COP 21 : le dixième jour

Les élections régionales – et l’ambiance délétère à laquelle elles correspondent dans ses résultats – fait que la COP 21 est passée à la trappe. Alors que justement c’est un événement d’une importance capitale, dont le contenu devrait captiver tout le monde !

Il est vrai que rien ne filtre et que tout est parfaitement rendu lisse. C’est une question de prestige pour l’Etat français. Anne-Laure Barral, journaliste de France Info, confie ici au Nouvel Observateur :

« Au fur et à mesure que les jours passent, c’est de plus en plus tendu avec les Français. On sent qu’ils veulent qu’on dise du bien, que tout se déroule parfaitement, qu’il n’y a aucune anicroche, que tout le monde est tombé d’accord.

Évidemment, on interroge d’autres sources pour avoir d’autres éclairages. Mais le fait est que les langues se délient peu. Il n’y a pas de coup de gueule. »

Hier, une nouvelle version du document final a été rendu public. Il reste 320 mots ou expressions entre crochets, donc quatre fois moins qu’au départ.

Il reste donc beaucoup de travail, cela ne présage rien de bon. On sait que les discussions se prolongent tard dans la nuit et que la fatigue prédomine largement chez les membres des négociations…

Où en est-on, pour ce qu’on en sait?

Il apparaît pour l’instant qu’on en reste aux engagements annoncés par chaque État, ce qui est en contradiction avec l’objectif des 2°C, sans même parler de 1,5°C, puisque avec les chiffres fournis, on aura au moins 3°C de plus à l’horizon 2100, par rapport à 1880.

Tout cela sera réévalué… d’ici 2020. On repousse donc ce qui devait être fait justement à la COP 21.

Il en va de même pour la question du financement : tout est repoussé concrètement à l’horizon 2020. Les contradictions semblent trop fortes et le document ne fixera rien.

Dans un même ordre d’idée, un bilan mondial sera effectué… en 2024. Il aurait peut-être fallu commencer par là, pourrait-on dire! Mais rappelons que les pays devaient en accepter le principe pour éventuellement en reconnaître les résultats… La division de l’humanité saute ici aux yeux.

Pareillement, la réévaluation régulière de la situation de chaque pays semble très mal partie. Pour formuler la chose plus clairement : on a quand même le tour de passe-passe en ce moment que la COP 21 accepte le principe d’une réévaluation tous les cinq ans, sans que ce qui soit évalué à la base ne soit décidé!

Et sans qu’un organisme puisse contraindre à ce que chaque pays obéisse à ce qu’il a signé… Car, de toutes manières, il n’est pas prévu d’organisme mondial ayant un pouvoir décisionnaire ou servant d’arbitre, comme par exemple l’Organisation Mondiale du Commerce.

Dans tous les cas, les pays seront contraints… à ce qu’ils auront eux-mêmes choisis de faire…

Conformément à cela, la nécessité de procéder à une évaluation du carbone, pour lui donner un « prix », est en train de passer à la trappe. Cela serait rendre universelle la question, alors que chaque pays est censé participer pour ainsi dire individuellement, chaque cas se voulant particulier.

Les énergies renouvelables ne sont pas présentées comme un objectif nécessaire de manière concrète, de manière chiffrée. Mais comment alors avancer vers une production conforme à l’écologie?

Donc pour résumer, en l’état actuel des choses, on peut déjà penser que le bilan sera vraisemblablement :

– il n’y aura pas de données chiffrées précises sur ce que chaque pays devra faire, le tout devant être évalué ;

– il n’y aura aucune instance contraignante obligeant à quoi que ce soit ;

– la question des financements ne sera pas réglé, ce qui sera masqué derrière une future évolution de la situation générale, ainsi que de chaque pays.

En fait, tout le monde est d’accord… pour être d’accord, ce qui a donné un démarrage assez bon, mais les contradictions ont primé, et surtout personne n’est prêt à donner de chiffres, et encore moins à accepter une dimension contraignante.

La division de l’humanité et la non-reconnaissance de la Nature semblent l’emporter clairement… comme on pouvait malheureusement s’y attendre.