Nous procéderions comme les plantes…

Nous avions très brièvement parlé de l’utopie de ne plus manger de végétaux. Si les végans se moquent avec raison de la propagande anti-animaux sur le « cri de la carotte », il n’en est pas moins vrai que les végétaux ont des ressentis également, même si moins « développés. »

Inévitablement la question des végétaux se posera, mais après celle des animaux, bien entendu.

Dans le passage suivant, Lovelock décrit l’utopie de se passer des végétaux, un peu comme dans la série « Star Trek » où on commande à l’ordinateur le plat que l’on veut et qui se fait synthétiser.

L’humanité fait face à Gaïa un peu comme si celle-ci s’était divisée, l’humanité étant en quelque sorte son enfant.

« Je crois qu’il est possible – sans mutiler Gaïa – de nourrir les huit milliards d’habutants que comptera bientôt la planète. Pour cela, nous devons nous dissocier du métabolisme de la Terre.

Lorsque la fusion [nucléaire, comme le fait le soleil, pour l’instant on utilise la fission nucléaire], peut-être disposerons-nous de toute l’énergie dont nous avons besoin ; cependant, nous n’en continuerons pas moins à occuper une surface beaucoup trop grande avec nos pratiques agricoles et à constituer une menace pour les écosystèmes océaniques.

Ne serait-pas possible de synthétiser la nourriture nécessaire à la population du globe et de renoncer par là même à l’agriculture ? La consommation alimentaire mondiale actuelle représente quelques sept cent millions de tonnes de carbone, soit une fraction minime de l’utilisation actuelle de carbone sous forme de combustible.

Les substances chimiques indispensables à la synthèse des aliments seraient extraites directement de l’air ou, plus facilement encore, des composants carbonés fournis par les effluents des centrales électriques.

L’azote et le soufre pourraient aussi provenir de ces effluents, et nous n’aurions besoin en outre que d’eau et d’éléments à l’état de trace.

Nous procéderions comme les plantes, mais en remplaçant la lumière solaire par la fusion.

Nous ne synthétiserions pas les substances complexes que nous mangeons habituellement (brocolis, olives, pommes, steaks, hamburgers, pizzas…). De nouvelles usines alimentaires de grandes dimensions produiraient plutôt des sucres et des acides aminés simples, lesquels constitueraient la base de cultures tissulaires (de viandes et de légumes) ou d’aliments artificiels fabriqués à partir de tous les organismes pouvant être mangés sans danger.

Les techniques utilisées ne seraient guère différentes de celle employées à présent pour brasser la bière ou produire des antibiotiques.

Appliquer ces procédés sur une échelle suffisante pour nourrir tout le monde permettrait à de restituer à Gaïa les terres agricoles afin qu’elles remplissent à nouveau leur fonction véritable : la régulation du climat et de la chimie de la Terre.

La surpêche actuelle qui menace la faune océanique cesserait du même coup. » (James Lovelock, La revanche de Gaïa)