« Les refus de pause WC dans l’industrie de la volaille »

L’ONG Oxfam a publié un rapport d’enquête sur les conditions de travail dans les abattoirs aux Etats-Unis. On sait à quel point, là-bas comme ici, ce sont les cadences qui décident de tout.

C’est vrai pour tous les emplois, mais l’exploitation animale est quelque chose en expansion ouverte et où le rythme est par conséquent d’autant plus effréné.

D’ailleurs, le rapport ne parle pas des conditions d’un travail, mais d’un aspect très précis : la possibilité d’aller aux toilettes. Le titre du rapport est ainsi explicite :

«Pas de répit. Les refus de pause WC dans l’industrie de la volaille.»

FranceTVinfos, présentant le rapport, raconte ainsi que :

Un ouvrier, par exemple, évoque l’expérience de sa mère, qui porte des couches au travail, après avoir été contrainte d’uriner dans ses vêtements. Au Texas, une femme assure que plusieurs collègues de son usine font de même.

Mêmes difficultés pour Dolores, ancienne employée dans l’Arkansas, dont les demandes de pause ont été rejetées « de nombreuses fois ». Après avoir essayé de porter une serviette hygiénique, elle a finalement opté pour des couches. « Moi et beaucoup d’autres, nous devions porter des Pampers. (…)

L’ONG cible notamment quatre poids lourds de la volaille : Tyson Foods, Pilgrim’s, Perdue et Sanderson Farms, qui contrôlent 60% du secteur et emploient plus de 100 000 personnes au total. »

Slate.fr nous dit :

D’autres ouvriers interviewés ont expliqué que dans une usine de l’Alabama, les chefs menaçaient les employés en disant: «va aux toilettes et après, va aux ressources humaines», et que dans d’autres usines, obtenir l’autorisation d’aller aux WC pouvait prendre entre vingt et soixante minutes.

Comme le rappelle le Washington Post, plusieurs autres rapports avaient révélé des problèmes similaires dans l’industrie du poulet.

En 2013, le Southern Poverty Law Center avait trouvé qu’en Alabama, 80% des 266 ouvriers de la volaille interviewés n’avaient pas le droit d’aller aux toilettes quand ils en avaient besoin.

Et en avril, une association de défense des droits des travailleurs avait publié une étude montrant que 86% des employés interrogés dans le Minnesota n’étaient autorisé à prendre que deux pauses pipi par semaine.

L’Express précise encore :

D’après l’étude publiée mardi, « la grande majorité » des 250 000 ouvriers du secteur avicole américain « dit ne pas bénéficier de pauses-toilettes adéquates », en « claire violation des lois américaines de sécurité au travail ».

Ils « luttent pour s’adapter à ce déni d’un besoin humain de base. Ils urinent et défèquent debout face à la ligne d’assemblage, portent des couches au travail, réduisent leurs prises de liquides et fluides à des niveaux dangereux » et risquent « de graves problèmes de santé », martèle l’étude.

Levif.be donne plus de détails, permettant d’avoir une meilleure vue d’ensemble.

Debbie Berkowitz, employé au National Employement Law Project, qui se bat pour la sécurité et la santé de ces travailleurs, dénonce les conditions de travail affligeantes dans le secteur du poulet:

« Je suis témoin des dangers, les ouvriers de l’industrie du poulet se tiennent épaule contre épaule de chaque côté de longues chaînes de production, ciseaux et couteaux à la main dans des conditions froides, humides et bruyantes, répétant les mêmes gestes des milliers et des milliers de fois par jour, pour enlever la peau, couper, désosser et emballer les poulets.

Une industrie produit 180 000 poulets par jour. Un ouvrier en manipule 40 chaque minute. »

La législation du travail aux Etats-Unis autorise pourtant les employés à faire des pauses pour se rendre aux toilettes.

En réponse, les entreprises ont mis en place un système dans lequel des ouvriers supplémentaires restent disponibles pour remplacer d’autres ouvriers de la chaîne de production qui devraient s’absenter pour faire leurs besoins.

Ce système est toléré par le gouvernement à la condition qu’il y ait suffisamment d’ouvriers de remplacement pour assurer aux travailleurs de ne pas devoir attendre trop longtemps pour aller se soulager.

Mais selon Oxfam, le système n’est pas respecté par les chefs d’équipe. Des travailleurs doivent ainsi parfois attendre plus d’une heure avant d’être remplacés et lorsqu’ils ont le feu vert pour s’absenter, ce n’est pas plus de dix minutes.

Un délai difficile à tenir lorsqu’il faut traverser de vastes plateaux d’usines où les sols peuvent être glissants, couverts de sang ou résidus d’animaux, et sachant qu’il leur faut enlever puis remettre des vêtements de protection. (…)

Les chefs de ligne refusent aux ouvriers ces pauses « parce qu’ils sont sous pression pour maintenir la vitesse de production », fait valoir Oxfam. « Le secteur volailler affiche aujourd’hui des bénéfices records » tandis que « les ouvriers gagnent de faibles salaires, souffrent de taux élevés de blessures et maladies, évoluent dans des conditions difficiles » et « un climat de peur », dénonce l’étude.

Au quotidien, les entreprises du secteur du poulet sont autorisées à faire défiler 140 volailles par minute sur les lignes de production, un débit qui pourrait prochainement encore être augmenté à 35 gallinacés par minute.

Naturellement, OXFAM en tant qu’ONG ne propose que des réformes, nullement l’abolition de l’exploitation animale ni des conditions de vie totalement différente pour les travailleurs.

Et les gens, aliénés, participent à leur propre écrasement. Rappelons qu’en France, il y a 1285 McDonald’s, avec 69 000 salariés, pour 1,8 million de repas par jour…

Lors du mouvement contre le projet de loi travail, on a pu voir des gens, censés être vraiment très à gauche, chanter « on veut du caviar dans nos burgers » devant un fast food…