« Wake and bake »

L’expression « wake and bake » signifie fumer du cannabis dès son réveil. Avant de faire quoi que ce soit, on fume. Évidemment, on devine quelles sont les conséquences : on est alors « stone » pour le reste de la journée.

Se « réveiller » pour se « cuire » est considéré comme très extrême même par les fumeurs occasionnels. En fait, c’est même considéré comme une ligne de démarcation. Une fois qu’on a basculé dans le fait de fumer seul, on est déjà dans le camp des dépendants.

Mais alors fumer le matin, c’est pire que tout. Car naturellement, cela va aussi avec le fait de fumer plus tard dans la journée. C’est en fait une preuve qu’on ne peut pas vivre sans que l’action du cannabis soit très forte et systématique, toujours présente.

Les conséquences sont d’autant plus fortes sur le plan de la faim, de la fatigue, de la paranoïa et surtout de l’angoisse. Les partisans du cannabis peuvent dire ce qu’ils veulent : le cannabis est une source d’angoisse extrêmement puissante quand les choses commencent à mal tourner.

Et il suffit de vivre mal un fait – un souci familial, la perte de proches, des problèmes d’emploi, des troubles sentimentaux, etc. – et tout déraille très vite.

Fumer le matin est alors plus qu’un symptôme, c’est le reflet d’une dépendance complète. S’arracher à cela devient extrêmement difficile. Là on ne raisonne plus en termes de jours ou de semaines, mais pratiquement d’années. Là on passe dans la figure pathétique du fumeur ramollo, tournant au ralenti, pratiquement le zombie vivant à un rythme totalement décalé et n’ayant plus qu’une seule préoccupation.

Toutefois, si on y regarde bien, c’est tout de même le cas de tous les fumeurs. Fumer du cannabis serait rebelle, permettrait de s’épanouir etc. etc. c’est une véritable idéologie, une vision du monde. Et force est de constater qu’elle n’y englobe rien d’autre que l’égocentrisme.

Fumer du cannabis est avant tout un egotrip et quand des gens fument ensemble mais séparément en fin de compte, on a pratiquement une copie de l’individualisme qui prévaut dans notre société, un peu quand des gens sont au PMU du coin et boivent chacun, ensemble, mais séparément, leur « petit verre » au comptoir.

Le « wake and bake » est l’étape supérieure : c’est le moment où l’on passe de l’égocentrisme à l’egotrip jusqu’au solipsisme. Il n’y a plus rien à part notre esprit qui compte, la réalité devient virtuelle, il n’y a plus que ce qui se passe dans notre tête qui apparaît comme réel.

La tendance individualiste s’épaissit à grands traits, mais comme on vit dans une société d’individualistes, cela passe… tant qu’on arrive à se lever et travailler, ou au moins faire semblant.

C’est pour cela qu’il y a tellement de fumeurs et qu’on trouve une telle apologie du cannabis sur internet, alors que théoriquement c’est interdit. A part pour un contrôle social minimal de la part de l’État, la société est tout à fait accoutumée aux fumeurs de cannabis. Cela ne la dérange absolument pas.

En quoi la société française est-elle dérangée par une jeunesse qui se précipite dans la futilité et fait l’éloge des drogues, avec le soutien des libéraux libertaires, avec un point de vue ouvertement exprimé par exemple dans un éditorial du monde en décembre 2014, ou encore dans la petite série « En passant pécho ».

Fumer du cannabis, ce serait être « moderne », être alternatif, refuser le système, alors qu’en fait il n’y a pas plus conventionnel, plus conformiste…

Refuser les drogues, voilà ce qui est une vraie rupture, une vraie confrontation…