Bardot l’identitaire face à la France anti-animaux

Cette histoire très médiatisée de Brigitte Bardot voulant faire comme Depardieu et avoir la nationalité russe est beaucoup plus compliquée qu’elle n’en a l’air.

En effet, de par les conditions en France du combat pour la libération animale, ou même pour la protection animale, Brigitte Bardot ne fait qu’exprimer un sentiment général d’abandon.

C’est cela qui lui fait dire à Nice-Matin :

« Je suis sérieuse. J’en ai plein le c… Ras-le-bol! Je ne supporte plus ce pays. Depuis Sarkozy et ses promesses non tenues, personne ne répond à mes requêtes. Cela me met dans une douleur et une rage folle de voir cette impuissance. Je ne demande rien d’extraordinaire: une RE-PON-SE pour sauver ces animaux! »

Nombre de végans de la première génération, celle des années 1990, se sont « enfuis » ailleurs, notamment en Angleterre, préférant vivre dans une culture squatt où le véganisme était considéré positivement, dans des pays où le soutien aux animaux n’est pas rejeté aussi massivement qu’en France.

Le sentiment catastrophé de Bardot, il n’y a pas en France une seule personne aimant les animaux qui ne l’ait. Cela il faut le dire, car c’est une réalité.

En cela, paradoxalement, Bardot a exprimé la seule chose qui ait véritablement un sens dans toute son attitude insupportable et raciste : le sentiment d’abandon face à une France totalement bloquée en ce qui concerne la question animale.

Bardot a ici exprimé une chose vraie, à travers un mélange d’horreurs, de stupidité raciste et de perspective non végane. C’est l’apogée de la démarche de Bardot. Après cela, elle ne peut plus rien dire qui ait ne serait-ce qu’un sens positif quelque part.

Est-ce positif, donc, ou bien LTD se serait-il assagi avec la nouvelle année qui vient de s’ouvrir ? Pas du tout : il faut toujours avoir les intérêts des animaux en tête et voir ce qui découle d’une situation.

Et naturellement, les états d’âme des végans, aussi importants qu’ils soient pour nous, ne comptent pas. Nous, végans, pouvons déprimer par rapport à la France, mais nous n’avons pas le choix et devons lutter, c’est notre devoir. Nos états d’âme ne comptent pas, même s’ils sont à prendre en compte car ils révèlent beaucoup de choses, mais ils ne doivent pas paralyser notre combat.

Il y a donc ce que la société retient surtout, malheureusement ici, à savoir que la sortie de Bardot a encore fait passer les personnes aimant les animaux pour des gens délirants, irrationnels, ayant une vision du monde totalement absurde.

Il ne faut d’ailleurs nullement basculer dans la naïveté, car Bardot sait très bien ce qu’elle dit. Elle n’est pas végane et elle peut donc largement mettre en avant la Russie non végane, surtout que ce qui compte pour elle, c’est l’instauration d’un régime « fort » et « identitaire. »

Bardot participe à la formation d’une opinion en attente d’un « recours » pratiquement fasciste, venant remettre l’ordre, sur une base « identitaire. »

Voici par exemple ce qu’a dit Bardot à Nice-Matin, au sujet de Poutine:

« Je lui trouve beaucoup d’humanité. A chaque fois que je lui demande quelque chose, en principe, il me l’accorde. Il a fait plus pour la protection animale que tous nos présidents successifs. Et puis là-bas, il n’ont pas l’Aïd-el-Kébir. »

C’est au moins la troisième fois qu’elle reprend l’antienne du président Poutine – qui – a – fait – plus – que – tous – les – présidents – français. Cela correspond à de nombreuses choses :

– le fait de résumer la question animale à des questions clefs, comme la corrida, le halal et le casher;

– son soutien à un régime « fort » (présenter Marine Le Pen comme quelqu’un qui « défend les animaux », expliquer justement qu’elle vote pour elle, confier la publicité de la fondation Bardot à une agence de communication issue de l’extrême-droite, souhaiter une bonne année 2012 aux « identitaires », remercier Poutine pour l’interdiction de vente de peaux de phoques, etc.);

– le fait d’affirmer la protection animale tout en expliquant son impossibilité pratique (voir par exemple le style de son soutien à Sea Shepherd);

– le fait de soutenir tout et n’importe quoi afin de faire du buzz (affirmer se présenter aux élections présidentielles, écrire une lettre à Carla Bruni pour la féliciter de ne pas porter de fourrure, soutenir Depardieu voulant quitter la France « …bien qu’il soit un amateur de corrida… », se prononcer pour le droit de fumer, de rouler trop vite et sans ceinture, etc.);

Brigitte Bardot a d’ailleurs utilisé à la fois sa fondation et une situation particulière, celle des éléphants tuberculeux à Lyon, Baby et Népal. Elle ne pose pas la question globale, elle utilise un événement suscitant l’émotion, comme la défense des deux éléphants de Lyon, pour faire dévier l’émotion vers la solution « identitaire » et « autoritaire. »

Voici le communiqué de Bardot, par l’intermédiaire de la Fondation Bardot :

Finalement, il y a une chose essentielle que l’on trouve ici en arrière-plan. Avec la crise, c’est le social-darwinisme qui se développe, et les animaux sont considérés comme des marchandises sans valeurs. La société est prête à accepter qu’ils souffrent, car la crise est considérée comme une préoccupation « bien plus sérieuse. »

Nombre de commentaires contre Bardot lui reprochent d’ailleurs de ne pas s’occuper des pauvres et d’ennuyer tout le monde avec les animaux.

Cela signifie que contre le populisme lié à la crise, les personnes amies des animaux doivent porter une utopie, proposer une véritable société alternative. Sans cela, toute revendication pour les animaux affrontera un mur toujours plus grand, toujours plus solide, toujours plus déprimant, toujours plus fondé sur la souffrance, la torture, le meurtre.