Ce qui s’est passé à Ploubalay, village de 3000 habitants au nord de Dinan dans les Côtes-d’Armor, en dit long sur la manière dont les animaux sont considérés comme des marchandises, et rien d’autre.
Hier, un ouvrier agricole arrive à neuf heures du matin sur son lieu de travail et s’aperçoit que ce lieu, une ferme industrielle, est en feu.
2 200 porcelets meurent dans la destruction par les flammes d’un hangar de 700 m², ainsi que 220 truies dans un second bâtiment.
C’est un chiffre énorme et on imagine à quel point leur mort a été atroce.
Car il faut prendre en compte le résultat de ce calcul sordide : 700 m² divisé par 2 200, cela donne comme résultat 0,32.
Cela fait 30 centimètres carré par porcelet, dans une ferme-usine où les 2 200 porcelets étaient « élevés sur caillebotis », comme la quasi totalité des cochons dans l’industrie de l’exploitation animale.
C’est terrifiant !
Nous avions considéré qu’il était erroné de parler de manière unilatérale de camp de concentration pour les élevages industriels, comme cela a été fait récemment (« non aux camps de concentration » écrit comme slogan lors de l’incendie volontaire à la « ferme des mille veaux »).
Cependant, là, on doit bien reconnaître qu’un feu ravageant 2 200 être vivants collés les uns contre les autres, des êtres vivants jeunes, terrorisés, cela a dû correspondre à ce qu’on appelle l’enfer.
On doit penser bien sûr qu’il en a été de même pour les truies, qui étaient sans doute bloquées chacune par tout un appareillage métallique, dans l’incapacité de bouger.
Et on en déduit, puisque l’ouvrier découvre cela à 9 heures du matin, qu’il n’y a aucune surveillance. Quant à l’efficacité d’alarmes ou de quelque chose de ce genre, sans doute qu’il y a bien peu à espérer ici : on est dans une industrie qui, comme toutes les industries, associe pression commerciale et pragmatisme d’entreprise.
Pourtant, la loi est formelle et citons ici un arrêté préfectoral concernant une ferme-usine de Ploubalay. Nous ne savons pas si c’est celle-ci qui est concernée, il y en a plusieurs là-bas.
Néanmoins, on se doute que le principe est le même partout :
« 2.4. – Sécurité
2.4.1 – L’installation électrique doit être conforme aux normes en vigueur ainsi que les installations de chauffage et de stockage de combustibles, s’il en existe.
2.4.2 – L’établissement doit être doté de moyens de lutte contre l’incendie appropriés aux risques à défendre (extincteurs pour feu d’origine électrique).
2.4.3. – L’installation classée dispose à 200 mètres au plus de l’établissement, en un emplacement facilement accessible par les sapeurs-pompiers et visiblement signalé, d’un poteau d’incendie de 100 m / m conforme à la norme NFS 61 213 capable de fournir en permanence un débit de 1000 litres / minute sous une pression dynamique de 1 bar minimum, ou d’une réserve d’eau d’une capacité utile de 120 m3 équipée d’une aire de mise en aspiration viabilisée, d’une surface de 32 m2 au moins, accessible en tous temps et en toutes circonstances.
2.4.4. – A défaut de disposer de moyens suffisants de lutte contre l’incendie implantés à moins de 200m au plus du risque ou d’un avis favorable des services d’incendie et de secours sur les moyens alternatifs de lutte contre l’incendie proposés par l’exploitant, celui-ci devra mettre en oeuvre une réserve d’au moins 120m3 destinée à l’extinction d’un sinistre dans un délai de 6 mois. »
Passons sur le fait qu’il n’y ait pas une surveillance 24 heures sur 24, des alarmes… Alors qu’en toute conscience cela devrait être le cas.
Si l’on se contente de ces lignes, alors le propriétaire de la ferme-usine est coupable de négligence… et de ce fait de maltraitance (c’est le moins qu’on puisse dire).
Or, on peut partir du principe qu’il n’y aura rien et que les assurances paieront.
Or, ce n’est pas la première fois que cela arrive, ces fermes-usines, en temps de crise économique massive, ont une bien étrange habitude de flamber…
Comme par exemple ici, en mai 2016, dans la Manche :
« Un incendie a entièrement décimé un élevage de porcs appartenant à la SARL Dorenlor, au lieu-dit “Le Chemin”, à Barenton (Manche), ce vendredi 27 mai. Le bâtiment, construit en 1994 et rénové en 2001, abritait trois lots de 300 porcs (300 porcs de 30 kg, 300 porcs de 80 kg et 300 porcs de 115 kg). »
En août 2016, dans la Vienne, deux fermes ont connu un incendie au même moment à Coulonges-les-Hérolles et Coussay-les-Bois, pourtant distants de 65 km…
Même localement, il y a eu plusieurs départs simultanés, et la nouvelle République rapporte à ce sujet l’hypothèse selon laquelle
« Un rat enflammé aurait pu propager l’incendie sur les différents lieux. »
Pour résumer : des bâtiments contrôlés et même modernes brûlent, les animaux meurent d’une mort atroce, personne n’est responsable.
Et cela ne relève pas de la stupidité, ni de la méchanceté : c’est ici un système économique parfaitement rôdé et protégeant ses intérêts.