La concentration des abattoirs

La crise des « lasagnes » est une conséquence directe de l’exploitation animale, qui dans la logique du profit pousse toujours plus à l’extrême la gestion de la production. Si la France aime ainsi son image d’Epinal de pays de fermes et de paysans, la réalité est toute autre : l’agro-industrie est surpuissante.

En illustration, voici un intéressant article du Courrier Picard, qui traite de la concentration des abattoirs. Ce qui est d’autant plus pratique pour les fermer demain ! Car l’exploitation animale arrivant à son point culminant ne peut que s’effondrer que comme un château de cartes !

PICARDIE Les abattoirs sont abattus

Il y en avait autrefois dans la plupart des grosses bourgades… Il n’en reste souvent qu’un par département. L’abattage connaît une concentration qui finit par nuire.

«C‘est vrai, je regrette un peu l’époque où je me rendais chez un éleveur de Crécy-en-Ponthieu pour y choisir mes bêtes sur pied. Mais c’est vrai aussi qu’aujourd’hui on n’a plus vraiment le temps

Artisan boucher installé à Abbeville, Frédéric Botte achète désormais, comme la quasi-totalité des boucheries traditionnelles, sa viande chez un grossiste. Lagache, Lebel Viande… Dans le jargon, on les appelle des « chevillards».

Ces grossistes achètent la viande sur pied à un producteur qui fait abattre les bêtes. Ils récupèrent les carcasses et les débitent pour le compte de leurs clients.

«Le système fonctionne bien, estime Jean-Louis Delayen, artisan à Amiens. Je téléphone en fin de semaine pour passer mes commandes et j’ai au bout du compte une qualité identique à celle que j’avais lorsque j’allais chez Défial (les ex-abattoirs d’Amiens fermés) choisir mes bêtes.»

Changement d’époque, nouveaux circuits… Ces quinze ou vingt dernières années, le paysage de l’abattage a considérablement évolué dans l’Hexagone, pour passer d’une logique de proximité à une logique de concentration. Rationalisation des coûts oblige.

Il reste un abattoir dans la Somme et un dans l’Oise

Dernier épisode en date: la fermeture, le 1erfévrier, des abattoirs de Domart-en-Ponthieu dans la Somme, ne laisse qu’un établissement dans le département, à Montdidier.

Dans l’Oise, il ne reste que les abattoirs Bigard à Formerie. Exception qui confirme la règle, l’Aisne en compte encore trois: à Laon, Hirson et au Nouvion-en-Thiérache. Mais ce dernier qui abat exclusivement des porcs, a failli disparaître et a été repris in extremis par une vingtaine de salariés qui ont créé une société coopérative et participative (Scop).

Au cœur de ce phénomène de concentration: les coûts, devenus très importants, couplés à une baisse de la consommation de viande.

«Quand vous achetez une prestation d’abattage, elle représente une ligne sur la facture avec X kilos de viande multipliés par le prix. En dessous, il y a douze lignes de taxes qui doublent le prix. Aujourd’hui, plus personne ne fait ce métier-là pour gagner de l’argent, mais pour assurer la sécurité de ses abattages», résume Maurice Soufflet directeur des établissements Lagache, à Friaucourt (Somme).

Lui achète toujours ses bêtes sur pied. Et s’efforce de rester dans ce schéma de proximité qui a longtemps prévalu: «Mais ça devient difficile parce qu’il y a de moins en moins d’abattoirs. Si les acheteurs ne se déplacent plus, les bêtes elles, font de plus en plus de kilomètres».

Une concentration qui finira par avoir ses limites. L’allongement des trajets étant forcément synonyme de renchérissement du coût du transport et de régression en termes de bien-être des animaux.

Si tout le monde a semblé jusqu’ici se satisfaire de la rationalisation du réseau – à commencer par l’État qui a trouvé là le moyen d’assurer un contrôle à la fois plus efficace et moins coûteux des normes sanitaires – on a atteint un seuil en deçà duquel, il deviendra compliqué de faire abattre les bêtes dans de bonnes conditions.

Le ministère de l’Agriculture planche sur un schéma. Sachant qu’il lui manque une donnée essentielle: au bout du bout, ce sont les industriels qui décident.