« Souccot, un juste rapport à la nature »

Étant donné que le rapport à la Nature est la grande question du 21ème siècle, on peut constater que les religions s’adaptent, se transforment selon les besoins de sa démagogie.

La religion juive se veut ainsi une religion très intellectualisée, et dont le coeur est la loi et la morale. On connaît le slogan de l’ALF « Si ce n’est pas maintenant, quand ? Si ce n’est pas toi, qui ? » : c’est en fait repris d’un aphorisme d’un rabbin du premier siècle avant notre ère (« Si je ne suis pas pour moi, qui le sera? Et si je ne suis que pour moi, que suis-je ? Et si pas maintenant, quand ? »).

Cette dimension moraliste pouvait avoir un sens il y a très longtemps, mais ce n’est plus le cas bien entendu et avec la question de la Nature, cela se voit de plus en plus. Ainsi la fameuse fête de Kippour, le « grand pardon », voit renaître une tradition disparue de plusieurs générations : celle du bouc-émissaire.

Ainsi, la cérémonie de Kapparot ayant disparu depuis bien longtemps dans la communauté juive revient : il faut faire tourner un poulet au-dessus de sa tête afin qu’il récupère les péchés, puis on lui coupe la tête. On est très loin de la dimension moraliste qui peut faire l’intérêt de cette fête historiquement…

Cependant, on doit bien voir qu’il s’agit ici d’un rapport à la Nature totalement déformé, et pas seulement d’obscurantisme médiéval. La consigne orthodoxe dit ainsi :

« Il est de la plus grande importance de traiter les poulets avec humanité et de ne pas – à D.ieu ne plaise – leur causer une quelconque douleur ou inconfort. La loi juive interdit formellement de causer une quelconque douleur inutile aux créatures de D.ieu. La répugnance qu’inspire un acte aussi cruel se doit d’être redoublée en ce jour, à la veille du jour où nous demandons à D.ieu une bienveillance et une miséricorde que nous ne méritons peut-être pas. Le Code de Loi Juive suggère même de placer les entrailles et le foie des poulets abattus dans un endroit où les oiseaux peuvent venir s’en nourrir. »

Dans la même logique, il y a la fête de Tou Bichevat, le « Nouvel An des Arbres », où il est dit notamment que « l’homme est un arbre des champs » (Deutéronome 20, 19), ou encore la « fête des cabanes », Souccot.
Voici un article d’Actualité Juive présentant cette fête dont c’est la période, et qui révèle que la religion tente de s’approprier la question du rapport positif à la Nature :

Souccot, un juste rapport à la nature

Souccot, parmi d’autres noms, porte celui de «  fête de l’engrangement ». « Quand vous aurez rentré la récolte de la terre, vous fêterez la fête du Seigneur…» (Lév 23, 39)

Souccot, comme Pessah, comme Chavouot, célèbre un événement agricole : l’engrangement des récoltes. Observons tout d’abord que cette célébration s’inscrit dans un temps où  la fécondité créatrice de la nature est particulièrement visible, et qui est habituellement dévolu à la fête des vendanges, une fête marquée dans les sociétés antiques par le culte de Dionysos ou Bacchus, les divinités du vin et de l’ivresse.

Or les deux rites qui caractérisent Souccot sont d’une part la soucca où l’on réside durant huit jours, d’autre part le loulav, cet assemblage de quatre plantes – myrthe, saule, feuilles de palmier et cédrat – que l’on réunit et que l’on agite dans les six directions de l’espace. Raisin ou vigne sont absents de cet ensemble, alors qu’ils constituent la récolte principale de l’automne.

Des garde-fous

La Torah nous met ainsi en garde contre toutes  les ivresses, pourtant universellement glorifiées, qui aliènent l’homme en le privant de sa lucidité  et de sa liberté. En d’autres termes, elle nous invite à prendre des distances à l’égard de la nature : le juste rapport que nous devons entretenir avec elle n’est ni un rapport de soumission, ni un rapport de domination conforté par l’orgueil de la possession et du pouvoir au moment où la terre donne ses fruits : car  «tu pourrais dire dans ton cœur : c’est ma propre force, c’est le pouvoir de mon bras qui m’a valu cette richesse » (Deut 8, 17) . La soucca et le loulav sont des garde-fous pour nous préserver de ces deux errements.

Ainsi ce que la religion dit ici, dans ce cas de figure, c’est d’un côté qu’il ne faut pas l’orgueil : cela pourrait amener à rejeter l’anthropocentrisme. Mais de l’autre côté il ne faut pas se soumettre à la Nature… mais uniquement à Dieu, c’est-à-dire en fait à l’Homme puisque Dieu n’est qu’une création de l’Homme. On retombe alors dans l’anthropocentrisme, mais la religion feint de prétendre le contraire.