourner inlassablement autour du pot!
Un commentaire dit d’ailleurs bien les choses :
Ballade en forêt au mois de mai; au cœur du printemps les bois devraient vrombir du vol des insectes et être empli de chants d’oiseaux… et rien!
Trois mouches et une abeille et une – une seule – fauvette!
Ce n’est pas que la situation est grave, c’est que c’est bel et bien déjà foutu.
Et tout ce que M. Lasserre trouve à faire c’est un cours de morale en écriture inclusive. Il va falloir trouver autre chose.
C’est malheureusement vra : l’article fait dans le moralisme, dénonçant une sorte d’insectophobie, revendiquant un droit « individuel » de chaque insecte. Bref on retombe dans le libéralisme, l’individuel, au lieu de raisonner en système planétaire…
On devrait respecter les insectes « en soi comme individus », alors que ce qu’il faut en réalité, c’est célébrer la vie en général, et en particulier comme réalité de l’ensemble planétaire…
C’est donc une intéressante tribune sur les insectes. Mais c’est limité par rapport aux exigences historiques. Vu du futur, c’est bien trop faible !
L’insecte, égal de l’homme
Mais où sont passés les papillons ? Que deviennent les abeilles ? Où sont ces insectes qui s’écrasaient par centaines sur nos pare-brise ? Voilà des interrogations récurrentes qui font écho à l’actualité de ces trente dernières années : les populations globales d’insectes diminuent drastiquement (Libération du 18 mai).
Pour certains d’entre nous, c’est peut-être une bonne nouvelle : enfin moins d’insectes ! Cela fait des millénaires que nous luttons contre ceux qui nous piquent, transmettent des maladies ou mangent nos récoltes. Alors enfin les voilà qui disparaissent.
Seulement, avec eux, tout un pan de la biodiversité diminue, celui qui dépend de ces petits animaux incroyablement nombreux et présents à tous les étages des écosystèmes.
Oui, les insectes qui nous embêtent peuvent en cacher d’autres, bien d’autres, inconnus et bienfaisants, pourtant. Seules quelques espèces apportent une sale réputation à l’ensemble de ce vaste monde.
Si l’on nous demande quels sont les insectes qui nous embêtent, environ 20 espèces (ou un peu plus pour un agriculteur) nous viennent en tête : moustiques, guêpes, frelons, mouches, puces, doryphores, capricornes, pucerons, etc.
Pourtant, rien qu’en France, il existe plus de 40 000 espèces d’insectes. C’est-à-dire qu’une vingtaine d’espèces portent préjudice à 39 980 autres ! Et pour aller plus loin, au sein de ces espèces, seuls quelques individus nous ennuient.
Ainsi, dire que «les pucerons sont nuisibles» ou que «les guêpes piquent» est une erreur de pensée face aux statistiques et probabilités. En effet, ici, nous manquons de pensée critique en ne prenant pas en compte toutes les fois où nous avons croisé une guêpe inoffensive, ou qu’un puceron a épargné nos tomates. Nous ne retenons qu’une anecdote : l’individu qui nous a ennuyés.
Mais combien de milliers de guêpes côtoyons-nous chaque année ? Malgré cela, la réputation des guêpes est unanime : elles piquent et nous ennuient. C’est aussi faux que de dire que tous les habitants de telle région sont peu accueillants, à partir d’une anecdote malheureuse. En fait, nous nous comportons de façon discriminante vis-à-vis des animaux non-humains.
Nous les mettons tous «dans le même panier». Attitude que nous tentons d’atténuer depuis longtemps entre humains. Certes ces derniers ont droit à un traitement de faveur, mais depuis Darwin, nous savons pourtant que le vivant n’a pas de hiérarchie, que l’arbre généalogique avec les humains placés tout en haut, et les insectes, et d’autres, en bas, n’existe plus.
Oui, nous sommes tous autant évolués les uns que les autres, sans hiérarchie, ni sens. Au cours du temps, un insecte a évolué vers la mouche, la guêpe, etc., comme un primate a évolué vers l’humain, le chimpanzé, etc.
Humains et mouches vivent aujourd’hui, aucun n’est resté dans le passé, ils ont tous évolué, changés.
Mais cette réalité biologique heurte encore notre philosophie et nos sens des valeurs. Notre anthropocentrisme nous empêche encore aujourd’hui d’intégrer cette théorie de l’évolution dans nos schémas mentaux.
C’est si difficile de penser que les capacités cognitives qui nous permettent d’écrire, d’imprimer et de lire ce journal ne sont pas «en haut de l’évolution» ! Alors nous continuons à traiter les non-humains comme bon nous semble.
Est-ce notre civilisation occidentale qui, au cours de l’Histoire, a accentué la violence qu’Homo sapiens a toujours eue avec le vivant ? Il semble en effet que la culture naturaliste élaborée au 17e siècle dans un Occident judéo-chrétien, qui consiste à séparer la nature de la culture (c’est-à-dire des humains), ait amplifié ces rapports conflictuels.
Nous en sommes profondément imbibés. Posons-nous la question : quel est mon rapport avec le vivant ? Sommes-nous individuellement et spontanément généreux et bienveillants avec cette araignée, cette souris ou ce frelon ? Pas vraiment, car nous voyons plus facilement leurs côtés négatifs et les détruisons sans remords.
Si les sciences naturalistes nous ont beaucoup apporté, elles ont aussi entériné le fait qu’il y avait des groupes impersonnels, comme «arbres», «insectes» ou «nature».
Sans nous en rendre compte, cela nous autorise une grande violence envers eux. Cela supprime notre sensibilité et notre acuité à voir la singularité d’un insecte, par exemple. Nous ne percevons plus l’être que l’on croise, mais sa catégorie.
Ainsi, lorsque notre voisin dit avoir détruit un nid de guêpes, cela n’a aucun impact sur notre sensibilité.
Pourtant ces individus ne nous ont souvent fait aucun mal et ils avaient eux aussi leur ontologie, comme disent les philosophes. Ils ont eux aussi une vision subjective du monde, et aucun d’entre eux ne souhaite mourir. Comme nous.
Nous sommes tous différents au sein des humains, tous singuliers, et nos sociétés nous ont faits égaux devant la loi.
Est-ce que Darwin arrivera un jour à rendre humains et non-humains plus égaux devant la loi (tout en préservant l’intégrité des humains) ? Ne serait-ce d’ailleurs l’une des meilleures pistes pour sauver les non-humains de nos occupations de l’espace et des terres ?
Car finalement, c’est ce qui fait disparaître la diversité du vivant, notre propension à occuper l’espace sans nous soucier des autres. Où que nous allions nous détruisons et aseptisons les espaces.
Nous les dominons, y compris dans nos jardins. Alors sans lieux où nicher, sans nourriture à déguster, comme des fleurs sauvages pour les insectes pollinisateurs, et voilà les insectes qui disparaissent. Et si en plus nous les aspergeons de produits toujours plus efficaces pour les tuer, cela ne les aide pas.
A cela s’ajoute notre propension à n’avoir d’yeux que pour les animaux «intelligents», c’est-à-dire qui nous ressemblent cognitivement, et surtout à ne reléguer les insectes qu’aux «rôles» qu’ils joueraient pour nous.
Dans ce cas, que faisons-nous de ceux qui n’en jouent pas ? Et comment pouvons-nous exiger d’un autre animal un rôle écologique, alors que nous, personnellement, n’en jouons pas ?
Et qui leur aurait attribué un «rôle» ? Dieu ? Nous ? Cela revient au même. Pourrons-nous un jour les accepter pour ce qu’ils sont, sans justificatif nécessaire ? Aucun d’eux et aucun de nous n’a plus de légitimité à vivre sur Terre, voilà une réalité biologique qui pourrait positivement alimenter nos réflexions philosophiques.
Enfin, les insectes représentent typiquement l’étranger, l’autre. Rencontrer un insecte, c’est rencontrer une autre culture.
Les apprécier pour ce qu’ils sont est une véritable gageure au pays des «nuisibles» ou autres «pestes», de la mécanisation de la «nature» et du traitement dominants/dominés que nous réservons aux non-humains, qu’ils soient domestiques à travers l’élevage, ou sauvages à travers la chasse.
De plus, notre gouvernance étatique semble entretenir et conforter cette attitude dominatrice. Est-ce qu’une démocratie un peu plus égalitaire et moins monarchique apporterait un autre rapport avec tous ceux qui nous entourent ? Certain.e.s le pensent.
Nous sommes entourés d’individus ayant chacun sa singularité et subjectivité, qu’il s’agisse d’humains ou de non-humains.
A partir de ce constat, ne pourrions-nous pas construire l’avenir, celui d’un humanisme plein et entier, sans frontières et magnifiquement biodiversifié ? Être Humain n’est-ce pas simplement accepter les autres, tous les Autres, pour ce qu’ils sont ?
Le Muséum national d’Histoire naturelle a publié hier un communiqué littéralement terrifiant au sujet de la situation des oiseaux dans les campagnes. Nous assistons à un véritable écocide et l’humanité est d’une passivité complète.
Seul un engagement total de ceux et celles qui ont conscience peut servir de dynamique pour renverser la tendance, libérer les consciences, aller à l’affrontement avec un système détruisant la planète !
DEUX NOUVELLES ÉTUDES DÉMONTRENT QUE LES OISEAUX DES CAMPAGNES FRANÇAISES DISPARAISSENT À UNE VITESSE VERTIGINEUSE.
Les derniers résultats de deux études de suivi des oiseaux, l’une menée à une échelle nationale, l’autre plus localement, viennent de sortir.
Les chercheurs du Muséum national d’Histoire naturelle et du CNRS arrivent au même constat : les oiseaux des campagnes françaises disparaissent à une vitesse vertigineuse. En moyenne, leurs populations se sont réduites d’un tiers en 15 ans.
Au vu de l’accélération des pertes ces deux dernières années, cette tendance est loin de s’infléchir…
Grâce à des ornithologues amateurs et professionnels qui identifient et comptent les oiseaux sur tout le territoire métropolitain, le STOC (Suivi Temporel des Oiseaux Communs, un programme de sciences participatives porté par le Muséum national d’Histoire naturelle au sein du CESCO1), produit des indicateurs annuels sur l’abondance des espèces dans différents habitats (forêt, ville, campagne etc.).
Les relevés effectués en milieu rural mettent en évidence une diminution des populations d’oiseaux vivant en milieu agricole depuis les années 1990.
Les espèces spécialistes de ces milieux, comme l’alouette des champs, la fauvette grisette ou le bruant ortolan, ont perdu en moyenne un individu sur trois en quinze ans. Et les chiffres montrent que ce déclin s’est encore intensifié en 2016 et 2017.
Ces résultats nationaux sont confirmés par une seconde étude menée à une échelle locale sur la Zone atelier « Plaine & Val de Sèvre » portée par le CNRS. Depuis 1995, des chercheurs du CEBC2 suivent chaque année, dans les Deux-Sèvres, 160 zones de 10 hectares d’une plaine céréalière typique des territoires agricoles français.
En 23 ans, toutes les espèces d’oiseaux de plaine ont vu leurs populations fondre : l’alouette perd plus d’un individu sur trois (-35%) ; avec huit individus disparus sur dix, les perdrix sont presque décimées.
Ce déclin frappe toutes les espèces d’oiseaux en milieu agricole, aussi bien les espèces dites spécialistes – fréquentant prioritairement ce milieu -, que les espèces dites généralistes – retrouvées dans tous les types d’habitats, agricoles ou non.
Or d’après le STOC, les espèces généralistes ne déclinent pas à l’échelle nationale ; la diminution constatée est donc propre au milieu agricole, sans doute en lien avec l’effondrement des insectes.
Cette disparition massive observée à différentes échelles est concomitante à l’intensification des pratiques agricoles ces 25 dernières années, plus particulièrement depuis 2008-2009. Une période qui correspond entre autres à la fin des jachères imposées par la politique agricole commune, à la flambée des cours du blé, à la reprise du sur-amendement au nitrate permettant d’avoir du blé sur-protéiné et à la généralisation des néonicotinoïdes, insecticides neurotoxiques très persistants.
Ces deux études, menées toutes deux sur une vingtaine d’années et à des échelles spatiales différentes, révèlent l’ampleur du phénomène : le déclin des oiseaux en milieu agricole s’accélère et atteint un niveau proche de la catastrophe écologique.
En 2018, de nombreuses régions de plaines céréalières pourraient connaître un printemps silencieux (« Silent spring ») annoncé par l’écologue américaine Rachel Carson il y a 55 ans à propos du tristement célèbre DDT interdit en France depuis plus de 45 ans.
Si cette situation n’est pas encore irréversible, il devient urgent de travailler avec tous les acteurs du monde agricole pour accélérer les changements de pratiques ; et d’abord avec les agriculteurs qui possèdent aujourd’hui les clés pour infléchir la tendance.
1 Centre des sciences de la conservation (Cesco – MNHN/CNRS/SU)
2 Centre d’études biologiques de Chizé (CNRS/Université de La Rochelle)
Lancée par un artiste, l’association « Ecologie République » a publié un texte lyrique en soutien à l’initiative d’Aymeric Caron, le « Rassemblement des écologistes pour le vivant« .
On peut être en désaccord avec le principe comme avec les idées exprimées, mais force est de constater que cela reflète ici une exigence : celle de comprendre la dramatique situation du monde, le besoin d’intervenir pour la planète, maintenant !
En solidarité avec Aymeric Caron
Le nombre d’animaux de compagnie perdus, abandonnés ou volés est en constante augmentation.
Dans les refuges et les fourrières, sous couvert de familles souhaitant adopter, les laboratoires font leur marché. Il y a pénurie de bêtes à martyriser. Le trafic d’animaux est le troisième marché parallèle dans le monde, après ceux des armes et de la drogue.
Avant qu’il ne soit trop tard, les États s’adresseront-ils aux citoyens, notamment aux plus jeunes, pour leur expliquer que l’animal est doué d’intelligence, d’amour, qu’il n’est ni un jouet, ni un vêtement, ni un sujet d’expérimentation pour tout et n’importe quoi ?
Je dénonce l’indifférence du public et ce qui est la cause de l’indifférence : montrer à la télévision des espèces en voie d’extinction, des cadavres humains, des terres inondées, brûlées, à des hommes qui se noient dans un enchevêtrement d’actions stérilespermet seulement d’accoutumer ces hommes à leur défaite.
Les populations respectueuses de la vie ayant toutes été anéanties par les populations dites civilisées, seule une poignée d’hommes agissent aux quatre coins du monde pour sauver la Terre en détresse ; de rares individus intervenant parfois au péril de leur vie pour aider une planète dont aujourd’hui, en vérité, tout le monde se fout.
Ces hommes et ces femmes, souvent isolés les uns des autres, œuvrant seuls ou en association, représentent l’arche sur laquelle repose la survie du globe.
Ils sont l’unique bastion qui se pose en contrepoids de tous les océans d’égoïsme jetés en pâture sur la terre.
Tous les jours de notre vie, nous devrions cultiver un jardin pour qu’à l’école, à la maison, au travail, dans nos différentes activités, nous apprenions à respecter toutes les vies qui nous entourent, quelle que soit leur distance par rapport à nous, parce que nous sommes un.
L’idéal n’est-il pas de gueuletonner d’un foie gras de canard, sachant que les canards souffrent – tels des martyrs – du gavage, suivi d’un couple d’ortolans, tués si possible en plein vol pendant qu’ils allaient retrouver leurs oisillons qui crèveront de faim, tandis que nous assistons à l’agonie du taureau dans l’arène tout en écoutant bien fort le cri terrifiant du cochon qu’on égorge ?
Nous prenons notre pied, car l’humain se réjouit de la souffrance et s’en goinfre. Détruire la vie sur terre un peu plus tous les jours, nous en redemandons : cela détend, c’est jouissif ! n’est-ce pas là l’inconscient moteur de notre civilisation, notre baume au cœur, ce pourquoi nous nous levons le matin ? Le spectacle de la souffrance remplit nos assiettes, désennuie, rapproche, rapporte.
Et quoi d’autre comme meilleur exemple à donner : exterminé mais pas tout à fait, ayant subi les pires supplices pendant des siècles et des siècles, un peuple réunifié se dépêche à son tour d’aller exterminer un autre peuple.
Nous sommes passés du stade peu enviable de chair à canon, luttant et mourant pour gagner et défendre les territoires du petit monde qui nous menait par le bout du nez, à celui envié de chair à consommation, luttant et vivant pour gagner et défendre les parts de marché du petit monde qui nous mène par le bout du nez.
Nous sommes devenus plus rentables vivants, alors nous vivons, nous consommons, nous nous multiplions – cela au détriment de la Terre, qui sera, selon les prédictions, en totalité polluée dans dix ans : du fond des océans à la cime des montagnes, il sera trop tard.
Et comme la sauvegarde de la planète est soumise au bon vouloir du petit monde qui nous mène par le bout du nez et qui s’en fout, il va de soi que les milliards d’humains s’en foutent.
Petit monde qui nous dépose où il veut, nous fait consommer ce qu’il veut, nous fait penser ce qu’il veut, nous organise pour que nous soyons si faciles à manœuvrer, un jour nous t’éliminerons et, peu à peu, nous te reconstituerons… si nous ne suivons pas Aymeric Caron.
Nous sommes quelques jours après la décision gouvernementale d’abandonner le projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes. Déjà il faut se réjouir de la protection de la Nature là-bas.
L’aspect principal reste pour nous la vie sauvage, et le fait qu’une partie d’entre elle puisse être préservée est essentiel. Même s’il faut être prudent pour l’avenir, d’autant plus que selon les propres lois de l’Etat français, le projet lui-même aurait dû être impossible en raison de la protection des zones humides…
Mais il faut également voir ce qu’il ressort de cette lutte à Notre-Dame-des-Landes, qui a eu beaucoup d’aspects. Ici il s’agit également voir si nous avons raison de tout d’abord saluer grosso modo le mouvement zadiste, pour ensuite le dénoncer comme s’étant retourné en son contraire.
Nous avions en effet constaté que loin de l’initiative écologiste du début, la ZAD s’est vite retrouvée comme un bastion des partisans de l’individualisme forcené, de la petite propriété et de la petite exploitation animale.
Il y a eu quelques végans pour servir de caution à la ZAD, tant sur place qu’en général, mais c’est absurde car les zadistes se sont toujours positionnés radicalement comme non végan, et donc comme anti-vegan, puisque la petite exploitation animale est leur valeur absolue.
Ces gens sont des réactionnaires, ils veulent réagir contre le monde moderne, ils veulent le passé. Le prochain rassemblement sur la ZAD, le 10 février 2018, confirme même la validité de notre critique rien que par son titre : « enracinons l’avenir ».
C’est là du pétainisme et l’utilisation du terme « s’enraciner » est un exemple pathétique de plus. Un tel vocabulaire relève exclusivement de l’extrême-droite à la française, avec le fameux « la terre, elle, ne ment pas » de Pétain, la terre comme « recours » comme il le dit dans son fameux discours.
Le communiqué de l’association ACIPA au sujet du rassemblement de février développe d’ailleurs tout l’argumentaire mystique du triptyque rustique – petite propriété – petite exploitation animale :
« Depuis des décennies, les 1650 ha de la zad sont menacés par un projet d’aéroport climaticide, destructeur de terres nourricières, de zone humides et de liens sociaux.
En lieu et place de ce projet, des paysan.ne.s résistant.e.s ont continué de vivre sur leurs terres et de nouveaux.elles habitant.e.s sont arrivé.e.s dans les 10 dernières années. Il s’invente sur la zad des formes de vie, d’habitats et d’agriculture fondées sur le partage, la rencontre, le soin du vivant et des biens communs. »
Le soin du vivant, c’est en effet la petite exploitation animale ; les biens communs servent ici de justification au maintien des biens qui ne le sont justement pas, communs ! Les paysans, sur « leurs » terres, voilà le rêve de certains en 2018, alors que nous avons besoin d’une humanité unifiée à l’échelle mondiale pour protéger la planète…
Certains ont d’ailleurs été surpris que le gouvernement n’ait pas décidé de déloger les zadistes. Mais pourquoi serait-il si pressé ? Cela ne dérange personne et cela fait genre la seule opposition consiste en des gens voulant vivre comme il y a cinquante ou cent ans.
Et rappelons que non loin à Nantes les anarchistes cassent régulièrement des choses au centre-ville lors de manifestations. Sans que cela ne change rien, à part permettre au gouvernement d’avoir l’air « démocratique ».
Les zadistes comptent par conséquent continuer tranquillement leur démarche, comme le dit le communiqué de « victoire » :
« Dans le futur, ce territoire doit pouvoir rester un espace d’expérimentation sociale, environnementale et agricole. »
On ne peut pas faire moins révolutionnaire : c’est vraiment l’éloge du repli sur un petit terrain, pour une « expérimentation ». Rien à voir avec l’urgence dont on a besoin !
Et comme le dit le texte commun de l’assemblée du mouvement du 18 janvier 2018, il y en a pour des années à négocier avec l’État, se mettre d’accord sur ce qui va être fait, etc.
Avec l’abandon de l’aéroport à Notre Dame de Landes nous vivons un moment important pour notre devenir commun.
Tandis que l’avenir de ce territoire fait l’objet de fantasmes médiatiques ici nous nous emparons de notre avenir et l’ensemble du mouvement avance concrètement sur sa construction.
Nous nous appuyons sur 10 ans de pratiques communes, assemblées, réunions, activités agricoles, vie quotidienne, organisation d’évènements etc… Nous avons construit une recherche du consensus qui est à la base de notre fonctionnement. Notre travail de réflexion et d’échange a abouti en 2015 à un accord en 6 points. Ils sont ce que nous défendons collectivement aujourd’hui.
Depuis plusieurs mois l’assemblée des usages nous permet de nous organiser sur différents thèmes :
Les hypothèses sur l’avenir qui explorent les formes juridiques possibles pour ce territoire.
Le foncier : ses usages, son partage, son statut
La gestion des conflits tant internes qu’avec l’extérieur (communes proches, organismes officiels etc…)
L’habitat, l’agriculture, la voirie, les communs que nous gérons
Il faudra de longs débats et un travail soutenu pour arriver à une formulation détaillée de notre projet, et nous aurons besoin de temps pour en trouver les formules de mise en place.
L’assemblée du mouvement du 18 janvier 2018
On pourrait se demander si, à la limite, tout cela n’est pas un grand gâchis. Sans doute que non. Tout comme le véganisme devait forcément connaître une décadence et un échec avec L214, l’écologie devait s’effondrer avec Europe Ecologie Les Verts et les zadistes.
Trop d’intellectuels liés aux universités, trop de gens de classes sociales supérieures, pas assez de contenu, pas d’engagement sur le long terme à part le plus souvent de carriéristes et d’opportunistes cherchant un moyen à s’intégrer dans les institutions d’une manière ou d’une autre…
Aujourd’hui, ni l’écologie ni le véganisme ne menacent l’équilibre des idées, la neutralité sociale la plus complète. Pourtant, il faut renverser l’exploitation animale et bloquer la destruction de la planète ; le décalage est énorme entre ce qu’il y a et ce qu’il faudrait.
Mais ce n’est qu’un début et les choses n’en resteront bien entendu pas là. La contradiction n’a été que repoussée… Pour s’exprimer d’autant plus violemment après.
Totalement inconnu en France, Herbert Marcuse est un philosophe allemand réfugié aux Etats-Unis qui a eu une influence très importante sur le Mai 1968 en Allemagne de l’Ouest. C’est un « freudo-marxiste » qui rejette le monde industriel, source pour lui d’aliénation totale.
C’est en quelque sorte un ancêtre du primitivisme. Voici une interview de lui à l’occasion d’un dossier du Nouvel observateur en 1972, intitulé « Ecologie et révolution » (Cliquer l’image pour agrandir).
La personne qui prend la parole juste après lui est le social-démocrate néelandais Sicco Mansholt, un des fondateurs de la Communauté Européenne et l’un des principaux artisans de la Politique Agricole Commune (PAC), avant de prôner en même temps une forme de « décroissance ».
« Nous visons la fin de la vente des voitures à essence et diesel d’ici à 2040 » avait déclaré Nicolas Hulot en juillet 2017, expliquant également au sujet des logements que d’ici dix ans, les « passoires thermiques », ce serait fini.
Ces propos sont éclairés désormais par une information, dont toute la presse s’est gaussée, ruinant encore davantage la crédibilité de l’écologie.
Car le gouvernement a rendu public la situation patrimoniale de ses membres et il y a plusieurs millionnaires : ce n’est guère étonnant. Que Nicolas Hulot en fasse partie, avec plus de sept millions d’euros, soit.
Cependant qu’il possède un véritable garage… Cela détruit toute crédibilité. Voici la liste de ses engins à moteur.
Description : Terrestre à moteur | Marque : BMW
Entrée dans le patrimoine : 2014 | Valeur d’achat : 33 000 €
Valeur vénale : 25 000 €
Description : Terrestre à moteur | Marque : LAND ROVER
Entrée dans le patrimoine : 1998 | Valeur d’achat : 1 000 €
Valeur vénale : 1 000 €
Description : Terrestre à moteur | Marque : BMW
Commentaire : Moto
Entrée dans le patrimoine : 2000 | Valeur d’achat : 1 000 €
Valeur vénale : 1 000 €
Description : Terrestre à moteur | Marque : PEUGEOT BOXER
Entrée dans le patrimoine : 1998 | Valeur d’achat : 1 000 €
Valeur vénale : 1 000 €
Certains chiffres sont étonnants : un millionnaire achèterait-il une vieille moto BMW à 1000 euros ? En sachant qu’à ce prix là il faut la retaper et qu’elle vaut donc alors après bien plus de ce prix ?
Et il y a le bateau. Il y a marquée que la marque est « Vaillant », mais en réalité c’est sans doute « Valiant ». Le fait qu’il en ait est connu de ceux et celles s’étant déjà questionné sur Nicolas Hulot. Mais quelle est la consommation du moteur ? En sachant qu’on en est facilement aux 40 litres par heure de consommation, avec ce type d’engins…
Mais peu importe et regardons un simple fait : Nicolas Hulot accumule les voitures. C’est incompatible, fondamentalement, avec l’affirmation de l’écologie. Et quel intérêt à ces vieilles voitures ? Rien qu’en mettant le contact, elles polluent déjà affreusement. Au moins, les riches Californiens font semblant de faire quelque chose avec leurs voitures électriques.
C’est là une incohérence qui, finalement, rappelle qui il est. Nicolas Hulot est imprégné des valeurs de cette société. Ancien animateur de télévision pour TF1, il gagne encore une fortune avec les produits Ushuaïa. C’est un beauf qui s’imagine avoir une prise de conscience, alors qu’il ne veut que se mettre en valeur et limiter la casse.
Sa démarche n’est pas sérieuse, elle est totalement décalée par rapport aux exigences de notre époque. Il faut ici d’ailleurs souligner la dimension « propriétaire ».
Propriétaire de multiples maisons (240 m², 334 m², 116 m², 180 m², ainsi qu’un appartement de 48 m²), Nicolas Hulot se dit peut-être qu’il a besoin d’autant de véhicules à chaque endroit. En ce cas, cependant, il ne peut pas donner de leçons, car c’est une attitude irresponsable.
La maison individuelle est justement une aberration écologiste, de par les ressources qu’elle demande, en termes de chaleur, infrastructure, d’empiétement sur la Nature, de transports nécessaires pour y aller, en termes d’accès à la culture urbaine, aux hôpitaux, etc.
Nous l’avions mentionné hier : Emmanuel Macron s’est empressé, après le discours de Donald Trump annonçant la sortie des accords de Paris signés à la fin de la COP21, de faire une petite vidéo en français et en anglais.
On peut l’y voir notamment utiliser le slogan « Make our planet great again », soit « rendons notre planète grande de nouveau ». C’est bien entendu une allusion au slogan de Donald Trump « Make America great again ».
Emmanuel Macron a également publié ce slogan sur instagram, ayant reçu 56 275 « J’aime » et sur tweeter, il y a pratiquement 200 000 « retweets » et plus de 300 000 « likes ».
C’est bien évidemment une opération de communication, visant à satisfaire l’ego français, ce fameux chauvinisme français qui se flatte que la France serait « à part » dans sa manière de vivre, son raffinement, etc.
C’est le fameux sentiment de supériorité français, qui exige que tout le monde apprécie les Français et les adulent, pendant qu’eux regarderaient les autres pays avec un mépris feutré.
On est ici dans une vanité totale et voici le discours d’Emmanuel Macron à la suite de la décision de Donald Trump, car demain, il faudra démasquer toute cette vaste hypocrisie.
La COP21 a été un échec, Emmanuel Macron ment quand il prétend défendre la planète, il faut avoir un regard objectif et exigeant, conscient de l’ampleur du désastre et de la radicalité nécessaire pour changer le monde.
Elysée – Jeudi 1er juin 2017
Mes chers compatriotes,
J’ai souhaité m’exprimer devant vous, quelques heures à peine après la déclaration du Président des Etats-Unis d’Amérique, parce que l’heure est grave.
Je prends note de la décision du Président américain de se désengager de l’Accord de Paris sur le climat. Je respecte cette décision souveraine. Mais je la regrette. Je considère qu’il commet là une erreur pour les intérêts de son pays et de son peuple et une faute pour l’avenir de notre planète.
Je viens à l’instant d’échanger avec le Président TRUMP et j’ai eu l’occasion de lui en faire part.
Le changement climatique est l’un des grands défis de notre temps. Ce qui paraissait encore pouvoir être discuté il y quelques années, s’impose désormais à nous tous, avec une grande évidence. La biodiversité est menacée, le dérèglement climatique affame plusieurs continents, dévaste certaines régions, chasse des habitants de leur patrie. En France même, nous observons chaque année les conséquences de ce dérèglement.
Si nous ne faisons rien, nos enfants connaitront un monde fait de migrations, de guerres, de pénuries, de disparitions d’archipels et de villes côtières, causées par ces évolutions. Cela a déjà commencé.
Ce n’est pas l’avenir que nous voulons pour nous. Ce n’est pas l’avenir que nous voulons pour nos enfants. Ce n’est pas l’avenir que nous voulons pour le monde.
La vocation de la France est de mener ces combats qui impliquent l’Humanité tout entière. C’est pourquoi la France s’est placée à l’avant-garde de la lutte contre le changement climatique. Elle s’est engagée résolument dans toutes les négociations internationales. En décembre 2015, la France a réussi ce tour de force de faire signer 195 pays, de leur faire signer un engagement commun, l’Accord de Paris pour le climat.
Alors, oui, je vous le dis ce soir avec beaucoup de force : Nous ne renégocierons pas un accord moins ambitieux. En aucun cas.
La France ce soir appelle l’ensemble des pays signataires à demeurer dans le cadre de l’Accord de Paris, à rester à la hauteur des responsabilités qui sont les nôtres et à ne rien céder.
Je veux ce soir dire aux Etats-Unis : La France croit en vous. Le monde croit en vous. Je sais que vous êtes une très grande Nation. Que les Etats-Unis ont été fondés pour faire triompher la liberté, la vérité, la raison, partout contre l’ignorance et l’obscurité. Mais ne vous trompez pas. Sur le climat, il n’y a pas de plan B. Car, il n’y a pas de planète B.
Alors, oui, nous continuerons.
A tous les scientifiques, ingénieurs, entrepreneurs, citoyens engagés, que la décision du Président des Etats-Unis a déçus, je veux dire ceci : Vous trouverez dans la France une seconde patrie. Je vous lance un appel : Venez travailler ici, avec nous, travailler sur des solutions concrètes pour le climat.
Ce soir, les Etats-Unis ont tourné le dos au monde. Mais la France ne tournera pas le dos aux Américains. Je vous assure, mes chers compatriotes et vous qui m’écoutez où que vous soyez dans le monde, la France n’abandonnera pas le combat.
Bien entendu, nous aurions préféré livrer cette bataille aux côtés des Etats-Unis d’Amérique. Car, ce sont nos alliés et ils resteront nos alliés, en matière de lutte contre le terrorisme, sur nombre de sujets de défense, de sécurité, sur nombre de sujets industriels et économiques. Mais il en est ainsi.
La porte n’est pas fermée, elle ne le sera jamais à cette Nation à laquelle nous devons tant. Mais nous sommes encore nombreux à conserver notre détermination.
La France jouera donc son rôle dans le monde car c’est ce qui est attendu d’elle. Dès ce soir, avec l’Allemagne et l’Italie, nous avons tenu à réaffirmer notre engagement pour l’Accord de Paris.
Je me suis entretenu, il y a quelques instants, avec la Chancelière d’Allemagne, nous prendrons ensemble, dans les prochains jours, des initiatives fortes allant en ce sens. Samedi, je verrai le Premier ministre indien à Paris et m’entretiendrai sur ce sujet avec lui. Dans les prochains jours, je parlerai aux principaux décideurs pour m’assurer de leur engagement.
Enfin, la France proposera un plan d’action concret, afin d’accroître son attractivité pour les chercheurs et les entreprises de la transition écologique et prendra des initiatives concrètes, notamment en Europe et en Afrique sur ce sujet. J’ai demandé au Gouvernement d’y travailler activement et le réunirai à cet effet la semaine prochaine.
Nous ne tiendrons pas seulement nos engagements passés. Dès ce soir, la France se doit d’être plus ambitieuse encore pour l’avenir, pour notre avenir.