Nicolas Hulot : « Ne soyons pas excessifs »

Madame Figaro vient de faire une interview de Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique. Voici un petit extrait de cet interview, qui montre que le problème, ce ne sont pas seulement les partisans ouverts de l’exploitation animale.

Ceux-là sont facilement compréhensibles, visibles, caricaturaux. Les grands chefs d’entreprise et les chasseurs n’ont pas la confiance de la grande majorité de la population. Mobiliser contre eux est possible, parce que leur rapport à la réalité est flagrant. Ce sont des beaufs et des profiteurs.

Cependant, il y a aussi ceux qui ne veulent pas être « excessifs ». Ceux-là sont des ennemis masqués. De L214 à Nicolas Hulot, ils disent qu’on a le temps, que le progrès est inévitable. Ils cachent que les choses empirent à l’échelle mondiale, que finalement pas grand-chose ne change pour les animaux.

Ils prennent un petit élément positif et le généralisent, alors qu’il est anecdotique. Qu’importe aux animaux à l’échelle mondiale qu’il y ait 3 % de gens vivant vegans dans certains pays du monde, si l’exploitation animale va doubler d’ici cinquante ans ?

Dans l’ordre du jour, la jeunesse devrait vouloir tout casser et la révolution devrait avoir eu lieu quarante fois. Au lieu de cela, tout est d’une mollesse complète, pour ne pas dire une paresse criminelle.

On se complaît dans un quotidien individuel qui, somme toute, est vivable, en se disant qu’il y a pire ailleurs. Et puis, il y a les petits efforts qu’on fait, qui suffisent à se donner bonne conscience…

Les propos de Nicolas Hulot relèvent tout à fait de cette approche de Ponce Pilate.

La viande est l’aliment qui impacte le plus le climat. Doit-on devenir végétariens ?

Ne soyons pas excessifs. Deux membres de ma famille sont végétariens. Moi, je suis flexitarien : j’ai divisé ma consommation de viande par quatre. J’en achète moins, mais de meilleure qualité, de proximité et bio.

Quitte à la payer un peu plus cher. L’agriculture représente 20 % de nos émissions de gaz à effet de serre. Elle peut être un problème, une victime, mais aussi une solution.

Quand un paysan élève son bétail avec de la prairie, il permet la capture du carbone par le sol.

Les agriculteurs peuvent ainsi – et c’est un exemple parmi tant d’autres les concernant- participer à la lutte contre le changement climatique. Mais il faut aussi qu’ils s’y retrouvent économiquement.

La souffrance animale dans les abattoirs et les fermes industrielles suscite un débat grandissant. Des enseignes, comme Monoprix, bannissent les œufs en batterie de leurs rayons. Comment aller plus loin ?

Les révélations nécessaires d’associations comme L214 ont permis de sortir d’une forme d’hypocrisie.

Je trouve inadmissible ces élevages industriels et ces conditions de transport ignobles, où les animaux sont, entre autres, trimballés sur de grandes distances en plein été. Les fermes de 10 000 vaches et les élevages de poulets en batterie sont d’une autre époque.

On peut améliorer les choses. Sur l’abattage, il faut créer les conditions pour que la peur de la mort soit réduite au maximum… Je veux engager une réflexion sociétale sur ce sujet de civilisation.

Nous sommes la partie consciente de la nature, capables d’attention et de bienveillance vis-à-vis des autres êtres vivants, et qu’en faisons-nous ? Pour mériter notre intitulé d’Homo sapiens, nous devons le démontrer.

La civilisation, ce serait de ne pas être excessif… Comme si c’était sa propre conscience qui décidait de la réalité, comme si rester mesuré dans ses choix avait une valeur en soi…

C’est ni plus ni moins que la capitulation masquée derrière le visage du « raisonnable ».