Le projet de trame bleue et verte

Nous avions parlé il y a peu du groupe VEAN évaluant la situation de l’urbanisation dans sa région (Le RER Nord-Pas de Calais, un projet d’urbanisation). Voici un nouvel article de leur part, au sujet du projet de Trame verte et bleue organisée par le gouvernement dans le cadre du « Grenelle de l’environnement ».

Cette trame consiste en des réservoirs de biodiversité, qui sont reliés par des corridors, avec également des aménagements locaux (faire des ouvertures dans les clôtures,  créer des « passages à faune », supprimer les obstacles pour les poissons – on peut voir le schéma ici). C’est un projet national, et ici VEAN l’évalue localement, dans un esprit critique et écologiste radical.

LE PROJET DE TRAME VERTE ET BLEUE ET SES OPPOSANTS SYNDICALISTES NE VOIENT QUE L’INTERET DES HUMAINS

Jeudi des agriculteurs de la région de Dunkerque ont répondu à l’appel de leur syndicat et ont manifesté en tracteur contre un projet de réaménagement du territoire : la trame verte et bleue.

Ils se sont rassemblés sous le mot d’ordre « Sauvons le fruit de nos terres » avec pour revendication que le projet soit abandonné ou modifié en profondeur.

La trame verte et bleue est un projet d’aménagement du territoire qui aura des conséquences importantes sur le secteur économique agricole. Le territoire du Nord-Pas de Calais est décrit par un Schéma régional de cohérence écologique suivant les décisions du Grenelle de l’environnement.

Des zones déterminées seront « renaturées » par décision de l’Etat. La volonté affichée est de tracer des couloirs de zones de nature faites de bois, prairies et bosquets, et de cours d’eau, de mares et des zones humides. En reliant des espaces qui apparaissent aujourd’hui comme des « réservoirs » de biodiversité, la trame verte et bleue permettrait aux animaux et végétaux de survivre, voire de s’épanouir.

Dans de nombreux secteurs du Nord-Pas de Calais, comme Lille, le bassin minier, Calais etc,  les  villes sortent d’elles-même. Elles se répandent autour, par des zones industrielles, commerciales, des routes, des lignes électriques. Tout cela couvre le sol de béton et d’enrobé et coupe les possibilités de déplacement de nombreux animaux. C’est ce que les spécialistes appellent des « surfaces artificialisées ».

En vingt ans, ces surfaces ont augmenté de plus de 20000 hectares, soit deux fois la ville de Paris. Or, 95 % de ces zones se sont créées à partir de terres agricoles.

En décidant de transformer des terrains dont la vocation est d’être agricole en terrains destinés à intégrer la trame verte et bleue, le schéma régional interfère avec les intérêts économiques des agriculteurs. En effet, certaines exploitations seront gênées dans leur développement.

Mais surtout, il faut avoir à l’esprit que la revente de terrains agricoles en terrains « à bâtir » est une ressource importante pour les exploitants agricoles. De nombreuses exploitations, qui ne trouvent pas de repreneur sont démantelées et divisées en lots de terrains.

Ces terrains deviennent terrains à bâtir par une décision de la mairie (modification du Plan Local d’Urbanisme), ce qui permet de les revendre bien plus cher. Il s’agit là d’un moyen pour les agriculteurs qui ne peuvent revendre leur entreprise de s’assurer une retraite confortable. Voilà le sens du mot d’ordre du syndicat : « Sauvons le fruit de nos terres ».

Les agriculteurs ont un poids important en France, et notamment dans le Nord-Pas de Calais qui est une région très agricole et assez rurale. La culture « très chasse » est très présente, les humains sont vus comme des êtres à part, hors nature, chargés d’exploiter la terre et d’élever des animaux ou de les « prélever » pour gérer leur population. Les vegans sont ignorés et les écologistes sont considérés comme des utopistes « qui n’ont pas de vision du monde rural » pour citer la dernière connerie de José Bové.

Cependant, le projet de trame verte et bleue n’est pas éloigné de cela et est largement incorrect du point de vue vegan. C’est sur, lutter contre les terres artificialisées est bien une nécessité du point de vue de la Nature.

Mais le schéma régional fondé sur les constats du Grenelle de l’environnement relève : « L’appauvrissement de la diversité bio logique constitue une préoccupation  fondamentale en soi. De par les nombreux services qu’elle rend aux sociétés  humaines, son appauvrissement continu  a des conséquences majeures sur le bien-être humain, aujourd’hui et dans l’avenir. »

Pour les techniciens des ministères comme pour les agriculteurs, la Nature n’a pas de valeur en soi. Selon eux, s’il faut sauver des bouts de nature, ou s’y opposer, c’est pour sauver de potentielles ressources futures !