Pauvre poulet mort, au corps étalé de manière indigne devant tout le monde. A côté du corps de cet animal décédé, un panneau indiquait : 27 poulets morts, merci les chiens.
Et cela, dans un lieu considéré comme étant le plus alternatif de France : la ZAD de Notre-Dame-des-Landes.
Ce que veut dire le panneau, c’est que les chiens en liberté « empiètent » sur les zones consacrées à l’exploitation animale : au lieu d’être tués par les humains, les poulets le sont par les chiens et cela pose « problème. »
Ça en dit long sur les conditions lamentables là-bas ; tout ce qui s’y passe en général d’ailleurs confirme l’opinion que nous avons émise à un moment donné, après avoir longtemps parlé de la lutte sur la ZAD : il y a eu un tournant, et la ZAD n’est plus un lieu progressiste, mais un rassemblement d’esprit petit-bourgeois, voulant un retour en arrière dans le temps, à l’époque de la petite exploitation.
Il n’y aucun projet de porté, aucune valeur universaliste, il y a la volonté de trouver un moyen de « fuir » la société. Cela a peut-être sa valeur, sauf que cela se fait nécessairement aux dépens des animaux. Ce qui est une preuve comme quoi il faut changer la société, et non pas l’abolir ou quelque chose du genre.
D’ailleurs, non loin de ce pauvre poulet se tenait une « antispézad. » Nous ne l’avions pas annoncé, car nous ne pouvions pas décemment donner une quelconque ambiguïté à ce qu’est la ZAD, quand on voit ce que c’est. Nous ne pouvons pas dire que la ZAD n’est pas progressiste et appeler à discuter du véganisme là-bas, ce serait indécent.
Ce genre d’incohérence ne gêne cependant pas les organisateurs, et pour cause puisque leur esprit est celui de l’antispécisme anarcho-punk, idéologie nihiliste fabriquant des « anti » à la chaîne (anti-sexisme, anti-racisme, anti-capitalisme, anti-âgisme, anti-transphobie, anti-islamophobie, etc. etc. la liste étant pratiquement infinie). On a ici une démarche catholique du choix entre le « bien » et le « mal » (car bien évidemment les « antispécistes » en Allemagne n’ont rien à voir avec ce bric à brac typiquement universitaire français).
Il est d’ailleurs assez fascinant de voir comment une telle idéologie peut naître en parlant des animaux, alors que ceux-ci n’existent pas pour cette idéologie. En effet, elle nie totalement la protection animale (résumée à une activité de gens arriérés pratiquement tous fachos), rejette l’ALF (mais ne l’avouera jamais et n’en parle de toutes manières jamais) et bien entendu rejette formellement tout ce qui peut avoir l’air d’une défense de la Nature.
Il n’y a donc d’animaux nulle part: ni à héberger et à soigner, encore moins à adopter, ni même à libérer, ni même à préserver. Les « animaux » de cette idéologie sont une sorte d’abstraction, un prétexte au romantisme typiquement humain. D’ailleurs, ces gens poussent même l’escroquerie intellectuelle jusqu’à se réapproprier le slogan « libération totale » comme libération animale + libération humaine, alors que ce slogan signifie libération animale + libération de la Terre…
Une telle initiative a néanmoins du mérite: elle rappelle, à l’inverse, la fabuleuse valeur des personnes indignées par la condition animale, mais incapables de l’appréhender rationnellement en raison du contre-coup émotionnel. Cela est normal, c’est tout naturel: on ne peut qu’être traumatisé quand on voit la condition animale. Beaucoup de gens se voilent la face à cause de cela: ils ont peur de souffrir en assumant de regarder la réalité.
Est-il juste de considérer ces gens comme des « idiots » parce qu’ils ne sont pas révolutionnaires, est-il juste de dire qu’ils sont nazis parce qu’ils ont des préjugés formés sur le tas et étant une tentative de comprendre ce qui se passe?
Non, évidemment! A moins de vouloir aider les fachos à gagner ces gens, ce qu’un antifascisme caricatural et unilatéral ne peut que faire (et nous avons déjà critiqué maintes fois ces gens qui ne mettent pas les pieds dans un refuge mais donnent des leçons abstraites d’antifascisme!).
Il y a une fantastique dignité dans la personne révoltée par la situation des animaux. Il y a un début formidable, une reconnaissance de la sensibilité, bien loin de l’esprit cartésien à la française, qui méprise les animaux et en a une conception mécanique. Tout la question est de savoir faire fonctionner la raison en même temps!