« Le paysan ou la paysanne qui est en nous dort d’un sommeil profond »

Lorsqu’à un moment nous avons rejeté la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, on aurait pu penser que c’était sectaire, et que finalement pour une fois qu’il se passe quelque chose, autant participer et éventuellement changer les choses de l’intérieur.

Cela aurait été une profonde trahison de la libération animale et de celle de la Terre, puisque la ZAD a été le véritable détonateur pour tout un culte de la petite production, qui par définition même est en contradiction totale avec nos valeurs.

Impossible de vivre vegan en se fondant sur une production locale: il faut des produits qui viennent d’un peu partout; de la même manière pour défendre la planète, il faut une humanité unie sans quoi on ne voit pas la planète, mais que des nations, des peuples différents, etc.

Le nouveau site qu’est reperes paysans est, dans ce cadre, une horreur de plus. Il propose de remettre en avant le petit paysan, cette figure passée qui a heureusement disparu ou presque, avec son vin, son identité limitée au terroir, ses moeurs de rustres et ses valeurs de réac, bref ce coeur de la France profonde qui a joué un rôle si néfaste lors de la Commune de Paris ou bien de mai 1968.

Voici, proposé par le site, un extrait du PDF intitulé « Pourquoi devenir paysan ou paysanne? » fournissant toute une vision du monde incroyablement romantique d’un style de vie heureusement révolu.

Le paysan ou la paysanne qui est en nous dort d’un sommeil profond…

Plus d’un siècle d’industrialisation a fini par endormir la quasi-totalité de la paysannerie en France et dans la plupart des pays dit « riches ». Les sociétés paysannes, basées sur un ensemble très diversifié de savoir-faire « autonomisants », ne peuvent coexister longtemps avec un système industriel qui a pour but d’organiser et de standardiser autant les manières de produire que de vivre.

Après plus d’un siècle d’industrialisation, la quasi-totalité des sociétés paysannes ont perdu leurs outils, leurs langues, leurs semences, leurs terres, leurs eaux, leurs communautés.

La plupart d’entre nous diront que c’est tant mieux, car c’est grâce à cette mutation que nous avons énormément augmenté notre niveau de confort à tous points de vue. Mais alors pourquoi existe-t-il encore chez nous de nombreuses revendications dites « paysannes »?

Et pourquoi sommes-nous nombreux à vouloir rejeter le système industriel, notamment en ce qui concerne la fabrication de notre nourriture ? Pourquoi un syndicat d’agriculteurs tel que la Confédération paysanne défend-elle précisément l’agriculture paysanne, tout comme les fameuses AMAP?

Lorsque nous prenons conscience des graves dégâts que provoque le système industriel, nous cherchons des alternatives. Le mode de vie paysan étant un mode de vie préindustriel, il est donc par essence une source de propositions alternatives.

Ces « propositions paysannes » concernent par exemple la manière de produire une nourriture plus saine, locale, sans détruire notre environnement : agriculture vivrière, biologique, paysanne…

Ou des manières d’habiter accessibles à tous : auto construction, habitat collectif, petit habitat léger… Ou encore des propositions d’ordre politique, économique et sociale avec la création de diverses formes de « démocratie locale » : l’autogestion, les système d’échange locaux, la vie communautaire…

Ces propositions sont très proches de savoir-faire et savoir-vivre paysans. Il est important de le comprendre pour s’autoriser à mieux explorer les modes de vie paysans, immenses réservoirs d’organisations possibles à échelle humaine.

Réveiller le paysan qui dort en nous est une manière de résister à la société industrielle. Nous sommes donc nombreux à ressentir le besoin de sortir de la léthargie dans laquelle nous plonge le mode de vie de la société industrielle, et
à expérimenter des pistes paysannes. (…) Il existe une paysannerie qui précède l’industrialisation et qui a bien du mal à lui résister.

Mais il existe aussi une paysannerie qui se développe précisément pour échapper au monde industriel. Cette paysannerie est difficile à réveiller, mais une fois debout elle est très difficile à anesthésier.

Il n’y a pas à dire, quand on lit de telles lignes, on se dit que le pétainisme n’a jamais été déraciné de la France! Au lieu de chercher les grandes idées et d’avoir de l’ambition dans l’utopie, on a là un esprit étriqué qui rejette les problèmes au lieu de les assumer, et pour cela idéalise le passé.

Mais que ce soit faux n’est pas ce qui est le plus grave, ce qui est affreux c’est que cela désoriente des gens véritablement désireux de reconnaître la Nature. Ils cherchent alors dans le passé ce qui est dans le futur; au lieu de devenir aujourd’hui vegan, ils fantasment à être éleveur demain, en s’imaginant vivre conformément à un passé totalement idéalisé a alors qu’il était absolument odieux…