Ce n’est peut-être qu’une impression, mais cette année il semble tout de même que les médias ont vraiment mis l’accent sur le soir de Noël comme prétexte à l’alcool, ainsi qu’aux repas prétendument « luxueux ».
Le plus souvent, les médias prenaient comme prétexte la santé pour justifier d’aborder le sujet de cette manière, le plus souvent dans le lyrisme, comme ici BFMtv :
« Ça y est, c’est le jour J ! Ce jeudi, des millions de personnes fêtent Noël à travers le monde. Mais pour certains, les réjouissances ont débuté dès ce mercredi soir.
Entre l’alcool, les plateaux de fruits de mer, les dindes et autres gibiers ou la multitude de sucrerie, l’estomac et le foie sont mis à rude épreuve avec ces repas gargantuesques. »
Dans la même veine, le Figaro racontait « Gueule de bois : beaucoup de recettes, peu de preuves », expliquant les diverses manières inventées pour soigner les lendemains difficiles, tandis que de son côté, le site d’extrême-droite Fdesouche faisait un sondage plus « traditionnel » sur son site : « Qu’avez-vous envie de manger comme plat pour le réveillon de Noël ? », avec comme réponses proposées : « chapon, pintade, canard, poulet/poule, dinde, gibier ».
Le journal Le Monde a fait dans le déculpabilisateur, avec un article le 23 décembre en tête de gondole sur le net, titré « Comment la population mondiale boit-elle de l’alcool ? ».
Histoire de faire encore plus sympa, l’article n’utilise que des évaluations fondées sur les sondages… Quand on sait qu’il faut multiplier par 2,4 en moyenne pour retrouver la réalité de ce qui est bu, on peut imaginer le décalage…
Sur le site TopSanté, c’est encore plus fort ! L’article « Alcool: nos conseils pour passer les fêtes sans gueule de bois » donne les traditionnelles recettes pour faire passer l’alcool, mais agrémenté d’une sorte de tableau relativiste typiquement à la française…
C’est bien français: quand on sait gérer, tout est relatif! A quoi il faut ajouter le coup du « boire un petit coup c’est agréable » etc.
De manière beaucoup plus intéressante, Radio Canada présente la situation des gens dépendants devant faire face à la vague des fêtes où l’alcool est un passage « obligatoire ».
Cela montre à quel point l’alcool est une idéologie massivement présente, prenant bien souvent largement le pas sur le caractère festif. Une fête, c’est aussi beaucoup de pression…
Les Fêtes vécues par une personne dépendante à l’alcool
Pour la plupart d’entre nous, Noël est un moment pour célébrer en famille et entre amis, en levant peut-être notre verre à la santé des autres. Mais pour ceux qui doivent composer avec l’alcoolisme, cette période est particulièrement difficile à traverser.
Les Alcooliques anonymes (AA) de Gatineau ont trouvé une façon d’aider ceux qui veulent maintenir leurs résolutions. Ils se rassemblent pour éviter de sombrer de nouveau dans l’alcool.
Gabriel* fait partie des AA. Il y a 26 ans, son alcoolisme l’a mené à l’itinérance. « D’une personne apparemment normale, en dedans de quelques semaines, je suis devenu un itinérant », rapporte-t-il.
Les AA l’ont sauvé et l’aident encore pendant la période des Fêtes. Ce qu’il trouve particulièrement difficile, ce sont les émotions qui surgissent du passé.
« Un alcoolique a dérangé beaucoup de personnes dans sa vie. […] Un alcoolique n’est pas équipé pour gérer ces émotions-là. » — Gabriel, membre des AA à Gatineau
« Ce que je faisais, tout simplement, c’est que je les gelais, je noyais mes émotions. […] Il y a à peu près juste moi qui ne savais pas que j’étais un alcoolique », avance-t-il.Se rassembler pour être plus fort
Gabriel se réjouit de pouvoir vivre Noël avec les autres membres des Alcooliques anonymes, avec qui il partage une expérience semblable. « Reste avec le groupe et ça va être plus facile de passer à travers », résume-t-il.
Les 24, 25, 31 décembre et le 1 janvier, des journées de partage sont ainsi organisées dans différentes régions du Québec.
Ces rencontres rappellent que composer avec l’alcoolisme est un engagement quotidien, qui dure toute la vie.
« 68 ans sans boire, ça va être long en tabarnouche. Mais on m’a appris à vivre une journée à la fois. Ne fais pas cette promesse-là pour 68 ans, fais-la juste pour aujourd’hui », soutient Gabriel.
C’est l’occasion de le rappeler : être straight edge, ce n’est pas que l’être pour soi. C’est montrer aux autres qu’on peut l’être, qu’on peut le rester.
L’alcool est massivement accepté, et en même temps la société considère qu’il faut regarder d’un oeil noir les gens ayant basculé dans l’alcoolisme, alors qu’en définitive, elles sont des victimes.
Cela ne signifie nullement qu’il faille idéaliser des situations ou des gens ayant plongé souvent dans les violences sociales. Mais il faut avoir une perspective générale et savoir affirmer les tendances positives… Dire non à l’alcool, c’est dire oui à la vie!