« Votre mere adore la viande demande au vosin surtout la saucise » : voilà le genre de commentaires que peuvent laisser les partisans de la chasse à courre sur facebook, entre les menaces de mort et toutes les défenses possibles des « traditions ».
Mais cela et leurs agressions, ainsi que le soutien du préfet de l’Oise participant à une chasse à courre le 17 février 2018, puis celui du président de la République Emmanuel Macron à la fin du même mois, n’auront pas réussi à briser la protestation populaire.
Un millier de personnes ont participé au rassemblement anti-chasse à courre à Compiègne hier, alors que 150 personnes étaient ensuite en forêt, parvenant à protéger un cerf que la dernière chasse à courre locale de la saison a dû « gracier » en raison de la pression populaire.
Cela a été l’apothéose d’un mouvement qui a fait que, depuis novembre, plus de 130 personnes se sont relayées deux fois par semaine en forêt pour protéger les animaux, bravant la fatigue et les intempéries, les risques pour leur intégrité physique.
Alors, évidemment, ce millier de personnes n’était pas vegan. Mais c’est cela justement qui en fait tout l’intérêt. Le slogan « non aux carnages, on n’est plus au Moyen-Âge » a ses limites : il a aussi tout comme son potentiel.
Le rassemblement d’hier a fait avancer le véganisme, de par la prise de conscience de la réalité animale, du caractère arriéré du rapport aux animaux, du rôle des puissants dans le maintien d’un tel rapport.
Le rassemblement allait de 7 à 77 ans comme le dit l’expression, avec une vraie portée démocratique : oui, des ouvriers étaient présents et cela change de la paralysie qui est la leur en raison de l’idéologie de la merguez et du repli culturel sur des revendications économiques par ailleurs très limitées.
Il y avait également des femmes bon chic bon genre, témoignant que le féminisme existe bien en conflit avec la violence viriliste telle que peut l’exposer la chasse à courre. Le fait que ces femmes saluaient leurs connaissances aux portes des riches maisons du centre ville historique a d’ailleurs dû faire frémir les grands bourgeois au cœur de la chasse à courre…
Ceux-ci prévoient d’ailleurs déjà le prochain tour. Alain Drach, maître d’équipage de la Futaie des amis, a ainsi expliqué au Courrier picard :
« Qu’est-ce que vous appelez une mobilisation importante ? J’ai été emmerdé toute l’année par une vingtaine de personnes. La manifestation ? J’ai regardé les films ; il n’y avait pas mille personnes. La Fédération de la chasse a prévu une contre-manifestation en septembre, on aura 3 000 à 4 000 personnes pour défendre toutes les formes de chasse. Je me suis occupé d’une manifestation à Londres, pour la chasse à courre, il y a 15 ans, il y avait 300 000 personnes. »
Une telle contre-manifestation disposera bien entendu de l’appui médiatique que le rassemblement d’hier n’a pas eu : seul le Courrier Picard et Le Parisien en ont parlé. C’est comme la tribune lancée par AVA tout récemment, signée par des grandes associations mais non diffusées par elle…
Il faut dire que les grandes associations n’ont, pareillement, pas hésité à s’approprier les vidéos d’AVA, leur prestige.
Les vegan sont pareillement totalement déconnectés. Souvenons-nous qu’il y a quelques jours, une femme a été condamnée à sept mois de prison avec sursis pour avoir dans un élan délirant à la suite de l’attentat de Trèbes salué le meurtre d’une personne par le terroriste, car il était boucher en disant sur Facebook :
« Ben quoi, ça vous choque un assassin qui se fait tuer par un terroriste ? Pas moi, j’ai zéro compassion pour lui, il y a quand même une justice »
On est là dans la posture, pas dans l’esprit révolutionnaire qui compte mobiliser pour supprimer les boucheries et l’activité de boucher… C’est comme, il y a quelques jours également, l’intervention à l’assemblée nationale de dix personnes de « Boucherie Abolition », perturbant la session parlementaire parlant des états généraux de l’alimentation à coups de slogans.
L’exemple parfait du truc qui ne sert à rien, assorti d’un vocabulaire totalement déconnecté. Il est protesté contre « le système naixterminateur » et le communiqué du groupe explique :
« L’Etat tortionnaire des chairs animales porte plainte contre les lanceureuses d’alerte du zoocide planétaire. Nous sommes des résistant.es animalistes, nous nous battons contre un crime de civilisation et pour une justice sociale, nous ne sommes pas réductibles à notre comportement alimentaire « vegan », nous attaquons la secte zoophage en légitime défense AVEC nos alter ego zoopprimés. Le peuple humanimal va abolir le père de tous les esclavages, il va abolir l’élevage et son industrie criminelle de la procréation forcée parce que c’est indispensable. Ensemble, pour l’ ABOLITION . »
D’un côté, la lutte ancrée dans la réalité sociale et culturelle, avec la volonté d’une mobilisation populaire dans le sens de faire progresser les consciences, de l’autre la secte et l’existentialisme, avec une radicalité qui n’est que façade, en quête de reconnaissance égocentrique et de spectaculaire.
Le véganisme connaît un tournant dont il faut savoir reconnaître le contenu !