« Mais ce geste devient de plus en plus fréquent »

Voici un article, de nouveau tiré de la presse non nationale (La Nouvelle République), qui retrace un parcours individuel face à l’alcool. C’est quelque chose de très concret, de trop concret sans doute justement pour que les journaux nationaux en parlent. Et c’est justement ce qu’inversement des médias locaux progressistes devaient traiter, car l’actualité des gens, c’est aussi le combat face à l’alcool.

Face à la dépendance, face aux non-dits, face à l’isolement. Le regard d’autrui vis-à-vis des gens dépendants est rarement solidaire, même si cela s’explique aussi par les effets de la dépendance sur les rapports sociaux (agressivité, violence, etc.).

Il y a lieu en tout cas de toujours saluer le courage des gens qui ont réussi à combattre leur dépendance, à en triompher. C’est une lutte difficile, et toujours sur le long terme. Voilà pourquoi on ne soulignera jamais assez l’importance de la culture, et il faut donc rappeler ici : quand on est straight edge, on ne l’est pas que pour soi, on donne également un signal aux autres, et cela peut aider !

Cela donne un signal, cela montre qu’on a conscience des enjeux. En apparence, l’alcool relève du choix individuel, mais ce n’est pas vrai: il y a les producteurs d’alcool, il y a les bars, il y a le fait que l’alcool est un moyen de « fuir » les problèmes. L’alcool, c’est tout un système, et c’est une illusion de penser qu’il s’agit « juste d’un petit coup », d’un acte individuel sans origine sociale, sans rapports avec la société, sans liens avec l’idéologie dominante.

On en est au point que pour beaucoup, se saouler est devenu une  habitude festive, et même le seul moyen de faire la fête. L’alcool, en fait, est devenu une consolation pratiquement du même type que la religion, avec ses illusions, ses rituels, sa négation du réel.

Loir-et-Cher – Santé
Elle se sort de l’alcool après des dégâts sur sa santé

Son naufrage dans l’alcool lui a causé de nombreux problèmes de santé. Aujourd’hui, Ghislaine est complètement sortie de cette addiction. Elle témoigne.

Il y a quelques années, Ghislaine (*), la quarantaine, a connu une véritable descente aux enfers. Suite à un problème d’emploi, elle s’est retrouvée seule face à elle-même. « J’ai très mal supporté cette situation. Ne plus rien faire du jour au lendemain alors que je travaillais sans interruption depuis l’adolescence a provoqué en moi un électrochoc », confie la Solognote.

Pour tenter de se détendre, elle commence par prendre un apéritif le midi, puis le soir, seule chez elle. Mais ce geste devient de plus en plus fréquent.

« L’appel du verre en amène un autre, poursuit-elle. Je considérais l’alcool comme mon ami. Je suis arrivée à en absorber une quantité excessive quotidiennement. » En état alcoolique, Ghislaine se sent forte et invincible.

« Mais quand l’alcool ne fait plus effet, on s’aperçoit que les problèmes sont toujours là et on reprend un verre. C’est un cercle vicieux. »
Au fil des mois, son état de santé se dégrade. « Il ne faut pas croire que l’alcool atteint seulement le foie. Le mien va très bien. En revanche, la première année, j’ai fait une névrose optique. J’avais un œil qui ne distinguait plus trop les couleurs. J’ai été hospitalisée pour ça. » Lors de son passage à l’hôpital, elle fait la connaissance d’Anne-Marie Brieude et Manuela Laurent, addictologues et appartenant au Rézo addictions 41.

« Je savais que j’avais un problème avec l’alcool, mais je n’étais pas prête à suivre une cure. Je pensais que je pouvais m’en sortir seule. » Mais après chaque hospitalisation, Ghislaine retombe dans les travers de l’alcool. « J’ai eu par la suite des problèmes au niveau des artères et des nerfs sur les membres inférieurs. »

Vient pour elle le moment de solliciter une cure : elle y part pour cinq semaines. A son retour, elle reste abstinente pendant sept mois. Mais un jour, comme pour se tester, elle reprend un verre, celui qui va l’entraîner dans une nouvelle alcoolisation.

Surviennent alors des pancréatites aiguës. « Après une crise violente qui m’a conduite à l’hôpital, j’ai arrêté l’alcool. Mais c’était trop tard, le pancréas était atteint. Mes pancréatites ont continué pendant un an et demi. »

«  Une nouvelle vie démarre  »

Devenue totalement abstinente, Ghislaine s’en remet au professeur Salamé, spécialisé dans les transplantations hépatiques, qui l’opère à l’hôpital Trousseau, à Tours. « L’intervention a consisté à couper la tête du pancréas, à retirer quatre organes et à reconstruire des veines et des artères. Malgré les risques encourus, j’ai accepté l’opération, qui s’est bien passée. »

Aujourd’hui encore, elle est en convalescence chez elle. « On m’a donné une seconde chance, une nouvelle vie démarre. » Dans cette lutte contre l’alcool, elle a pu compter sur le soutien de Christian et Josette de l’association Vie libre de Romorantin dont elle fait désormais partie. « Il ne faut pas avoir peur de demander de l’aide. »

Vie libre Romorantin : M. et Mme Menneray, tél. 02.54.98.63.27.
(*) Il s’agit d’un prénom d’emprunt pour préserver l’anonymat de la personne.