Des animaux et des pharaons: expo au Louvre-Lens

« Des animaux et des pharaons. Le règne animal dans l’Egypte ancienne« : tel est le nom d’une exposition (temporaire) qui se tient à partir d’aujourd’hui et jusqu’à début mars 2015, au musée du Louvre-Lens. 430 oeuvres y sont présentées, et si évidemment on peut deviner que la présentation sera très éloignée de la démarche de la libération animale, elle n’en sera certainement pas moins fascinante, et utile pour comprendre notre rapport avec les animaux, tout au moins avec certains animaux en particulier.

Ainsi, le chat est devenu un animal très proche de la société humaine; on sait qu’il y a eu une sorte de partenariat entre les êtres humains voulant protéger leur récolte et le chat qui est devenu un allié objectif pour cela.

« En Égypte, la faune paraît omniprésente à celui qui découvre la civilisation pharaonique. Mais ce ne sont pas tant les défilés d’animaux visibles dans les mastabas et destinés à devenir nourriture pour le défunt qui ont pu surprendre, que les millions de momies animales occupant des nécropoles réparties dans tout le pays ou les figurations hybrides, mi-hommes, mi- bêtes des divinités du panthéon égyptien.

Ce phénomène était déjà, dès l’Antiquité, un motif d’étude. Après Hérodote, qui, le premier, décrivit son étonnement, Diodore de Sicile put écrire : « À propos des animaux sacrés en Égypte, ce qui a lieu paraît à beaucoup à juste titre extraordinaire et mériter une enquête. En effet, les Égyptiens vénèrent extrêmement quelques animaux, non pas seulement quand ils vivent mais quand ils sont morts aussi, tels les chats, les ichneumons, et les chiens, et encore les faucons et les animaux appelés chez eux ibis, et aussi les loups, les crocodiles et bien d’autres encore du même genre… » (Livre 1, 83, 1). (Alain Charron, Les animaux et le sacré dans l’Egypte tardive, fonctions et signification)

« Après un court chapitre sur la médecine locale, exclusivement attachée à des recettes traditionnelles dont il est interdit de s’écarter, notre auteur consacre plusieurs chapitres à un trait frappant des mœurs égyptiennes, le respect des animaux sacrés, dont Hérodote avait lui aussi parlé longuement.

C’est l’occasion pour Diodore de rapporter un incident dont il fut témoin pendant son séjour dans le pays : un Romain qui avait involontairement tué un chat fut lynché par la populace sans que ni l’autorité du roi lagide, ni la crainte des armes romaines aient pu le sauver. Les renseignements que l’historien nous donne sur la zoolâtrie, objectifs et bien classés, sont d’un vif intérêt pour l’étude de la religion égyptienne, et les réflexions auxquelles il se livre sur l’origine de ces cultes et sur leur diversité à travers les provinces témoignent d’un esprit curieux et avisé. » (L’Égypte d’après Diodore de Sicile)

« Dans l’ancienne Egypte, le chat se nommait maaou ; et ta-maaou, la chatte, était un nom fréquemment porté par les femmes. Les Égyptiens habitant l’Italie voulurent sans doute conserver cet usage et traduisirent en latin la dénomination égyptienne.

Bien qu’aucun texte n’en fasse mention, nous pouvons, je crois, affirmer que la déesse Bast avait aussi un sanctuaire à Pompei, et le plus ancien, vraisemblablement, de tous ceux qu’on lui connaît en Europe. D’après un critique allemand, l’Isium primitif de Pompei remonterait au deuxième siècle avant notre ère; détruit en 63 par un tremblement de terre, les Égyptiens le reconstruisirent; mais, étant fort traditionalistes, ils ne changèrent rien à la forme extérieure du culte, et tout fut rétabli comme par le passé.

Or une peinture du Musée de Naples, provenant de l’Isium de Pompei, nous fait assister à une cérémonie religieuse en l’honneur de Bast. Cette composition, moins importante que celles d’Herculanum décrites plus haut, se réduit à un personnage unique, mais elle offre un élément d’un intérêt exceptionnel, qu’on chercherait vainement ailleurs.

La tête rasée et accotée de deux plumes, un prêtre égyptien, vêtu d’une blanche tunique de lin à franges, chante un hymne écrit sur un rouleau de papyrus à moitié déroulé. Il est debout, face au spectateur, devant un haut piédestal en forme de stèle avec trois marches à sa base, et sur lequel se trouve un chat passant à droite (fig. 2).

Non une statue à tête de chat, mais bien un chat à quatre pattes.

Dans cette image, la tête est surmontée de Yatew, ornement symbolique, placé d’habitude sur le chef des divinités égyptiennes, pour en marquer le caractère sacré. Nous ajouterons qu’ici cet atew est figuré par une interprétation défectueuse du signe meh, emblème de la basse Egypte. Notre quadrupède, qui alors serait une chatte, représente donc, à n’en pouvoir douter, la déesse Bast dans sa forme primitive. » (Le culte de la déesse Bast dans l’Italie méridionale et particulièrement à Pompéi)