3 ans après, la situation à Fukushima

Cette photographie a été prise à Fukushima. Elle témoigne de la vigueur du tsunami qui a frappé là-bas il y a trois ans. Elle rappelle également que la zone a dû être évacué, dans un périmètre toujours plus grand.

On a donc ici des rizières, qui entourent le distributeur de boissons. Mais il n’y a plus les humains qui organisaient ces rizières et qui utilisaient ce distributeur : la vanité de la domination de la Nature par la technique est ici exposée.

Ce n’est également pas le seul endroit au monde qui a été abandonné de telle manière par les humains : les environs de la centrale nucléaire de Tchernobyl a été pareillement abandonnée, notamment la ville de Pripiat. On retrouve les mêmes photos au caractère si étrange et inquiétant (Pripiat et Tchernobyl).

Bien entendu, cela ne plaît pas au gouvernement japonais qui prétend que tout est sous contrôle et qui entend forcer le retour des humains dans la zone. Voici un panorama de la situation fourni par Sortir du nucléaire, alors qu’en avril il n’y aura plus de dédommagements pour les gens ayant perdu leur emploi en raison de la catastrophe.

On notera cependant que, comme d’habitude, les animaux et l’océan sont les grands oubliés de l’évaluation de la situation.

Trois ans après, la situation à la centrale reste hors de contrôle. Les réacteurs éventrés doivent toujours être refroidis ; près de 400 000 tonnes d’eau s’accumulent dans des cuves construites à la va-vite, dont un grand nombre fuient.

Les stations de traitement des eaux ne sont toujours pas opérationnelles et les fuites hautement radioactives ont déjà atteint la nappe phréatique et l’océan, contaminant gravement le milieu marin.

Sur 67 poissons pêchés par Tepco dans le port devant la centrale en décembre 2013, 21 dépassaient 10 000 Becquerels/kg en césium 134 et césium 137, soit 100 fois la limite fixée par le gouvernement japonais.

L’évacuation du combustible usé du réacteur n°4, débutée en novembre 2013, devrait durer jusqu’à fin 2014. Mais il reste encore près de 2000 tonnes de combustible usé hautement radioactif sur l’ensemble de la centrale.

Où pourront-elles être stockées ? Par ailleurs, l’ensemble du site reste vulnérable à un nouveau séisme de grande ampleur.

Depuis 2011, plus de 30 000 travailleurs se sont succédés à la centrale, dont plus de 26 000 sous-traitants, au péril de leur santé.

Au fur et à mesure que ceux-ci accumulent des doses de radioactivité, la pénurie de travailleurs qualifiés se fait de plus en plus criante. Certains intervenants, recrutés parmi les sans-abris par la mafia, travaillent dans des conditions particulièrement indignes.

Près de 150 000 personnes déplacées suite à la catastrophe vivent toujours dans des conditions précaires. En avril 2014, Tepco cessera de dédommager ceux qui ont perdu leur travail suite à l’accident.

Ce même mois, pour la première fois, l’ordre d’évacuation sera levé et les habitants du district de Miyakoji (à 20 km de la centrale) devront rentrer chez eux, bien qu’en de nombreux endroits, la dose d’exposition autorisée pour le grand public de 1 millisievert/an soit largement dépassée.

Souhaitant arrêter de payer des compensations financières pour les évacués et limiter les frais des travaux de décontamination, le gouvernement entend hâter le retour dans les zones contaminées malgré l’opposition des habitants qui, à juste titre, craignent pour leur santé.

Des centaines de milliers de personnes continuent par ailleurs de vivre dans des villes et villages où le niveau de radioactivité ambiant justifierait pourtant l’évacuation.

Tas de terre radioactive abandonnés au bord des routes, maisons simplement passées au kärcher, mesures hâtives : dans la préfecture de Fukushima, les « décontaminations » sont un fiasco. Les habitants non évacués ont le choix entre se voiler la face ou contrôler le moindre aliment, le moindre objet.

Interdits de jouer dehors, condamnés à porter des dosimètres, les enfants sont les premières victimes. Les enfants de la préfecture de Fukushima doivent subir un examen médical à grande échelle.

Parmi les 250 000 qui y ont déjà été soumis, 74 pourraient déjà être atteints par un cancer de la thyroïde ; et pour 33 d’entre eux, le cancer ne fait plus de doute (chiffres au 31 décembre 2013).

Pour le radiologue spécialiste du cancer Hiroto Matsue, il ne fait pas de doute que tous ces cancers sont directement causés par Fukushima. Il déclare ainsi : « Depuis quarante ans que j’exerce, je n’avais jamais vu de thyroïde avec tellement de kystes et de nodules que je ne pouvais les compter. Ce n’est pas normal. » (Science&Vie, mars 2014, p.88)

À la contamination s’ajoutent des drames humains : de nombreuses familles sont séparées, les mères ayant préféré déménager pour protéger leurs enfants tandis que leurs maris souhaitaient rester sur place.