Nouvelle reconnaissance constitutionnelle de la corrida

Le conseil constitutionnel a reconnu que la corrida était bien constitutionnelle. Cela étonnera qui ?

Il faut poser la question de fond : est-ce que la loi est le reflet du rapport de forces dans la société ? Ou bien est-ce la loi qui fait qu’il existe tel ou tel rapport social ?

Si l’on considère que ce monde est une société organisée par les « riches » et pour les « riches », alors on pense la première chose. Aucune valeur positive n’existera à moins d’être arrachée. Et l’exploitation animale ne peut pas être réformée, elle ne peut qu’être abolie.

Si par contre, on pense qu’on vit dans une société « démocratique » avec des « lobbys » en lutte, alors on tente de modifier le droit. C’est ce que tente de faire le milieu de la « protection animale », qui espère améliorer la condition animale, en tendant vers le bien-être (on appelle cela le « welfarisme »).

Il va de soi que nous trouvons cela illusoire, et là on en voit même le côté totalement contre-productif. Les partisans du « welfarisme » ont en effet tenté de jouer sur les mots de la loi pour rendre inconstitutionnel la corrida.

Puisqu’en effet la corrida n’est autorisée que là où elle peut prouver une « tradition », alors cela remet en cause le principe de la république une et indivisible, etc.

Sauf que tout cela est du bla bla et que la « République » est le fruit d’une grande quantité de rapports de force historiques. L’histoire fait que les situations changent localement : en Alsace la religion est subventionnée, en Bretagne l’autoroute est gratuite, etc. etc.

Pareillement, s’il y a des congés payés, c’est également en raison du Front Populaire et de la grande grève de 1936, pas en raison d’une loi bien faite par des gens sympathiques améliorant les conditions de vie des gens qui travaillent…

En jouant sur la loi et non sur les valeurs positives d’une culture positive « révolutionnaire », les partisans du welfarisme ont non seulement gaspillé des forces, mais ont provoqué un contre-coup majeur, puisque le conseil constitutionnel a considéré comme parfaitement constitutionnel la corrida.

La corrida a donc encore plus de légitimité qu’avant-hier. Elle est encore plus ancrée dans la constitution, qui auparavant la « couvrait », et maintenant va plus loin : elle la reconnaît comme légitime. Les corridas vont maintenant encore plus revendiquer leur statut spécifique, historique, reconnu nationalement.

Les gens qui critiquent la corrida vont encore plus se voir repousser comme remettant en cause un statu quo républicain, comme « extrémiste », etc.

Mais de toutes manières, la question n’était pas là. La libération animale est un tout, ce n’est pas quelque chose qu’on peut découper en petits morceaux séparés, en tentant de grapiller des choses ici et là.

L’exploitation animale est une réalité non pas simplement « morale », c’est une réalité sociale, économique : ne pas voir cela, c’est se condamner à un moralisme individuel abstrait et impuissant à transformer la réalité.

Voici le document du conseil constitutionnel, qui ne veut d’ailleurs rien dire et ne dit même strictement rien, preuve que tout cela est de la poudre aux yeux. Une preuve que ce n’est pas en jouant sur les mots que l’on fait plier l’exploitation !

Décision n° 2012-271 QPC du 21 septembre 2012

Association Comité radicalement anti-corrida Europe et autre [Immunité pénale en matière de courses de taureaux]

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 21 juin 2012 par le Conseil d’État, dans les conditions prévues par l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par l’association « Comité radicalement anti-corrida Europe » et l’association « Droits des animaux ». Cette question était relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de la première phrase du septième alinéa de l’article 521-1 du code pénal.

Le premier alinéa de l’article 521-1 du code pénal réprime notamment les sévices graves et les actes de cruauté envers un animal tenu en captivité. La première phrase du septième alinéa de cet article exclut l’application de ces dispositions aux courses de taureaux. Cette exclusion est toutefois limitée aux cas où une tradition locale ininterrompue peut être invoquée.

Les requérants soutenaient que ces dispositions du septième alinéa portaient atteinte au principe d’égalité devant la loi. Le Conseil constitutionnel a rejeté ce grief et jugé les dispositions contestées conformes à la Constitution.

Le Conseil constitutionnel a relevé que l’exclusion de responsabilité pénale instituée par les dispositions contestées du septième alinéa de l’article 521-1 du code pénal n’est applicable que dans les parties du territoire national où l’existence d’une tradition ininterrompue est établie et pour les seuls actes qui relèvent de cette tradition. Le législateur, par ces dispositions, a entendu que le premier alinéa de l’article 521-1 du code pénal ne remette pas en cause des traditions de courses de taureaux. Ainsi, la différence de traitement instaurée par le législateur entre agissements de même nature accomplis dans des zones géographiques différentes est en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit.

Il appartient par ailleurs aux juridictions compétentes d’apprécier les situations de fait répondant à la « tradition locale ininterrompue ». Cette notion n’est pas ambiguë.