Annie Thébaud-Mony et les légions d’honneur de Duflot

C’est un acte courageux qui se veut symbolique: la ministre du Logement Cécile Duflot entendait remettre la Légion d’honneur à Annie Thébaud-Mony, sociologue de la santé, spécialiste des cancers professionnels.

Ce n’est pas un acte contre Duflot est-il précisé, mais en pratique quand même. Car Duflot et EELV sont outrageusement réformistes, dans une logique d’installation confortable dans le système.

Mais trop c’est trop, et Annie Thébaud-Mony ne peut pas accepter ce qui l’amènerait à accepter tacitement l’ordre dominant.

Au lieu de cela, elle appelle à « la remise en cause de l’impunité qui jusqu’à ce jour protège les responsables de crimes industriels », constatant « l’accumulation des impasses environnementales, en matière d’amiante, de pesticides, de déchets nucléaires et chimique. »

Ce qu’elle dit est simple: les industriels ont les coudées franches et l’Etat leur accorde l’impunité derrière le discours des « faibles doses. »

Et qui paie le prix, en premier lieu? Les travailleurs les plus précaires et les ouvriers bien entendu, qui utilisent des produits dangereux, sans le savoir.

Annie Thébaud-Mony est ainsi engagée, en plus d’être directrice de recherche honoraire à l’Inserm, elle est présidente de l’Association Henri Pézerat (santé, travail, environnement) et porte-parole de Ban Asbestos France.

Deux ouvrages aux titres très parlant avaient été particulièrement remarqués: « L’industrie nucléaire : sous-traitance et servitude » (2000) et « Travailler peut nuire gravement à votre santé. Sous-traitance des risques, Mise en danger d’autrui, Atteintes à la dignité, Violences physiques et morales, Cancers professionnels » (2007).

Elle a ainsi violemment chargé la ligne de sous-traitance d’EDF, qui amène une pression énorme sur les travailleurs, qui doivent par exemple « oublier » leur dosimètre de radiations pour sauver leur emploi…

Ce qui l’a amené bien entendu à être mise relativement de côté dans sa carrière.

Duflot comptait en quelque sorte remettre en avant Annie Thébaud-Mony en l’institutionnalisant, mais c’était trop gros et sans aucune efficacité possible. NI Duflot ni EELV ne peuvent proposer grand chose à personne, à part… à Duflot et EELV.

 Duflot a en effet décerné 21 personnes (sur 60 posible) chevaliers de la légion d’honneur, dont une dizaine… de proches.

On trouve ainsi la maire de Montreuil et ancienne ministre de l’environnement Dominique Voynet.

On a également le maire EELV de Loos-en-Gohelle (Pas-de-Calais) et Catherine Calmet-Rebérioux, secrétaire générale du groupe EELV au conseil régional d’Ile-de-France.

On a Maryse Oudjaoudi, secrétaire régionale d’EELV en Rhône-Alpes et candidate dans l’Isère aux législatives, ou encore Jean Malet, conseiller régional Vert d’Ile-de-France, et maire de Mezy-sur-Seine.

On a Michèle Rivet, vice-présidente écologiste du conseil régional du Centre, et Daniel Breuiller, maire et conseiller général EELV d’Arcueil (Val-de-Marne).

Pour la petite cerise sur le gâteau, on retrouve également deux personnes de l’Indre: Thérèse Delrieu qui est conseillère générale PS, et Ghislaine Millet, présidente de la Ligue des droits de l’homme du département.

Or et évidemment, Manuel Flam qui est le directeur de cabinet de Cécile Duflot, est implaté politiquement en Inde…

Ce n’est peut-être pas le pire. Parmi les autres personnes, qui ne sont pas des amis arrosés, on retrouve un architecte-urbaniste, un coprésident d’office HLM, un directeur général d’un office public de l’habitat…

Or, quand on voit la France, peut-on décemment donner une décoration à ces gens-là? Duflot n’a pas un ministère neutre; en assumant celui du Logement, elle va montrer que sur le plan de l’urbanisme elle n’a rien voir avec la Nature, ni de près, ni de loin. C’est là dessus, sur son bilan, que tout sera on ne peut plus parlant!