COP 21 : le cinquième jour

Aujourd’hui, samedi, la version finale devait être rendue à midi. Vue d’hier soir, difficile de penser que cela sera le cas.

Quelle a été la situation de ce cinquième jour de la COP 21, hier ? Selon Le Figaro, « les négociations patinent ». Les contradictions deviennent plus profondes entre les pays ayant connu un  » développement » et les autres.

La Fondation Nicolas Hulot formule cela de la manière suivante :

« Qu’est-ce qui bloque ? Evidemment les questions centrales de la différentiation et du financement (atténuation, adaptation, pertes et dommages), notions intimement liées. Par exemple, certains pays développés veulent que soit indiqué, dans l’article sur les financements, que tous les pays qui le peuvent doivent contribuer, alors que d’autres veulent qu’au contraire les pays développés paient leur dette écologique et remplissent déjà seuls leurs engagements. »

Un pays comme le Qatar, par exemple, refuse catégoriquement de payer en disant qu’il n’est pour rien dans le réchauffement climatique, qu’il n’a donc par conséquent rien à payer. Un pays comme la Chine est sur une position similaire.

C’est tout à fait logique, puisqu’ils raisonnent en termes de nations, et non d’humanité, et encore moins de manière planétaire.

C’est là le fond du problème, le coeur du problème ; c’est cela que la COP 21 est censée dépasser, et on voit mal comment. On ne peut rejeter la Nature et diviser l’humanité sans qu’il y ait un impact, une contradiction.

Voici un petit témoignage d’anthropocentrisme typiquement français justement, avec des éléments synthétiques censées imiter la Nature dans l’espace de la présidence française… Que dire?

Ce ne sont évidemment pas les opérations de communication qui vont changer, comme par exemple la venue à la mairie de Paris de 1000 maires. Cela disperse plus qu’autre chose. La « bonne volonté » n’est pas ce qui est en jeu : c’est toute une vision du monde, ainsi que des intérêts économiques, c’est une humanité divisée, niant la Nature.

Il en va de même pour l’ouverture au Grand Palais d’une sorte d’exposition d’entreprises présentant leurs démarches vertes, appelée « forum « Solutions COP21″ ».

Qu’attendre d’EDF, Coca-Cola, GdF-Engie, Carrefour, Sanofi, Suez, etc. ? Rien du tout quand on a conscience de la réalité. Cela n’a pas empêché des ONG, comme Attac ou Les Amis de la Terre, d’être allé à l’inauguration de l’exposition, qui doit durer quelques jours, pour organiser à l’intérieur un « Toxic tour » en anglais et en français, pour présenter l’hypocrisie de ces entreprises.

Naturellement, la trentaine de gens présents s’est fait expulser manu militari, ainsi que les journalistes présents. A quoi pouvait-on s’attendre d’autre et à quoi sert de dire que les grandes entreprises sont hypocrites et méchantes ? Il faut croire que l’idée de révolution n’est pas encore parvenue à la conscience de ces gens qui « témoignent ».

En ce qui concerne les débats, finalement hier on est arrivé à un texte de 38 pages. Auparavant, il y avait encore 50 pages, et qui plus est avec deux modèles.

Cette histoire étrange est présentée de manière suivante par la Fondation Nicolas Hulot, qui la révèle pour mieux en atténuer le caractère à la fois ridicule et grave :

« 10h ce matin [donc, hier] ont été conjointement publiées deux versions du projet de texte d’accord :
la première avec le texte compilé des différentes options proposées par les pays
la seconde intégrant les propositions de rédaction de compromis proposées par les co chairs et les co-facilitateurs.

C’est une bonne solution pour que les pays puissent dépasser plus facilement leurs formulations initiales.

Nb : Nous ne sommes pas du tout dans le scénario de Copenhague, où un second texte, complètement déconnecté du premier, avait été rédigé « en secret » par quelques-uns, en dehors des salles de négociation.  A Paris, il y a donc pour l’instant deux versions du projet de texte, mais servant à préparer le même accord au final car les propositions de compromis acceptées seront réintégrées dans le projet initial, en toute transparence. »

On n’est pas dans un texte secret, mais tout de même dans une démarche où deux lignes se montrent et s’opposent radicalement, avec l’espoir d’un « compromis ». Ce n’est pas une négociation collective, mais une bataille pour bricoler un texte commun.

Concluons avec une anecdote, une information de RFI. On y apprend que les chefs d’État et les premiers ministres eux-mêmes seraient en train de négocier dur, et que la COP 21 partirait à la conquête des citoyens…

Mensonge et langue de bois réunis en un seul package… Finalement, voilà ce qu’aura été la COP 21 réalisée par la France.

« Tandis que les 150 chefs d’Etat et de gouvernement négocient dur depuis le 30 novembre au Bourget pour parvenir à un accord visant à limiter à deux degrés le réchauffement climatique, la COP21 déborde du lieu des discussions officielles pour gagner Paris et aller au contact des citoyens. »