La « Stratégie de la France pour le bien-être des animaux 2016 – 2020 »

Ce qui se passe est affreux, mais peut-être était-ce un passage nécessaire pour que l’on voit à quel point certaines personnes qui prétendent défendre les animaux sont, en réalité, les contributeurs de la modernisation de leur exploitation.

Grâce aux exigences welfaristes et au maintien de la défense des animaux dans un cadre institutionnel, sans horizon révolutionnaire, le ministère de l’agriculture peut se targuer de mettre en place une « Stratégie de la France pour le bien-être des animaux 2016 – 2020 », avec le sobre sous-titre « Le bien-être animal au cœur d’une activité durable ».

Dès le départ, ce papier – qu’on devine bricolé pour satisfaire l’opinion publique, bien entendu – parle du bien-être animal comme « enjeu de société ». Voici comment les choses sont présentées :

« Le bien-être des animaux d’élevage, de compagnie, de loisir ou encore de ceux utilisés à des fins scientifiques est l’objet d’une politique réglementaire d’envergure tant au niveau international, européen que français.

L’intensification des productions animales, les mutations des territoires, l’évolution des connaissances scientifiques expliquent notamment pourquoi les citoyens demandent à ce que la sensibilité de l’animal soit mieux prise en compte. Au delà des aspects scientifiques ou émotionnels, la question du bien-être animal revêt par ailleurs, une réelle dimension éthique. »

Les cinq axes d’actions révèlent bien ce plan de satisfaction :

Axe 1 : Partager le savoir et promouvoir l’innovation

Axe 2 Responsabiliser les acteurs à tous niveaux

Axe 3 Poursuivre l’évolution des pratiques vers une production plus respectueuse

Axe 4 Prévenir et être réactif face à la maltraitance animale

Axe 5 Informer chacun des avancées et des résultats du plan d’actions

Moderniser, faire en sorte que tout le monde suive, faire semblant, réagir plus rapidement pour empêcher qu’il y ait scandale, mener une propagande intense pour jeter de la poudre aux yeux : voilà ce que signifient ces « axes d’action ».

Grâce aux welfaristes, la question animale subit un hold up institutionnel. La défense des animaux ne relèverait plus, comme l’histoire le montre pourtant, du mouvement ouvrier, des organisations de défense, des végans, de l’ALF… mais d’un « progrès scientifique », c’est-à-dire d’experts.

« Le concept de sensibilité des animaux, longtemps considéré comme anthropomorphique et hors de la science, n’est plus contesté.

Cette évolution est à mettre au compte des progrès scientifiques considérables de la recherche en matière de bien-être animal, qui a su démontrer la gamme variée d’émotions des animaux.

La connaissance est un des éléments clés des progrès en matière de bien-être animal et il convient à la fois de participer aux travaux de recherche mais également à la diffusion des résultats vers les professionnels afin de s’inscrire dans une démarche de progrès. »

On devine déjà comment les grands bourgeois et carriéristes universitaires de la cause animale trépignent d’impatience de devenir de tels experts…

Car il y aura forcément des postes dans les universités qui vont s’ouvrir, des places institutionnelles pour les associations (ce qui est même ouvertement indiqué), afin que tous accordent leur légitimité au « centre national de référence bien-être animal français » inventé par le ministère…

Tout cela afin de faire en sorte que l’élevage, le transport et l’abattage se déroulent de manière plus « humaine ». Quant au dispositif anti-maltraitance, il vise simplement à neutraliser la contestation, en minimisant les faits qui seront immédiatement encadrés.

On notera, sur ce plan, la remarque suivante :

« Une réflexion partenariale devra être engagée afin de définir dans quelle mesure le monde associatif, les professionnels et l’état doivent s’impliquer dans le financement des mesures de sauvegarde des animaux maltraités. »

On voit déjà comment ici il y a une réflexion pour intégrer des associations, d’une manière ou d’une autre, comme soutien de l’activité étatique, afin de les intégrer dans le dispositif de neutralisation générale du combat contre l’exploitation animale.

On lit même, révélé de manière directement cynique ou plutôt complètement idiote :

« Définir une politique concertée de communication auprès du grand public

Il s’agit ici de ne pas limiter la communication à la seule réponse à des infractions médiatisées. Faire connaître ce qui est déjà fait par les éleveurs et communiquer sur la réalité de l’élevage est nécessaire pour éclairer le jugement du consommateur citoyen. »

Même pas capables de faire semblant jusqu’au bout, voici la photo qu’on trouve sur la dernière page du dossier du ministère. C’est cela, le « bien-être animal » ?