Le jeu macabre et « artistique » de la taxidermie

La mort d’un animal qui partage notre vie est un événement très difficile à vivre. Cet animal aimé mérite que l’on s’occupe dignement de son corps. Pour ce corps sans vie, il y a l’enterrement dans un jardin privé (lorsque c’est possible), les cimetières pour animaux ou bien les centres d’incinération.

Certaines (rares) personnes choisissent de faire empailler leurs animaux défunts, afin de les « avoir pour toujours avec eux »… Sauf que la mort fait aussi partie de la vie et qu’il faut l’accepter et admettre que la dépouille d’un être vivant doit être décemment traitée et doit partir avec respect.

La taxidermie, cette pratique morbide vieille de l’Antiquité est même parfois considérée comme un art et sert surtout à alimenter les musées. Ce qui est déjà glauque, au vu des multiples autres techniques maintenant disponibles afin de recréer un corps quelconque.

Et quand la taxidermie s’invite chez les particuliers, là ça devient pathologique et il faut le dire.

Surtout que dans une atmosphère glauque comme on peut en connaître, le glauque, le bizarre, etc. est à la mode, particulièrement dans l’art contemporain et chez des gens « branchés. »

A Brooklyn, la taxidermie anthropomorphique est par exemple tendance. Cette pratique abjecte, se voulant « artistique », consiste à empailler les animaux « de compagnie » décédés et de les mettre en scène avec de petits objets.

Voici comment un article canadien explique le principe de l’atelier « morbid anatomy » :

«C’est un peu l’immortalité», explique Susan Jeive, 40 ans, au début de son cours au «Morbid anatomy», un atelier également galerie d’art spécialisé dans les sujets morbides.

Ses élèves ont payé 60 dollars pour assister à son cours et écoutent avec attention les instructions qu’elle leur donne avec son assistante, Emily Hexe, 22 ans.

«Il faut laisser le crâne et les os des pattes. Tout le reste doit être enlevé», dit-elle. Elle essaie de rassurer les débutants. «Il n’y a rien de dégoûtant. Il n’y a pas de sang qui va jaillir ou quoi que ce soit de ce genre», dit cette enseignante couverte de tatouages.

Les élèves ont en général une trentaine d’années, du genre plutôt branché.

Ils ont commencé par le plus facile, choisir leurs accessoires: meubles ou vêtements de poupée, ou même une lampe qui pourra servir de maison à la souris.

Quand Emily Hexe apporte les souris réfrigérées, certains semblent nerveux.

Mme Jeive souligne qu’elles étaient promises à un destin moins glorieux: servir de nourriture pour les lézards et serpents.

Certains hésitent à jouer du scalpel. D’autres ont déjà incisé la peau de la colonne vertébrale jusqu’à la queue pour pouvoir ensuite vider l’animal (…).

David Edelman s’est fixé comme objectif de faire de sa souris un intellectuel, avec comme accessoire un petit globe du monde.

La graphiste Sara Stryjewski, 27 ans, rêve quant à elle d’une «souris chanteuse de country», avec sa petite guitare.

«J’ai un chat qui vieillit», dit-elle aussi et, «peut-être, ce serait une possibilité», ajoute-t-elle, hésitant à être plus précise quant à l’avenir de son chat.

Jonathan Horvath, 31 ans, et Kersti Bryan, 28 ans, tous deux acteurs, sont là pour un rendez-vous amoureux.

«C’est bien de faire des choses qui sont un peu dangereuses», explique le jeune homme, tandis que Kersti Bryan souligne vouloir faire de sa souris «une jeune actrice». «Je ne dis pas que je suis Dieu, mais peut-être un tout petit peu», ajoute-t-elle.

Mais le temps passe. Il faut encore enlever les boyaux, racler les cerveaux. Et une fois ce nettoyage terminé, remplir la souris de glaise et renforcer les membres avec du fil de fer. Certains sont déjà prêts à ajouter chapeaux et petits vêtements. Mais il faut encore enlever les yeux, leur rappelle leur instructrice.

La phrase sur « Dieu » est révélatrice de l’état d’esprit méprisant pour la nature, un état d’esprit dominateur et destructeur. Un état d’esprit répugnant où la dignité des corps des animaux morts est insultée, bafouée, dans une barbarie qui semble en fin de compte « intelligente » et « amusante » !

C’est très révélateur de comment la société traite les animaux « domestiques » : des jouets changeables, rachetables, avec lesquels on peut faire tout ce que l’on veut. Même la mort d’un animal « domestique » n’est pas respectée et son corps sert de divertissement et de prétexte malsain à l’ « art ».

Ainsi, l’artiste d’art contemporain le plus riche du monde, Damien Hirst, a voulu acheter pour un million de livres sterling la collection de taxidermie de Walter Potter, un anglais qui à la fin du 19ème siècle pratiquait déjà la mise en scène d’animaux empaillés dans des scènes de la vie quotidienne.

L’initiative de Damien Hirst a raté pour diverses raisons, mais si elle avait réussi, cela aurait donné un élan énorme à cette pratique, que Damien Hirst connaît déjà à travers ses œuvres.

S’il est devenu immensément riche, c’est notamment grâce à une œuvre comme « Mother and Child, Divided » (Mère et enfant, séparé), où baignent dans le formol une vache et son veau qui ont été… tronçonnés en deux.

Damien Hirst a pratiqué cela avec de nombreux animaux. Cela montre la fascination morbide, l’idéologie macabre de gens qui, ne trouvant pas de sens dans leur vie dénaturée, décident de dégrader tout ce qu’il leur est possible de dégrader, afin de donner un sens imaginaire à une vie toujours plus aliénée.

Pour « Mother and Child, Divided » par exemple, la putréfaction des corps n’est pas arrêtée, elle est seulement ralentie. Il y a là une fascination pour le morbide…

La fascination morbide pour la mort et l’absence de respect pour les animaux, voilà une culture glauque à rejeter !