« Mon corps était en train de s’éteindre à petit feu »

Ohmymag.com est un site dédié, pour faire court, aux « fashionistas », et on peut y lire un article très impressionnant, au titre ouvertement provocateur :

Vegan, elle explique comment cette façon de vivre lui a ruiné la vie

L’article raconte qu’une femme de 25 ans, Jordan Younger, était vegan et tenait un blog appelé « The blonde vegan » (ainsi qu’un instagram The balanced blonde) avant de rompre avec sa démarche. L’article présente la situation et demande de manière faussement candide :

Cet [sic] alimentation végétalienne dite « saine » et cette idée de lutte contre l’exploitation des animaux a traversé les frontières mais est-elle si positive qu’on le pense ?

Et voici la charge, l’attaque, l’agression, consistant en la présentation des « désavantages » :

Le premier d’entre eux étant quand elle recevait du monde ou qu’elle était invitée à manger.

Elle devait alors expliquer son mode de vie tout en sachant qu’elle était jugée et non comprise.

Le second point négatif est le fait que quelques temps plus tard, son corps lui a dit « stop ».

Elle a perdu 11 kilos en un rien de temps, ses cheveux commençaient à tomber et elle se blessait beaucoup plus facilement.

Elle explique qu’elle ressentait beaucoup plus de fatigue qu’auparavant et que son système immunitaire était affaibli.

Elle en a même perdu ses menstruations ; ainsi, pendant 6 mois elle n’a eu aucune règle. « Cela m’a montré que mon corps était en train de s’éteindre à petit feu » conclut-elle.

Ce n’est pas seulement absurde : c’est répugnant. Il s’agit ici de faire peur, de terroriser.

Sur le plan psychologique, d’abord : le véganisme amènerait une désocialisation, ce qu’il faut traduire ici par : on ne peut plus vivre comme tous les bourgeois, de manière traditionnelle, son propre « ego » serait dévalorisé, il n’y aurait plus de reconnaissance de soi, etc.

Sur le plan physique, ensuite : en présentant le végétalisme comme quelque chose d’anti-naturel, provoquant une réaction en chaîne dans le corps provoquant des dégâts, un affaiblissement général, etc.

Ce qui est d’autant plus grave, et honteux, c’est que ce n’est même pas ce que dit Jordan Younger. Elle n’a rien contre le végétalisme et elle a des amis végétaliens. L’attaque de Ohmymag est donc pratiquement de la récupération anti-véganisme.

En réalité, Jordan Younger explique en réalité qu’elle a abandonné le végétalisme par rejet général de « l’orthorexie », c’est-à-dire le principe de suivre une alimentation « précise », « droite ». Elle aurait connu cette « maladie », qui viendrait s’ajouter à la boulimie, l’anorexie, etc.

Elle explique qu’elle avait suivi le végétalisme par quête d’une alimentation « pure », qui ne provoquerait pas de dégâts pour son corps, etc. Elle raconte qu’elle n’a pas choisi le végétalisme tant par moral que par quête de « pureté ». C’est avec cela qu’elle rompt et elle n’a rien contre le végétalisme, ses troubles étant les siens, relevant de problèmes personnels. On est très loin de ce que dit l’article de Ohmymag…

D’une certaine manière, on comprend ce avec quoi rompt Jordan Younger : cette quête irrationnelle de « pureté » très à la mode, prenant en otage différents régimes alimentaires sans aucune analyse sérieuse et juste parce que cela semble « radicalement » sain (sans gluten, paléo, raw, même le végétalisme malheureusement, etc.).

Mais c’est bien qu’elle n’avait rien compris au sens fondamental du véganisme : la compassion, l’amour des animaux. Et vu le titre de son oeuvre – rompant avec le végétalisme – on voit bien que sa démarche a été pratiquement d’aller au véganisme pour mieux le saboter, pour rompre « de l’intérieur »…