Le rat des Baumettes

Il y a quelques jours a été diffusé un document du contrôleur général des lieux de privation de liberté sur la prison des Baumettes à Marseille. Y était dénoncé des conditions de vie abjectes, comme en témoigne par exemple cette photo.

Parmi les photographies, on trouvait également celle-là.

C’est cette photographie qui est également importante de notre point de vue. En effet, il n’existe pas de point de vue neutre. Toute photographie, de la manière dont elle est cadrée, le choix de la luminosité, par le choix de ce qu’elle représente, est un parti-pris.

Et cette photographie, justement, relève du social-darwinisme. Parce que les conditions de la prison sont inhumaines, il « fallait » que soit montré le caractère inhumain, et alors le social-darwinisme en appelle à ce qui est « monstrueux », animal.

C’est là qu’on retrouve nos pauvres amis les rats, qui sont encore une fois utilisés de manière démagogique afin de symboliser ce qui est inhumain. Mais les humains ne peuvent pas être inhumains : s’ils ont l’air de l’être, c’est que quelque chose ne va pas, il est totalement faux de prétendre que cela serait un « retour en arrière » au côté « animal. »

En présentant un rat mort, la photographie ôte toute dignité à cet être vivant ; le rat est utilisé comme « preuve » utilitaire du caractère inhumain de la prison. Sa réalité sensible est niée, son corps mort est exploité comme moyen d’affirmer quelque chose de totalement extérieur à lui.

Sont-ce les rats qui ont construit la prison des Baumettes ? Sont-ce les rats qui ont fait que les humains se retrouvent dans une société où l’on met des gens en prison en tentant de leur arracher toute dignité ? Sont-ce les rats qui sont à l’origine du crime dans la société française ?

Absolument pas. Et le fait de présenter de la sorte un rat mort montre bien que la photographie en appelle à une « amélioration » qui passe par la « culture » et non pas la nature. En fin de compte, on en appelle ici à une prison plus « moderne » et plus « humaine. »

Or, il est évident que si le crime existe, c’est parce que la société prétendument humaine ne l’est pas ; si les personnes emprisonnées allaient travailler en rapport avec la nature, si elles exerçaient des activités socialement utiles mais aussi et surtout utiles à la vie en général, alors elles se transformeraient, elles progresseraient.

Il existe une multitude de choses faciles à faire qui donnent un sens à la vie, et les personnes emprisonnées, si elles fabriquaient par exemple des voiturettes pour chiens, trouveraient facilement un sens à aller de l’avant, à se rendre utiles.

Ceci dit, c’est valable pour les gens en-dehors des prisons et inversement il faut rappeler qu’il existe déjà des emplois en prison, payés absolument une misère et qui représente un degré terrible d’exploitation !

En tout cas, ce qui est certain, c’est qu’une société humaine qui nie la Nature ne peut qu’aller dans le mur, elle n’a pas de perspectives, car elle nie la réalité sensible. Comment s’épanouir si on nie pourtant cela ?

La photographie du corps d’un rat mort n’est donc pas un témoignage en appelant à la dignité, c’est une tentative de sortie par le social-darwinisme, en attaquant plus faible que soi. Les prisons n’auront un sens que lorsque les rats seront reconnus dans toute leur dignité, mais alors il n’y aura plus de prison du tout, car l’humanité vivra en reconnaissant la vie et son épanouissement !