La publicité et « Serge le lama »

Nous pensions en avoir terminé avec cette terrible histoire du pauvre lama (voir La pathétique et terrible histoire de « Serge le lama » et Serge le lama : un faux « conte » pour adultes barbares). Malheureusement, ce pauvre être se voit désormais encore plus esclave, puisque le cirque qui l’exploite a décidé de profiter de sa notoriété.

Et pas que le cirque d’ailleurs : d’Air France à l’UNICEF, tous ont décidé de profiter du malheur du lama pour faire progresser leur propre cause, commerciale ou morale, ce qui dans le dernier cas est un comble.

On peut ainsi tout à fait comprendre la démarche d’Air France, qui a fait le tweet suivant :

« Le Pérou et ses animaux célèbres dès 998 EUR. #lamadebordeaux »

Car Air France est là pour essayer, dans une option ouvertement commerciale, de se faire de la publicité à peu de frais. La situation du lama importe peu aux responsables publicitaires et marketing.

Mais que même l’UNICEF joue sur cette carte, c’est ouvertement dérangeant. Théoriquement, on a ici une opposition entre la superficialité et un véritable engagement. En pratique, on a ici quelque chose qui s’appuie ouvertement sur l’opposition condition animale / « humanisme » moderne.

Cela n’a rien de nouveau, nous avions parlé de l’Observatoire Internationale des Prisons qui avait déjà fait de même (La fausse opposition animaux / humains: quelques exemples très parlant).

D’ailleurs, l’initiative de l’UNICEF, qui vise à « récupérer » un phénomène superficiel, est strictement équivalente aux autres initiatives du même type.

La superficialité appelle la superficialité et par exemple mener une campagne contre le cirque en tentant de « surfer » sur le buzz actuel serait contre-productif, car en appelant non à l’intellect, mais au divertissement (une chose que l’association PeTA n’a jamais comprise, par exemple).

Voici une publicité lancée par le le comité du tourisme gersois, son directeur, dans la presse, expliquant cette initiative par un très identitaire (c’est à la mode en ce moment) :

« L’humour, pour souligner notre esprit de Gascons ! »

Le responsable du cirque reçoit par ailleurs d’innombrables propositions pour faire de la publicité, des supermarchés aux discothèques. Après le pathétique arrive l’ignominie.

On remarquera d’ailleurs la référence à la Nature dans la publicité suivante…

Et on a même le club de football des Girondins de Bordeaux qui joue dessus, et qui affirme l’avoir comme invité demain dimanche avant le match…

La liste est de fait innombrable. Et cette récupération montre bien le fond: il est parlé d’humour, mais on est dans une culture perverse du décalé et de l’exploitation. Faire passer la barbarie pour de l’originalité, voilà le tour de passe-passe du capitalisme…

Ce qui est aussi à noter, c’est que ces publicitaires au niveau intellectuel et culturel aussi bas sont payés une fortune et encensés… Cela en dit long sur ce qui est valorisé…

Nous avions sous-estimé le vide de la société: après les médias, même la publicité s’est mêlée de cette terrible histoire. Et Serge le lama est encore plus esclave…