« Pour sauver un paysan, mangez un végan »

La Coordination rurale est un des principaux syndicats agricoles ; nous en parlions récemment avec leur campagne contre la dénomination des simili-carnés, ou encore lorsque ces gens ont réalisé l’acte totalement barbare de pendre le cadavre d’une vache morte depuis trois semaines sur la façade d’une permanence d’un député, à à Avranches…

On est ici à un niveau très primitif et se sentant forcément galvanisée par la sordide campagne électorale du moment, la section du Lot-et-Garonne de la coordination rurale a décidé de faire des affiches au slogan « ravageur ».

« Pour sauver un paysan, mangez un végan » est à la fois provocateur et agressif, mais d’une certaine manière subtile, doublement subtile même.

Tout d’abord, il est parlé de « paysan », un terme bien plus sympathique que celui d’agriculteur, c’est-à-dire insistant sur la dimension du travail manuel et non sur le fait que les agriculteurs sont désormais de vrais capitalistes jouant au monopoly qu’est le capitalisme…

Ensuite, en assimilant tous les agriculteurs, y compris ceux qui ne travaillent pas dans le secteur de l’exploitation animale, avec ceux qui y travaillent…

Patrick Franken, président de la CR du Lot-et-Garonne a expliqué sur France-Bleu que :

« Il y a des végans qui s’opposent aux éleveurs au niveau des abattoirs.

Ça fait un moment qu’on avait envie de les interpeller et de faire naître le débat. (…)

Il n’y a pas une volonté d’en découdre avec les vegans, seulement de les interpeller.

Cette théorie qui veut que les humains soient l’égal de l’animal et inversement, ça c’est quelque chose qu’on ne peut pas accepter. »

On doit donc remarquer une autre subtilité, plus précisément un choix stratégique. Il s’agit pour la coordination rurale de faire tourner la question animale en conflit stérile éleveurs / vegans.

Une option qui a toute chance de marcher quand on voit que pour bon nombre de vegans, la question reste individuelle et existentielle, qu’il ne s’agit pas de convaincre le « peuple ».

Les institutions et les médias seraient alors une sorte de terrain neutre pour un « affrontement » entre éleveurs et vegans, ce qui ne rimerait à rien du tout…

D’où le besoin d’une utopie claire, lisible, avec des propositions. Sans cela, on se laisse piéger, ou on raconte n’importe quoi, comme par exemple la Fondation Brigitte Bardot, qui parlant de l’affiche de la coordination rurale, a tweeté :

Nul : la Coordination rurale invite à manger du #vegan. Pour sauver un paysan, il vaudrait mieux dissoudre la @FNSEA

La FNSEA représente effectivement les intérêts des gros éleveurs, mais en quoi y aurait-il une différence de fond, de notre point de vue, avec les petits éleveurs?

Petits éleveurs dont le rêve, on le sait, est de devenir grands…

Puis, de toutes manières, vu le niveau de provocation, était-ce le moment de dénoncer la FNSEA?

Il faut savoir assumer les conflits, quand on assume une grande cause!